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chargerait un de ses membres de la tenir ouverte au public, trois fois par semaine, et que ce Bibliothécaire serait logé dans l'hôtel, et aurait un traitement annuel de 800 fr.

Aucun des biographes qui ont donné l'article de Bel ne parle de sa patriotique donation; certains l'ont singulièrement dénaturée, en la considérant comme une intention vague de sa part, tandis que c'était un fait accompli. Ils disent seulement <«< qu'il >> avait une très-belle bibliothèque qu'il voulait rendre publique, >> avec des fonds pour l'entretien de deux bibliothécaires. >> Mais le projet qu'ils supposent conçu par Bel, il l'a réellement exécuté avec munificence en faveur de sa patrie. Ces faits sont notoires à Bordeaux, et l'histoire locale les confirme. On voit encore, au milieu de la Bibliothèque publique de cette ville, le portrait de Bel, où il est représenté en robe de palais, avec ce distique au bas, qui caractérise la nature de sa donation :

HAS MUSIS ÆDES, LIBROSQUE, LARESQUE SACRAVIT ;

IMMEMORES MUSAS NON SINIT ESSE SUI.

On n'a pu découvrir l'époque précise où cette Bibliothèque commença à être ouverte au public. On apprend seulement, par les Annales de Bordeaux, que « le 19 février 1739, l'Académie » tint sa première séance publique dans l'hôtel que lui avait légué » le conseiller Bel. Ce ne fut que pour annoncer sa prise de pos>> session; car, depuis, elle reprit ailleurs ses assemblées ordi»> naires, attendu les réparations et les nouvelles dispositions à >> faire dans ce local. » Il est probable que l'Académie, dans son intérêt et dans celui de ses concitoyens, s'empressa d'accélérer les travaux nécessaires à sa translation. Ce que l'on sait de positif à cet égard, c'est qu'en 1751, le docteur Castet, un des membres de cette société, occupait l'hôtel de l'Académie en qualité de son Bibliothécaire, et que cette Bibliothèque était alors ouverte au public trois fois par semaine.

S II.

Biographie du fondateur de la Bibliothèque de Bordeaux. Jean-Jacques Bel, conseiller au Parlement de Bordeaux, naquit dans cette ville, le 21 mars 1693, de Jacques Bel, trésorier de France, et de Marie Gauffreteau de Châteauneuf. Il montra de bonne heure un goût vif pour l'étude. Après avoir achevé son cours d'une manière distinguée au célèbre collége de Juilly, il revint dans le sein de sa famille, à l'âge de dix-huit ans, et se livra avec une nouvelle ardeur à des occupations d'un genre plus élevé. Son père, qui était un homme fort instruit, seconda l'émulation de son fils, en lui faisant rendre compte, tous les soirs, des matières dont il s'était occupé dans la journée. Il accompagnait cet examen d'observations si pleines de goût et même de profondeur, que Bel a souvent avoué depuis qu'il avait plus appris dans ces conférences paternelles qu'avec ses livres.

Pour accroître ses moyens d'instruction, il avait imaginé de réunir, tous les jeudis, des jeunes gens, comme lui amis de l'étude, avec lesquels il s'entretenait de matières relatives à la littérature et aux sciences morales. Des questions sur ces matières étaient proposées dans ces réunions. Elles étaient d'abord traitées par écrit par un des assistants, puis discutées de vive voix dans l'assemblée. Le mémoire produit était ensuite remis à deux de ses membres, qui, dans l'assemblée suivante, présentaient un rapport sur ce travail et sur la discussion orale qui avait eu lieu à ce sujet. Ils terminaient ce rapport par leur avis motivé, tant sur la question proposée que sur la discussion dont elle avait été suivie. Ce qui prouve combien ces conférences intéressaient ceux qui les tenaient, c'est qu'elles se continuèrent pendant six ans consécutifs.

Bel se destinant à la magistrature, jugea convenable de s'exercer pendant quelques années dans la carrière du barreau comme avocat. Il s'y fit distinguer par sa pénétration dans les affaires li

IV

tigieuses, et publia divers mémoires dont on admira surtout la précision. On apprend, dans la 7° édition des Décisions de Lapeyrère, que Bel faisait partie de la première réunion que plusieurs magistrats et avocats distingués à Bordeaux avaient formée, en 1723, pour rédiger en commun un commentaire sur les Coutumes de la sénéchaussée de Guienne, travail qui était connu dans l'ancien barreau de cette ville sous le nom de Conférences manuscrites.

Bel fut reçu conseiller au Parlement de Bordeaux, le 15 mai 1726. Sa compagnie lui donna bientôt une marque de la confiance qu'elle avait dans ses lumières, en le députant vers le conseil d'état, quoiqu'il fût le plus jeune des magistrats de la chambre des enquêtes, pour poursuivre la décision d'une importante question de compétence élevée entre le Parlement et la Cour des Aides. Il parvint à obtenir une déclaration du Roi, du 24 août 1734, qui jugeait la contestation en faveur du Parlement.

L'Académie des belles-lettres, sciences et arts de Bordeaux admit Bel au nombre de ses membres, le 17 juin 1736. Il était directeur de cette société, l'année suivante, lorsqu'il y prononça, en séance publique, un discours dans lequel il fit une savante analyse d'une dissertation latine sur la structure et le mouvement des muscles, dont l'auteur (A. Stuart) venait d'être couronné par cette Académie. Cette dissertation se trouve sous le n° 5345 du Catalogue de la Bibliothèque de Bordeaux, volume des Sciences et Arts. Nous faisons cette remarque pour les curieux, qui pourront voir en tête de cette dissertation une gravure représentant la mé– daille que l'Académie distribuait alors pour ses prix, et qui porte d'un côté ses armes, et de l'autre celles du duc de La Force, fondateur de ces mêmes prix.

Les principes de la philosophie de Newton commençant à se répandre en France, Bel se rendit à Paris pour en prendre une connaissance approfondie. Il se livra à cette nouvelle étude avec tant d'ardeur, que sa santé, naturellement faible, en fut profon

dément altérée. Il mourut dans cette ville, par suite d'un excès de travail, le 15 août 1738.

On a de Bel les ouvrages suivants : 1. Examen de la tragédie de Romulus; Paris, 1722, in-12. Bel démontre dans cet écrit que Lamotte, auteur de cette tragédie, y fait parler et agir le fondateur de Rome comme un héros d'opéra, un vrai Céladon. -1. Apologie de M. Houdart de Lamotte, de l'Académie françoise; Paris, 1724, in-8°. Cette prétendue apologie est une critique des ouvrages de Lamotte, principalement de sa tragédie d'Inés, qui était alors en grande vogue.—III. Lettres à M. de.., contenant quelques observations sur la tragédie de Mariamne, de M. de Voltaire; Paris, 1725, in-12. Ces observations, qui ont pour objet de faire connaître les défauts du plan de la tragédie de Mariamne, déterminèrent l'auteur de cette pièce à la retirer du théâtre et à la refondre entièrement. VI. Relation de ce qui s'est passé au sujet de la réception de l'illustre Christophle Mathanasius à l'Académie françoise; 1727, in-12. On y critique d'une manière plaisante le style ridicule employé dans les discours prononcés à l'Académie française à la réception de ses membres, ou à leur mort. - v. Lettre d'un Rat calotin à Citron Barbet, au sujet de l'Histoire des chats; Ratopolis, 1727, in-12. C'est la moins mauvaise des critiques. dont on accabla dans le temps un opuscule de Moncrif.— vi. Dictionnaire néologique, à l'usage des beaux-esprits de ce siècle, par un avocat de province; Amsterdam, 1727, in-12. L'auteur y fait un relevé des mots nouveaux, des expressions impropres, des phrases recherchées, du style précieux, amphigourique et ridicule qu'employaient, dans les ouvrages les plus sérieux, tant en vers qu'en prose, les écrivains les plus renommés du temps, tels que Fontenelle, Lamotte, Marivaux, Catrou, Lavisclède, Ducerceau, Hédouville, les journalistes de Trévoux, etc. La critique qu'en a faite Bel est pleine de goût, de modération et de convenance. Desfontaines s'empara de cet ouvrage, 'qu'il fit impri

mer à son profit, avec des additions; quelques biographes le lui attribuent. Le Dictionnaire néologique a eu beaucoup de vogue, et l'on en compte sept éditions, dont la dernière est de 1756.VII., Le nouveau Tarquin, comédie allégorique; Amsterdam, 1732, in-12. Nous ne connaissons de cet ouvrage que le titre rapporté par des biographes, qui l'attribuent à Bel. — vш. Dissertation, où l'on examine le système de l'abbé Dubos, touchant la préférence que l'on doit donner au goût sur la discussion. Cet écrit n'a été imprimé que dans les Mémoires de littérature et d'histoire, de Desmolets, tome 3. IX. Réponse de M. B, conseiller au Parlement de B***, à une Lettre que M. Durand lui a écrite au sujet du discours de M. Lamotte sur ses poésies dramatiques. On trouve cet écrit. dans le Recueil des pièces d'histoire et de littérature; Paris, 1732.

On prétend que Bel s'exerça de bonne heure sur divers sujets de littérature, de métaphysique et de morale, et que ses essais en ce genre ont été insérés dans la Bibliothèque française, dont Goujet a publié les premiers volumes. On a remarqué parmi ces écrits, des analyses faites par Bel, de quelques dissertations lues à l'Académie de Bordeaux avant qu'il ne fût membre de cette société. A sa mort, il s'occupait à mettre la dernière main à un ouvrage auquel il travaillait depuis longtemps, sur les causes du rétablissement, des progrès et de la décadence du goût dans les belleslettres, les sciences et les arts en France. Toutes les productions de Bel sont écrites d'un style pur, et la critique qui y domine est basée sur les vrais principes, qu'il développe clairement, sans aigreur et avec convenance. L'utile fondation dont Bordeaux lui est redevable recommande sa mémoire à la reconnaissance des amis des lettres et des arts dans sa patrie.

SIII.

Accroissements successifs de la Bibliothèque de Bordeaux. La Bibliothèque léguée par Bel à l'Académie de Bordeaux, pour l'usage des habitants de cette ville, s'est successivement

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