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violence faite à l'instinct dont la nature les a pourvus.

» Columbarum fera natura est, dit la loi 5, $5, D. de acquirendo rerum dominio. Et il n'importé, ajoute-t-elle, qu'ils soient dans l'habitude de revenir au Colombier : cette habitude ne leur fait pas plus perdre le caractère d'animaux sauvages que ne le fait perdre aux abeilles l'instinct qui les fait revenir à leurs ruches : Non ad rem pertinet quod ex consuetudine avolare et revolare solent: nam et apes idem faciunt, quarum constat feram esse naturam.

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>> Attendu que les tribunaux de police ne peuvent connaître que des faits auxquels la foi attribue le caractère de contravention, et dont elle soumet les auteurs à des peines ;

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Que l'article cité de la loi du 4 août 1789, qui veut que les pigeons soient enfermés aux époques fixées par les communautés, que durant ce » C'est même parce que les pigeons sont, comme temps ils soient regardés comme gibier, et que les lapins, des animaux sauvages et non sujets à chacun ait le droit de les tuer sur son terrain, est être gardés à vue, que l'art. 564 du Code civil dé- restreint à cette mesure répressive; qu'il ne qualifie clare que, lorsqu'ils passent dans un autre Co- pas de délit ou de contravention le fait du prolombier ou garenne, ils appartiennent au pro- priétaire qui laisserait sortir et vaguer ses pigeons priétaire de ces objets, pourvu qu'ils n'y aient dans le temps prohibé, et qu'il n'attache à ce fait point été attirés par fraude et artifice. aucune sorte de peine; que, si de la combinaison Qu'on ne dise de la loi du 28 septemau reste, que, si les pi- des art. 3 et 12, tit. 2, pas, geons ne sont pas compris dans l'art. 12 du tit. 2 bre 1791, il résulte que les dégâts causés par les de la loi du 28 septembre 1791, sous la dénomi- bestiaux de toute espèce laissés à l'abandon, sont nation de bestiaux laissés à l'abandon, ils classés parmi les délits ruraux, il est évident que, au moins compris sous la dénomination de vo- sous la dénomination de bestiaux, ne sont comlailles. La dénomination de volailles n'a jamais pris que des quadrupèdes domestiques; que ces convenu aux pigeons : elle a toujours été res- expressions, bestiaux laissés à l'abandon, ne peutreinte aux poulets, aux canards, aux dindons, aux vent s'appliquer à des oiseaux tels que les pigeons, oies, en un mot, aux oiseaux domestiques, ou, qui, voués en quelque sorte, par leur nature et d'autres termes aux oiseaux sur lesquels le pro- par leur instinct, à la divagation, ne sont pas priétaire conserve tous ses droits, lors même qu'ils susceptibles d'ètre gardés à vue, et ne sauraient cons'échappent au loin et passent dans une autre habita- séquemment jamais être considérés comme laissés tion, où ils n'ont été attirés par aucun moyen illicite. à l'abandon; que, si les pigeons ne peuvent être » Témoin le Dictionnaire de l'académie fran- rangés dans la classe des bestiaux dont parle l'arçaise, qui définit ainsi le mot volaille : « Nom col- ticle 12 de la loi de 1791, il n'est pas plus permis »lectif qui comprend des oiseaux qu'on nourrit de les supposer compris dans le même article, sous >> ordinairement dans une basse-cour. »> la dénomination de volailles, dénomination qui ne s'applique à d'autres animaux qu'aux oiseaux que l'on tient en état de domesticité, à des oiseaux de l'espèce de ceux qu'on élève et qu'on nourrit dans les basses-cours; qu'il suit de ces observations, que, dans l'espèce, Piel était sans motifs légitimes pour traduire Desguez à la police, à raison du dommage qu'il a pu éprouver par un fait auquel la loi n'attache pas le caractère de contravention; qu'en prononçant sur cette demande de Piel, et en condamnant Desguez à l'amende et aux dépens pour sa prétendue contravention, le tribunal de police de Senonches a manifestement violé les règles de compétence, donné une extension arbitraire à l'art. 2 de la loi du 4 août 1789, contrevenu à l'art. 136 du Code d'instruction criminelle, et fait une fausse application de l'art. 12, tit. 2, de la loi du 28 septembre 1791;

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» Aussi la loi elle-même, dans l'article dont il s'agit, applique-t-elle formellement à ce qu'elle dit des volailles, la même restriction qu'à ce qu'elle dit des bestiaux. Après avoir parlé des dégâts causés par les bestiaux laissés à l'abandon, elle ajoute: si ce sont des volailles qui causent le dommage...., et il est évident que c'est comme si elle disait : Si les bestiaux laissés à l'abandon, sont des volailles, etc. Elle ne s'occupe donc que des oiseaux laissés à l'abandon; et assurément on ne peut pas être censé laisser à l'abandon des oiseaux que l'on n'est pas tenu de garder à vue.

» Ce considéré, il plaise à la cour, vu l'art. 441 du Code d'instruction criminelle, l'art. 2 des lois du 4 août 1789 et l'art. 12 du tit. 2 de la loi du 28 septembre 1691, casser et annuler, dans l'intérêt de la loi et sans préjudice de son exécution à l'égard des parties intéressées, le jugement du tribunal de police du canton de Senonches ci-dessus mentionné, et dont expédition est ci-jointe; et ordonner qu'à la diligence de l'exposant, l'arrêt à intervenir sera imprimé et transcrit sur les registres dudit tribunal.

» Fait au parquet, le 16 octobre 1813. Signé Merlin.

RÉPERTOIRE. Ve EDIT. TOM. 3.

D'après ces motifs, la cour casse et annulle, dans l'intérêt de la loi..........»

XV. Les pigeons qui sont dans un Colombier à pied, sont réputés immeubles, parce qu'ils sont regardés comme faisant partie du Colombier; mais les pigeons de volière sont meubles.

[[L'art. 524 du Code civil met les pigeons des Colombiers au rang des immeubles par destination

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qand ils ont été placés par le propriétaire pour le service et l'exploitation du fonds.

Mais qu'entend-il par Colombier? Restreint-il la signification de ce mot aux retraites à pigeons qui forment des bâtiments séparés, et ont des boulins dans toute leur hauteur? Je ne le pense pas; et je crois qu'il est dans l'esprit de cet article, de réputer immeubles tous les pigeons que le propriétaire est dans l'habitude de laisser sortir à leur volonté. V. ce que j'ai dit ci-dessus, no 11, sur l'art. 2 des lois du 4 août 1789.1]

XVI. Il est défendu de dérober des pigeons d'autrui, soit en les attirant par des odeurs qu'ils aiment, ou par d'autres appâts, soit en les prenant avec des filets ou autrement.

Il est pareillement défendu à tout particulier de tirer sur des pigeons, même sur les siens, parce que, sous prétexte de tirer sur ses propres pigeons, qu'il est fort difficile de reconnaître, on pourrait tirer sur ceux d'autrui. « Défendons (porte l'ar»ticle 12 de l'ordonnance de Henri IV du mois » de juillet 1607) à toutes personnes, de quelque » état ou condition qu'elles soient, de tirer de l'arquebuse sur des pigeons, à peine de 20 livres pa»risis d'amende. »

>>

[L'ordonnance déjà citée des archiducs Albert et Isabelle, du 31 août 1613, contient, sur cette matière, plusieurs dispositions que voici :

« Art. 89. Item défendons à tous de prendre pigeons, avec fausses trapes ou autres instruments pareils, ni d'en avoir en leur maison, à peine de fourfaire lesdites trapes ou autres instruments, et de 10 royaux d'amende.

» 90. Item que personne ne s'advance de tirer aucuns pigeons sur les Colombiers ou près d'iceux, à peine de fourfaire 10 royaux d'amende, et les arquebuses ou instruments avec lesquels ils seront tirés ou prins; ni aussi prendre ou tirer lesdits pigeons aux champs, à peine de fourfaire 6 royaux d'amende, et des arquebuses ou instruments comme dessus est dit.

» 91. Item que personne ne s'advance de prendre pigeons d'autrui par mansards, gasteaux ou autres engins par lesquels ils pourraient être affichés, à peine de fourfaire tels mansards, gasteaux et engins, et 10 royaux d'amende, et outre ce, 10 royaux d'amende pour chaque pigeon que l'on saura montrer avoir ainsi été attrapé.

92. A laquelle fin les officiers de nos commis pourront, toutes et quantes fois qu'ils auront soupçon de mésus, entrer en tous Colombiers comme ils ont fait et pu faire du passé, pour voir ce qu'ils penseront y être fait au contraire de cette notre ordonnance.

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pour mulctes et amendes, nous avons, par certain notre placard du 28 d'août 1606, déclaré et déclarons derechef qu'un royal d'amende sera payé à la valeur de 26 sous et 2 places de notre duché de Brabant, faisant 26 patards et deux tiers. »

[[ Du reste, les pigeons qui, sans avoir été attirés par fraude et artifice, passent dans un autre Colombier, appartiennent, dès ce moment, au propriétaire de celui-ci. C'est la disposition de l'art. 564 du Code civil. ]]

XVII. On a agité la question de savoir si une veuve qui a droit d'habitation dans un château, a aussi le droit de jouir du Colombier et des poissons des fossés. Les héritiers du mari qui contestaient ce dernier droit à la veuve, prétendaient que les pigeons du Colombier et les poissons des fossés, étaient des fruits qu'on ne devait point comprendre avec l'habitation que le contrat de mariage de cette veuve lui avait attribuée dans le château; mais l'arrêt qui intervint, et qui est rapporté par Montholon, jugea en faveur de la veuve. V. Ġibier. (M. GUYOT.)*

[[COLONAT. C'est un genre de possession fort commun en Allemagne.

I. On y appelle Colonats des terres qui ont été concédées à des paysans, 1o moyennant des charges personnelles qui sont des restes de leur ancienne servitude, et des redevances réelles en argent ou en deniers; 2o sous la condition de ne pouvoir être aliénées sans le consentement du seigneur, de n'être transmissibles qu'à un seul héritier, et de retourner au seigneur en cas d'extinction de la descendance du concessionnaire.

II. Quelques jurisconsultes allemands, et notamment Strube (de jure villicorum, chap. 2, § 7), ont soutenu que les colons n'avaient pas le domaine utile des biens qu'ils tenaient en Colonat, et qu'on ne devait les considérer que comme des fermiers.

Mais d'autres, tels que Stryck et Schiller, ont combattu cette opinion avec avantage. Il est impossible, ont-ils dit, que celui qui a le droit de transmettre un bien à ses descendants, n'en soit pas le propriétaire. Qu'importe que le Colonat soit inaliénable? Les biens substitués le sont également, et le grevé de substitution n'en a pas moins la propriété de ces biens. Qu'importe que le Colonat soit affecté à un seul des héritiers du colon, et qu'il ne puisse être morcelé par un partage entre eux? Il a cela de commun avec beaucoup de substitutions. Qu'importe qu'en cas d'extinction de la ligne directe du colon, le Colonat se réunisse, dans la main du seigneur, au domaine direct qu'en avait conservé celui-ci? Les fiefs aussi retournent au seigneur à la mort du vassal décédé sans héritiers appelés par l'investiture primitive, et le vassal n'en est pas moins propriétaire.

Les lois allemandes consacrent expressément cette opinion. Un édit du duc Ernest-Auguste de Hanovre, de 1691, qualifie le colon de proprié

taire, des eigenthums herr. L'ordonnance politique de Celle (ordinatio politica Cellensis), chap. 44, § 2, déclaré que les colons possèdent à titre de propriété les biens qui composent les Colonats. Enfin, l'ordonnance de Brême (Reichsordnung), chap, 9, § 9, oblige les colons, comme ayant le domaine utile et comme vrais possesseurs du fonds, à l'entretien des digues qui se trouvent

dans l'étendue de leurs terres.

III. Le Colonat étant incompatible avec les principes du Code civil, a dû disparaître des parties de l'Allemagne où le Code civil a été successivement mis en activité.

Et en effet il a été d'abord supprimé, sans la moindre opposition, dans les départements de la Roer, de la Sarre, de Rhin et Moselle, et du Mont-Tonnerre.

Il l'a été ensuite dans le grand-duché de Berg et dans les pays d'Erfurt, de Fulde, de Hanau et de Bayreuth, par un décret du 12 décembre 1808, que l'on peut voir dans le Moniteur du 25 du

même mois.

Il l'a été enfin dans les départements de l'EmsSupérieur, des Bouches du Weser et des Bouches de l'Elbe, par le décret du 9 décembre 1811, dont voici les dispositions sur cette matière :

« TIT. 3. Des Colonats. (Meier-recht, Erbmeir, Erbleihe, Erbzinsguter.) Art. 99. Les colons jouiront, à titre de propriété pleine et entière, du Colonat et de toutes ses dépendances, sous les réserves et distinctions portées aux articles qui suivent, relativement au bois de construction et de haute-futaie; le tout à la charge d'indemnité envers le bailleur.

» 100. Les colons conserveront, à titre de propriété, tous les bois de construction et de hautefutaie dépendants du Colonat, et dont ils ont eu seuls la jouissance jusqu'à ce jour.

Ils auront également la propriété pleine et entière, et sans avoir égard aux rapports qui existaient ci-devant entre eux et le seigneur, de tout le bois de construction et de haute-futaie qui se trouve dans l'enclos de la ferme, et répandu isolément sur les terres du Colonat.

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101. S'il se trouve des bois de construction et de haute-futaie dépendant du Colonat, autres que ceux désignés à l'article précédent, et dont la jouissance ait été commune entre le seigneur et le colon, ou pour lesquels il ait été réservé que l'un ne pourrait pas faire des coupes sans le consentement de l'autre, ces bois seront partagés par portions égales entre le seigneur et le colon.

» 102. Si le seigneur a eu seul le droit de procéder aux coupes des bois de construction et de futaie compris à l'article précédent, à la charge de fournir au colon la quantité de bois nécessaire pour l'entretien des bâtiments, les clôtures et entourages, et pour les instruments aratoires, le sol et les bois seront partagés, savoir: deux tiers au seigneur et un tiers au colon.

» 103. Le partage aura lieu dans les mêmes pro

portions pour le sol et le bois accru à la superficie, si le colon avait seulement la jouissance de tout ou partie de la glandée.

104. Les forêts qui contiennent en même temps des bois de construction et de haute-futaie, et des bois taillis, seront partagées de manière que le seigneur obtienne la propriété d'une partie de sol et de bois, sans distinction d'espèce, proportionnée à la valeur du bois de haute-futaie et de construction que produit la forêt entière; et le colon, la propriété de l'autre partie de sol et de bois, proportionnée à la valeur du bois taillis.

» 105. L'indemnité mentionnée en l'art. 99, sera réglée de gré à gré entre les deux parties, ou suivant une estimation d'après le mode déterminé par les art. 71, 72, 73 et 74 ci-dessus (1), et en calculant 10, les chances de retour plus ou moins favorables qui existaient en faveur du seigneur, l'époque de l'estimation; 2o les charges dont le colon était grevé envers le seigneur, à raison du Colonat.

à

S'il s'élève des contestations, il sera procédé comme il est dit aux art. 54 et 55 (2).

» 106. L'indemnité une fois déterminée, il en sera passé reconnnaissance devant notaire ; une grosse dudit acte sera remise au seigneur, aux frais du colon.

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» 107. Jusqu'à ce que l'indemnité soit payée, le seigneur conservera sur le Colonat, au moyen d'une inscription faite conformément au livre 3 tit. 18, chap. 4, du Code civil, le même privilége que l'art. 2103 dudit Code accorde au vendeur ou bailleur de fonds.

(1) Ces articles sont ainsi conçus :

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71. Pour le rachat des dîmes ou autres redevances proportionnelles qui consistent en une portion des fruits récoltés sur le fonds, si les parties ne peuvent s'arranger de gré à gré, il devra être fait, par des experts, un rapport constatant la quantité de grains, pailles, denrées et animaux que la redevance peut produire année commune, en supposant que les terres sont cultivées sans travail ni dépenses extraordinaires, mais, selon la coutume du pays, avec les alternats et assolements d'usage.

72. Ces experts seront nommés dans la quinzaine de la signification des offres de rachat, l'un par les redevables, l'autre par le propriétaire, le troisième par les deux parties de concert, et à défaut, par le président du tribunal de première instance.

73. Les frais d'expertise seront à la charge des redevables, à moins qu'ils n'aient fait antérieurement, au propriétaire, des offres suffisantes par lui refusées, et justifiées par le rapport des experts, auquel cas, tous les frais seront à la charge du propriétaire.

74. Le produit annuel ainsi déterminé, le rachat aura lieu comme de redevances en nature, sur le pied de vingtcinq fois le produit.

(2) Voici les termes de ces articles :

54. Si les parties ne peuvent se régler de gré à gré, le juge-de-paix de son domicile, en la forme et de la manière redevable fera citer le propriétaire en conciliation devant le établies par le Code de procédure civile.

55. Si le juge-de-paix ne peut les concilier, il les réglera définitivement sans appel ou à la charge d'appel, lorsque le capital du rachat n'excédera par sa compétence sous l'un on l'autre de ces rapports; autrement, il les renverra devant les tribunaux.

» 108. Quant au privilége pour les arrérages échus lors de la publication du présent décret, l'art. 50 ci-dessus (1) est déclaré commun aux Colonats.

» 109. Le colon ne sera point tenu de rembourser au seigneur le montant de ladite indemnité, tant que le bien restera dans son intégrité entre ses mains : il suffira qu'il paie l'intérêt à quatre pour cent, lequel commencera à courir de la publication du présent décret.

110. Il en sera de même de l'héritier du colon, si cet héritier est un de ses descendants en ligne directe, et de plus sous la condition portée au précédent article.

» 111. Aussitôt que le bien sera divisé entre les héritiers, quels qu'ils soient, ou que le bien, même sans être divisé, passera entre les mains de tout autre que celui qui a droit de recuillir, le capital composant l'indemnité sera exigible par le seigneur.

112. Dans l'année du jour où le capital composant l'indemnité sera devenu exigible, le colon ou ceux qui le représentent, seront tenus d'en faire l'offre au propriétaire.

>> Les frais de cette offre, et tous autres qui peuvent en être la suite, seront à la charge du colon. >> Faute d'avoir satisfait à la présente disposition dans le délai prescrit, le colon sera passible de tous dépens, dommages et intérêts. >>

V. Corvées, Fief, sect. 2, § 6; Dime, Rente seigneuriale, Champart, Terrage, etc. ]]

* COLONIE. Réunion d'hommes sortis d'un pays pour en peupler un autre.

[[§ 1. Idée générale des Colonies. Régime des Colonies françaises avant 1791. ]] I. Tyr et Carthage ont fondé différentes Colonies, où les vaisseaux fatigués d'une longue navigation faisaient réciproquement leurs échanges. Rome en établit pour assujettir les peuples qu'elle conquérait et pour récompenser ses soldats; les barbares envahirent plusieurs contrées où ils s'établirent; mais toutes ces anciennes Colonies diffé. raient de celles qui ont été la suite de la découverte de l'Amérique.

Les premiers colons des îles de l'Amérique furent des aventuriers exilés de leur patrie, par l'inquiétude que fait naître l'ambition ou la misère : d'abord soldats et navigateurs heureux, ils devinrent bientôt des dévastateurs redoutables. Après avoir saccagé les huttes des sauvages, ils se jurèrent entre eux des haines implacables, qui furent suivies des plus grandes atrocités : ils se divisèrent en bandes, sous le nom de flibustiers, et ne connurent plus d'autre frein que la subordination inspi

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rée par l'intrépidité de leur chef. La seule loi convenue et observée fut le partage égal du butin. I. Soumises en même temps à des compagnies commerçantes, qui, sans faire des avances suffisantes, voulaient retirer beaucoup et promptement, les îles de l'Amérique furent long-temps victimes de priviléges exclusifs.

Lors de la révocation de la dernière de ces compagnies, en 1674, toute la puissance de l'administration se trouvait entre les mains des deux gouverneurs lieutenants-généraux que le roi envoie, l'un dans les îles du vent, l'autre dans les iles sous le vent. Les premiers de ces chefs militaires furent des citoyens vertueux, qui n'employèrent leur autorité que pour la prospérité des établissements naissants; mais les abus que quelques-uns de leurs successeurs ont fait de cette autorité , ont obligé le roi à la limiter aux troupes réglées en garnison dans les Colonies, aux escadres françaises qui naviguent dans les mers de l'Amérique,aux habitants classés en compagnies de gardescôtes ou de milice, et aux vaisseaux marchands qui abordent dans les ports des Colonies. L'arrêt du conseil d'état du 21 mai 1762 et l'ordonnance du 1 février 1766 prescrivent à ces chefs de prêter main-forte pour l'exécution des jugements civils, et leur défendent de connaître de l'administration de la justice.

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Les gouverneurs lieutenants-généraux ont sous leurs ordres des commandants en second, à SaintDomingue, à la Martinique, à la Guadeloupe et à Cayenne, qui doivent y faire exécuter les ordonnances du roi et les ordres du lieutenant-général, et qui ne doivent se mêler du gouvernement que mais qui n'ont aucune autorité sur les habitants, quand le gouverneur le leur permet, ou qu'il est hors d'état de remplir ses fonctions.

A ces commandants en second, sont subordonnés des commandants de quartier pour veiller plus particulièrement à l'exécution des ordres du gouverneur lieutenant-général, et lui rendre compte de tout ce qui intéresse la sûreté et la tranquillité de leur commandement.

Les commandants des Colonies exercent les fonctions municipales relatives aux chemins, aux corvées, aux recensements, etc., quoique l'article 96 de l'ordonnance du roi du 24 mars 1763 suppose qu'il existe des officiers municipaux dans les Colonies.

Il est vrai qu'il en a été établi à Saint-Domingue, sous le nom de syndics, par l'ordonnance du gouverneur lieutenant-général et de l'intendant, enregistrée le 27 juin 1763 dans les deux conseils souverains de Léogane et du Port-au-Prince; mais ces syndics ont été remplacés par les commandants et par d'autres officiers, lors du rétablissement des milices, en 1768, sans cependant avoir été supprimés par une déclaration du roi, et quoique l'ordonnance des milices ne contienne aucune disposition générale ou particulière qui attribue aux commandants les fonctions municipales.

Les milices avaient été réformées en 1764, comme peu propres à servir utilement à la défense extérieure de la Colonie, attendu que de simples milices ne peuvent être bien disciplinées ni formées aux exercices militaires, sans ruiner entièrement la culture des terres, et que la prodigieuse étendue et le facile abord des côtes des Colonies ne permettent pas même d'espérer qu'on puisse jamais empêcher l'ennemi de s'y introduire, quelques mesures que l'on prenne à l'intérieur, si on ne lui oppose des troupes réglées, et si les Colonies ne sont protégées au dehors par des forces maritimes qui éloignent les vaisseaux ennemis. Mais les milices ont été rétablies en 1768, afin de maintenir la police intérieure, de prévenir la révolte des esclaves, d'arrêter les courses des nègres fugitifs, d'éloigner les nègres marrons, d'empêcher les attroupements, de protéger le cabotage et de garantir les côtes contre les corsaires.

Ces milices sont divisées en compagnies d'infanterie et en compagnies de cavalerie; le nombre des compagnies de cavalerie est relatif à la facilité que l'on a dans chaque île de se procurer et d'entretenir des chevaux ; celui des compagnies d'infanterie est proportionné à la population de chaque

Colonie.

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Tous les colons, depuis quinze jusqu'à cinquante-cinq ans, sont assujettis au service des milices, excepté les officiers de guerre et de justice ayant commission, brevet ou ordre de sa majesté. Dans les Colonies sous le vent, la noblesse n'est point exempte de la milice; mais elle ne peut être assemblée qu'en cas de guerre ou d'attaque: les ordonnances veulent qu'il soit établi dans chacune des îles du vent, une compagnie de gentilshommes, qui s'assemblent en temps de paix tous les ans une fois, et pendant la guerre, lorsque le gouverneur le juge à propos. Mais les articles 23, 24 et 28 de l'ordonnance de 1768 obligent les miliciens roturiers des Colonies à passer, en temps de paix, huit revues par an, dont quatre particulières ou des paroisses doivent être faites, de trois mois en trois mois, par les capitaines commandants; deux générales ou de quartier, de ix en six mois, par les commandants de quartierĮ; et deux autres, aussi de six en six mois, par le gouverneur lieutenant-général ou l'un des commandants en second..

Les milices ne font aucun exercice; mais les gardes-côtes se rassemblent de temps en temps pour s'exercer à tirer au blanc; les autres miliciens montent la garde chacun à leur tour, à moins qu'ils ne s'en rachètent en fournissant deux hommes pour chaque nombre de vingt noirs qu'ils possèdent.

Enfin, par l'art. 39 de la même ordonnance, il a été créé des compagnies de milice de mulâtres et nègres libres, pour la chasse des nègres marrons et des déserteurs, et pour la police des quartiers. Leur service est très-analogue à celui de la maréchaussée des Colonies.

La première maréchaussée des Colonies fut éta

blie par l'arrêt du mois de mars 1705. Il ordonnait qu'il serait entretenu six hommes dans chaque quartier, pour faire la recherche des nègres fugitifs; qu'il serait payé annuellement 300 livres à chacun par les maîtres des esclaves qu'ils rameneraient;que le prix des nègres qui seraint tués dans ces chasses, serait remboursé à leurs maîtres; et qu'enfin, les fonds nécessaires au paiement des appointements et au remboursement du prix des nègres tués, se feraient par une capitation sur les esclaves, dont chaque habitant fournirait le dénombrement. Ces dispositions ont été confirmées par un règlement de 1743, qui, en augmentant le nombre des brigades de la maréchaussée, la charge particulièrement de poursuivre les nègres marrons et de veiller à la sûreté des grands chemins.

Les gouverneurs lieutenants-généraux et les intendants ont ensemble le pouvoir de faire punir, à bord des vaisseaux de sa majesté, les hommes de l'équipage qui, étant à terre, y commettent des désordres ; ils doivent veiller à la sûreté des grands chemins, des rues et carrefours des villes : ils règlent ce qu'ils jugent à propos sur le port d'armes; ils peuvent ordonner d'arrêter les malfaiteurs ; ils doivent les livrer, dans vingt-quatre heures, aux procureurs-généraux, pour poursuivre leurs procès.

mais

Autrefois le gouverneur lieutenant-général devait seul ordonner les corvées, la construction des nouvelles fortifications et la réparation des anciennes. Les vexations et les abus auxquels ce pouvoir a souvent donné lieu, l'ont fait restreindre les chefs militaires ne peuvent pas même à présent proposer au gouvernement l'entreprise de travaux publics quelconques, sans y être autorisés par une délibération des principaux habitants; et ils ne peuvent les faire commencer avant l'arrivée des ordres de sa majesté, sinon par l'avis d'un conseil de guerre composé des commandants des troupes réglées et des commandants de quartier.

Mais le gouvernement n'a pu encore tempérer, dans toutes les Colonies, les inconvénients attachés aux corvées exigées forcément et sans salaire; ils sont plus funestes dans les îles de l'Amérique qu'ailleurs: la nature du climat et des productions fait que les terres souffrent plus de l'absence du cultivateur occupé à des ouvrages publics; l'éloignement de la métropole facilite des exemptions injustes et la multiplication des corvées inutiles. A Saint-Domingue, l'administration a été à cet égard, pour la prospérité des colons, au delà de ce quils osaient espérer, en autorisant, en 1764, une assemblée nationale qui a aboli les corvées et a assuré l'indemnité de celles auxquelles des circonstances imprévues pourraient forcer.

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III. Après que la culture eut fait des progrès, et que la société eut pris une forme durable dans les Colonies, le besoin de lois et de magistrats s'y fit sentir. Louis XIV y pourvut par la publication de l'édit connu sous le nom de Code Noir, et par la création de conseils souverains et de différents siéges royaux."

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