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dans le camp, ait encore eu besoin de passer la Trébie pour gagner Plaisance? Le général Guillaume de Vaudoncourt, à qui nous devons un beau travail sur les campagnes d'Annibal, avait soupçonné quelque faute dans le texte, et proposé une rectification. Je ne pense pas, moi, qu'il y en ait besoin; et, puisqu'il faut absolument suppléer par des conjectures, je préfère baser les miennes sur le texte, tel qu'il nous est parvenu, que de hasarder des corrections dont on pourrait contester la nécessité.

Il me paraît évident que l'auteur désigne dans son récit, par le mot castra, deux camps différents : « Aliis timor hostium audaciam « ingrediendi flumen fecit, transgressique in castra pervenere » (XXI, 56). Il est clair qu'il parle là du camp que les Romains avaient quitté le matin, puisqu'il leur fallut franchir la Trébie pour y retourner. J'en dirai autant du passage qui précède de quelques lignes : «Quum neque in castra reditus esset flumine interclusis. >> Mais lorsque Tite-Live dit, quelques lignes plus bas : «Itaque «nocte insequenti, quum præsidium castrorum, et quod reli<«quum ex magna parte militum erat, ratibus Trebiam trajice<«<rent.» Cela ne peut plus s'entendre que d'un autre camp placé sur la gauche de la Trébie; car autrement les troupes qui le quittaient n'auraient pas dû traverser cette rivière pour se rendre à Plaisance.

Ce second camp était, sans aucun doute, celui que Scipion avait quitté peu de temps auparavant, lors de la défection des 2,200 Gaulois. En effet, ce camp ne devait pas être à une grande distance du champ de bataille, car les deux armées étaient restées à peu près dans les mêmes lieux depuis le passage du Pô. On peut même conjecturer que Scipion, ne pouvant, à cause de ses blessures, prendre part au combat, et ayant cependant passé la Trébie avec toute l'armée, y avait pris position, et s'y était tenu en observation avec quelques troupes pendant la bataille; l'expression præsidium castrorum, que je viens de citer, me paraît donner à cette conjecture un haut degré de probabilité. Si l'on n'adopte cette interprétation, je ne vois pas de moyen de tirer un sens satisfaisant de ce passage de Tite-Live.

NOTE F (page 239, 382).

Sur les MANSUETARII.

Les anciens, les Romains principalement, avaient fait d'étonnauts progrès dans l'art d'apprivoiser et de dresser les animaux

féroces. Les mansuetarii, c'était le nom que l'on donnait aux hommes qui se livraient à ce dangereux métier, étaient parvenus, à force d'adresse et de persévérance, à rendre dociles les lions, les tigres, les léopards, et ils leur faisaient exécuter des tours aussi surprenants que ceux que nous avons admirés dans les ménageries des Martin, des Carter, des Van Amburg. Ils pouvaient, dit Sénèque, plonger impunément la main dans la gueule du lion, serrer les tigres dans leurs bras, et les assujettir au joug. «Certi sunt domitores ferarum qui sævissima animalia, et ad «occursum expavefacientia hominem, cogunt pati jugum, nec << asperitatem excussisse contenti, usque in contubernium miti«gant. Leonibus magister manum insertat: osculatur tigrim suus <«custos: elephantem minimus Æthiops jubet subsidere in genua, «<et ambulare per funem.» (Senec., ep. LXXXV, in fin.) Martial dit avoir vu un tigre qui léchait la main de son gardien.

Lambere securi dextram consueta magistri

Tigris ab Hyrcano gloria rara jugo.

(De Spectac., epigr. 18.)

Il ajoute qu'on voyait souvent dans l'amphithéâtre des lions dressés à chasser le lièvre, à serrer ce timide gibier dans leur gueule, sans lui faire aucun mal, à le lâcher ensuite pour le poursuivre encore, et à s'en amuser, enfin, comme nous voyons les chats se jouer avec les souris. (Martial., Epigr., 1, 7, 15, 23, 49, 52, 61, 105.)

que

On sait Marc-Antoine aimait à se promener avec la courtisane Cytheris dans un char traîné par des lions. (Plutarch., M. Anton., 9. - Plin., Hist. nat., VIII, 21.) Héliogabale faisait aussi quelquefois atteler à son char des cerfs, des tigres et des lions. (El. Lamprid., Heliogabal., 28.) Il avait fait couper les griffes à un certain nombre de lions et de léopards, et il était parvenu à adoucir tellement leur férocité, qu'il les faisait entrer tout à coup dans la salle des festins où ils allaient paisiblement prendre place parmi les convives, sans qu'il en résultât le moindre accident. Quoi qu'il en soit, on se figure aisément la terreur de ces hommes qui n'étaient pas prévenus; mais c'était ce que voulait le bouffon couronné, à qui cette terreur causait un vif plaisir: «Habuit et leones et leopardos exarmatos in deliciis: «quos edoctos per mansuetarios subito ad secundam et tertiam «mensam jubebat accumbere, ignorantibus cunctis quod exar

«mati essent, ad pavorem ridiculum excitandum. » (Æl. Lamprid., Heliogabal., 21.)

Nous avons fait mention, dans l'appendice I, des tigres et des léopards apprivoisés, offerts en spectacle au peuple par Auguste, par Claude, par Aurélien et par Gallien nous n'avons pas besoin de donner ici sur ces faits de nouveaux détails.

Du temps de Domitien, on attela, dans l'amphithéâtre, des léopards, des tigres et des taureaux sauvages; on assujettit au frein des cerfs, des ours et des sangliers; enfin, on vit des éléphants danser en cadence à la voix de leurs conducteurs. Ces particularités nous sont racontées par Martial, dans l'épigramme suivante:

Picto quod juga delicata collo

Pardus sustinet, improbæque tigres
Indulgent patientiam flagello :
Mordent aurea quod lupata cervi,
Quod frænis libyci domantur ursi
Et quantum Calydon tulisse fertur
Paret purpureis aper capistris :
Turpes esseda quod trahunt bisontes,
Et molles dare jussa quod choreas
Nigro bellua nil negat magistro:
Quis spectacula non putet deorum?

(Lib. 1, epigr. 105.)

S'il faut en croire Pline (Hist. nat., VIII, 21, et Elien, Animal., v, 39), ce fut un Carthaginois, nommé Hannon, qui le premier réussit à dompter des lions et à leur faire porter des fardeaux; mais probablement de pareils essais avaient déjà été tentés dans d'autres pays sur les animaux féroces qui y étaient le plus communs. Le poëte Manilius, faisant l'application des préjugés astrologiques de son temps aux différentes destinées de la vie humaine, prétend que ceux qui sont nés sous la constellation du Lion, et sous celle de l'Ourse, doivent être doués d'une grande aptitude pour dompter les animanx féroces et pour les apprivoiser; et, en même temps, il énumère les tours de force que pourra exécuter cet heureux mortel, tours de force qui, sans doute, ne sont autres que ceux que le poëte avait vu faire aux mansuetarii de son temps.

Ille manu vastos poterit frænare leones,
Et palpare lupos, pantheris ludere captis,

Nec fugiet validas cognati sideris ursas.
Ille elephanta premet dorso stimulisque monebit
Inque artes hominum perversaque munia ducet.
Ille tigrim rabie solvet, pacique domabit;
Quæque alia infestant silvis animalia terras

Junget amicitia secum.

(Manil., Astronomic., v, vs. 698 sqq.)

NOTE G (page 244).

Des locutions employées par les Latins et par les Grecs pour désigner la trompe et les défenses de l'éléphant. - De quelques défenses d'une grandeur remarquable, dont il est fait mention dans les auteurs.

Les Latins se sont servis, pour désigner la trompe de l'éléphant, des mots brachium et manus; et, en effet, cet organe est comparable au bras pour sa force, et à la main pour sa souplesse. Pline, Végèce, Quinte-Curce, Solin, Silius Italicus, le désignent par l'expression de manus 1: «Manus, data est elephantis, dit Ciacéron (de Nat. deorum, 11, 47), quia, propter magnitudinem cor«poris, difficiles aditus habebant ad pastum. » L'expression nasuta manus, dont se sert Cassiodore (Epist. var., x, 47), désigne trèsbien le double service auquel cet organe est destiné. Quant à l'épithète anguimanos, appliquée par Lucrèce aux éléphants, elle peint aussi très-bien l'extrême flexibilité de leur trompe, qui, comme les serpents, peut s'allonger, se raccourcir et se plier en

tous sens:

Sicuti quadrupedum cum primis esse videmus
In genere anguimanos elephantos.

(Lucret., 11, vs. 536.)

Inde boves Lucas turrito corpore tetros
Anguimanos belli docuerunt volnera Pœni
Sufferre, et magnas Marlis turbare catervas.

(Id., v, vs. 1301.)

Guidés par la même analogie, les Grecs ont aussi quelquefois donné le nom de zip à la trompe de l'éléphant; ce mot est em

1 Haud improprie appellata manu.» (Plin., Hist. nat., vi, 10.) Nous avons cité, page 243, un passage de Quinte-Curce, et page 277, un passage de Végèce, où ces auteurs appellent manus la trompe de l'éléphant.

ployé dans ce sens par Diodore, Elien et Philostrate. Iv ñ mpoƐcoxis ἀντὶ χειρὸς εὑρέθη. «La nature a donné la trompe à ce quadrupede en «place de la main », dit un poëte d'une époque plus récente (Manuel. Philæ, Carmen de elephante, vs. 52, ed. Wernsdorf). En effet, quoique cet organe soit dépourvu de véritables doigts, l'éléphant s'en sert à peu près comme nous nous servons de la main, pour défaire un nœud, tourner une clef, déboucher une bouteille, ramasser des pièces de monnaie, etc.; mais il l'emploie surtout d'une manière utile pour arracher et porter à sa bouche l'herbe et les feuilles dont il fait sa nourriture. C'est pour cela que les Grecs ont aussi donné à cet organe le nom de proboscis (polcoxic anò To Boozsiv, a pascendo), nom que les Latins ont adopté, en le changeant quelquefois en promuscis. Nous le désignons par le mot trompe, soit à cause de sa forme, soit à cause du bruit éclatant que l'animal en fait sortir lorsqu'il est en colère, bruit l'on peut réellement comparer au retentissement aigu de la trompette.

que

Les Latin's ont appelé barritus le cri de l'éléphant, sans doute par onomatopée; c'est l'opinion de Festus: «Barrire elephanti <«< dicuntur, sicut oves dicimus balare, utrumque a sono ipso «vocis.» (De Signif. verb.) Il faudrait, si l'on adoptait cette étymologie, donner la même origine au mot barrus, par lequel les Romains ont quelquefois désigné l'éléphant. (Horat., Epod., x1.) Cependant il y a des auteurs qui pensent que cette dénomination vient de quelque idiome barbare, et plus vraisemblablement de l'Afrique que de l'Asie.

Pausanias discute la question de savoir si l'on doit placer les défenses de l'éléphant dans la catégorie des dents ou dans celle des cornes, et il paraît pencher pour la seconde de ces opinions. (Eliac. prior., 12). Philostrate a également traité ce sujet (Appollon. vit., 11, 6). Le roi Juba II, qui avait écrit de savants ouvrages sur l'histoire naturelle, donnait, suivant Pline (Hist. nat., viii, 4), le nom de cornes aux défenses des éléphants. Elien et d'autres auteurs leur donnent aussi le nom de xépara; enfin, le verbe xépato (cornu peto), est celui dont se sert Arrien (Exp. Alex., v, 17) pour indiquer la manière dont les éléphants de Porus attaquèrent les Macédoniens à la bataille de l'Hydaspe. (Voyez ci-dessus, page 242.) Les Latins se sont également servis du mot cornua pour désigner les défenses de l'éléphant; et, en effet, vues de loin, ces défenses ont tout à fait l'apparence de cornes, et l'animal

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