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a particulièrement facilité les choses et permis même de réaliser de véritables tours de force. Les rapports de M. l'ingénieur-hydrographe Pélissier ont mis en évidence l'accueil favorable reçu par les demandes de la mission: le Service maritime a mis à sa disposition des observateurs de marées; le Service radiotélégraphique les postes de Mytho, Phuto, Poulo-Condore; pour le Bassac, les travaux publics ont installé ou fourni des pylones, des chalands, des citernes; le directeur du pénitencier de Poulo-Condore a apporté le plus large concours; il a fait construire trois piliers en maçonnerie, installer un repère de nivellement, avec de nombreuses corvées de détenus pour le transport du matériel, le déboisement des sommets, la préparation du terrain de la base. Les documents les plus récents de la triangulation ont été communiqués au fur et à mesure des besoins par le lieutenant-colonel chef du Service géographique de l'Indochine, qui s'est chargé aussi de faire réparer les instruments.

Le compte rendu général du commandant Capronnier insiste également sur les concours de toute nature qu'il a trouvés, alors qu'avec les crédits restreints qui lui étaient alloués (à peine 1200 piastres), le programme de la campagne était très chargé; le lieutenantcolonel Dubuisson, directeur du Service géographique, fournit gratuitement une aide précieuse et fit tirer une épreuve sur zinc de Port-Dayot. Le lieutenant-colonel Glaize, directeur de l'aviation, mit à la disposition de la mission, sur l'ordre du Gouvernement général, une section photographique aérienne en baie d'Along, avec développement des clichés sur place à bord d'une annexe, dirigée par le capitaine Barres, logé avec son personnel sur l'Octant, qui exécutait en même temps le levé de la région environnante. Même accueil auprès du directeur des Travaux Publics, M. Pouyanne, des administrateurs de province, de la Société française des charbonnages du Tonkin, qui trouva le moyen de construire en moins d'un mois, une maison très confortable pour abriter trois officiers et quatorze marins; les autorités locales d'Haïphong, résident-maire, colonel commandant d'armes, médecin-chef de l'hôpital, eurent aussi à maintes reprises à rendre service à la mission. Ainsi le Lapérouse et ses annexes trouvèrent partout et dans toutes les circonstances, même au point de vue pécuniaire, les facilités qui devaient singulièrement simplifier sa tâche et activer ses travaux, avec une largeur de vues et une affabilité auxquelles il convient de rendre hommage.

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Les travaux de la mission sont rédigés au jour le jour par les

officiers du bord dans la salle de travail du Lapérouse, cependant qu'avec les données recueillies, on procède aussi complètement que possible à la rédaction d'ensemble d'une première minute de la carte, qui, une fois tirée par les soins de la colonie naturellement impatiente d'avoir ce document, même imparfait, sera la « carte provisoire ». Mais la rédaction définitive et les calculs sont repris à Paris, au Service hydrographique de la Marine, par une équipe des mêmes officiers qui ont fait la campagne, et c'est cette dernière carte qui deviendra le document officiel.

J. VIVIELLE.

Une Étude géographique

et un Questionnaire d'enquête

sur les colporteurs de l'Oisans

Il convient d'insister à bon droit sur le fait que la foire est essentiellement une organisation de commerce nomade. Elle fonctionne dans les temps et dans les pays où les échanges sont encore mal organisés, sporadiques, intermittents; elle a pour objet de régulariser les intermittences. Les foires dont le nom même vient de feriæ fates sont fixées avec prédilection à certaines dates de fêtes chrétiennes entraînant des rassemblements particulièrement importants; André Allix, qui a publié plusieurs études sur les Foires (notamment dans La Géographie, XXXIX, 1923, p. 521-563), a donné la liste des grandes fêtes foraines, qui, dans toute la chrétienté, se succèdent de mois en mois, et qu'on retrouve aussi bien dans le rythme des foires de bétail d'aujourd'hui que dans celui des foires de marchandises d'autrefois la Saint-Jean, la Saint-Jacques, la Saint-Barthélemy, la Saint-Mathieu, la Saint-Simon et Saint-Jude, la Saint-André; - auxquelles il faudrait ajouter la Saint-Denis et la Saint-Michel.

La foire fonctionne par excellence dans les pays où la vie tout entière des individus et des groupes est fondée sur le nomadisme (ou, disons plus exactement, sur la simple transhumance) 1. Unie à ce genre de vie, la foire joue en bien des cas, d'une manière intermittente et par conséquent réduite au minimum, le rôle de centre urbain. C'est pourquoi Allix appelle la foire une ville intermittente et presque toujours périodique, souvent juxtaposée à une ville permanente, mais qui répond à des besoins spéciaux

1. Avec Arbos, il faut même ajouter le nomadisme et la transhumance des troupeaux ne sont pas les seules nécessités auxquelles répondent les foires. L'élevage, même stable, entraîne la périodicité des foires. Enfin il n'y a pas de rythme que de la vie pastorale ». (Ann, de géogr., XXXII, 1923, p. 557.) LA GEOGRAPHIE. - T. XLIII, 1925.

d'échange et qui concentre à un moment précis l'activité économique nomade d'une région de nomadisme. Il voit donc en elle, en son sens le plus général, « un organe commercial régulateur du nomadisme ».

Le colportage, non plus que les foires, n'est une spécialité exclusive ni des pays de montagne ni des zones de transhumance; mais les habitudes de migration ainsi que les alternances de climat qui poussent les habitants de la montagne à chercher pour la période hivernale une occupation rémunératrice sont des causes conjointes qui ont souvent et logiquement donné lieu à des migrations saisonnières plus ou moins lointaines.

Il se trouve que le géographe qui s'est spécialement occupé des foires, André Allix, a naguère publié, en collaboration avec un autre géographe de valeur, C. Robert-Muller, une longue étude qui résulte d'une enquête longtemps et méthodiquement poursuivie sur le Colportage issu d'une région dauphinoise de très haute montagne, l'Oisans 1.

Les «< Uissans » ou habitants de l'Oisans ont en effet curieusement résolu le grave problème de la morte-saison provoquée en hiver par la rudesse du climat. De toute évidence l'émigration hivernale en Oisans a eu pour raison première les conditions géographiques.

La tradition orale fait remonter cette pratique au début du XIXe siècle; auparavant, les Uissans paraient en partie à leur misère de la saison rigoureuse par la mendicité; ils avaient mérité justement le nom d' « attrape-sous » dont on qualifie encore quelquefois leurs successeurs, plus honorables, en tous cas plus habiles.

Les colporteurs s'en allaient au commencement de l'hiver pour une durée plus ou moins longue; dès la fin d'octobre on voyait se masser au Bourg-d'Oisans ceux des plus hautes communes de l'Oisans méridional; les merciers de Villard-Reymond, les épiciers et les marchands de tissus de Villard-Notre-Dame (qui restent sept mois. en route), les « porte-balle » de Saint-Christophe.... De la Toussaint au 15 novembre, c'était le tour des fleuristes qui descendaient par le chemin de fer (partant pour un an ou même deux ans vers des pays lointains), ainsi que les herboristes et marchands de drogues (qui ne s'en allaient, eux, que pour une petite tournée de trois mois).... Vers la Noël et le jour de l'An, partaient les bijoutiers et les marchands. de lunettes.... A l'aube du printemps, les marchands de graines et de semences, dont beaucoup venaient déjà de faire une tournée d'hiver

1. Un type d'émigration alpine, Les Colporteurs de l'Oisans (Revue de Géographie alpine, XI, 1923, fasc. III, p. 577-634).

avec d'autres marchandises, quittaient Venosc et Villard-NotreDame.

Vers avril et mai, presque tout le monde remontait pour les travaux des champs et pour mener les bêtes à la montagne.

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Normalement autrefois, le colporteur portait sa balle sur son dos, logeant la nuit dans les granges, parcourant durant la journée les longues routes, « chinant » dans les maisons « faire la chine >> signifie courir de porte en porte pour offrir sa marchandise, et il allait à pied. Depuis lors il a souvent une petite voiture, car il faut bien s'adapter aux pays de faible densité humaine où les sites. habités sont beaucoup trop distants; il évite les grandes villes, (la région lyonnaise au sens le plus étroit ne voit pour ainsi dire jamais de colporteurs), et parcourt de préférence les régions aux habitants disséminés, étant « par son nomadisme d'hiver, agent de liaison économique entre divers organismes d'une contrée sédentaire »>.

Parmi les colporteurs les uns, le plus grand nombre, parcourent le Massif Central et ses abords, les autres le Dauphiné et la Savoie : d'autres le Midi et le Sud-Ouest; d'autres l'Est de la France, quelquefois atteignant « jusqu'aux portes de Paris, non la banlieue industrielle, mais la couronne des pays ruraux qui enveloppent la capitale». Les colporteurs se réservent et se répartissent les itinéraires des tournées, afin d'éviter entre eux la concurrence; il est déjà assez difficile de lutter contre les concurrents Auvergnats (marchands de drap), Mauriennais, Gascons (vendeurs de toile du nord)... ou Piémontais! Dans la plupart des cas ils sont seuls; quelques-uns, moins individualistes, ceux qui font l'Auvergne ou le Limousin, par exemple, vont assez souvent deux par deux « se tenant compagnie ». Pour les lointains pays, ces opiniâtres voyageurs, ne partent au contraire que rarement seuls; ils s'associent et l'on a vu fréquemment huit ou dix hommes de Mont-de-Lans (fleuristes en route pour l'Amérique) former, sur parole, un groupe solide durant plusieurs années.

Deux formes de commerce sont prédominantes parmi les colporteurs la mercerie et la rouennerie; des spécialités plus anciennes, comme quelques denrées d'alimentation, les fleurs, la bimbeloterie, ou relativement récentes comme les lunettes et les graines de semences, représentent souvent, quoique moins générales, des activités beaucoup plus rémunératrices. Certaines communes sont plus spécialisées Venosc est le pays des fleuristes, Villard-Notre

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