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6 avril 1847, aff. Teterel et aff. Lecoq, D. P.47. 1. 155;27 avr. 1847, aff. Ponsot, D. P. 47. 1. 156; Cass. 21 juin 1848, aff. Vien, D. P. 50. 5.356; 17 juill. 1854, aff. Carlier, D. P. 54. 1.

demandèrent et conclurent à ce que Leproust-Navereau fût tenu de rapporter, sur ce qu'il avait reçu, ce qui excéderait la quotité disponible; et, attendu sa renonciation, qu'il fût déclaré non recevable dans sa prétention d'obtenir une part dans la réserve.

Jugement du tribunal de Saint-Calais, du 11 mai 1858, qui déclare que Leproust-Navereau n'a aucun droit à la réserve ;- «Considérant que Leproust-Navereau a renoncé à la succession de sa mère; qu'ainsi il est censé n'avoir jamais été son béritier; qu'il ne peut, dès lors, prétendre à aucun des droits attachés à cette qualité; que la légitime des enfants fait partie de ces droits, et qu'elle ne leur est due qu'autant qu'ils ne renoncent pas à la succession de leur auteur. » — Appel par LeproustNavereau. La quotité disponible avait été fixée sans avoir égard à la donation de 950 fr. faite au sieur Clément Leproust, par le motif que l'état d'insolvabilité de ce dernier ne permettait d'obtenir le rapport d'aucune portion de cette somme. Leproust-Navereau attaqua, devant la cour, ce mode de fixation, et conclut à ce que, pour faire le calcul de la portion disponible, la succession fût réputée augmentée des 950 fr. donnés à Clément; et qu'outre la quotité disponible, il fût autorisé à retenir sa part dans la réserve. Le 18 juill. 1839, arrêt de la cour d'Angers, qui confirme le jugement du tribunal de Saint-Calais, avec adoption de motifs, et rejette le chef relatif à une nouvelle fixation de la quotité disponible: «Attendu que l'appelant ayant renoncé à la succesion de sa mère est sans qualité pour exiger le rapport de ce qui a été donné à Clément Leproust, quand même celui-ci serait en position d'effectuer ce rapport; que, dans toutes les hypothèses, la donation faite audit Clément par contrat de mariage, antérieur à celle de l'appelant, aurait la préférence sur celle dont se prévaut celui-ci, et absorberait la quotité disponible, ce qui rendrait la liquidation moins favorable à l'appelant que celle qui a été exercée par le jugement dont est appel. » Pourvoi du sieur Leproust-Navereau pour : 1o violation de l'art. 845 c. civ.; 2o Violation des art. 915 et 922 c. civ., et fausse application de l'art. 857 c. civ. - Arrêt.

LA COUR;-Vu les art. 845, 913 et 922 c. civ. ;—Attendu, sur le premier moyen, que le père de famille ne peut entamer la réserve légale au préjudice de ses enfants; Que, s'il dispose en faveur de l'un d'eux, la renonciation de celui-ci à la succession paternelle, pour s'en tenir à la donation à lui faite, n'a d'autre résultat que de lui donner droit de retenir, dans les limites de la loi, ce qui lui a été donné ; mais que par là, il n'abdique pas sa part dans la réserve légale à laquelle sa qualité d'enfant lui donne droit; - Que cela résulte de la combinaison des art. 845 et 919 c. civ.; D'où il résulte qu'en décidant que l'enfant donataire qui renonce à la succession perd sa légitime, parce qu'il cesse d'être héritier, l'arrêt attaqué a violé les lois citées; Attendu, sur le deuxième moyen, que l'héritier donataire, renonçant à la succession pour s'en tenir à la donation à lui faite, conserve droit et intérêt à ce que la fixation de la masse héréditaire soit légalement établie, et qu'en refusant d'y faire entrer fictivement, aux termes de l'art. 922 c. civ., la donation faite à Clément Leproust, l'arrêt attaqué a formellement violé cette loi; Par ces motifs, casse, etc.

Du 17 mai 1843.-C. C., ch. civ.-MM. Boyer, pr.-Chardel, rap.Hello, av. gén., c. conf.-P. Dupont et Lanvin, av.

(1) 1re Espèce: (Gardes C Bellaud.) LA COUR ; - Attendu que la donation entre-vifs est un acte par lequel le donataire se dépouille actuellement et irrévocablement de la chose donnée, au profit du donataire qui l'accepte (art. 894 c. civ.); - Attendu que l'irrevocabilité de cet acte prend un caractère plus obligatoire encore, s'il est possible, lorsque, comme dans l'hypothèse de la cause, la donation est faite en contrat de mariage, et devient ainsi le fondement et le gage de l'union de deux familles ; - Qu'il suit de là que, ni les dispositions testamentaires du sieur Gardes père, ni la donation contractuelle par lui faite à l'appelante, le 26 fév. 1832, de quelques qualifications que ces dispositions aient été revêtues, ne sauraient porter atteinte à la donation entrevifs qu'il avait précédemment consentie à son fils dans le contrat de mariage de celui-ci, en date du 6 mars 1815;

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Attendu que, lorsqu'un père de famille donne à l'un de ses enfants une somme qui excède le montant de la part successive du donataire, il est présumé, de droit, lui donner cet excédant sur la portion disponible de ses biens, et qu'il y est autorisé, puisqu'il aurait pu en gratifier un étranger; Attendu que la clause en avancement d'hoirie, ajoutée à la donation faite à l'enfant, n'ôte pas à cette donation son caractère d'irrévocabilité; - Que cette clause n'a d'autre effet que d'obliger le donataire, s'il veut prendre part à la succesion paternelle, d'y rapporter la totalité de son don; mais que cette obligation cesse s'il renonce à cette succession pour s'en tenir à la donation qui lui a été faite; Attendu que si, pendant un temps, on a mis en doute la question de savoir si, malgré cette renonciation, l'enfant donataire pouvait retenir à la fois sa portion dans la réserve, et le reste du don sur la quotité disponible, cette question n'est plus douteuse aujourd'hui ;

271) et plusieurs cours d'appel ont statuée dans le même sens (Montpellier, 18 déc. 1855; Bordeaux, 14 juill. 1837; Paris, 7 avril 1838; Rouen 23 déc. 1841 (1); Turin, 1er avril 1812,

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Qu'il est universellement reconnu que la renonciation de l'enfant donataire, pour s'en tenir à son don, ne peut être assimilée à la renonciation de l'enfant non donataire; - Que celle-ci est absolue, et ne laisse à l'enfant renonçant ni droit sur la quotité disponible, puisqu'il n'est pas donataire, ní droit sur sa portion successive, puisque sa renonciation ne peut porter que sur elle; Que l'autre renonciation, au contraire, n'est qu'une renonciation restreinte et conditionnelle; Qu'en décla rant qu'il ne renonce que pour s'en tenir à son don, l'enfant donataire manifeste la volonté de conserver tout ce qui compose ce don, c'est-àdire sa part dans la réserve à laquelle il a droit en sa qualité d'enfant, et le surplus dans la portion disponible;

Que c'est ainsi que la cour de cassation l'a jugé par ses arrêts des 11 août 1829 et l'arrêt du 24 mars 1834, et que l'a jugé la presque totalité des cours royales; que cette décision ne blesserait les droits des autres enfants que dans le cas où le don excéderait la portion successive du donataire, réuni à la portion disponible des biens du donateur; mais que telle n'est pas la position des parties; - Qu'il est convenu que le sieur Gardes père a laissé trois enfants; Que la part de chacun d'eux à la réserve est, par conséquent, d'un quart, et que cette portion n'est nullement ébréchée par l'exécution de la donation faite au fils;

Que l'appelante attaque cette donation sous un autre rapport; qu'elle prétend qu'elle doit être réduite, non comme entamant la portion réservée aux autres enfants, mais comme excédant le montant de la portion disponible, et fonde sa prétention sur l'art. 845 c. civ.; Confirme. Du 18 déc. 1835.-C. de Montpellier, ch. civ.-M. de Trinquelague, 1er pr. 2o Espèce: (Brossard C. Bosredon.) LA COUR; Attendu qu'un père peut disposer de ses biens ainsi qu'il le juge convenable, pourvu qu'il respecte les limites établies par l'art. 913 c. civ.; Qu'il suit de cette première réflexion que l'enfant qui retrouve dans la succession sa portion personnelle, légale et non diponible, n'a pas le droit de se plaindre;

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Du 14 juill. 1837.-C. de Bordeaux, 2 ch.-M. Dégranges, pr. 3o Espèce: (Cochois C. Cochois.) Appel. - LA COUR; Considérant que le rapport n'est dû que par l'héritier à son cohéritier; Que, dans l'espèce, il s'agit seulement de la réduction d'une donation faite à un enfant réservataire et renonçant, et qu'on ne peut appliquer ici les principes qui sont particuliers aux rapports; Considerant qu'un enfant renonçant, qui n'aurait pas qualité pour demander sa réserve par voie d'action, peut cependant la retenir sur la donation qui lui a été faite, et ce par voie d'exception; Qu'en effet, l'héritier qui trouve dans la succession sa réserve personnelle ne peut être recevable à attaquer d'autres enfants qui n'ont rien au delà de leur réserve; Qu'autrement, admettre un héritier à se prévaloir contre ses frères du privilége réservé à ceux-ci par l'art. 915 c. civ., ce serait tourner contre des enfants un droit introduit en leur faveur ; Considerant, au surplus, que toute donation faite par des pères et mères à leurs enfants sans dispense de rapport est censée faite en avancement d'hoirie; et qu'ainsi, nanti de sa réserve, un enfant donataire peut la conserver, sans avoir besoin d'accepter la succession; - Infirme.

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« LE TRIBUNAL ; —Attendu que la transmission des biens par succession est basée sur l'affection présumée du défunt, mais que, lorsque la présomption se trouve détruite par la volonté exprimée, cette volonté doit recevoir son exécution; · Attendu que, d'après ces règles générales, la volonté de l'homme semblerait toujours devoir l'emporter sur la volonté de la loi, mais que le législateur a pensé qu'il existait des limites au delà desquelles il y aurait abus du droit de propriété; que ce droit, en un mot, doit être concilié avec l'accomplissement des devoirs de père ou d'enfant; que de là vient l'institution des légitimes et des réserves; Attendu qu'il y avait sous l'ancien droit une distinction à faire entre les pays de coutume et les pays de droit écrit ; que, dans ces derniers, la légitime était, non-seulement attachée à la qualité d'enfant,

afí. Galleani C. Solaro; Riom, 28 janv. 1820, M. Grenier, pr., aff. Lebrun C. Laribette; Toulouse, 7 août 1820. M. de Cambon,

mais pouvait être réclamée en vertu de cette seule qualité, abstraction faite de la qualité d'héritier; que, dans les autres, la légitime, ou portion réservée, était bien attachée' la qualité d'enfant, mais ne pouvait être réclamée qu'en vertu de la qualité d'héritier: Non habet legitimam nisi qui hæres est; que la raison de cette différence se puisait indubitablement dans la différence des deux législations sur la transmission des biens par décès; que, sous le droit romain, la volonté de l'homme faisait les héritiers qui, sous le droit commun, étaient appelés à la succession en vertu de la loi; que sous le droit romain, le désir d'empêcher les pères de famille d'abuser de leur autorité porta le législateur à leur défendre de passer sous silence leurs enfants dans leur testament, et donna lieu aux actions résultant de la prétérition et de l'inofficiosité; que la légitime réclamée par les enfants n'était donc autre chose que la portion que, d'après la loi, le père de famille aurait dû leur donner de son vivant ou leur laisser par son testament; qu'il n'était nullement nécessaire qu'une semblable réclamation fût appuyée sur la qualité d'héritier, qualité qui d'ailleurs aurait été très-souvent plus nuisible qu'utile à l'enfant ; Attendu que, sous le droit coutumier, la loi faisait au contraire les héritiers; que ce n'était que par exception que le défunt pouvait, en certains cas, disposer d'une quantité quelconque et parfois de la totalité de ses biens; que, lorsque les enfants privés de leur réserve réclamaient contre une excessive libéralité, ils ne faisaient autre chose que de faire rentrer dans la succession ce qui n'aurait pas dû en sortir, et n'agissaient, dès lors, et ne pouvaient agir que comme héritiers; - Mais attendu que, cependant, on faisait observer avec juste raison que, lorsque l'enfant avait le droit de retenir sa légitime à un autre titre que celui d'héritier, lorsqu'il était donataire du défunt, rien ne s'opposait à ce qu'il conservât cette légitime par exception, quoique ayant abdiqué la qualité d'héritier, parce que rien ne pouvait s'opposer à ce que le père, qui devait laisser dans la succession la réserve ou légitime de chacun de ses enfants, donnât cette réserve de son vivant à un ou à plusieurs d'entre eux, et qu'on ne voyait pas de nécessité à ce que l'enfant, investi de sa réserve à un titre légitime et ne pouvant être exposé à aucun danger, fût obligé de recourir à un autre titre plus dangereux, celui d'héritier, pour conserver ce qu'il avait déjà;

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>> Attendu que le législateur du code civil avait à choisir entre ces deux systèmes; qu'il est évident que le droit coutumier a prévalu, en ce sens, qu'en thèse générale c'est la loi qui fait les héritiers; que la permission de disposer de ses biens, par acte entre-vifs ou testamentaire, est à la vérité accordée, mais que des bornes sont posées à cet exercice du droit de propriété, afin de ne pas le faire prévaloir sur les devoirs du père de famille;-Attendu que la réserve est attachée à la qualité d'enfant; que cela résulte de l'art. 913, qui veut qu'elle soit calculée à raison du nombre des enfants, et non à raison du nombre des héritiers ;Mais attendu, cependant, que la réserve étant le résultat de la défense de disposer de ses biens en certains cas, au delà de certaines limites, il devient évident que la portion indisponible, n'étant pas transmise par la volonté de l'homme à ceux qui doivent la recueillir, ne peut l'être que par la volonté de la loi; que le résultat de cette dernière volonté est la transmission par voie héréditaire; qu'il faut donc, pour réclamer la réserve dont le père aurait disposé entre-vifs, ou la retenir dans l'hérédité malgré une disposition testamentaire, réunir, à la qualité d'enfant qui motive cette réserve, la qualité d'héritier qui donne le moyen d'obtenir; »Attendu que cela est si vrai qu'il est reconnu que la seule manière d'exécuter l'art. 921, qui ne permet pas aux créanciers du défunt de profiter de la réduction d'une donation entre-vifs, est l'acceptation, sous bénéfice d'inventaire, de la succession, parce que de cette acceptation résulte pour l'enfant le droit de réclamer la réserve par voie de réduction, et, d'un autre côté, de ne pas confondre avec les biens de la succession cette même réserve qui se trouve réunie aux biens propres de l'enfant; de pouvoir, dès lors, user de la qualité voulue pour que la réserve puisse être demandée, sans pourtant encourir les chances de cette qualité; Attendu que les raisonnements ci-dessus sont confirmés par les art. 917, 918, 1006, 1011 et 1015, dans lesquels le droit à la réserve semble toujours, en général, être attaché à la qualité d'héritier; que le système du code, sous ce rapport, est donc en harmonie avec l'ancien système coutumier, avec la maxime: Non habet legitimam nisi qui hæres est, et avec cet axiome de Dumoulin : Filius cui delata est hæreditas patri non potest consequi legitimam ex hereditate repudiată;

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» Attendu qu'il reste à examiner si le code civil a maintenu l'exception admise par les jurisconsultes anciens, et établissant que l'enfant donataire peut conserver, par voie de rétention, la réserve, quoiqu'il ait abdiqué la qualité d'héritier; -Attendu que, pour soutenir la négative, l'on excipe de l'art. 845 c. civ., qui dit qu'on ne permet à l'héritier donataire qui renonce de conserver la donation que jusqu'à concurrence de la quotité disponible; Mais attendu que l'art. 845 n'est évidemment que la contre-partie de l'art. 843 et de l'art. 844; que, d'après ces derniers articles, l'héritier qui vient à une succession a besoin de la clause de préciput pour retenir son don; qu'il n'en a pas besoin, au

pr., aff. Chamayon C. Chamayon; Paris, 31 juill. 1821, M. Séguier, pr., aff. Dunot C. Delamarre; Toulouse, 17 août 1821,

contraire, lorsqu'il renonce à cette même succession; que c'est là tout ce que le législateur a voulu dire par la disposition de l'art. 845, en l'autorisant à retenir ce don jusqu'à concurrence de la quotité disponible; mais que, dans cet article, le législateur n'a pas eu à s'expliquer sur les droits du donataire renonçant par rapport à la réserve; que le titre des successions était, en effet, étranger au mode de délation de cette réserve; qu'on ferait, dès lors, un raisonnement vicieux en disant que, quoique l'art. 845 autorise, en général, la rétention jusqu'à concurrence de la quotité disponible, cette rétention ne peut jamais aller au delà;

» Attendu que si, dans le chap. 3 du titre des donations relatif à la portion disponible et à la réduction, on cherche des traces du droit à la réserve de l'enfant donataire renonçant, on doit convenir que le législateur ne s'est réellement pas occupé de cette question, car l'art. 942 n'est applicable qu'à l'enfant héritier et donataire par préciput; qu'il ne faut pas conclure de là, cependant, que la réserve est tellement irrévocablement attachée au titre d'héritier, qu'il ne puisse y avoir de réserve sous ce titre ; qu'on chercherait vainement dans la loi une proposition aussi absolue; qu'on y trouvera, sans doute, des textes qui annoncent qu'on ne peut demander la réserve par voie d'action en réduction, sans être héritier, mais que ces textes se bornent à établir ce principe que, comme le tribunal l'a fait d'ailleurs observer ci-dessus, l'adition d'hérédité n'est nécessaire pour réclamer la réserve par voie de réduction, que parce que la portion indisponible n'étant pas transmise, en ce cas, par la volonté de l'homme, elle ne peut l'être que par la volonté de la loi; que le résultat de cette dernière volonté ne peut être, sous notre législation, que la transmission par voie héréditaire; que nous ne sommes plus, en effet, sous l'empire du droit romain, qui contraignait le père à donner à chacun de ses enfants sa légitime, et avait inventé les actions de prétérition et 'inofficiosité pour suppléer à l'accomplissement de ce devoir légal; mais que la qualité d'héritier doit cesser d'être utile dès que le père de famille a, de son vivant, assuré à un de ses enfants la réserve qu'il est obligé de lui conserver; que la transmission légale n'est plus indispensable en ce cas; qu'on peut ici répéter avec avantage les raisonnements des anciens jurisconsultes qui disaient que la qualité d'héritier n'étant qu'un moyen de réclamer la réserve, si elle peut être obtenue à un autre titre également légitime, on ne voit pas pourquoi ce titre ne suffirait pas; que, sans aucun doute, une donation est un titre légitime; que l'enfant donataire, en renonçant à la succession, n'a pas besoin d'agir comme héritier pour obtenir sa réserve, de chercher dans ce titre d'héritier le moyen de se prévaloir de la faveur légale; que son titre de donataire lui suffit;

» Attendu que le système contraire à celui qui vient d'être exposé présenterait de singulières anomalies; que, par exemple, lorsqu'il n'existe qu'un enfant, le père peut disposer de la moitié de ses biens; que l'enfant n'a donc, en ce cas, que moitié à réclamer du donataire, s'il y a excès dans la donation; qu'autant vaudrait soutenir que si ce donataire, au lieu d'être étranger, était lui-même un enfant, il se trouverait réduit au tiers, et que l'enfant non donataire aurait les deux tiers; qu'ainsi, la qualité d'enfant, si favorable aux yeux du législateur, serait, au contraire, une cause de défaveur; qu'il serait, en outre, bien étrange, dans le cas de l'art. 921, de voir l'enfant non donataire réclamer de l'enfant donataire renonçant toute la réserve, ne pas lui permettre de conserver sa part de cette réserve, sous le prétexte qu'il n'est pas héritier, et se soustraire lui-même aux obligations de cette qualité d'héritier en ne confondant pas la réserve avec la succession; qu'il faut donc reconnaître que le système qui permet à l'enfant donataire, par avancement d'hoirie, de conserver, en renonçant, la réserve et la quotité disponible, n'est point en désaccord avec les principes du code; qu'il est, au con.. traire, conforme à ses principes, et doit être adopté;

>> Attendu que la jurisprudence a varié sur cette question; qu'en 1818, la cour de cassation rendit l'arrêt Delaroque de Mons, qui décida que l'enfant donataire par avancement d'hoirie, renonçant, ne pouvait retenir que la quotité disponible; - Mais, attendu que bientôt les inconvé-nients de cette décision furent signalés ; qu'il en résultait, en effet, nécessairement que l'enfant donataire par avancement d'hoirie, n'ayant en renonçant d'autre droit que celui de retenir son don jusqu'à concurrence de la portion disponible, ne pouvait jamais être dépouillé de ce droit; qu'ainsi, par sa seule volonté, par l'effet de sa renonciation, il privait nécessairement le père de la faculté de donner à un autre enfant, par préciput, ou à un étranger, la quotité disponible; que le père était ainsi dépouillé de sa magistrature paternelle; que, d'un autre côté, on ne pouvait, en présence d'une renonciation faite par le donataire pour s'en tenir à son don, le dépouiller intégralement; que le seul moyen de concilier tous les intérêts était donc de décider que le don par avancement d'hoirie devait d'abord s'imputer sur la réserve, et qu'il ne s'imputerait sur la quotité disponible qu'autant que, par une disposition spéciale, le père ne l'aurait pas épuisée; que ce système fut adopté par la cour de cassation dans les deux arrêts Demourgues, des 11 août

M. d'Aiguesvives, pr., aff. Rives C. Rives; Agen, 6 juin 1829, M. Tropamer, pr., aff. Dupouy; Toulouse, 25 juill. 1832, M. de Miégeville, pr., aff. Dufour C. Peyrefite; Limoges, 4 déc. 1855, M. Tixier-Lachassagne, pr., aff. Granger C. Peytavit; Lyon, 2 mars 1836, M, Achard-James, pr., aff. Charreton C. Boissieux; Caen, 25 juill. 1857, M. de la Chouquais. pr., aff. Dudonney C. Dionis; Bastia, 27 nov. 1838, aff. Franceschini, V. Appel incident, no142; Lyon, 22 juin 1843, aff. Allimand, D. P. 45. 2. 184; 15 juin 1844, aff. Sandelion, eod.; Montpellier, 14 mai 1845, aff. N..., eod.; Toulouse, 9 août 1845, aff. Daugnac, D. P. 46. 2. 235; trib. de Figeac, 4 déc. 1845, aff. Conios, D. P. 46. 3. 167; Montpellier, 7 janv. 1846, aff. Gros, D. P. 47. 2. 6; Paris, 3 fév. 1846, aff. Lecoq, D. P. 46. 2. 255; Rouen, 29 avril 1847, aff. Lecesne, D. P. 47. 2. 195; 22 juin 1849, aff. Herbel, D. P. 50. 2. 78; Grenoble, 2 fév. 1852, aff. Tirau, D. P. 53. 2. 128; Aix, 27 juin 1855, aff. Beleuil, D.P. 55, 2. 241; Amiens, 17 mars 1855, aff. Gandon, D. P. 53. 2. 240).

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1030. Quant aux auteurs, la nouvelle jurisprudence a rencontré dans le plus grand nombre une vive opposition. Antérieurement, la thèse du cumul avait été soutenue par MM. Delvincourt, t. 2, p. 421 à 429; Proud'hon, dans une consultation; Malpel, Suppl. au traité des success., p. 16, no 270. Mais depuis que la cour suprême s'est rangée à cette opinion, nous ne connaissons qu'un seul interprète, M. Troplong, des Donations, n° 791 à 793, qui ait approuvé ce changement de jurisprudence. Contrà MM. Grenier, t, 2, no 566, et Chabot sur l'art. 845, d'abord partisans du cumul; Merlin, Quest. de droit, vo Réserve (ce qu'il dit, Rép., vo Légitime, n'appartient qu'à l'ancien droit, et quant aux articles Réserve et Portion disponible du Répertoire, ils sont de M. Grenier et non de M. Merlin); Toullier, t. 5, no 10; Favard, Rép., vo Renonciation, § 1, no 14; Levasseur, Quotité dispon., no 146; Saintespès-Lescot, t. 2, nos 515, 315 et suiv.; Coulon, Quest. de droit, vo Quotité dispon,, no 111; Zachariæ, § 882, note 2; Duranton, t. 7, no 252; Demante, t. 2, no 271; Valette, Droit du 17 déc. 1845, et toute l'école de Paris; Duverger, Gazette des tribun. du 19 oct. 1844; Rodière, Journ. des trib. du Midi, du 27 juin 1850; Coin-Delisle, dans sa dissertation intitulée: Limite du droit de rétention par l'enfant donataire renonçant.

Pour nous, nous persistons à penser que l'héritier renonçant ne peut retenir cumulativement la portion disponible et sa part de la réserve; qu'il ne peut avoir rien de plus, que si c'était un donataire étranger. Cette solution, que nous avons développée pour la première fois il y a près de trente ans, dans notre précédente édition, en traitant des Disposit. entre-vifs et test., t. 5, chap. 3, sect, 3, art. 1, no 47, nous paraît commandée par ces trois principes: 1° la réserve est une partie de la succession; 2° il faut être héritier pour avoir droit à la réserve; 5° la part du renonçant accroît à ses cohéritiers. On peut rattacher à l'une ou l'autre de ces propositions la plupart des éléments de cette grande controverse.

Et d'abord la réserve est une partie de la succession. En effet, la succession se divise en deux masses: la portion disponible et la portion indisponible. La réserve compose même toute la succession, quand le disponible a été épuisé. - Ici on a objecté que les biens donnés entre-vifs ne sont plus dans la succession. Mais il faut distinguer. A l'égard des tiers, créanciers, donataires et légataires, la succession ne comprend pas les biens donnés ; à l'égard des héritiers, la succession se compose de tous les biens qui doivent entrer dans le partage, même par rapport ou réduction. La réduction a l'effet rétroactif d'une condition résolutoire, et le bien donné est censé, pour ce qui excède la portion disponible, n'être jamais sorti des mains du donateur. Tout ce qui n'est pas

1829 et 30 mai 1856, et dans l'arrêt Decastille, du 25 mars 1834; >> Attendu que ces derniers arrêts battaient nécessairement en brèche le système de l'arrêt Delaroque; que, loin d'interpréter judaïquement l'art. 845, la cour reconnaissait que c'était d'abord sur la réserve que l'imputation du don par avancement d'hoirie devait s'effectuer; qu'elle a été bientôt amenée à décider que, si le père n'avait pas usé de la faculté de disposer de la quotité disponible, le donataire par avancement d'hoirie conserverait, en renonçant, et la part de réserve, et la quotité disponible elle-même; que c'est ce qui résulte en effet de l'arrêt Canillac, du 5 fév. 1840; que la jurisprudence se réunit donc à la doctrine

disponible ayant été réservé aux enfants est succession à leur égard. La réserve (le mot seul semble l'indiquer) ne cesse pas d'être la succession, par cela seul que les biens qui y sont affectés ont été momentanément aux mains d'un donataire.

Si la réserve fait partie de la succession, il faut être héritier pour y prétendre. Or le renonçant est censé n'avoir jamais été héritier, c. nap. 785.-On lit toutefois, dans quelques arrêts de cours d'appel, que la réserve est attachée à la seule qualité d'en. fant. Mais le contraire résulte de plusieurs articles du code Napoléon, qui qualifient expressément d'héritiers les personnes exerçant leurs droits dans la réserve (art. 917, 922, 924, 1004, 1006, 1009, 1011). D'ailleurs si la qualité d'enfant était attributive par elle-même de la réserve, sans adition d'hérédité, le renoncant pourrait la réclamer par voie d'action; et cependant on limite son droit à une rétention par voie d'exception. Car tous les interprètes sont d'accord aujourd'hui pour lui refuser l'action directe ce n'a été un point d'hésitation que dans les premiers temps du code Napoléon, et sous l'influence du droit romain, qui, par des raisons particulières, exposées plus loin, accordait à l'enfant, même renonçant, l'action en légitime.

Si la réserve est un droit héréditaire, il faut appliquer la règle de l'art. 786 c. nap.: « La part. du renonçant accroît à ses cohéritiers.» Car, d'une part, il n'y a pas de règles spéciales de dévolution pour la réserve; elle est régie par les principes de la succession ordinaire et notamment par les art. 724 et 1004 c. nap., qui saisissent de plein droit les héritiers de tous les biens du défunt. D'autre part, les adversaires eux-mêmes reconnaissent, à l'égard d'un donataire étranger, que la quotité de la réserve est fixée irrévocablement au décès par le nombre des enfants alors existant; qu'elle ne diminue point par le fait ultérieur de la renonciation de quelques-uns. Ce n'est point une assignation individuelle, une quotité personnelle; c'est une attribution collective à tous les enfants. Tant qu'il reste un seul héritier acceptant, il n'y a donc jamais accroissement de la quotité indisponible à la quotité disponible. Toutefois c'est contre l'application de l'art. 786 c. nap. qu'on a réuni le plus d'objections en faveur de l'enfant donataire.

On a dit d'abord que cet article suppose un abandon des choses de la succession et n'est pas applicable quand l'héritier retient à un titre spécial la chose donnée: son titre ici est une donation irrévocable de sa nature, un avancement d'hoirie, qui est le payement d'une dette naturelle.-A quoi nous répondons: il n'y a pas deux espèces de renonciation, ou deux renonciations ayant des effets différents. On est acceptant ou renonçant. Acceptant, on ne cumule pas avec la réserve un don non dispensé du rapport; renonçant, on ne peut retenir la réserve, au seul titre de donataire, puisque la donation ne transfère que ce qui est disponible, -L'avancement d'hoirie n'est point considéré comme le payement d'une dette, puisqu'il est rapportable, et que sous le code Napoléon l'enfant n'a point d'action contre ses père et mère pour son établissement. Quant à l'irrévocabilité de la donation, elle ne saurait faire obstacle à la réduction. Révocable et réductible sont deux idées tout à fait différentes. Révocable suppose un acte émané de la volonté du donataire. Réductible, c'est une condition imposée par la loi elle-même.

On a dit ensuite, et c'est à cet argument que les partisans du cumul, et notamment M. Troplong, des Donat., no 792, semblent attacher le plus de force: les demandeurs en réduction ne sont pas recevables à réclamer au delà de leur part dans la réserve; car l'enfant renonçant peut leur tenir ce langage: Si j'ai renoncé, c'est pour profiter de la donation. J'aurais accepté, si la donation avait été faite à un étranger; et dans ce cas, j'aurais partagé avec vous la réserve. Votre condition est donc là même, soit que je

pour faire décider que Teterel aîné, en renonçant à la succession de son père, a le droit de conserver sur son don la part dans la réserve et la quotité disponible, si tant est que cette quotité soit restée intacte; ➡ Déclare, etc. >>

Appel par Louis Teterel.-On produit, dans son intérêt, une consultation délibérée par MM. Perreyve et Demante, professeurs à la faculté de droit de Paris, à laquelle ont adhéré Mes Deschamps et Daviel. —Arrêt. LA COUR Adoptant les motifs des premiers juges, confirmę. · Du 23 déc. 1841.-C. de Rouen. -MM. Gesbert, pr.-Blanche, subst., concl. contr.-Desseaux, Néel et Sénard, av.

renonce, en retenant avec le don de ma part de réserve, soit que j'accepte, le disponible étant pris par un étranger. Ce n'est pas à vous, d'ailleurs, à tirer profit de ce que la donation m'a été faite. Donc il vous suffit que votre part de réserve soit intacte. -A nos yeux, ce raisonnement n'est concluant que si l'on admet deux portions disponibles: l'une, absolue et fixe, vis-à-vis l'étranger; l'autre, relative et variable, vis à-vis les enfants des ascendants. Or une telle distinction est-elle conciliable avec les textes du code Napoléon? Les libéralités ne pourront excéder, dit l'art. 913 c. nap., sans distinguer si elles sont faites à un hérilier où à un étranger. Nulle distinction, également dans l'art. 920, qui autorise la réduction. Mais la preuve qu'il n'y a pas deux portions disponibles nous paraît résulter surtout de l'art. 845, rapproché de l'art. 844, ou considéré en lui-même.-Aux termes de l'art. 845, « l'héritier qui renonce à la succession peut cependant retenir le don entré-vifs ou réclamer le legs à lui fait, jusqu'à concurrence de la quotité disponible. » Or, le sens de ces mots se détermine par l'art. 844, qui, à l'égard des dons par préciput, statue que « l'héritier venant à partage ne peut les retenir que jusqu'à concurrence de la portion disponible: l'excédant est sujet à rapport.» Dans ces deux articles, les mots portion disponible et quotité disponible ont le même sens, et s'entendent de ce qui n'est pas rapportable par le donataire dispensé du rapport. La portion disponible doit donc se calculer de la même manière, que l'héritier soit donataire par préciput ou en avancement d'hoirie. D'ailleurs l'art. 845 assimile pour la mesure du disponible le don entre-vifs à retenir et le legs à réclamer. Donc le donataire ne peut retenir que ce que le légataire pourrait réclamer. Or, on reconnaît que le légalaire ne peut réclamer que la portion disponible, sans y joindre sa part de réserve. Donc l'héritier renonçant doit, dans les deux cas de legs et de donation, être considéré comme étranger à la succession. Aussi l'art. 845, dans les premiers projets du code Napoléon, se terminait par ces mots: ainsi qu'un étranger pourrait le faire; mots qu'on a supprimés sans douté comme une superfluité, le style des lois étant un style de disposition et non de comparaison. Ajoutons que, loin de songer à favoriser le renonçant plus qu'un étranger, les rédacteurs de l'art. 845 étaient préoccupés de la loi alors régnante (loi du 17 niv. an 2, modifiée par la loi provisoire du 4 germ. an 8), qui avait placé la réserve dans la succession d'une manière si absolue, que l'hériter renonçant était sujet au rapport. C'est par opposition à cette règle et pour en indiquer l'abrogation que l'article emploie le mot cependant. Tout ce qu'on a voulu, c'est donc seulement que l'héritier renonçant et donataire ne fût pas de pire condition qu'un étranger. Donc la loi n'a pas entendu qu'il y eût une portion disponible plus étendue en faveur de cet héritier. Nous ne comprenons pas que M. Troplong, loc. cit., se soit borné à dire sur l'art. 845 : « Quant à l'argument tiré de cet article (argument que le savant auteur n'indique pas), il n'a plus aucune portée pour les esprits sérieux... Il est évident, en effet, que le don, en tant qu'il porte sur la portion disponible, ne saurait l'excéder, c'est là ce qu'a voulu dire l'art. 845. Mais il ne s'explique pas sur la question de savoir si à la portion disponible l'enfant renonçant peut joindre, en la retenant, la légitime dont il est saisi.» Que signifient ces mots dont il est saisi? Saisi de plein droit, en vertu de la loi? Non, puisqu'il n'est pas héritier. Saisi en vertu de la donation? Mais le don ne peut être retenu, d'après l'art. 845, que jusqu'à concurrence de la portion disponible, c'est-à-dire pour tout ce qui ne l'excède pas. Donc cet article s'oppose à la saisine, supposée par M. Troplong, qui ne la fonde pas, d'ailleurs, sur la seule qualité d'enfant.

On a tiré aussi argument de l'intention présumée du père, qui, en donnant à l'un de ses enfants, entend sans doute ne faire qu'une remise anticipée de sa part de réserve, de manière à conserver, pour des donations ultérieures, un plus grand disponible. Mais remarquons que l'imputabilité sur la réserve, pour faire produire effet à des libéralités postérieures, est une question distincte du droit de cumul invoqué par l'enfant dans son seul intérêt; question examinée séparément no 1035. Ajoutons que le cumul est contraire à l'intention présumée du père; car en ne faisant qu'un avancement d'hoirie sujet au rapport, il n'entendait pas faire un aussi grand avantage que s'il eût dispensé du rapport. Or, par le cumul, l'enfant renonçant se trouvera

aussi avantagé que si le don lui avait été fait par préciput. On a invoqué l'ancien droit sur la légitime. Mais la réserve établie par le code diffère essentiellement de la légitime, soitdes pays de droit écrit, soit des pays de coutume. — Dans les pays de droit écrit, la légitime, conformément au droit romain, n'était point une portion de l'hérédité, un droit héréditaire, mais une créance d'aliments, un secours dû par les père et mère à leurs enfants debitum bonorum subsidium (L. 6. au Cod., De inoff. test.; L. 5, au Cod., De inoff. don.). D'où il suivait: 1o que l'enfant même renonçant, avait l'action en légitime ou en supplément de légitime;-2° Que s'il était donataire, on imputait d'abord la chose donnée sur ce qui lui était dû, d'après la maxime nemo liberalis, nisiliberatus ;—3o Que chacun des enfants n'ayant qu'une créance personnelle, l'héritier institué ou le donataire se libérait en lui délivrant sa légitime individuelle; que si l'un d'eux renonçait à sa légitime ou négligeait de la réclamer; c'était le donataire qui en profitait, et non les autres enfants; 4° Qu'efi conséquence, et d'après le texte formel de la novélle 92, si l'en-' fant donataire s'abstenait de la succession, il retenait son don, comme l'eût fait un étranger, à la seule charge de parfaire la légitime de chacun de ses frères et sœurs (Faber, Cod. lib. 3, tit. 19, def. 5; Dumoulin, cons. 35; Furgole, Test., chap. 8, sect. 2; Berroyer, sur arrêts de Bardel; Voët, sur le Digeste). — Dans les pays de coutume, la légitime était considérée comme une portion de l'hérédité, et il fallait être héritier pour la demander. Cependant le renonçant pouvait la retenir par voie d'exception. Cette distinction se motivait sur ce que la légitime consistait pour chaque enfant dans une part fixe et individuelle, au lieu de leur être dévolue à tous in solidum.-L'art. 298, ajouté à la coutume de Paris lors de la réformation de 1580, et qui était devenu le droit commun de la France, porte: «La légitime est la moitié de telle part et portion que chacun eût eue en la succession..., si les père et mère... n'eussent disposé, etc.» De cette fixation distributive et toute personnelle, il suivait que chacun des enfants devait se trouver satisfait s'il obtenait intacte saportion virile, et que la part du renonçant accroissait, non aux cohéritiers, mais au donataire ou légataire de la portion disponible. De là aussi cette conséquence, consacrée par l'ord. de 1731, art. 34, que l'enfant avantagé pouvait retenir tout ce qui lui avait été donné, à la seule condition d'indemniser ses frères et sœurs pour la valeur de leur part légitimaire (Denisart, vo Légitime, nos 15 et suiv.; Bretonnier, t. 2, p. 529; Ferrière, sur la Coutume de Paris, t. 4, p. 524; Auroux des Pommiers, sur la Coùtume du Bourbonnais; Guy-Coquille, sur la Coutume du Nivernais, Donat., art. 7; Lebrun, des Successions, liv. 2, chap. 3, sect. 15 nos 9 et suiv.; Ricard, des Donat., part. 3, no 978; Pothier, des Donat., sect. 3, art. 5, § 1).

Cette conséquence du droit coutumier est-elle conciliable avec les principes du code Napoléon? Oui, selon M. Troplong, loc. cit., nos 791 à 793, en ce que les héritiers, demandeurs en réduction, ne sont pas recevables à réclamer au delà de leur part de réserve. Sans répéter ce que nous venons de dire contre cette proposition, remarquons seulement qu'à la différence du droit coutumier, le donataire étranger ne profite plus par accroissement de la part du renonçant. C'est là une différence capitale qui suffirait seule, indépendamment de textes formels, à justifier autrefois le droit de rétention de sa part de réserve par l'enfant donataire et renonçant.-M. Troplong invoque, avec une grande insistance, l'opinion de Dumoulin, en lui donnant une portée qu'on n'avait point encore signalée. Dumoulin écrivait avant la réformation de la coutume de Paris, avant qu'on y eût ajouté l'art. 298 cité plus haut, et introductif d'un droit nouveau. A ce moment, la règle de la légitime, même dans les pays de coutume, était la novelle 18. Or, au lieu de fixer la légitime comme cet article, d'une manière distributive et individuelle, la novelle statuait dans le même sens que le code Napoléon, en la fixant au tiers des biens du défunt, s'il laissait moins de cinq enfants, à la moitié s'il en laissait un plus grand nombre. Cette fixation collective n'empêchait pas' Dumoulin de reconnaître au renonçant le droit de retenir sa part de réserve par exception, quoiqu'il fût l'auteur de l'adage non habet legitimam, nisi qui hæres est (sur cout. de Paris, art. 125, no 1). Donc, conclut-on, l'autorité de ce grand jurisconsulte doit avoir tout son poids sous l'empire du code Napoléon. Mais, pour

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que cette conclusion fût vraie, il faudrait d'abord établir que Fart. 298, ajouté lors de la réformation à la coutume de Paris, fut l'expression d'un droit tout nouveau, c'est à-dire opposé à la doctrine universellement reçue. En général, on n'érige en loi qu'une opinion déjà plus ou moins accréditée. De plus, le prin cipe que la part du renonçant dans la réserve accroissait au donataire étranger et non aux cohéritiers, était admis avant comme depuis la réformation, dans les pays de coutume comme dans les pays de droit écrit, et ce principe, encore une fois, devait avoir une influence décisive pour notre question.

Un auteur (M. de Maleville) a cru voir dans l'art. 924 c. nap. la reproduction de l'ord. de 1731, art. 34, qui disposait que l'enfant donataire renonçant retenait les biens à lui donnés, sauf la légitime des autres enfants.-M. Delvincourt, t. 2, p. 113 et 248, puise aussi son principal argument pour le cumul dans le texte du même article ainsi conçu : « Si la donation entre-vifs réductible a été faite à l'un des successibles, il pourra retenir, sur les biens donnés, la valeur de la portion qui lui appartiendrait comme héritier dans les biens non disponibles, s'ils sont de la même nature. » Le donateur, dit-il, retient sur la portion non disponible ce qui lui appartiendrait comme héritier, c'est-à-dire s'il était héritier. Donc la loi prévoit le cas où il n'est pas héritier. Mais telle n'est point la pensée de l'art. 924, qui ne parle point d'ailleurs de renonciation et qui suppose au contraire le même individu à la fois successible et donataire. La condition finale si les biens sont de même nature, indique assez qu'on a voulu seulement rappeler les principes déjà posés relativement au rapport. C'est ce que nous expliquons vo Disp. entre-vifs et test., no 1052, en combinant cet article avec l'art. 866, et en reconnaissant d'ailleurs que la correction grammaticale manque à l'art. 924, où le futur conditionnel appartiendrait a été employé dans le sens du présent appartient. Ajoutons que cet argument de texte paraît abandonné par la plupart des auteurs qui soutiennent le droit du renonçant.

On a prétendu aussi que l'art. 931 c. nap. par ces mots « la réduction ne pourra être demandée que par ceux au profit desquels la loi fait la réserve, » devait s'entendre dans un sens partitif et individuel, comme s'il était dit par chacun de ceux......., dans la proportion de son droit à la réserve. Mais l'article n'a évidemment pour objet que d'indiquer dans quelles mains est l'action en réduction et non d'en déterminer l'étendue. Il n'a point surtout en vue le cas de renonciation de l'un des successibles, qui a été réglé ailleurs (art. 786) par le droit d'accroissement. Du reste, dans la discussion du code Napoléon, on a rejeté de l'art. 921 cette énonciation finale qu'y ajoutait l'un des projets: « la réduction sera dans les proportions établies en raison de la légitime de chaque successible. >>

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1031. On a vu que la cour suprême avait changé sa jurisprudence. Il y a eu à cet égard des appréciations inexactes, quant à la portée de quelques-uns de ses arrêts. Selon nous, l'innovation daterait de l'arrêt (Req. 5 fév. 1840, aff. Despréaux de Saint-Sauveur, suprà, no 1029). Selon d'autres interprètes, elle remonterait plus haut. On a cité trois arrêts antérieurs : 1. L'arrêt Cass. 8 juill. 1826, aff. Lamothe, vo Dispos. entrevifs, etc., no 1100-5o.—Mais il s'agissait seulement de savoir si, pour calculer la quotité disponible qui lui a été donnée ou léguée par préciput, un étranger a le droit de demander la réunion fictive des dons faits en avancement d'hoirie. Dans l'espèce, il n'y avait pas même d'héritiers renonçants. 2o L'arrêt Req. 11 août 1829, aff. Mourgues, infrà, no 1054.-Dans l'espèce, l'héritier renonçant ne demandait pas à annuler la quotité disponi- | ble et la réserve. Le procès n'était qu'entre le frère et la sœur de cet héritier, pour savoir si, dans la liquidation à opérer entre eux, le don au renonçant devait s'imputer sur la réserve ou sur la quotité disponible. 3° L'arrêt Cass. 25 mars 1834, aff. Castille, infrà, no 1034.—Dans l'espèce, il ne s'agissait encore que d'une imputation et non d'un cumul. La décision est que le don en avancement d'hoirie n'est que le don de la réserve légale, selon l'intention du père, qui conserve ainsi un plus grand pouvoir de disposer, et que la renonciation de l'enfant donataire à la succession ne change pas la nature du don et ne le rend pas (1) 1гe Espèce:-(Gallois C. Gallois.)-LA COUR ;-Attendu que tout

seulement imputable sur la portion disponible. A la vérité, le donataire a été autorisé à retenir son don, en l'imputant d'abord sur la réserve, puis en prenant sur le disponible le complément de la somme donnée. D'où l'on a conclu (M. Troplong, des Donat., n° 788) que l'arrêt, tranchant une question de cumul, au profit du renonçant, est le premier pas de la cour de cassation dans la voie de sa nouvelle jurisprudence. Mais il faut bien remarquer qu'il ne s'agissait pas d'attribuer en résultat au renonçant un avantage supérieur à celui qu'aurait pu avoir un étranger. Tout en imputant son don d'abord sur la réserve, puis, par supplément, sur la portion disponible, l'enfant ne retenait, en définitive, qu'une somme égale à la quotité disponible. On semblait donc respecter l'art. 845; et l'imputabilité ne faisait question que dans l'intérêt d'un second donataire, à quiavait été donnée ultérieurement la quotité disponible.

1032. Nous avons supposé, dans la discussion qui précède, une donation entre-vifs non dispensée du rapport. Telle, en effet, l'espèce jugée en sens divers par les arrêts ci-dessus. Mais notre solution contre le cumul serait la même, quoique l'héritier renonçant fût donataire par préciput. Car le don ne peut porter que sur le disponible. Peu importerait, par la même raison, que le donateur eût formellement compris dans sa libéralité le disponi. ble et la part de réserve.

1033. La même raison s'oppose encore à cette théorie intermédiaire, consacrée par plusieurs arrêts, et qui, distinguant entre le cumul et la simple imputation, décide que le don fait à l'héritier renonçant et non dispensé du rapport doit s'imputer sur sa réserve, si le père a donné depuis la quotité disponible, soit à un autre enfant, soit à un étranger. Ici, dit-on, ce n'est plus de l'intérêt du renonçant qu'il s'agit. Pourvu qu'il retienne ce qui lui a été donné, peu lui importe que ce soit à titre de réserve ou de quotité disponible. Mais il s'agit de l'intérêt des autres donataires postérieurs ou légataires. Si le don fait au renonçant s'impute sur sa réserve, la quotité disponible en aura été plus étendue; la puissance paternelle en sera favorisée; et il ne dépendra pas d'un enfant de rendre nulles ou de réduire considérablement par une renonciation concertée les autres dispositions de son père.-Puisque d'ailleurs l'on suppose le don fait en avancement d'hoirie, l'intention du père a été qu'il portât d'abord sur la réserve. On encourage ainsi les avancements d'hoirie, sans atteindre le droit des autres légitimaires. Ce n'est pas le cas d'appliquer le principe, que la réserve est attachée à la qualité d'héritier, et ne peut profiter au renonçant; car, encore une fois, il ne s'agit pas d'un profit à faire par le renonçant, mais d'un simple mode d'imputation, qui, sans avantager aucunement celui-ci, concilie les intérêts des autres donataires et des légitimaires. M. Duranton, t. 7, no 282 et suiv., entre dans de longs développements pour justifier ce système. M. Coin de Lisle, qui l'avait soutenu d'abord dans son commentaire sur les donations, p. 146, nos 10 et suiv., vient de le combattre dans sa dissertation intitulée : Limite du droit de rétention, etc., nos 250 et suiv. Pour nous, nous ne méconnaissons pas la puissance des raisons de convenance et d'équité que nous venons de résumer. Mais elles ne sauraient à notre sens prévaloir sur le principe que la loi seule attribue la réserve; que seule elle règle les effets de la donation en avancement d'hoirie pour le cas où l'enfant donataire répudierait la succession et qu'alors la part durenonçant accroît à ses cohéritiers.

1034. Il a été jugé que le don en avancement d'hoirie, fait par un père à son enfant, n'enlève pas au donateur la faculté de disposer dans la suite, par don ou legs, avec préciput et hors part, de la quotité disponible; que si l'héritier renonce à la succession pour s'en tenir à son don, et que la quotité disponible ait été léguée depuis, le droit de rétention doit d'abord être exercé sur la réserve légale; et que, si cette réserve est insuffisante pour compléter le don, le droit de rétention s'exerce alors sur la portion disponible; qu'il ne peut se prévaloir de l'art. 845 c. nap., lequel ne s'applique qu'au cas où le père n'aurait point, avant ou après le don que le donataire prétend retenir, disposé de la quotité disponible (Grenoble, 22 fév. 1827; Req. 11 août 1829; Cass., 25 mars 1834; Aix, 13 fév. 1835 (1); Grenoble, 30 don en avancement d'hoirie a nécessairement pour objet une remise an

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