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Il est à remarquer que, si le tribunal ne peut pas déclarer l'absence sans ordonner préalablement l'enquète dont parle l'art. 116, il peut au contraire fort bien, s'il se trouve suffisamment éclairé, si par exemple il a sous les yeux une lettre récente de l'absent, rejeter la demande en déclaration d'absence de plano, c'est-à-dire sans enquête préalable.

« Le procureur du Roi enverra, aussitôt qu'ils seront rendus, les juge»ments tant préparatoires que définitifs, au ministre de la Justice, qui » les rendra publics » (art 118).

Sous le nom de jugement préparatoire, ce texte désigne le jugement qui ordonne l'enquête. D'après la terminologie adoptée depuis lors par le code de procédure civile, il faudrait dire jugement INTERLOCUTOIRE.

Quant au jugement définitif, c'est celui qui déclare l'absence. Le ministre de la justice rend ces jugements publics par la voie du journal officiel. Cette mesure de publicité est à l'adresse de l'absent. La loi espère que le journal officiel, qui va dans tous les pays du monde civilisé, tombera entre ses mains, et qu'informé de ce qui se passe, il se décidera à donner de ses nouvelles s'il est encore en vie.

La cour de Nîmes avait jugé que la publication du jugement ordonnant l'enquête n'était pas nécessaire pour que l'absence pût être déclarée; son arrêt a été cassé par la cour suprême le 15 juillet 1878 (Sir., 78. 1. 452).

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Enfin aux termes de l'art. 119: « Le jugement de déclaration » d'absence ne sera rendu qu'un an après le jugement qui aura ordonné l'enquête ». En ajoutant ce délai d'un an au délai de quatre ans ou de dix ans, avant l'expiration duquel la déclaration d'absence ne peut pas être utilement demandée, on arrive à un délai total de cinq ans ou de onze ans, qui représente la durée minimum de la période de la présomption d'absence, à laquelle la déclaration d'absence met fin.

CHAPITRE III

DES EFFETS DE L'ABSENCE (1)

SECTION PREMIÈRE

DES EFFETS DE L'ABSENCE, RELATIVEMENT AUX BIENS QUE L'ABSENT POSSÉDAIT AU JOUR DE SA DISPARITION

345. La loi s'occupe ici successivement de l'envoi en possession provisoire; du droit d'option accordé au conjoint de l'absent; — de l'envoi en possession définitif; de la fin de l'absence.

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Ces matières feront l'objet d'autant de paragraphes.

(1) Les art. 120 à 138, qui composent les sections I et II de ce chapitre, ne font pas partie du programme du premier examen de Baccalauréat.

Nous y ajouterons un appendice dans lequel il sera traité de l'action en pétition de la possession de l'hérédité.

§ I. De l'envoi en possession provisoire.

No 1. Généralités.

346. Pendant la première période de l'absence, il est toujours pourvu d'une manière assez imparfaite à l'administration du patrimoine de l'absent. On ne prend que des demi-mesures, parce qu'on espère le prompt retour de l'absent; et encore souvent surviennent-elles trop tard, par suite des lenteurs de la justice ou de la négligence des intéressés. Quelquefois le tribunal nomme un curateur salarié, qui administre comme peut administrer un homme dont les actes ne sont soumis à aucun contrôle, et que sa gestion n'intéresse qu'au point de vue des émoluments qu'elle lui procure. Bref les cinq ou onze années, et plus, que dure la présomption d'absence, équivalent ordinairement, comme le dit M. Laurent, à autant d'années d'abandon. L'intérêt des héritiers de l'absent, et généralement de tous ceux qui ont des droits subordonnés à son décès, l'intérêt de l'absent lui-même s'il est encore en vie, l'intérêt social enfin, qui n'est que la somme des intérêts particuliers, exigent que cette situation ne se prolonge pas indéfiniment. Il est temps, la déclaration d'absence une fois prononcée, de prendre des mesures un peu mieux définies qui, dans l'intérêt de tous, assureront la conservation du patrimoine de l'absent. En les organisant, la loi s'est certainement préoccupée à la fois des intérêts de l'absent et de ceux des personnes qui ont des droits subordonnés à son décès; mais c'est une grosse question (nous l'examinerons plus loin) que celle de savoir lequel de ces deux intérêts est dominant aux yeux du législateur. Nous verrons que c'est celui de l'absent.

Quoi qu'il en soit sur ce point, voici le système de la loi. Les meilleurs administrateurs d'un bien sont ceux auxquels ce bien appartient ou doit appartenir un jour; il faut par conséquent confier l'administration des biens de l'absent à ceux auxquels ces biens doivent revenir après sa mort, à ceux en un mot qui ont sur lesdits biens des droits subordonnés à son décès. Ainsi on confiera au légataire les biens que l'absent lui a légués, aux héritiers les plus proches de l'absent ceux dont il n'a pas disposé par testament. C'est là ce qu'on appelle l'ENVOI EN POSSESSION PROVISOIRE. - Envoi en possession, parce que chaque intéressé est mis en possession des biens sur lesquels il a un droit subordonné au décès de l'absent. Provisoire, parce que celte attribution n'est faite que provisoirement, en ce sens surtout que les biens devront être restitués à l'absent s'il reparaît.

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L'envoi en possession provisoire est pour les envoyés la source d'un avantage important: ils gagnent une grande partie des fruits par eux perçus (art. 127). La loi veut ainsi sans doute, dans l'intérêt même de l'absent, les convier à demander l'envoi en possession provisoire; vraisemblablement ils ne l'auraient pas sollicité, s'il n'avait dû entraîner pour eux que la charge de l'administration des biens sans aucun profit. 347. La plupart des auteurs établissent comme principe, au début de cette matière, que L'absent est présumé mort le jour de sa disparition ou de ses dernières nouvelles, et que par suite sa succession est réputée provisoirement ouverte à dater de cette époque. Cette présomption n'étant écrite dans aucun texte, on ne doit pas l'admettre; car il ne saurait y avoir de présomption légale sans loi. Comme le dit fort bien la cour de cassation dans un arrêt récent (29 janvier 1879, Sir., 79. 1. 159), « l'absent n'est légalement réputé ni vivant ni mort ». Il y a incertitude sur son existence; voilà tout. Ce point est important à constater dès le début, car un faux principe engendre de fausses conséquences. On en verra bientôt la preuve.

No 2. A quelle époque l'envoi en possession provisoire peut être demandé.

348. L'envoi en possession provisoire est le fruit de la déclaration. d'absence. Il peut donc être demandé aussitôt que l'absence est déclarée. C'est ce que disent les art. 120 et 121.

D'après le projet primitif, ainsi que nous l'avons déjà noté (n. 339), l'existence d'une procuration laissée par l'absent devait retarder, non pas la déclaration d'absence, mais seulement l'envoi en possession provisoire. Ce système ayant été abandonné, on aurait dû reporter l'art. 121 dans le chapitre II, en effaçant les mots et l'envoi provisoire, et supprimer en outre dans l'art. 120 les mots Dans les cas où l'absent n'aurait point laissé de procuration pour l'administration de ses biens. Par mégarde, sans doute, on a omis de faire ces modifications; de sorte que, au point de vue de la rédaction, la loi est assez défectueuse. Il n'y a d'ailleurs aucun doute sur l'interprétation qu'elle doit recevoir.

L'envoi en possession provisoire doit être demandé à la justice. Le tribunal compétent pour l'accorder est celui qui a déclaré l'absence. Dans la pratique il est d'usage, pour diminuer les frais, de demander à la fois la déclaration d'absence et l'envoi en possession provisoire, de manière qu'il soit statué sur le tout par le même juge

ment.

No 3. Par qui l'envoi en possession provisoire peut être demandé.

349. L'envoi provisoire peut être demandé par tous ceux qui ont des droits subordonnés au décès de l'absent. Pour déterminer quels ils sont, il faut se reporter au jour de la disparition ou des dernières

nouvelles de l'absent, c'est-à-dire au jour où il a donné le dernier signe de vie. En effet c'est à cette époque que l'absent sera considéré comme mort, si on ne reçoit jamais de ses nouvelles. La fixation de toute autre époque eût été arbitraire.

L'envoi en possession pourra donc être obtenu :

1° Par les héritiers présomptifs de l'absent au jour de son départ ou de ses dernières nouvelles, c'est-à-dire par ceux qui auraient recueilli sa succession si elle s'était véritablement ouverte à cette époque. L'art. 120 dit à ce sujet : « ... ses héritiers présomptifs au jour de sa dispari» tion ou de ses dernières nouvelles, pourront, en vertu du jugement défi» nitif qui aura déclaré l'absence, se faire envoyer en possession provi» soire des biens qui appartenaient à l'absent au jour de son départ ou » de ses dernières nouvelles, à la charge de donner caution pour la sûreté » de leur administration ».

Sous le nom d'héritiers, la loi comprend ici non seulement les héritiers légitimes de l'absent, mais aussi ses successeurs irréguliers. Il y a un texte en ce qui concerne le conjoint (art. 140), et il n'est pas douteux que les autres successeurs irréguliers, principalement les enfants naturels et l'Etat, n'aient aussi le droit de demander, le cas échéant, l'envoi en possession provisoire.

Notre article accorde l'envoi en possession provisoire aux héritiers présomptifs de l'absent au jour de sa disparition ou de ses dernières nouvelles, et non à ses héritiers au jour où l'envoi est demandé. En d'autres termes, pour déterminer quels sont ceux auxquels l'envoi provisoire doit être accordé, il faut supposer l'absent mort, non pas le jour où l'envoi en possession est demandé, mais le jour où il a donné le dernier signe de vie, c'est-à-dire le jour de son départ ou de ses dernières nouvelles. C'est à celui qui était son héritier présomptif à cette époque que l'envoi provisoire devra être accordé, ou à ses successeurs s'il est décédé; car le droit à l'envoi s'est irrévocablement fixé sur sa tête. Exemple: Au moment de la disparition ou des dernières nouvelles de l'absent, son héritier présomptif était son conjoint, l'absent n'ayant alors, on le suppose, aucun parent au degré successible (art. 767); ce conjoint meurt avant la déclaration d'absence, laissant son frère pour héritier. Par qui l'envoi en possession provisoire pourra-t-il être obtenu? S'il devait être attribué à l'héritier présomptif au jour où l'envoi est demandé, c'est l'Etat qui l'obtiendrait (art. 768), puisque l'absent à cette époque n'a plus ni parent ni conjoint. Mais, en vertu de notre principe, on l'accordera à l'héritier du conjoint, son frère dans l'espèce, le beau-frère de l'absent, bien qu'il n'ait aucun titre personnel pour lui succéder, parce que le droit à l'envoi provisoire s'est irrévocablement fixé sur la tête du conjoint dont il est héritier.

2° Par les légataires. On les mettra provisoirement en possession des biens qui leur ont été légués.

* Si un légataire est mort depuis la disparition ou les dernières nouvelles de l'absent, l'envoi en possession provisoire sera accordé à son héritier. En effet le droit à l'envoi s'est fixé sur la tête du légataire, par cela seul qu'il était vivant au moment du départ ou des dernières nouvelles (arg. art. 120 et 1039).

* Mais comment saura-t-on quels sont les légataires de l'absent ? On ouvrira son testament, s'il est cacheté, à la réquisition des intéressés ou du procureur de la république (art. 123).

3° Par les donataires (art. 123).

Il s'agit des donataires de biens à venir (art. 1082 et s.) et non des donataires de biens présents. En effet l'envoi en possession n'a lieu qu'au profit de ceux qui ont des droits subordonnés au décès de l'absent. Or le donataire de biens à venir est seul dans ce cas le donataire de biens présents a un droit indépendant du décès du donateur (art. 894).

4° Par toutes autres personnes ayant sur les biens de l'absent des droits subordonnés à son décès.

Ce qui s'applique notamment : au nu-propriétaire d'un bien dont l'absent était usufruitier; au donateur qui a donné un bien à l'absent avec stipulation du droit de retour; aux appelés à une substitution dont l'absent était grevé.

350. Régulièrement les héritiers présomptifs de l'absent au jour de son départ ou de ses dernières nouvelles doivent obtenir d'abord l'envoi en possession de tous les biens composant le patrimoine de l'absent; puis ils délivrent, sur leur demande, aux autres intéressés, tels que les légataires, les biens particuliers sur lesquels ils ont des droits subordonnés au décès de l'absent. Cette marche, qui est éminemment rationnelle, puisque les héritiers, étant appelés à l'universalité des biens, sont les contradicteurs naturels de tous ceux dont la prétention tend à distraire quelque chose de cette universalité, est indiquée par l'art. 123, ainsi conçu: « Lorsque les héritiers présomptifs auront » obtenu l'envoi en possession provisoire, le testament, s'il en existe un, » sera ouvert à la réquisition des parties intéressées, ou du procureur du » Roi près le tribunal; et les légataires, les donataires, ainsi que tous » ceux qui avaient sur les biens de l'absent des droits subordonnés à la » condition de son décès, pourront les exercer provisoirement, à la » charge de donner caution ».

Mais supposez que les héritiers présomptifs ne veuillent pas demander l'envoi en possession. Peut-être ont-ils leurs raisons pour cela; ils savent par exemple que le testament de l'absent les dépouille et ils se disent à quoi bon agir pour le profit des légataires? Leur inaction va-t-elle tenir en échec les droits des autres intéressés ? Ce serait certainement injuste. Mais hâtons-nous de dire que la loi ne consacre pas cette injustice. En effet les termes de l'art. 123 ne sont pas restrictifs. Ce texte ne dit pas que les légataires et autres intéressés ne pourront exercer provisoirement leurs droits que lorsque les héritiers présomptifs auront obtenu l'envoi en possession; il porte simplement, statuant de eo quod plerumque fit, que, lorsque les héritiers présomptifs auront obtenu l'envoi en possession, les autres intéressés devront s'adresser à eux pour obtenir l'exercice de leurs droits. Le cas qui nous occupe se trouve être ainsi resté en dehors des prévisions de la loi, parce qu'il est de nature à se présenter rarement, et il doit être résolu d'après les principes généraux. Or ces principes ne permettent pas que le droit qui nous appartient puisse être paralysé par le mauvais vouloir d'autrui. Comprendrait-on d'ailleurs que les légataires et autres intéressés, qui ont incontestablement le droit de demander la déclaration d'absence sans la participation des héritiers (supra n. 343), eussent besoin de cette participation quand ils veulent obtenir l'envoi en possession provisoire, qui est le fruit de la déclaration d'absence? Aussi la solution que nous venons de développer triomphe-t-elle en juris

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