Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

Vazeille, art. 878, no 12; Massé et Vergé sur Zachariæ, t. 2, p. 338, note 26). Jugé ainsi à l'égard d'un créancier ayant un titre sous seing privé (Orléans, 22 août 1840, aff. Boullay, V. n° 1501).

1482. L'inscription peut même être requise par des créanciers qui n'ont aucun titre écrit, tels, par exemple, que des fournisseurs. Mais suffira-t-il alors d'une simple affirmation de leur créance? Oui, selon MM. Vazeille, Massé et Vergé, loc. cit. D'autres auteurs exigent au préalable un jugement ou une ordonnance du juge (Duranton, loc. cit.; Poujol, art. 878, no 17).

1483. Est-il besoin des formalités de l'art. 2111, si la succession a été acceptée sous bénéfice d'inventaire, ou la séparation a-t-elle lieu de plein droit au profit des créanciers de la succession? V. suprà, no 785.

Jugé que lorsqu'une succession est vacante, la séparation de patrimoines s'opère de plein droit, et n'a pas, dès lors, besoin d'être prononcée en justice (Amiens, 2o ch., 11 juin 1855, M. Bazenery, pr., aff. Forzy.-V. Conf. MM. Troplong, Priv. et hyp., t. 3, no 651; Blondeau, Séparat. de patrim., p. 503 et s., D. P. 54. 5.690).

1484. Compétence, procédure. La demande en séparafion doit être portée devant le tribunal du domicile de l'héritier, et non devant celui de l'ouverture de la succession (Paris, 26 juin 1841, aff. Brichard, V. Compét. civ. trib. d'arr., no 86).

1485. La demande en séparation est proposable pour la première fois en appel : « Attendu que la demande en séparation de patrimoines est recevable en tout état de cause, même en appel; d'où suit que lors même que la dame de Besse ne l'aurait pas formée d'une manière régulière en cause d'appel, elle aurait suffisamment réparée ce vice en concluant sur l'appel à la confirmation pure et simple de la sentence de Riom qui l'avait accueillie; casse» (Cass. 8 nov. 1815, MM. Brisson, pr., Carnot, rap., aff. Besse. Conf. Caen, 20 août 1824, aff. Morin C. Breton). Jugé, pareillement, que l'action en séparation peut être exercée pour la première fois en appel, quoique les biens du débiteur soient vendus, si le prix n'en est pas encore distribué (Toulouse, 3 mars 1841, M. de Faydel, pr., aff. Picou C. veuve Bellegarde).

1486. Lorsque, devant une cour royale, on s'est borné à discuter sur le point de savoir si, au sujet d'une succession ou verte avant ce code, un créancier hypothécaire avait eu besoin, pour conserver le privilége de la séparation des patrimoines, de se conformer à l'art. 2111 c. nap., et qu'on a omis le moyen pris de ce que la déchéance du droit de demander cette séparation résulterait en tout cas, contre le créancier, de ce qu'il n'en a pas formé la demande dans le délai de cinq ans prescrit par les lois romaines, ce dernier moyen ne peut être proposé devant la cour de cassation: « Attendu qu'en supposant admissible, au cas dont il s'agit, la prescription de cinq ans contre la demande en séparation du patrimoine, il suffit que l'exception n'ait pas été proposée pour qu'on ne puisse reprocher à la cour d'appel de n'y avoir pas statué » (Req. 17 avr. 1827, MM. Henrion, pr., Rousseau, rap., aff. Dupic C. d'Hauthier).

1487. Les poursuites, qui n'ont d'autre objet que de faire déclarer exécutoires contre l'héritier les titres contre le défunt, ne sont pas des actes interruptifs de la prescription de l'action en séparation de patrimoines (Grenoble, 21 avr. 1823, aff. Allard et Mathieu C. Bosc).

[ocr errors]

§ 3.-Effets de la séparation de patrimoines. 1488. Les effets de la séparation des patrimoines sont à considérer à l'égard, 1o des créanciers de l'héritier; 2o de l'héritier lui-même; 3° des créanciers du défunt entre eux; 4° des créanciers du défunt et des légataires respectivement; 5° des tiers acquéreurs.

1489. La séparation des patrimoines a été introduite principalement contre les créanciers de l'héritier, pour les empêcher d'exercer leurs droits sur les biens de la succession avant que les créanciers de la succession aient été payés.

1490. Quant à l'héritier lui-même, la séparation ne modifie en rien ses droits. Ainsi, il ne conserve pas moins la capacité d'aliéner les immeubles de la succession (Chabot, art. 880,

[ocr errors]

n° 8). De même, il peut disposer des effets mobiliers, la loi n'ayant organisé aucune mesure conservatoire qui en affecte dans ses mains la saisine ou la disponibilité. Et spécialement il a été jugé que la séparation des patrimoines ne donne pas au créancier qui l'a obtenue le droit d'exiger pour garantie du payement de ce qui lui est dû, que l'héritier lui fournisse, soit une une caution, soit le placement de certaines valeurs de la succession avec affectation spéciale de ces valeurs à l'extinction de sa créance (Paris, 31 juill. 1852, aff. Courtois, D. P. 53. 2. 33).

1491. Quel est l'effet de la séparation des patrimoines, quant aux obligations de l'héritier? N'est-il toujours tenu des dettes de la succession que pour sa part, s'il a des cohéritiers? — On a prétendu que le principe de la division des dettes recevait ici exception; que l'héritier, qui a dans son lot des biens d'une valeur supérieure à sa part des dettes était tenu vis-à-vis les créanciers de la succession, jusqu'à concurrence de leur valeur (MM. Duranton, t. 19, no 224; Dufresne, no 114; Bonnier, Rev. de lég., t. 14, no 483). Jugé aussi que la séparation des patrimoines confère aux créanciers du défunt le droit de se faire payer indistinctement sur tous les biens de la succession, sans égard à la division des dettes et nonobstant l'offre faite par quelques-uns des cobéritiers de payer leur part de la dette (c. nap. 875, 879 et 2111; Bourges, 20 août 1832, aff. Devaux, V. Faillite, no 494; Bordeaux, 14 juill. 1836, M. Dégranges, pr., aff. Dupuy C. Dupuy).

1499. L'opinion contraire nous paraît mieux motivée. Les exceptions ne doivent point se suppléer; quand la loi a voulu déroger au principe général de la division des dettes, elle s'en est expliquée formellement comme dans les art. 873 et 1017. L'art. 873 oblige bien, à la vérité, pour toute la dette, l'héritier détenteur de l'immeuble hypothéqué; mais il s'agit alors d'une hypothèque constituée par le défunt, d'un droit acquis avant l'ouverture de la succession. - Il n'y a pas les mêmes raisons d'attacher la solidarité des dettes au seul fait de la détention des biens, vis-à-vis des créanciers qui depuis le décès ont obtenu la séparation des patrimoines; car cette mesure, on ne saurait trop le répéter, n'a point été introduite contre l'héritier luimême, mais contre ses créanciers; la loi n'a point entendu ajouter à ses obligations, aggraver sa position, mais seulement assurer aux créanciers de la succession la préférence sur les créanciers personnels de l'héritier. Jugé dans ce sens que le créancier chirographaire qui obtient la séparation de patrimoines n'a droit de se faire payer sur le lot de chaque héritier qu'en proportion de sa part contributive dans la dette, et non jusqu'à concurrence de la valeur des biens composant son lot (Caen, 14 fév. 1825, aff. Alix, V. suprà, no 1359).—Cette décision est approuvée de MM. Vazeille, art. 878, no 8; Fouet de Conflans, même article, no 12; Belost-Jolimont sur Chabot, art. 878, observ. 1; Massé et Vergé, t. 2, p. 335, note 19.

-.

1483. La séparation des patrimoines établie contre les créanciers de l'héritier demeure sans effet contre les créanciers du défunt. Cette règle, toutefois, demande une explication. Nul doute d'abord entre les créanciers qui se sont inscrits dans les six mois; ils ont tous un privilége de même nature; ils viennent donc au même rang, sans égard à la date de leur inscription, et sauf, bien entendu, les causes de préférence résultant de la nature de leur créance (Delvincourt, sur l'art. 878; MM. Duranton, t. 7, no 476; Vazeille, sur l'art. 878, no 11; Blondeau, p. 481 et suiv.; Bonnier, Rev. de législ., t. 14, p. 482; Marcadé, art. 480; Massé et Vergé sur Zachariæ, t. 2, p. 337, note 25).

1494. Mais il en est de même si tous les créanciers du défunt n'ont pas demandé la séparation ou n'ont pas pris inscription; le créancier vigilant qui a rempli ces formalités n'a acquis ainsi aucun privilége contre ceux qui les ont négligés. C'est toujours la conséquence du principe que la séparation de patrimoines ne confère de privilége aux créanciers du défunt qu'à l'encontre des créanciers de l'héritier (MM. Duranton, t. 7, no 477, et t. 19, no 426; Belost-Jolimont sur Chabot, art. 878, no 3; Dufresne, nos 93 et suiv.; Marcadé, Massé et Vergé, loc. cit.). Jugé ainsi que l'inscription prise par quelques-uns seulement des créanciers de la succession dans les six mois de son ouverture ne crée à leur profit aucun droit de préférence contre

les autres créanciers qui ont omis de se faire inscrire (Grenoble, 21 juin 1841) (1).

(1) (Colin et Perret C. Morel et Doyon.) LA COUR; Attendu que les art. 878 et 880 c. civ., en consacrant le principe de la séparation des patrimoines, n'ont pas eu pour objet d'établir des droits de préférence entre les créanciers de l'hérédité; que leur but unique, parfaitement conforme à la raison et à l'équité, a été d'empêcher que les créanciers d'un individu, qui trouvaient dans ses biens personnels un gage suffisant de leur créance, ne fussent exposés à voir tout à coup leur position changer de face et leurs garanties s'évanouir par le décès du débiteur et la confusion de son patrimoine avec celui d'un héritier insolvable; que, pour prévenir ce danger, le législateur, en promulguant ces articles, a voulu que le patrimoine du défunt, malgré la maxime le mort saisit le vif, pût rester distinct du patrimoine de l'héritier de telle sorte que le premier ne fût affecté au payement des dettes de l'héritier, dans le cas qu'il prévoit, qu'après l'entière extinction des dettes de l'hérédité; que, sous cette partie de la législation et avant l'adoption des art. 2111, 2113 c. civ., il est hors de doute que les créanciers du défunt restaient les uns vis-à-vis des autres dans la position que leur donnaient leurs titres de créance; que ceux-là seuls étaient privilégiés ou hypothécaires, en faveur de qui la nature ou l'acte constitutif de leur créance établissait ce droit, et que les autres créanciers demeuraient chirographaires; - Attendu que, pour que le titre des hypothèques, promulgué depuis, eût modifié ce principe, il faudrait qu'il l'eût exprimé d'une manière formelle ; Attendu que, dans le doute, l'interprétation de la loi devrait plutôt être en faveur du principe d'équité qui règle le sort des créanciers du défunt entre eux, d'après les droits qu'ils ont reçus de leurs conventions avec leur débiteur, que dans le sens d'un droit exorbitant de privilége ou d'hypothèque que la loi conférait de plano à chaque créancier, même chirographaire, du défunt, contre ses créanciers, par le fait seul du décès de leur débiteur commun; qu'aucun motif raisonnable ne viendrait justifier une pareille disposition;

Attendu que l'art. 2111, loin d'établir, en faveur d'un créancier du défunt contre ses cocréanciers, un nouveau droit contraire au principe résultant de l'art. 878, ne fait que tracer le mode de conservation du droit de séparation de patrimoines, tel qu'il est réglé par ce dernier article; Attendu qu'il était naturel que le législateur, en établissant au titre des priviléges et hypothèques le système de publicité de ces droits de préférence, ne voulût pas laisser occulte le droit de séparation de patrimoines dont les art. 878 et 880 avaient frappé les immeubles d'une hérédité; qu'il était logique de soumettre le créancier à qui cette faculté était accordée à l'obligation d'avertir, par une inscription, ceux entre qui elle était établie, sous peine de les exposer à être trompés par les apparences et à croire libres des biens grevés; que c'est pour cela que l'art. 2111 a soumis les créanciers et légataires du défunt à la nécessité d'une inscription dans les six mois du décès, s'ils voulaient primer les créanciers de l'héritier, en décidant que, pendant ce délai de six mois, aucune hypothèque ne pourrait être établie avec effet, à leur préjudice, par l'héritier, mais que ce mode de publicité n'a été créé, comme l'était déjà le droit qu'il est destiné à conserver, que contre les créanciers de l'héritier, ainsi que l'énonce textuellement cet art. 2111; qu'il est donc sans influence sur la position relative des créanciers et légataires du défunt entre eux, lesquels restent dans le cercle que leur avait tracé l'art. 878;

Attendu qu'on objecterait en vain que ces mots à l'égard des créanciers, des héritiers ou représentants du défunt, qu'on lit dans l'art. 2111, comprennent les créanciers de l'hérédité qui ne se sont pas inscrits dans les six mois; que cette interprétation est repoussée par la nature même du droit auquel s'applique la disposition; que, s'agissant de séparation de patrimoines, le patrimoine du défunt est nécessairement mis en opposition avec le patrimoine de l'héritier, et les créanciers de celui-ci avec ceux du défunt; que limiter aux créanciers de l'héritier les effets de l'inscription, c'est exprimer suffisamment et même irrésistiblement que cet effet ne s'étend pas aux créanciers de l'hérédité entre eux; que l'on ne peut prétendre que les créanciers du défunt qui ne se sont pas fait inscrire dans les six mois, soient devenus simplement créanciers de l'héritier, puisque l'art. 2115 leur accorde la faculté de donner à leurs créances une garantie hypothécaire, après les six mois, en les soumettant à la formalité de l'inscription, faculté qu'ils n'acquièrent pas en vertu d'une nouvelle stipulation intervenue entre eux et l'héritier, comme celui-ci pourrait la concéder à ses propres créanciers, mais qu'ils tiennent de leur qualité de créanciers du défunt et du droit de séparation de patrimoines, faculté qu'ils n'exercent enfin que sur les immeubles de la succession et non sur ceux de l'héritier, ce qui prouve clairement que, même à défaut d'inscription dans les six mois, ils ne sont pas tombés dans la classe des simples créanciers de l'héritier;

Attendu qu'on ne peut davantage argumenter du mot tiers inséré dans l'art. 2113, pour prétendre que l'hypothèque consacrée par cet article produit son effet contre toute personne autre que le créancier inscrivant; que, sans doute, si l'art. 2115 ne se fût rapporté qu'à l'art. 2111, on eût pu s'étonner que le législateur n'eût pas exprime plus nettement sa

1495. Si le retard ou l'omission d'inscription par l'un des créanciers de la succession ne peut lui nuire dans ses rapports

pensée et n'eût pas répété que l'hypothèque ne produirait effet à l'égard des créanciers de l'héritier qu'à compter de la date de son inscription, mais qu'il faut observer que l'art. 2113 est le corollaire de tous les articles qui précèdent, à partir de l'art. 2106, qu'il les régit tous; qu'il était donc nécessaire que sa rédaction fût conçue en termes assez généraux pour qu'elle s'accordât avec les cas prévus par les dispositions précé dentes; que c'est pour cela que l'expression générique tiers y a été employée, et non pour modifier les principes el les effets de la séparation de patrimoines et de la préférence qu'elle établit; — Attendu que, si l'on admettait qu'à partir du décès tous les créanciers chirographaires du défunt deviennent créanciers privilégiés les uns vis-à-vis des autres, a charge d'une inscription dans les six mois, l'on arriverait à cette conséquence que le créancier du défunt qui aurait obtenu sur ses biens, quelques jours avant sa mort, une hypothèque judiciaire ou conventionnelle qu'il n'aurait fait inscrire que le lendemain du décès, et qui aurait omis de faire inscrire, dans les six mois, son droit de séparation de patrimoines, serait primé par le créancier chirographaire du défunt qui se serait conformé à l'art. 2111, et que, lors même qu'il aurait fait inscrire à la fois son hypothèque et son privilége, il ne viendrait néanmoins qu'en concours avec le créancier chirographaire inscrit dans les six mois; ce qui serait contraire à toutes les règles du droit et d l'équité, et constituerait une violation flagrante des conventions des parties et de la foi due aux contrats; Attendu qu'il n'est pas besoin,

pour restreindre aux créanciers de l'héritier les effets de l'inscription prise en vertu de l'art. 2111, de refuser aux dreits de préférence sa les immeubles résultant de la séparation de patrimoines le nom de privilége que leur donne cet article; qu'à l'égard des créanciers de l'héritier ce droit est bien un véritable privilége, puisqu'il confère aux créanciers du défunt qui l'ont fait inscrire dans les six mois une préférence sur tous les créanciers qui auraient acquis de lui des hypothèques, et qui les auraient fait inscrire même avant l'inscription du créancier de l'hérédité; préférence qui résulte de la qualité des créances, c'est-à-dire de ce qu'elles sont créances de l'hérédité, ce qui est le caractère du privilege; qu'il faut seulement reconnaître que ce privilége n'est pas général et absolu, mais simplement relatif; qu'il n'existe pas contre toutes personnes, mais seulement contre les créanciers de l'héritier;

Attendu qu'il suit de tout ce qui précède que le privilége et l'hypothèque conférés aux créanciers du défunt qui ont rempli les formalités des art. 2111 et 2113 n'ont d'effet que contre les créanciers de l'héritier; que l'inscription prise dans les six mois n'a pour objet que de rendre inefficace toute concession d'hypothèque par l'héritier au préjudice du créancier du défunt; et l'inscription après les six mois, de donner à l'inscrivant la préférence sur tout créancier hypothécaire de l'héritier qui se serait inscrit après lui; mais qu'ils laissent les créanciers du défunt entre eux dans la position relative que leur ont créée leurs titres de créance, de telle sorte que s'il ne s'agit que de leurs droits respectifs, si aucun créancier de l'héritier n'a acquis, par une inscription avant un créancier retardataire du défunt, des droits qui diminuent le gage commun, les créanciers du défunt, bien qu'inscrits les uns pendant les six mois, les autres après, restent les uns à l'égard des autres avec les droits que leur attribuent leurs titres originaires; Attendu que ce principe n'empêche pas que l'inscription du droit de séparation de patrimoines ne soit personnelle à l'inscrivant, et ne profite qu'à lui, en ce qui a rapport aux biens que son inscription, prise en temps utile, a sauvés de la mainmise des créanciers de l'héritier inscrits après les six mois, mais avant l'inscription tardive d'autres créanciers du défunt; qu'il ne s'agit plus alors seulement de déterminer le sort des créanciers du défunt entre eux, d'après leur qualité et leurs titres respectifs; qu'à leurs droits sont venus se mêler les droits acquis des tiers ; que si ces tiers, par leur vigilance à s'inscrire, sont parvenus à primer des créanciers du défunt inscrits tardivement, ces derniers sont exposes à subir la peine de leur négligence, et à voir passer entre les mains de leur coeréancier, inscrit dans les six mois, des valeurs que ce créancier de l'heritier inscrit avant eux leur enlève; que c'est plutôt alors devant ce créancier de l'héritier que devant leur cocréancier du défunt, premier inscrit, qu'ils succombent; qu'il n'y a pas là contravention au principe qu'entre les créanciers du défunt qui ont demandé la séparation de patrimoines, la préférence se détermine par le titre originaire, et non par la date de l'inscription da privilége de séparation de patrimoines, mais application d'une autre règle de droit et d'équité, qui rend chacun responsable de son imprudence et de sa négligence; or l'inscription après les six mois constitue une négligence dommageable, quand elle se trouve précédée par l'inscription d'un créancier de l'héritier; Attendu que les différents cas possibles de co genre de concours ne peuvent être résolus à l'avance hypothétiquement; qu'on ne pourrait les discuter utilement que sur une connaissance exacte des faits qui exercent, dans leur variété, une grande influence sur l'application du droit; Attendu que, bien qu'il soit allégué dans la cause que les parties se trouvent placées dans une de ces hypothèses, à raison d'une hypothèque légale du fils mineur d'Adolphe Doyon, dispensée d'in

avec les autres créanciers héréditaires, il n'en est pas de même vis-à-vis des créanciers de l'héritier qui pourraient le primer et l'exclure en prenant à temps inscription. Il suit, de là, qu'en cas d'insuffisance des biens pour payer toutes les créances inscrites, les créanciers inscrits de la succession ne profiteront pas, par une sorte d'accroissement, de la part des créanciers héréditaires non inscrits; le profit en est seulement pour les créanciers de l'héritier, puisque c'est vis-à-vis eux que l'inscription est requise. Les créanciers du défunt ne sauraient bénéficier de l'omission d'une formalité qui ne les concerne pas. Merlin, Rép., yo Sép. de patr., § 5, no 4; MM. Duranton, t. 7, no 478, et 19, no 227; Malpel, no 219; Grenier, t. 2, nos 455; Dufresne, nos 99 et suiv.; Marcadé, art. 880; Massé et Vergé sur Zachariæ, 1. 2, p. 338, note 25; V. cependant MM. Blondeau, p. 48 et suiv.; Fouet de Conflans, sur l'art. 878, no 11).

1496. Si les biens de la succession ne suffisent pas pour en payer les dettes, les créanciers qui ont demandé la séparation des patrimoines sont-ils autorisés à venir par contribution ou au rang de leur hypothèque sur les biens de l'héritier avec ses créanciers personnels? La question a été controversée. Ulpien et Paul prétendaient qu'en demandant la séparation les créanciers avaient restreint leurs droits aux biens de la succession. Papinien, au contraire, permettait d'exercer ces droits sur les biens de l'héritier (L. 3, § 2, ff., De separ.). Sa décision avait prévalu dans l'ancienne jurisprudence. «La séparation de patrimoines, disait Pothier, ch. 5, art. 4, des Success.), introduite en faveur des créanciers de la succession, ne doit pas être rétorquée contre eux : en la demandant, ils n'ont pas eu l'intention de libérer l'héritier de l'obligation qu'il a contractée par l'acceptation de la succession, mais seulement d'être préférés sur ces biens aux créanciers de l'héritier.» Toutefois cette solution n'était admise par Papinien, Domat, Lebrun (liv. 4, ch. 2, sect. 1, n° 26), et Pothier, loc. cit., qu'à condition que les créanciers de l'héritier fussent tous payés sur ses biens personnels, avant que les créanciers du défunt pussent y rien prétendre. «Puisqu'on sépare, disait Pothier, aux créanciers de l'héritier les biens de la succession, il est équitable qu'on sépare aux créanciers de la succession les biens de l'héritier. »

[ocr errors]

Cette restriction doit-elle être admise sous le code? - Oui, selon Maleville, art. 880; M. Marcadé, art. 881. Ce dernier auleur voit dans le résultat de la séparation des patrimoines, deux masses d'actif et de passif, deux débiteurs ayant chacun leurs créanciers propres ; d'où il conclut que les créanciers de l'héritier, exclus des biens héréditaires par les créanciers du défunt, excluront à leur tour des biens propres, jusqu'à ce qu'ils soient désintéressés, les créanciers du défunt.- · Cette interprétation est rejetée par la plupart des auteurs (Chabot, art. 878, no 13; Merlin, Rép., vo Sépar. de patr., § 5, no 6; MM. Duranton, t. 7, nos 500 et suiv.; Delvincourt, sur l'art. 878; Grenier des Hypoth., n° 437; Malpel, no 219; Vazeille, art. 878, no 7; Poujol, ibid., nos 9 et 20; Rolland de Villargues, vo Sépar. de patr., no 58; Dufresne, no 110; Cabantous, loc. cit., p. 136; Toullier, t. 4, p. 548; Massé et Vergé sur Zachariæ, t. 2, p. 336, note 21). En effet, aucune disposition particulière n'autorise le privilége❘ que réclamaient ici les créanciers. Ce serait les faire profiter de la séparation des patrimoines qui a été établie contre eux, ou du moins, dans le seul intérêt des créanciers du défunt. La réciprocité dont on argumente n'est pas même fondée.Aux créanciers du défunt on enlèverait des droits réels qu'ils ont acquis sur les biens de l'héritier, si sur ces biens étaient

seription, qui prendrait rang entre la créance de la femme Morel et de son fils et celle de Perret, cependant il n'est aucunement prouvé, jusqu'à présent, que cette créance de Doyon fils existe réellement; Attendu, d'ailleurs, que le rang de ces trois créanciers ne pourrait être régulièrement fixé aujourd'hui, quant à ce, en l'absence du mineur Doyon, qui n'est pas en cause; qu'il suffit de réserver les droits de toutes les parties à faire valoir dans l'ordre du prix à provenir des immeubles hypothéqués, pour le cas où le mineur Doyon, ou tout autre créancier de l'héritier, prétendrait avoir des droits hypothécaires venant après l'inscription dé Julie Bourk et avant celle de Perret, et eu égard au montant de ces créances intermédiaires seulement; - Emendant, etc. Du 21 juin 1841.-C. de Grenoble.-M. Legagneur, 1er pr. (1) Espèce: (Seillier et Campion C. Rouxel.) 31 janv. 1821,

[ocr errors]
[ocr errors]

préférés ses créanciers personnels, Aux créanciers de l'héritier on n'enlève aucun droit réel en préférant les créanciers de la succession sur les biens héréditaires : car ces biens ne peuvent devenir la propriété de l'héritier, ni par conséquent de ses créanciers, que déduction faite des charges qui les grevaient. C'est le système de Pothier, qui produirait un résultat contraire à une juste réciprocité. Supposons que a séparation ait été obtenue, mais que l'inscription n'ait pas été prise dans les six mois alors ne serait-il pas singulier d'admettre les créanciers de l'héritier à concourir avec ceux de la succession sur les biens de la succession même, et d'empêcher les créanciers de la succession inscrits ou non inscrits de concourir avec ceux de l'héritier sur les biens de ce dernier?

Ces considérations sont développées avec force, dans la dissertalion déjà citée, par notre savant ami M. Nicias-Gaillard (Revue crit. de législ., mars 1856), qui s'est attaché particulièrement à combattre le système de M. Marcadé. Le judicieux magistrat fait aussi remarquer en terminant que ce qui a entraîné cet auteur, sans qu'il y prit garde, à admettre deux débiteurs en même temps que deux patrimoines, c'est le langage même de la loi, le nom de séparation de patrimoines : « Mais en y regardant mieux, on reconnaît que ce n'est là qu'une fiction. Celui qui n'est plus ne saurait plus être ni débiteur ni créancier. Il ne reste de lui que son héritier qui le représente et le continue. Seul désormais cet héritier peut devoir, et seul, en effet, il doit à tous les créanciers et sur tous les biens. >>

1497. Les légataires d'une succession acceptée purement et simplement par l'héritier, ont-ils le droit d'être payés de leurs legs concurremment avec les créanciers du défunt sur les biens de cette succession, lorsque ceux-ci n'ont pas demandé la séparation des patrimoines? Le doute naît au premier abord de la maxime nemo liberalis, nisi liberatus, qui ne permet pas que les libéralités aient effet avant l'entier acquittement des dettes. Mais cette maxime n'est applicable qu'autant que les biens du défunt sont distincts de ceux de l'héritier; le droit de préférence des créanciers sur les légataires est subordonné à la demande en séparation des patrimoines, c'est-à-dire à la même condition que celle imposée par la loi aux créanciers de la succession et aux légataires eux-mêmes, pour être préférés aux créanciers personnels de l'héritier (Vazeille, art. 878, no 13). — Il a été jugé en conséquence: 1o qu'à défaut de demande en séparation les légataires doivent être payés dans la même proportion que les créanciers de la succession et que ceux-ci notamment nont pas le droit, pour compléter le remboursement intégral de leur créance, de répéter ce qui a été payé par l'héritier aux légalaires : — « Áttendu que Jean-Baptiste Rouy, institué héritier général et universel par son père, a accepté purement et simplement la succession de celui-ci ; que dès lors ses frères et sœurs légitimaires sont devenus, à son égard, des créanciers ordinaires ; qu'ils ont donc pu recevoir leur dû de leur frère, sans être tenus au rapport envers les créanciers de leur père» (Req. 2 prair. an 12, M. Vallée, rap., aff. Buisson C. Rouy); — 2o Que le droit de préférence ne peut être exercé contre les légataires, lorsque d'ailleurs l'héritier, devenu leur débiteur personnel, s'est obligé envers eux par un acte postérieur au décès, leur a consenti une hypothèque sur des biens héréditaires, et a laissé prendre ensuite de nouvelles inscriptions en vertu d'une condamnation, tant sur ses biens personnels que sur ceux provenant de la succession (Rej. 6 déc. 1825) (1).

1498. Pour être opposable aux légataires, et donner sur

arrêt de la cour de Caen : « Considérant que, par le fait d'une acceptation pure et simple, l'héritier se trouve personnellement grevé des charges de la succession; qu'il suit de là que les légataires du défunt deviennent créanciers personnels de l'héritier, sans qu'il puisse être fait de distinction entre eux et tous autres qu'il se serait créés, à quelque titre que ce soit; car, si les créanciers du fait de l'héritier l'ont pour obligé, à raison des valeurs qu'ils lui ont fournies, les légataires du défunt l'ont également pour obligé, à raison des valeurs par lui trouvées dans la succession, et qui leur avaient été destinées jusqu'à concurrence de leur legs par la volonté du défunt, valeurs légalement présumées suf fisantes pour faire face à ces mêmes legs, lorsque l'héritier n'a pas usė de la ressource du bénéfice d'inventaire qui lui était ouverte; - Consi dérant que Rouxel a d'autant mieux acquis la qualité de créancier per

eux un droit de préférence aux créanciers de la succession, il faut que la demande en séparation soit formée dans le délai légal, et, par exemple, dans le délai de trois ans, si la succession est mobilière (Rej. 6 déc. 1823, aff. Seillier, no 1497).

1499. A l'égard des immeubles, on a vu suprà, no 1451, qu'il n'y avait point de délai fatal pour la demande en séparation; qu'elle pouvait être formée tant que les immeubles existaient aux mains de l'héritier, et même après l'expiration du délai de six mois, qui n'est prescrit par l'art. 2111 que pour l'inscripfion, et non pour la demande; on a vu aussi suprà, no 1494, que l'inscription n'est requise qu'à l'encontre des créanciers de l'héritier.-Il suit de là, et c'est ce qui résulte d'un arrêt, que les créanciers d'une succession acceptée purement et simplement conservent leur droit de préférence sur les légataires du défunt, pour les immeubles héréditaires détenus encore par l'héritier, bien que les légataires aient pris en temps utile l'inscription exigée

sonnel des héritiers Mauger-Deschenez, que non-seulement il a contre eux leur acceptation pure et simple d'héritiers, mais encore qu'ils se sont obligés envers lui, par acte passé depuis l'ouverture de la succession, au payement de la rente léguée; qu'ils lui ont consenti hypothèque sur des biens héréditaires en s'engageant à maintenir les rentes existantes sur Daigremont-Duvical, et qui devaient répondre du payement de celles qui grèvent les objets donnés en hypothèque; que cependant ils ont disposé d'une portion desdites rentes, au mépris de leur promesse, ce qui a fait obtenir à Rouxel, sur eux, un jugement portant nouvelles hypothèques, tant sur leurs biens personnels que sur ceux provenus de la succession; Considérant que, quels que soient les biens dont il s'agisse de distribuer le prix sur des héritiers purs et simples, les créanciers de la succession ne sont pas fondés, en l'absence de privilége ou hypothèque constitués par les voies ordinaires, à prétendre aucune préférence sur ceux de l'héritier, à moins qu'ils ne puissent recourir au bénéfice de la séparation des patrimoines; Considerant que, dans le procès actuel, en fait, la séparation des patrimoines n'a pas même été demandée par Campion et Seillier; en droit, elle l'aurait été inutilement, puisque la chose dont le prix est à distribuer consiste en rentes qui, d'après leur caractère mobilier, ne sont plus susceptibles, aux termes de l'art. 880 c. civ., d'être l'objet d'une pareille demande, vu que plus de trois ans s'étaient écoulés entre le moment de Fouverture de la succession et celui où la distribution des deniers a eu lieu; Considérant qu'il est impossible à Seillier et Campion de se prévaloir ici de leur qualité de créanciers à titre onéreux de Mauger-Deschenez, par rapport à celle de légataire du même individu, qui appartetient à Rouxel, pour opposer à ce dernier la regle suivant laquelle les légataires ne peuvent rien prétendre sur les biens de la succession, que les dettes ne soient préalablement payées: nihil est in bonis nisi deducto are alieno; Considérant qu'en effet cette règle suppose nécessairement, par son application, que la succession et l'héritier sont restés ou peuvent se trouver replaces dans l'état d'êtres distincts et séparés l'un de l'autre; ce qui n'a pas lieu dans le cas soumis à la décision de la cour, où il n'y a ni acceptation sous bénéfice d'inventaire, par les héritiers Mauger, de la succession de leur auteur, ni séparation de patrimoines possible, et où, par conséquent, il n'existe que des créanciers des héritiers, ayant, sous ce point de vue, des droits absolument égaux entre eux, etc.>>

[merged small][ocr errors]

LA COUR;

Attendu que l'héritier succède in universum jus; que les biens de la succession deviennent les siens propres, compter de l'ouverture de la succession; qu'ils sont, dès ce moment, le gage de tous ses créanciers, sans exception; que si les créanciers de la succession peuvent néanmoins conserver leurs droits particuliers sur ces biens, c'est un privilége que la loi leur accorde comme une conséquence de la maxime non dicuntur bona, nisi deducto aro alieno; mais que ce privilège est subordonné à des formes, et doit être exercé dans un délai déterminé;

Qu'aux termes des art. 878 et 2111 c. civ., les créanciers du defunt sont tenus de demander la séparation des patrimoines, et qu'en matière de meubles la demande doit être formée dans les trois ans, à peine de déchéance; D'où il suit qu'en le jugeant ainsi et en déclarant les demandeurs non recevables à exercer un privilége sur le prix d'une créance mobilière, parce qu'ils n'ont pas formé de demande en séparation de patrimoines, la cour royale, loin d'avoir violé les lois invoquées, a fait la plus juste application des principes de la matière; Rejette.

Du 6 déc. 1823.-C. C., sect. civ.-MM. Desèze, 1er pr.-Larivière, rap.Cahier, av. gen., c. conf.-Guillemin et de Neufvillette, av. (1) (Colin et Perret C. Morel et Doyon.)- LA COUR;-Sur les droits respectifs des créanciers et des légataires: Attendu que si les légataires deviennent les créanciers de l'héritier par le fait de l'acceptation pare et simple de la succession; si, à ce titre, ils ont le droit de se faire

par l'art. 2111, et que les créanciers au contraire n'aient inscrit leur demande en séparation de patrimoines qu'après les six mois (Grenoble 21 juin 1841) (1).

1500. La séparation des patrimoines n'empêche point, comme nous l'avons dit plus haut, la disponibilité des biens de la succession, et dès lors ne peut nuire aux tiers acquéreurs, si l'aliénation est sincère et de bonne foi.

1501. Du reste, le privilége de la séparation des patrimoines jouit, après l'inscription exigée par l'art. 2111 c. nap., de tous les avantages des priviléges, et notamment du droit de suivre les immeubles compris dans le patrimoine frappé de séparation, et par conséquent de surenchérir au cas de vente, encore bien que le surenchérisseur n'eût été, à l'égard du défunt, qu'un simple créancier chirographaire (Orléans, 22 août 1840) (2).

1502. Le même privilége s'étend aux fruits des biens de la

payer par lui, et si les payements ainsi faits ne peuvent être soumis à répétition au profit du créancier du défunt non payé, comme cela existerait en vertu de l'art. 809 c. civ., dans le cas de succession bénéficiaire, la distinction entre le créancier et le légataire se reproduit quand celuici poursuit le recouvrement de ses droits, non contre l'héritier, qui, devenu débiteur personnel, ne pourrait opposer aucune exception à la demande, mais contre le patrimoine de l'hérédité qu'il a fait distinguer du patrimoine du défunt; qu'à l'égard des biens du défunt, le légataire n'a de droit qu'après le payement des dettes, en vertu du principe bona non intelliguntur, nisi deducto are alieno; qu'il ne peut dépendre d'un testa→ teur qui n'a d'actif que ce qui est nécessaire pour l'acquit de ses dettes de grever sa succession de nouvelles charges et contraindre ses créan→ ciers à partager ses dépouilles avec des legataires qu'il lui plairait d'avantager; que c'est le cas d'appliquer la maxime nemo liberalis nisi liberatus; qu'il est donc juste d'accorder à Perret, créancier légitime de Simon Doyon-Châteauvieux, la préférence sur Julie Bourk et son fils, qui ne sont que legataires; - Attendu que ceux-ci ne peuvent objecter qu'il serait inique de les faire primer par Perret, et de décider qu'eux qui ont conservé le patrimoine de Simon Doyon-Châteauvieux, en s'inscrivant dans les six mois du décès, auraient ainsi rendu la condition de Perret meilleure, et que celui-ci, qui a été négligent, profiterait de leur diligence; qu'en effet, ce n'est pas l'inscription de Julie Bourk qui a conservé les droits de Perret; que l'inscription qu'il a prise luimême, quoique postérieure, a suffi pour lui assurer le bénéfice de la sé→ paration de patrimoines sur des immeubles qui n'étaient pas encore sortis des mains de l'héritier; qu'en supposant que Julie Bourk n'eût pris au→ cune inscription, Perret n'en aurait pas moins les mêmes droits contre les créanciers de l'héritier, en vertu de la sienne propre, sauf le cas d'hypothèque inscrite ou dispensée d'inscription, qui primerait la sienne. hypothèque sur laquelle les droits des parties demeurent réservés, ainsi qu'il est énoncé précédemment.

Du 21 juin 1841.-C. de Grenoble, 1r ch.-M. Legagneur, 1or pr. (2) (Boulay C. Bizot.) — La cour ; —Attendu que l'effet général d'un privilege ou d'une hypothèque inscrite est de donner sur le bien hypothéqué un droit sur la chose jus in re, le droit de la suivre dans quelques mains qu'elle passe, et par suite, de surenchérir en cas de vente pour obtenir le prix véritable du bien vendu ;- Que vainement on prétendrait que ces mots : privilége et inscription, n'ont pas dans Fart. 2111 le sens et la portée que la loi leur attribue dans ses autres disposi tions sur cette matière; Qu'en effet, si l'on doit admettre difficilement que le législateur a méconnu la valeur des mots qu'il emploie, cette supposition devient surtout inadmissible lorsque, comme dans l'espèce, les mots privilége et inscription se trouvent placés dans un titre special qui s'occupe des priviléges, hypothèques et inscriptions, et de la manière de conserver ces priviléges: lorsque le mot inscription est employé dans l'art. 2111, en présence de la disposition qui interdit toute inscription hypothécaire aux tiers pendant la durée des six mots accordés pour délibérer aux créanciers du défunt, et qu'on ne comprendrait pas que la loi eût employé dans le même article le même mot en y attachant des significations différentes;

Attendu, d'ailleurs, que, considérés dans leur esprit, les art. 2111 et 2115 ne sont que la sanction nécessaire et équitable du droit concédé aux créanciers du défunt par les art. 878 et 880, au titre des successions; Qu'en accordant la séparation des patrimoines, le législateur a dû vouloir aussi que ce droit ne restât pas stérile entre les mains de ceux à qui il le concédait; Que pour cela il a déclaré que, par l'effet de la séparation des patrimoines, la succession du défunt devenait le gage exclusif de ses créanciers, même chirograpbaires, et que l'héritier n'en était plus que le dépositaire; - Que, pour qu'un gage profite à celui qui l'obtient, il faut lui reconnaître le droit de le suivre en quel ques mains qu'il passe; Que, par l'inscription, les tiers sont avertis de cet état de choses comme ils le sont par toute autre inscription hypothécaire; - Que dès lors, comme toute autre inscription, celle prescrite

succession, mais non toutefois aux fruits naturels et civils produits avant la demande en séparation : ces fruits se sont confondus, par la perception, dans les biens personnels de l'héritier; ils n'ont d'ailleurs jamais fait partie du patrimoine du défunt, n'étant échus que depuis l'ouverture de la succession (Grenier, po 436). — Jugé que le privilége de séparation s'étend aux fruits des immeubles qui en sont affectés, et, par exemple, aux fermages, bien, que sur la sommation des créanciers personnels de l'héritier bénéficiaire, ils aient été déposés par les fermiers à la caisse des consignations (Caen, 26 avr. 1842, aff. Tardif, D. P. 51. 2. 236).

ART. 1.

[blocks in formation]

Du droit de demander le partage, et des restrictions dont ce droit est susceptible.

1503. « L'indivision, dit M. Chabot, ne convient ni à nos habitudes, ni à notre régime; elle met des entraves à l'exercice du droit de propriété, et n'est le plus souvent qu'un sujet de discorde entre les copropriétaires. » La loi romaine signale aussi l'indivision comme une source de querelles, qu'il est de l'intérêt public de prévenir : Quas sedare publicè interest, ut concordia potiùs inter cives retineatur, quo potissimùm vinculo reipublicæ salus contineatur, quæ suprema lex semper esse debet (L. 77, ff., De leg., 2o). Cette considération a plus d'autorité encore entre parents, l'union des familles étant la principale base de l'ordre social, et les dissensions domestiques portant un caractère particulier d'immoralité, qui produit le scandale. De là le principe, écrit dans l'art. 815 c. nap., également admis par les lois romaines (L. 14, § 2, ff., Communi divid.), et notre

-

par l'art. 2111, prise dans la même forme, doit conserver au créancier inscrit le droit de suite et de surenchère, aux termes de l'art. 2185, dont les dispositions sont générales et applicables à tout créancier dont le titre a été dûment inscrit ; Que cette inscription ne produirait pas un effet utile si l'héritier pouvait aliéner, si les tiers pouvaient acquérir le gage des créanciers du défunt, malgré leur inscription; - Que l'on ne comprendrait pas comment cette inscription, prise dans le délai de la loi, primerait celles prises antérieurement par les créanciers de l'héritier, ainsi que l'ordonne le § 2 de l'art. 2111, et ne serait cependant pas une véritable inscription quant à ses effets; Que c'est à tort qu'on veut expliquer cette contradiction qu'on introduirait ainsi dans la loi en alléguant que, d'après l'art. 880, l'héritier peut vendre, puisque la demande en séparation n'est admise qu'autant que les biens existent dans ses mains; Qu'en effet, il résulte seulement de cette disposition que, dans ce cas comme dans tous les autres, l'héritier, propriétaire jusqu'à a demande, peut aliéner, que les tiers de bonne foi peuvent acquérir, mais aussi que du jour de l'inscription et de la demande il ne peut vaablement aliéner un bien frappé d'hypothèque ; Qu'il en est ainsi our toute propriété soumise à une hypothèque non encore inscrite, et qui peut être valablement aliénée sans secours contre les tiers;

Attendu que l'on ne doit pas s'arrêter davantage aux objections tirées de ce que la préférence établie par l'art. 2111 n'est pas comprise parmi les priviléges énumérés dans l'art. 2105, et de ce que la condition des créanciers chirographaires du défunt ne doit pas être améliorée; · Que, sur le premier point, il faut considérer que l'art. 2103 n'est point tellement limitatif qu'il n'admette pas d'autres priviléges que ceux qu'il énonce, et qui peuvent résulter d'autres dispositions de la loi, et qu'il serait étrange que le législateur eût oublié cette limitation absolue lorsque, dans un article subséquent, il qualifie du nom de privilège la préférence qu'il accorde aux créanciers du défunt;

Attendu, quant à l'autre objection, que la position du créancier chirographaire qui a demandé la séparation de biens est, par ce seul fait, améliorée, puisqu'il obtient, d'après l'art. 2111, le droit de prendre inscription en vertu d'un titre sous seing privé, ce qu'il ne pouvait pas faire avant cette demande; Que, si sa position reste la même vis-àvis des créanciers du défunt, elle est évidemment meilleure vis-à-vis des créanciers de l'héritier, puisqu'il a droit de primer, s'il s'incrit dans les six mois, leurs inscriptions, même celles prises avant la sienne; Que, vis-à-vis d'eux, il est comme s'il avait un titre authentique ; Qu'à leur égard, au moins, cette inscription, prise en vertu d'un acte privé et par exception à l'art. 2127, a la même force que l'inscription prise par un autre créancier du défunt muni d'une lettre authentique; Qu'on ne saurait prétendre que celui-ci, en vertu de son titre authentique, n'ait pas, après son inscription prise dans les termes de l'art. 2111, un droit de suite sur les immeubles hypothéqués; qu'il faut donc arriver aussi à cette conséquence que l'inscription du créancier

[ocr errors]

ancienne jurisprudence (Lebrun, liv. 4, tit. 1): « Nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision; et le partage peut être toujours provoqué, nonosbstant prohibitions et conventions contraires. >> Jugé que le principe selon lequel nul n'est tenu de demeurer dans l'indivision n'est point applicable au cas où le propriétaire d'une usine est assigné en destruction des innovations par lui faites sur un canal commun avec le demandeur. Cette action ne peut être considérée comme une demande en partage des eaux de ce canal; dès lors elle a pu être rejetée sans violation de l'art. 815; - «Attendu que le demandeur n'a point exercé une action en partage d'une chose indivise, mais que sa demande avait pour objet de faire réduire la masse d'eau employée par son adversaire et de le faire condamner à détruire les travaux destinés à retenir les eaux d'un canal; Qu'ainsi l'art. 815 c. nap. était étranger à la contestation;-Rejette (Req. 3 avril 1838, MM. Zangiacomi, pr., Jaubert, rap., aff. Bonnet C. Etienne).

1504. Puisque le partage peut être toujours provoqué, nonobstant prohibitions et conventions contraires, le testateur l'interdirait vainement à ses héritiers, du moins d'une manière perpétuelle (C. nap. 900). — Jugé qu'il en était de même sous l'empire des lois romaines (Liége, 20 therm. an 13, aff. Goër C. Grumsel)-C'est ainsi que sous le code nap. la condition de rester en communauté imposée par le communiste à celui qu'il institue légataire de ses droits dans la communauté, a été réputée non écrite (Aix, 10 mai 1841) (1).

1505. Pareillement il a été jugé 1o que le partage d'un bien indivis doit être ordonné, nonobstant la clause d'une transaction (antérieure au code nap.) qui aurait pour but de consacrer l'indivision entre les communistes (Req. 9 mai 1827) (2); 2° Que la clause d'un acte de partage de biens immeubles qui a pour ef

-

chirographaire doit produire, dans ce cas, le même effet; Que la préférence accordée est donc un véritable privilége dans le sens legal de co mot, et doit en produire tous les effets;-Confirme, etc.

Du 22 août 1840.-C. d'Orléans.-MM. Travers de Beauvert, 1er pr. (1) (Augier C. Maintenon.) LA COUR;- Attendu qu'Augier ayant, en vertu du testament de son oncle, la moitié de la nue propriété des biens meubles qui sont l'objet du procès, il est à ce titre communiste de l'intimé, à qui appartient l'autre moitié desdits biens; qu'il a donc droit d'en réclamer le partage, aux termes de l'art. 815 c. civ.; que ce droit de sortir de l'indivision est au nombre de ceux que la loi déclare inseparables de la propriété; Qu'aucune convention ni prohibition ne pouvant en dépouiller le propriétaire, il est inutile d'examiner si Maintenon a eu l'intention d'attribuer cet effet prohibitif du partage à une clause quelconque de son testament, puisqu'en le supposant ainsi, il aurait voulu une chose contraire à la loi et cette volonté serait sans valeur; - Par ces motifs, ordonne que le partage des facultés mobilières de la communauté légale qui a existé entre Maintenon et sa femme sera faite aux formes de droit, etc.

[ocr errors]

[ocr errors]

Du 10 mai 1841.-C. d'Aix.-M. Pataille, 1er pr. (2) Espèce : (Barde C. Françon.) Barde et Françon étaient propriétaires indivis d'un terrain. Le 26 nov. 1822, Françon actionne Barde en bornage de quelques propriétés contigues, et en partage du terrain indivis; il demande que la partie du terrain à partager, sur laquelle il a fait bâtir une écurie, tombe dans son lot. Barde déclare que l'indivision de ce terrain est consacrée par une transaction du 4 août 1752; que néanmoins il ne s'oppose point au par ag, s'il peut avoir lieu sans inconvénient. 31 mars 1823, jugement interlocutoire qui reconnait à Françon le droit de faire cesser l'indivision du terrain commun; ordonne que les experts nommés, après avoir vérifié si le terrain peut être commodément divisé, en formeront deux parts égales, dont l'une pour Françon et l'autre pour Bårde. 13 juin suivant, rapport des experts dans lequel ils fixent les passages qui doivent rester indivis, et indiquent les lots de chaque copartageant. Barde demande le rejet de ce rapport, et conclut à ce que, par application du titre du 4 août 1752, le terrain soit déclaré insusceptible de division, attendu qu'un partage qui le priverait du droit d'étendre sur ce terrain les feuilles de la litière, des vers à soie et des lessives, lui porterait le plus grand préjudice. Le 10 mai 1824, jugement qui homologue le rapport des experts, et investit chacun des copartageants du lot que les experts lui ont assigné. Les principaux motifs de ce jugement sont qu'avant le jugement du 31 mars, Barde avait déclaré ne pas s'opposer au partage; que, lors de l'opération des experts il avait fait observer que le lot du nord, à cause de sa pente, devait avoir une plus grande contenance que celui du midi et qu'il consentait à laisser à Françon le hangar par lui construit sur le terrain indivis; qu'ainsi, ayant acquiescé au jugement interlocutoire, il ne pouvait se prévaloir de l'acte de 1752; que, d'ailleurs, on ne pou

« VorigeDoorgaan »