A MONSIEUR LE CONSEILLER AULIQUE BAUM A GOETTINGUE Je t'envoie, cher et respectable ami, le livre que je t'ai annoncé, il y a quelque temps, et te demande de le bien accueillir. Il fait partie d'une série de manuels, à l'aide desquels on se propose de faire pénétrer dans un public plus nombreux la vive intelligence de l'antiquité classique; il est donc destiné à des lecteurs d'un esprit cultivé qui, sans fouiller eux-mêmes le champ de l'archéologie, sentent le besoin de se familiariser avec l'esprit et les institutions des anciens peuples. Je ne pouvais me dissimuler, en entreprenant ce travail, que parmi les objets compris de tout temps dans l'étude de l'antiquité, il y en a un certain nombre qui, fort intéressants sans doute pour le philologue de profession, n'offrent qu'un intérêt médiocre au reste des lecteurs. Si je ne me trompe, dans l'étude des antiquités grecques, cela seul se recommande à l'attention générale, qui aide à faire connaître la vie morale et politique des Grecs, durant les temps classiques de leur 425316 histoire; c'est vers ce but que j'ai cru devoir diriger tous mes efforts. Après avoir, dans le premier volume, répandu sur les commencements de la Grèce les clartés de l'épopée homérique et reconstitué la Cité, je réserve pour le second le tableau des relations internationales et tout ce qui a trait aux choses du culte. Pour ce qui concerne les antiquités privées, les usages militaires et autres particularités du même genre, elles ne trouveront place dans cet ouvrage qu'en raison du parti que l'on en peut tirer au point de vue de la vie politique et religieuse. Je crois, en ce faisant, n'avoir rien négligé et j'espère ne rien négliger dans le reste de cet ouvrage de ce qui importe vraiment à la science. On serait plutôt tenté, je pense, de se demander si je n'ai pas recueilli dans le nombre tels ou tels faits qui eussent pu être négligés sans désavantage. Je me flatte au moins que personne ne me reprochera l'obligation que je me suis prescrite de ne jamais exposer mes lecteurs à confondre des résultats hors de doute à mes yeux, qu'ils soient dus à mes propres recherches ou à des recherches étrangères, avec ceux qui ne me paraissent offrir que des probabilités, et sur lesquels la discussion n'est pas close. Il y a certainement un grand nombre de points qui ne sont pas encore tirés à clair, qui peut-être même ne le seront jamais, et il était indispensable que les termes dans lesquels sont hasardées ces conjectures trahissent les efforts et les incertitudes de l'analyse critique. On ne me saura non plus mauvais gré d'avoir mis les lecteurs en mesure d'entrer plus avant dans le détail des questions qui les intéressent, soit en remontant aux sources, soit en s'aidant des travaux modernes. Je n'ai accordé toutefois aux citations qu'une place très restreinte, ne mentionnant, parmi les dissertations des philologues, que celles qui peuvent être dans toutes les mains, et n'extrayant des auteurs anciens que les textes décisifs, sans viser à donner un ensemble complet. J'ai la confiance qu'un ouvrage sur les antiquités grecques, renfermé dans ces limites et composé d'après ce plan, sera retonnu propre à l'objet qu'il se propose. En l'écrivant, j'ai eu souvent présente à l'esprit ton image, et me suis rappelé le goût que tu as conservé toujours pour l'antiquité, bien qu'adonné à des études qui n'ont avec elle que très peu de rapports. Puisse donc ce livre donner satisfaction à toi et à ceux qui te ressemblent. Quel que soit d'ailleurs le jugement que tu doives en porter, ton amitié m'est un sûr garant de la bienveillance avec laquelle tu en accueilleras la dédicace, faible témoignage de mes sentiments. Greifswald, octobre 1855. |