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action contre un collatéral avide que la raison repousse et que l'équité condamne.

Les demoiselles Vanthyssen, répondait le sieur Huseman, doivent être placées, de leur aveu, dans la cathégorie des étrangers, et en effet, par leur entrée irrévocable dans un monastère étranger, par leurs vœux solennels, elles montrent avoir perdu tout esprit de retour en France: elles se sont donc volontairement soumises à l'empire d'une autre législation.

La conséquence nécessaire de ce principe est qu'elles ne peuvent plus se prévaloir des lois françaises sur l'abolition des vœux monastiques: ces lois n'ont disposé que dans l'intérêt des religieux de France, et dans l'intérêt de l'état elles ne s'étendent point aux étrangers sur lesquels elles n'ont aucun pouvoir: ainsi, les demoiselles Vanthyssen ne peuvent invoquer que la loi prussienne, qui reconnaît les vœux religieux. Ces vœux rendant celui ou celle qui les a émis incapable de posséder quelque chose en propriété, et l'incapacité le suivant par-tout, puisqu'elle tient à la personne, il est évident que lesdites demoiselles sont écartées de la succession de leur père par la fin de non-recevoir que je leur oppose.

Le sieur Huseman citait l'article 3 du code civil, à l'appui du principe sur l'effet du statut personnel, ainsi que Ferdinand Defranquen s'en était emparé con. tre sa sœur il observait d'ailleurs, que ce principe était conservé par toutes les législations.

Les moyens du collatéral prévalurent dans l'opinion du tribunal civil de Ruremonde, qui, par juge ment du 6 prairial an XII, motiva la non-recevabilité

des demoiselles Vanthyssen sur les considérations sui

vantes :

«Attendu que les demanderesses sont toutes in«<dividuellement membres des corporations religieu«<ses auxquelles elles appartiennent respectivement, « et qu'elles sont comme telles engagées dans les liens • des vœux monastiques solennels, ainsi assujetties aux << canons des conciles ; que par l'effet de cet engagement « reconnu par les lois des pays respectifs qu'elles ha<< bitent, elles sont devenues incapables de succéder, «< comme ayant renoncé à toute propriété, et pour « ainsi dire, à leurs personnes, en se mettant sous « la dépendance entière de leurs supérieurs, laquelle « incapacité les suit par-tout, comme inhérente à leurs << personnes, de même que l'état et la capacité des « personnes suit les Français, conformément à l'article « 3 du code civil; que par conséquent elles ont éga«<lement rendu incapable de leur succéder toute per<< sonne quelconque, soit Français, soit étranger, d'où «< il résulte que cette réciprocité de successibité exi

gée entre un Français et un étranger, par les ar«< ticles 11, 726, 902 du code civil, pour rendre ce « dernier habile à succéder, n'existe pas dans l'espèce;

<< Attendu que les lois françaises, en abolissant les « vœux monastiques solennels, n'ont statué que re<< lativement aux vœux des religieux en France; d'où <«< il suit que la France, par respect dû au droit des «gens, ne peut cesser de reconnaître ces vœux dans « les personnes des étrangers; qu'ainsi, les deman« deresses ne pouvant, aux termes du concile de La<< tron et du concile de Trente, rien posséder en pro«pre, ce ne pourrait être en tout cas que leurs mo<< nastères ou couvens qui succéderaient en leur place,

<«< ce qui serait incompatible avec nos décrets, qui « déclarent nationaux les biens des corporations;

<«< Attendu que la loi du 17 nivôse an II, en ap« pelant à recueillir des successions, les religieux et <«< religieuses, concerne exclusivement les religieux et << religieuses supprimés; que par conséquent les de« manderesses, comme ayant été dans l'état monas«<tique à l'époque de l'ouverture de la succession dont << est question, et l'étant actuellement encore, ne peu«vent être admises à jouir du bénéfice de la loi,

«

qui ne se rapporte qu'aux religieux et religieuses « supprimés, qui seuls sont affranchis de l'ordonnance « émanée de l'an 1528, de l'empereur Charles V, et « de l'article 6, page 127, du droit statutaire du cidevant pays de Gueldre. »>

Appel de la part des demanderesses, dont deux avaient été rendues à la société civile par la suppression de leur couvent, arrivée quelques mois après le décès de leur père.

En instance d'appel, les demoiselles Vanthyssen, outre les moyens développés devant le premier juge, ont tâché d'établir, sur l'autorité des plus célèbres jurisconsultes, que l'entrée dans un monastère n'empor la mort civile;

tait pas

Que, dans les états du roi de Prusse, les enfans profès dans quelque couvent que ce fùt, étaient capables de recevoir par le testament de leurs père et mère ; e;

Que la réciprocité voulue par le code ne devait s'entendre que d'une réciprocité générale, et non d'une réciprocité individuelle ;

Et

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Et enfin, que dans l'espèce elles étaient appelées à la succession paternelle, tant par la volonté légalement exprimée de feu leur père, que par la loi dusang;

Que la crainte de voir passer les biens fonds, situés en France, à des corporations étrangères, était toutà-fait chimérique, puisqu'il était évident que les demoiselles appelantes aliéneraient les biens de la succession pendant leur vie, ou qu'elles les laisseraient dans leur succession; que, dans le premier cas, elles feraient ce qu'il est libre à tout propriétaire de faire; et dans le second, que nul monastère ne pouvant en France s'arroger la qualité d'héritier, soit légitime, soit testamentaire, lesdits biens seraient indubitablement recueillis par les héritiers nommés par la loi de leur situation.

Le sieur Huseman, intimé, a persisté à soutenir que les statuts de la Prusse, et les conciles rendaient les demoiselles appelantes incapables de succéder; qu'elles ne pouvaient recevoir par testament qu'une pension modique : il ajoutait, qu'en leur qualité d'étrangères, il n'y avait que la réciprocité qui pût, abstraction faite à l'exclusion résultant des effets du statut personnel, les faire admettre; mais que cette réciprocité, telle que la loi l'exigeait, n'existait pas, puisqu'il est évident que jamais le père des appelantes n'aurait pu leur succéder.

La Cour s'est proposée la question suivante :

« Les appelantes, en qualité de filles légitimes de «Georges-Guillaume Vanthyssen, et par lui instituées «< héritières universelles, peuvent-elles être admises << à recueillir sa succession? »

Tome III, N.° 7.

4.

Sur quoi, vu les articles 745, 902› et 726 du code civil;

Elle a pensé que l'intimé, en sa qualité de neved du défunt, ne pouvait enlever aux demoiselles Vanthyssen la succession à laquelle elles étaient appelées par un double titre, sous prétexte qu'elles seraient religieuses, et par conséquent mortes civilement, « 1.oparce « qu'il résulte de l'article 902 du code civil, que ceux<«<là seuls sont incapables de recevoir, que la loi a « déclarés tels, et qu'il n'existe aucune loi obligatoire <«< en France, où les vœux religieux ne sont plus <«< reconnus, qui déclare les religieuses incapables « de recueillir une succession; 2.0 parce qu'il n'est pas vrai que les religieux soient morts civilement; qu'au contraire, il est adopté en principe par les <«< meilleurs auteurs, tels que Stockmans, Mean, Vanes «pen, Stryckens, Boehmer et M. le procureur gé «néral Merlin, que la profession religieuse n'empor «tait pas la mort civile, mais qu'elle privait seule «ment les profès de l'exercice de certains droits, «sans pour cela les retrancher totalement de la so« ciété; que ce principe doit d'autant plus recevoir « son application à l'espèce, qu'il résulte du § 1204, partie 2, titre 11, des statuts généraux pour « états de Prusse, dans lesquels sont situés les cou« vens de Rengerig et de Sterckráedt, où deux des appelantes sont encore religieuses, qu'il était per<< mis aux père et mère d'appeler, par un testament « légal, leur enfant religieux à 'recueillir une portion « de leur succession; qu'ainsi, si en Prusse, où les << ordres religieux ne sont pas supprimés, un profes « peut être institué héritier testamentaire, et si, en « vertu de la loi, il peut, d'une certaine manière, «< étre admis au partage de la succession, on ne doit

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