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de Raimond, qui prêta hommage pour ce fief au pape, le 2 décembre 1673, comme frère et substitué à ce fief par le décès de son frère sans enfans1.

Sans espoir du côté de cette famille, Françoise prit seulement le nom de Grésinde Béjard, le 31 mai 1677, dans l'acte de célébration de son second mariage avec Isaac-François Guérin, se qualifiant officier du roi, quoiqu'il fût comédien; avec ce nom de batême, ainsi isolé, elle n'était pas d'accord avec elle-même, puisqu'elle supprimait le prénom d'Armande. J'observerai que cet acte de mariage est signé par le curé et tous les témoins, tandisque le premier n'est pas signé par le curé, et que les mots et d'aultres, ajouté après le nom des témoins signans, semble annoncer des témoins qui n'ont pas même voulu dire leur nom. Ne sont-ce pas là des caractères de clandestinité?

Arrêtons-nous un instant sur les divers noms qu'a pris la femme de Molière. Lorsque son premier mari l'avait inscrite sur le rôle des acteurs, il lui avait donné le nom de mademoiselle Molière 2; après son second mariage, elle fut inscrite sur le rôle de 1680, sous les noms d'ArmandeGrésinde-Claire-Élisabeth Béjard, femme Guérin, reprenant ainsi le nom d'Armande, et en ajoutant deux autres. Si l'on veut se faire une idée nette de toutes ces variations, on observera que les prénoms sont inscrits ainsi :

Armande Grésinde, registre des mariages de 1662; premier enfant, 1664; second, 1665;

1. Histoire manuscrite de la ville de Pernes, par Giberti.

2. Registres de la Grange, pour 1662, 1665, 1670 et 1672.

+

Armande-Claire-Élisabeth, troisième enfant, 1672;
Grésinde, mariage avec Guérin, 1677.

Armande-Grésinde-Claire-Élisabeth, registre de la Grange, de 1662; liste de 1680; et, comme on le verra après cette lettre, extrait mortuaire de la femme Guérin.

Les actes de mariage, qui devraient être les plus exacts, le sont le moins, si l'on veut que les quatre noms aient appartenu à la femme de Molière. J'ajoute que Françoise ne savait pas bien même comment elle devait écrire son prétendu nom de famille; car elle signe en 1662 Béjart, et en 1677, Béjard ainsi qu'on le verra dans les pièces qui suivent, fidèlement copiées par M. Trémisot. Și de cela seul j'avais conclu qu'elle s'appelait Françoise, j'aurais sans doute fait un fort mauvais raisonnement, et je n'aurais pas mérité votre réponse; mais, après avoir prouvé par le témoignage unanime des contemporains et une tradition constante de cent-cinquante-neuf ans, que Françoise était la femme de Molière, j'ai cru venir à l'appui de cette preuve en fesant observer ces variations jointes au défaut d'extrait batistaire qui n'avait pas été produit lors du mariage, ainsi que je l'en concluais; j'ai ajouté que M. Beffara n'a pu découvrir cet extrait batistaire sous le nom de Béjard, tandis qu'il l'a trouvé sous le nom de Françoise.

Quoique cette femme n'ait jamais pris le nom de Modène, dont la famille ne l'aurait pas souffert, la tradition constante n'en fut pas moins conservée de son vivant, puisque deux ouvrages imprimés avant sa mort la constataient; et, cinq ans après sa mort,

Grimarest, après avoir recueilli tous les faits de Baron, nomme son véritable père, saus être contredit par

personne.

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Le témoignage du généalogiste de la famille de Modène, dans un ouvrage publié quarante ans après la mort de mademoiselle Molière, m'a aussi paru de quelque importance. Il semble qu'ayant en mains l'extrait batistaire de Françoise démontrant que M. le comte de Modène a réellement eu une fille de la Béjard, vous auriez pu regarder cette déposition comme méritant d'être observée. Mais vous avez préféré de répéter une phrase assez ridicule attribuée à Chamfort, et d'accuser en quelque sorte l'auteur de la vie de la Guérin, Baron, Grimarest, et le généalogiste, d'être des sots. Je ne sais si vous avez étendu cette qualification à Bret, à Voltaire, à M. Petitot et à tous ceux qui ont écrit la vie de Molière sans élever le moindre doute sur ce fait; permettez-moi de ne pas le croire. Un sarcasme n'est pas un raisonnement, et, quoi qu'ait pu dire Chamfort, l'opinion publique n'est pas moins respectable que la tradition. Ni l'un ni l'autre ne doivent jamais être contredits légèrement.

De nouvelles pièces sont produites au procès. Je vais les rapporter textuellement, ainsi qu'elles ont été copiées sur les registres. Je ne puis avoir de meilleur juge que vous, monsieur; je n'en puis avoir de plus prévenu en ma faveur, si j'en dois croire les éloges que vous voulez bien m'accorder. Je ne les mérite de vous que par la confiance que j'ai en vos lumières et en votre bonne foi. Vous annoncez une vie de Molière qui jettera un nouveau jour sur cette question et sur d'autres

non moins importantes. Cet écrivain philosophe n'est pas encore assez connu, et il méritait un historien tel que vous.

Paris, 19 janvier 1825.

Le marquis DE FORTIA.

EXTRAIT

DU REGISTRE DES NAISSANCES DE LA PAROISSE SAINT-EUSTACHE.

FRANÇOISE, ILLÉGITIME.

Du dimanche 11 juillet 1638.

Fut baptisée Françoise, née du samedy troisiesme de ce présent moys, fille de messire Esprit de Raymond, chevallier seigneur de Modène et aultres lieux, chambelan des affaires de Monseigneur frère unique du roi, et de demoyselle Magdeleyne Beiard. La mère demeurant rue Saint-Honoré. Le parein, Jehan-Baptiste de l'Ermitte, escuyer, sieur de Vausel, la tenant lieu de messire Gaston-Jehan-Baptiste de Raymond, aussy chevallier seigneur de Modène. La mareine, damoyselle Marie Hervé, femme de Joseph Beiard, escuyer.

1. Probablement Vauselle, ou peut-être Bosela, ainsi qu'écrivent les

titres de la famille de l'Hermite.

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