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CAS DE PISTILLODIE DANS UN BEGONIA TUBÉREUX A FLEURS CRISTÉES ET DANS LE Begonia semperflorens « Aigrette » (1),

par M. D. Bois (2).

On sait combien la variation est grande dans certaines espèces cultivées du genre Begonia. Ces plantes, si précieuses et si recherchées pour l'ornement des jardins, bien qu'ayant déjà produit un nombre considérable de variétés, sont toujours l'objet de la sollicitude des horticulteurs, qui, par l'hybridation, le métissage, les semis et la sélection répétés, poursuivent sans relâche la recherche de types nouveaux.

Sous cette influence de la culture, ces plantes sont parvenues à l'état physiologique que l'on désigne en Horticulture sous le nom d'« Affolement », c'est-à-dire dans lequel la stabilité organique est si ébranlée que la variation peut se produire dans toutes les parties du végétal et dans tous les sens.

L'apparition de fleurs à pétales pourvus d'appendices en forme de crêtes, dans les Bégonias tubéreux, a été l'une des monstruosités les plus curieuses qui se soient produites dans ces dernières années (3). Elle a servi de point de départ à toute une série de variétés qui constituent aujourd'hui une race distincte connue sous le nom de « Bégonias tubéreux à fleurs cristées ». Mais ces crêtes n'ont pas tardé à se développer sur le feuillage lui-même, et, déjà, dans la séance du 22 septembre 1898 de la Société nationale d'Horticulture de France (4), MM. Vallerand frères, horticulteurs à Saint-Leu et Taverny (Seine-et-Oise),

(1) Cette note était rédigée lorsqu'ont paru, dans le Gardeners' Chronicle, n° du 7 octobre, p. 283, quelques lignes accompagnées de figures noires, consacrées à un cas de pistillodie très accentué. L'observation a été faite par M. Soane, en Angleterre, sur un Bégonia dont l'espèce n'est pas indiquée et dans lequel les fleurs måles ont les étamines transformées en pistils, comme dans le cas du B. semperflorens « Aigrette ».

(2) Déposé le 12 octobre 1899.

(3) Voir Journal de la Société nationale d'Horticulture de France, 1893, p. 679.

(4) Voir Journal, 1898, p. 853.

présentaient, sous le nom de Begonia Vallerandi, une série de plantes extrêmement curieuses, qui offraient cette particularité. Dans ces plantes, les nervures principales des feuilles se tro vent bordées, de chaque côté, d'un relèvement du limbe a forme de longues crêtes, et prennent des coloris divers, ver pâle, blanc nacré, jaunâtres, roses ou rouges, constituant des panachures d'un effet très particulier et parfois très ornemental.

Le 3 septembre dernier, notre excellent collègue, M. G. T. Grignan, appela notre attention sur une fleur de Bégonia tubéreux à fleurs cristées, très curieuse, au sujet de laquelle il avait adressé une communication à M. le Dr Masters (1). Il nous fit

FIG. 30. Pétales de Bégonia tubéreux à fleurs cristées. dont l'un porte un appendice stigmatifère (grossi deux fois.

parvenir, quelques jours après, deux fleurs, cueillies sur deux plantes cultivées chez lui, à la Varenne-Saint-Hilaire, et qui présentaient, l'une et l'autre, mais à un degré différent, la monstruosité à laquelle M. le Dr Masters a donné le nom de Pistillodie (2).

On sait que, dans les Begonia, les fleurs sont monoïques, c'est-à-dire que, les unes mâles, les autres femelles, se trouvent réunies sur le même pied. Or, dans les plantes de M. G. T. Grignan, les fleurs femelles ne présentaient aucune espèce d'anomalie: seules, quelques fleurs mâles étaient devenues monstrueuses.

L'une de celles que nous avons reçues offrait le caractère relaté dans le Gardeners' Chronicle: elle avait plusieurs pétales supplémentaires, et deux d'entre eux étaient stigmatifères, c'est-à-dire portaient sur leur bord, vers la moitié de leur hauteur, un bourrelet long de 5 millimètres (fig. 30), de tous

(1) Gardeners' Chronicle, 2 septembre, p. 194. (2) Vegetable teratology. Londres, 1869.

points comparable à une portion de stigmate. Il n'y avait aucune trace de style et d'ovaire.

Dans la seconde fleur, l'anomalie était beaucoup plus prononcée. C'était encore une fleur mále, mais elle présentait, accompagnant l'androcée, un style avec son stigmate, parfaitement développés (fig. 31). Cette fois encore, il n'y avait aucune trace d'ovaire.

Ces anomalies, évidemment fort curieuses, sont d'autant plus intéressantes que les deux plantes sur lesquelles M. G. T. Grignan les a observées les avaient déjà produites et ont ensuite con

FIG. 31. Fleur mâle de Bégonia tubéreux à fleurs cristées,
avec un style dans l'androcée (grandeur naturelle).

tinué à les produire; une fleur présenta même deux faux-pistils accompagnant les étamines. Il ne s'agit donc pas là d'un fait accidentel isolé, mais de plantes qui offrent un caractère déjà fixé.

Le 9 septembre, à l'Exposition d'Horticulture de Saint-Mandé, nous examinâmes avec soin un lot de fleurs coupées de Bégonias tubéreux à fleurs cristées exposé par M. Thiébaut-Legendre, espérant trouver de nouveaux exemples de cette monstruosité. Nous finimes par découvrir, au milieu d'un grand nombre d'autres, une seule fleur, présentant trois faux pistils dans son androcée.

Il est donc certain que la pistillodie est un fait tératologique qui se reproduit avec quelque fréquence dans les Bégonias tubéreux à fleurs cristées, et que ce caractère tend à se fixer

dans certaines plantes, comme le prouvent les observations de M. G. T. Grignan.

Nous nous demandions quel intérêt ces faits pouvaient présenter au point de vue horticole, ces fausses fleurs hermaphrodites n'étant nullement en état de produire des graines, puisqu'elles sont dépourvues d'ovaire. Une présentation, faite à la Société nationale d'Horticulture de France, dans la séance du 28 septembre (1), nous permit d'observer, dans le Begonia semperflorens, qui appartient à une tout autre section que les précédents, une remarquable amplification de l'anomalie que nous avions déjà observée, et nous montra toute l'importance qu'elle pouvait avoir au point de vue de la création d'un type

nouveau.

Le Begonia auquel nous faisons allusion a été présenté par M. Legros, jardinier chez M. Raffard, au Vésinet (Seine-et-Oise), et sera mis au commerce sous le nom de Begonia semperflorens <«< Aigrette » par MM. Cappe et fils, horticulteurs, habitant cetle même localité. En le soumettant à l'examen des membres du Comité de Floriculture de notre Société, l'obtenteur déclara l'avoir trouvé dans un semis de Bégonia Vernon, en 1898, et l'avoir reproduit par le bouturage, en 1899.

Dans cette plante, toutes les fleurs femelles sont normales et présentent par conséquent un ovaire infère, 2 sépales, 2 pétales et 3 styles bifides surmontés de stigmates.

Par contre, les fleurs mâles, au moins toutes celles que portait un rameau mis obligeamment à notre disposition par M. Cappe fils, ne renferment aucune trace d'étamines. Ces fleurs bizarres (fig. 32) présentent, au lieu d'androcée, un nombre considérable de styles (jusqu'à une centaine et même davantage) beaucoup plus longs que ceux du Begonia semperflorens (fig. 33 et 34), insérés sur un axe central épais et allongé (fig. 35), divisés au sommet en deux branches stigmatifères, et constituant une masse hémisphérique d'un jaune d'or qui atteint jusqu'à 2 centimètres de diamètre (fig. 32).

On observe, entremêlés aux styles, de petits appendices ver

1) Voir Journal, 1899, septembre, p. 829.

dâtres qui sont autant de placentas entièrement recouverts d'ovules (fig. 36) qui se présentent à nu et ont l'aspect d'une

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FIG. 32. Rameau du Begonia semperflorens « Aigrette »

(réduit d'un quart).

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poussière blanchâtre. Examinés à la loupe, ces ovules apparaissent sous la forme de petits corps cristallins dont la structure rappelle exactement celle de ces mêmes organes dans le Begonia semperflorens.

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