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enfans d'un premier lit, ne pourrait, etc.; ce qui semblerait induire une prohibition absolue. Je doute cependant que l'on ait eu l'intention d'accorder aux enfans du second mariage, même en cas de non-existence d'enfans du premier lit, le droit d'attaquer une donation, sans laquelle on peut présumer que le mariage qui leur a donné naissance, n'aurait pas été contracté, et de demander une réduction qui n'a été établie aucunement dans leur intérêt. Je pense donc qu'ils seraient non-recevables, sauf le droit résultant en leur faveur de l'art. 1094. Mais, maintenant, doivent-ils profiter du retranchement, quand il est demandé par les enfans du premier lit?

Je pense qu'oui; d'abord, parce que, d'après l'esprit général du Code, lorsque le droit écrit et le droit coutumier se sont trouvés en opposition, le droit coutumier a été, en général, suivi de préférence. (Voyez les articles 747, 1393, 1576, etc.)

En deuxième lieu, parce que, si la contravention faite par l'époux à la prohibition de la loi, ne doit pas préjudicier aux enfans du premier lit, l'on ne voit pas non plus pourquoi elle leur profiterait. Or, si l'époux n'eût pas contrevenu, s'il n'eût donné que ce qu'il pouvait donner, l'excédant se trouverait dans sa succession, et tous ses enfans y participeraient.

3o. Enfin, parce que si l'on n'admettait pas cette opinion, l'on fournirait à l'époux un moyen indirect d'avantager ses enfans du premier lit, au préjudice de ceux du second. Il n'aurait qu'à donner à son époux bien, au delà d'une part d'enfant; il priverait par là scs enfans du second lit de toute part dans l'excédant; car, si l'on décidait qu'ils ne peuvent prendre part dans les objets retranchés, il faudrait décider également que les enfans du premier lit ne seraient pas obligés de rapporter les objets provenant du retranche

ment.

Nec obstat, que, s'il n'y a point d'enfans du premier mariage, les enfans du second n'auraient pas le droit d'attaquer la donation. Car nous avons dans les lois romaines des exemples qui prouvent que telle personne, au profit

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de laquelle une action ne s'ouvrirait pas, peut cependant profiter du bénéfice de cette action, quand une fois elle est ouverte. C'est ainsi que la loi 3, § 11, ff. de Bonor. possess. contrà tabul., décide que l'enfant, institué héritier, ne peut demander la possession des biens contrà tabulas, attendu qu'il peut demander la possession secundùm tabulas,, qui n'a pas l'inconvénient d'annuler le testament du défunt. Mais elle décide en même temps que, si un autre enfant, non-institué, est dans le cas de demander la póssession des biens contrà tabulas, le premier pourra la demander ce qui peut lui être avantageux, parce que, s'il n'a qu'un frère, et que le testament soit rescindé, la succession leur est alors déférée à tous deux ab intestat. Ils en auront en conséquence chacun moitié, tandis qu'il n'était peut-être institué par le testament, que pour une part beaucoup moindre.

Quid, si les enfans du premier lit n'agissent point; putà, s'ils ont fait remise de leur action? On pensait que cela ne pouvait préjudicier aux enfans du second lit. Il en résulterait en effet trop d'abus; il serait possible que l'on obtînt cette remise au moyen d'arrangemens secrets faits entre l'époux et les enfans du premier lit, et qui n'auraient d'autre but que de frauder les enfans du second lit. En un mot, l'action ne peut pas s'ouvrir au profit des enfans du second lit; mais lorsqu'elle est ouverte, ceux du second lit peuvent l'intenter comme ceux du premier. Cette décision est fondée sur la loi citée ci-dessus, et sur la loi 10, § 6, eod., qui décide que, quand il y a lieu à demander, par un enfant, la possession des biens contrà tabulas, ceux qui en profiteraient, mais qui ne pourraient la demander de leur chef, peuvent la demander du chef de l'autre enfant en faveur de qui l'action est ouverte, quoique celuici ne la demande pas. Hi qui, propter alios, contrà tabulas bonorum possessionem petunt, non expectant ut præteriti bonorum possessionem accipiant; verùm ipsi quoque bonorum possessionem petere contrà tabulas possunt. Cùm enim semel beneficio aliorum ad id beneficium fuerint admissi, jàm non curant, petant illi, necne,

bonorum possessionem. Mais, dans ce cas, les enfans du second lit ne l'intenteront que pour leurs parts.

Il en est de même, si les enfans du premier lit ont approuvé la donation. Cela équivaut à une remise de l'action. Il est même à remarquer que cette approbation ne pourrait être opposée, même aux enfans du premier lit, quand ils seraient seuls, si elle avait été faite du vivant du donateur. Cela serait regardé comme un pacte sur une succession future, et comme un consentement arraché par la crainte, ne pejus faciat.

Est-il nécessaire que les enfans qui demandent la réduction, soient héritiers du donateur?

Anciennement l'opinion générale était pour la négative. RICARD même, le judicieux RICARD, avait adopté cet avis (part. 3, no 1301 et suivans), quoiqu'il eût prouvé ailleurs péremptoirement que le légitimaire ne peut demander la réduction des donations entre vifs, qu'autant qu'il s'est porté héritier du donateur, au moins par bénéfice d'inventaire. Comment cet auteur, avec le bon sens qui le distingue évidemment, n'a-t-il pas senti que les mêmes raisons existaient à l'égard de la réduction des donations faites au second époux?

« Les enfans, disent RICARD et les autres auteurs qui >> ont suivi son opinion, ne tiennent pas leur droit de la >> loi sur les successions, mais de l'Édit des Secondes No» ́ces.» (POTHIER, du Contrat de Mariage, no 568.) Ce n'est pas non plus de la loi des successions, mais d'une loi particulière, que les enfans tenaient le droit de faire réduire les donations entre vifs. (Voir le Tit., Cod., de inoffic. Donat.) D'ailleurs, cette raison n'a plus d'application dans le droit actuel, qui n'est, en quelque sorte, composé que d'une seule loi.

« Ce qui a été donné à l'époux, ajoutent-ils, ne fait >> pas partie des biens du donateur, et ne se trouve plus >> dans sa succession au moment de son décès. » Mais d'abord il est très-possible, et c'est même le cas le plus fré quent, que la donation soit de biens à venir; et alors les biens donnés se retrouvent dans la succession. Et d'ailleurs,

ce qui a été donné entre vifs à un étranger, s'y trouve t-il davantage?

Au surplus, sans répéter ici tous les raisonnemens que nous avons déjà employés, pour prouver que le légitimaire doit être héritier pour demander la réduction des donations entre vifs, nous nous contenterons de reproduire celui-ci :

Une femme ayant enfans, a donné à son second mari vingt mille francs. Elle meurt, laissant un fils unique du premier lit sa succession paraît mauvaise; le fils y renonce. Un collatéral plus hardi l'accepte; l'enfant forme sa demande en réduction contre le mari; et attendu qu'il ne reste rien dans la succession, il fait réduire la donation à cinq mille francs. Un événement inattendu rapporte à la succession soixante mille francs : le collatéral, comme héritier, s'en empare. Le mari demande que l'enfant soit tenu de restituer les quinze mille francs, parce qu'au moyen de l'événement survenu, les biens se trouvent monter à quatre-vingt mille francs; la donation n'excédait donc pas le quart des biens. En vain l'enfant voudra-t-il opposer qu'il ne profite pas des soixante mille francs nouvellement rentrés. Le mari lui répondra avec avantage que, s'il n'en profite pas, c'est par sa faute, et parce qu'il a renoncé à la succession; mais, que lui, mari, ne doit pas en être victime. Certainement la demande du mari sera admise; et cet exemple prouve clairement, comme il l'a déjà prouvé à l'égard de la réserve, qu'il faut être héritier pour demander le retranchement ordonné par l'article 1098.

D'ailleurs, remarquons que la plupart des dispositions adoptées, même dans l'ancien droit, et notamment celle qui admettait les enfans du second lit au partage des biens retranchés, étaient fondées sur ce que, si l'époux n'eût pas contrevenu à la loi, s'il n'eût donné que ce qu'il pouvait donner, le surplus serait resté dans sa succession. Or, à quel titre, dans ce cas, les enfans auraient-ils pu recueillir ce surplus, si ce n'est à titre d'héritiers?

Enfin, RICARD lui-même paraît se contredire, lorsqu'examinant dans le no 1265 et le suivant, si, lorsque des filles ont été exclues par leurs contrats de mariage,

de la succession de leurs père et mère, même sans avoir rien reçu, comme cela était permis dans quelques coutumes, la donation faite au second mari, devait être réduite d'après la part de ces filles, c'est-à-dire à rien, s'il ne leur avait rien été donné, il décide que, pour fixer le montant de la donation, l'Édit n'a considéré que les enfans venant à la succession; que les donations faites au second époux, n'intéressent que ces enfans, et non point les filles exclues par la coutume ou par leur contrat de mariage. Or, quelle différence peut-il y avoir, quant à l'effet, entre une renonciation faite par contrat de mariage, et celle qui est faite après le décès? Et si la fille du premier lit, qui a renoncé par contrat de mariage, ne peut quereller la donation faite au second époux, comment accorder plus de droit à celui qui a renoncé depuis l'ouverture de la succession?

Voir également le n° 1306, où le même auteur semble s'être attaché à donner les raisons les plus fortes en faveur de l'opinion que nous venons d'établir.

Enfin, dans le n° 1307, voulant prouver de nouveau que les filles exclues de la succession par leurs contrats de mariage, ne peuvent quereller les donations, il en donne pour raison que, cessant même la donation faite au second époux, elles n'en auraient pas davantage profité. Or, je le demande, cette raison ne s'applique-t-elle pas également aux enfans qui ont renoncé à la succession du donateur, depuis son décès?

Observez enfin, que les mêmes auteurs, qui prétendaient qu'on pouvait demander le retranchement sans être héritier, convenaient qu'il ne pouvait être demandé par celui qui était exclu de la succession pour cause d'indignité.

Au surplus, il faut appliquer ici la disposition de l'article 921, portant que les créanciers du défunt ne peuvent demander la réduction, ni en profiter. Il suffira donc que l'enfant accepte la succession sous bénéfice d'inventaire. Mais même, alors, la question est encore importante, puisque l'enfant, quoiqu'héritier bénéficiaire, n'en est pås moins tenu au rapport envers ses cohéritiers.

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