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bâtiments sont, au moment où on les emploie, chose essentiellement mobilière. Ils deviennent immeubles au fur et à mesure de leur incorporation dans un édifice. Car l'édifice dont ils forment désormais une partie intégrante est lui-même immeuble, comme partie intégrante du sol, dont on ne peut plus le séparer sans le détruire, ou tout au moins en qualité d'accessoire du sol. Omne quod solo inædificatur solo cedit, dit la loi romaine. Par où l'on voit que les bâtiments sont immeubles par incorporation ou accession plutôt que par nature : il n'y a de tels, à proprement parler, que les fonds de terre.

La loi ne définit pas le bâtiment; de là quelques difficultés. Cette dénomination comprend certainement toutes les constructions adhérant au sol par fondements ou par pilotis. Mais non, à notre avis les constructions qui sont simplement posées sur le sol. Ainsi les baraques faites en temps de foire, les cabines destinées aux baigneurs..., ne sont pas immeubles.

D'ailleurs, il n'est pas nécessaire, pour qu'un bâtiment soit immeuble, qu'il ait été incorporé au sol à perpétuelle demeure. Des constructions sur fondements ou sur pilotis, bien que faites pour un temps limité, par exemple pour la durée d'une exposition, n'en seraient pas moins immeubles. C'est du moins ce que l'on peut induire de l'art. 519, qui déclare les plantations immeubles, bien que leur incorporation au sol soit, par la nature même des choses, essentiellement temporaire.

* De là il suit qu'il n'est pas nécessaire que des constructions soient élevées par le propriétaire d'un terrain pour être immobilières. Ainsi les constructions faites par un usufruitier seraient certainement immobilières, bien qu'il ne les ait faites, selon toute vraisemblance, que pour la durée de son usufruit.. Il en serait de même des constructions élevées par un fermier, quoiqu'il n'ait qu'un droit temporaire sur le fonds, et qu'il ait dû sans doute construire en vue de la durée de sa jouissance seulement. L'immobilisation des constructions résulte d'un fait matériel, leur incorporation au sol, et il importe peu que ce fait matériel soit réalisé par le propriétaire ou par un tiers.

L'immobilisation des constructions dérivant de leur incorporation au sol, il en résulte que, quand cette incorporation cessera par la démolition de l'édifice, les matériaux reprendront la nature mobilière qu'ils avaient auparavant (art. 532).

1213. III. Moulins fixés sur piliers ou faisant partie d'un bâtiment. — On lit à ce sujet dans l'art. 519 : « Les moulins à vent ou à eau fixés » sur piliers ET faisant partie du bâtiment, sont aussi immeubles par leur

»> nature »>.

Ce texte parait exiger deux conditions pour qu'un moulin soit immeuble, savoir : 1o qu'il soit fixé sur piliers; 2o qu'il fasse partie d'un bâtiment. Mais sur ce point il est en contradiction avec l'art. 531, qui ne déclare les moulins meubles que quand nos deux conditions manquent à la fois ce qui revient à dire que, si l'une d'elles existe, le moulin sera immeuble. Dans l'incertitude où nous laissent les textes, il faut recourir aux principes; or les principes donnent raison à l'art. 531. En effet, quand les moulins sont fixés sur piliers en maçonnerie sans faire partie d'un bâtiment, ils adhèrent au sol, ce qui suffit pour les rendre immeubles. D'autre part, quand ils font partie d'un bâtiment sans être fixés sur piliers, ils empruntent la nature du bâtiment dont ils sont une dépendance, et sont immeubles au même titre

que lui. Une des deux conditions indiquées par l'art. 531 suffit donc pour qu'un moulin soit immeuble, et il faut par conséquent substituer dans l'art. 519 la disjonctive ou à la conjonctive et. On est d'accord sur ce point.

1214. IV. Récoltes pendantes par branches et par racines et semences confiées au sol. « Les récoltes pendantes par les racines, et les fruits » des arbres non encore recueillis, sont pareillement immeubles. Dès » que les grains sont coupés et les fruits détachés, quoique non enlevés, » ils sont meubles. Si une partie seulement de la récolte est coupée,

» cette partie seule est meuble » (art. 520).

De même que les bâtiments, les récoltes pendantes par branches ou par racines sont immeubles plutôt par leur incorporation au sol que par leur nature. La terre, on l'a fort bien dit, immobilise tout ce à quoi elle donne la vie, les arbres et leurs fruits, les récoltes de toute nature. Fructus pendentes pars fundi esse videntur.

Cette règle, dans sa généralité, s'applique même aux arbres des pépinières. Quant aux plants qui auraient été mis provisoirement en dépôt dans le sol, en attendant leur vente ou leur transplantation, ils ne doivent pas être considérés comme immeubles, car ils ne sont pas incorporés au sol, qui les abrite plutôt qu'il ne les nourrit. Nous en dirions autant des arbres plantés dans des caisses, alors même que ces caisses auraient été mises dans la terre.

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1215. Tous les produits de la terre deviennent meubles aussitôt qu'ils en sont séparés, car alors la cause de l'immobilisation cesse. La loi dit à ce sujet : « Dès que les grains sont coupés et les fruits détachés, quoique non enlevés, ils sont meubles. Si une partie seulement de la » récolte est coupée, cette partie seule est meuble » (art. 520 al. 2 et 3). Plusieurs de nos anciennes coutumes considéraient les fruits comme meubles, aussitôt arrivée l'époque de leur maturité, même avant qu'ils fussent séparés du sol: sans doute parce que la cause de l'immobilisation semble cesser quand les fruits, devenus mûrs, n'ont plus besoin d'être alimentés par la terre. Il y avait même certaines coutumes qui, probablement pour éviter les difficultés auxquelles pouvait donner lieu la détermination précise de l'époque de la maturité des fruits et par suite de leur mobilisation, les déclaraient meubles à une époque fixe qui précédait ordinairement celle de la maturité réelle. Par exemple, dit Pothier, il y a des coutumes qui réputent meubles les foins à la mi-mai, les blés à la saint Jean, les raisins au mois de septembre. L'art. 520 al. 2 et 3 a eu principalement pour but d'abroger ces dispositions et de les remplacer par une règle qui est à la fois plus rationnelle et d'une application plus facile.

L'art. 521 a été écrit dans le même ordre d'idées : « Les coupes ordi»naires des bois taillis ou de futaies mises en coupes réglées, ne devien» nent meubles qu'au fur et à mesure que les arbres sont abattus ».

Sans cet article on aurait pu croire, par suite d'une réminiscence de notre ancien droit, que la seule arrivée de l'époque fixée pour la coupe d'un bois taillis ou d'une haute futaie aménagée, c'est-à-dire mise en coupes réglées, suffisait pour mobiliser la portion de bois qui doit être coupée, alors même que la coupe serait retardée. La loi a voulu lever ce doute. Elle ne parle pas des futaies non aménagées, parce qu'à leur égard l'application du principe ne pouvait faire difficulté.

1216. Les fruits pendants par branches et par racines sont immeubles en qua

lité d'accessoires du sol qui les nourrit. Ils cessent d'avoir ce caractère, et deviennent par suite choses mobilières, quand on les considère abstraction faite du fonds auquel ils sont attachés. C'est ce qui arrive dans les trois cas suivants :

1o Au cas de saisie-brandon. La saisie-brandon est une saisie des fruits pendants. Elle ne peut être pratiquée que dans les six semaines précédant l'époque ordinaire de la maturité des fruits. (C. pr. art. 626). Son nom vient de ce qu'on plaçait autrefois, dans les champs dont les fruits étaient saisis, des poteaux auxquels on suspendait des faisceaux de paille ou brandons. Nos lois modernes ont supprimé le signe visible de cette saisie; mais elles ont conservé le nom auquel il avait donné lieu. La saisie-brandon est une saisie mobilière, parce que les fruits sont envisagés abstraction faite du sol et pour l'époque où ils en seront détachés. Ce qu'on saisit, et ce qui sera vendu sur la saisie, ce sont les fruits considérés par anticipation comme séparés du sol et par conséquent comme choses mobilières. La saisie-brandon offre sur la saisie immobilière le double avantage de la célérité et de l'économie.

2o Les fruits pendants sur un fonds sont considérés comme meubles à l'égard du fermier de ce fonds. En effet, dans le contrat de bail, les parties envisagent les fruits séparément du fonds, qui est regardé seulement comme l'instrument de leur production. Elles ne les considèrent donc pas comme liés au fonds par le lien qui unit l'accessoire au principal.

3o Enfin les fruits pendants sont regardés comme meubles, en tant qu'ils sont vendus séparément du fonds. En effet le droit de l'acheteur d'une récolte ou d'une coupe à faire, comme celui du fermier, ne s'applique pas à l'immeuble, mais seulement aux fruits à percevoir, aux fruits considérés comme étant déjà perçus, et comme ayant cessé par conséquent d'être liés au sol par le lien qui produit l'immobilisation. Quand je vends une récolte pendante, je ne vends pas un accessoire de mon fonds, je vends des fruits considérés comme chose principale et distincte de l'immeuble auquel ils adhèrent je vends donc des meubles. Il en est de la vente d'une récolte sur pied comme de la vente d'une maison pour être démolie. Ce sont alors en réalité des matériaux qui sont vendus; la vente est donc mobilière. Cass., 5 janvier 1886, Sir., 86. 1. 269.

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* 1217. De là plusieurs conséquences :

a. Entre deux acquéreurs successifs de la même récolte ou de la même coupe à faire, on préfèrera celui qui le premier aura été mis en possession réelle, s'il est de bonne foi (arg. art. 1141).

b. L'art. 1622, relatif aux ventes d'immeubles faites avec indication de contenance, ne serait pas applicable aux ventes de coupes de bois faites avec indication de la contenance du terrain qui porte le bois à couper.

c. L'action, que l'acheteur d'une coupe de bois intente contre le vendeur à l'effet d'obtenir l'autorisation d'effectuer la coupe, est une action mobilière, qui doit par suite être portée devant le tribunal du domicile du vendeur, et non devant celui de la situation de l'immeuble (C. pr. art. 59).

d. Les ventes publiques volontaires de récoltes ou de coupes à faire sont de la compétence des commissaires-priseurs aussi bien que des notaires. Ces derniers revendiquaient le droit exclusif de procéder à ces ventes en se fondant sur leur nature immobilière, et la cour de cassation leur avait donné raison dans plusieurs arrêts. Mais la loi du 5 juin 1851, appliquant les vrais principes, a condamné leur prétention. L'art. 1 de cette loi est ainsi conçu : « Les ventes publiques volontaires, soit à terme, soit au comptant, de fruits et de récoltes pendants par racines et des coupes de bois TAILLIS, seront faites en concurrence et au choix des parties, par les notaires, commissaires-priseurs, huissiers et greffiers de la justice de paix, même dans le lieu de la résidence des commissaires-priseurs ». — Ce texte ne parlant que des ventes de coupes de bois taillis, il en résulte (on l'a positivement

expliqué lors de la confection de la loi) que les ventes de coupes de hautes futaies, aménagées ou non, sont de la compétence exclusive des notaires : ce qu'il est peutêtre difficile de justifier au point de vue des principes, les ventes de coupes de hautes futaies étant certainement mobilières tout aussi bien que les ventes de coupes de taillis.

e. Le droit fiscal à percevoir sur les ventes de récoltes pendantes ou de coupes à faire, est le droit de deux pour cent applicable aux ventes mobilières, et non le droit beaucoup plus élevé auquel donnent lieu les ventes d'immeubles. C'est ce qui résulte de l'art. 69 § 5-1o de la loi du 22 frimaire de l'an VII, ainsi conçu : « 2 francs » par 100 francs... Les ventes de récoltes de l'année sur pied, coupes de bois taillis » et de hautes futaies... ».

La vente d'une coupe, même de haute futaie, ne cesserait pas d'être mobilière par suite de cette circonstance qu'elle aurait été suivie de la vente du terrain au même acheteur, et que celui-ci, devenu propriétaire du bois et du terrain, n'aurait pas effectué la coupe. C'est ce que la cour de cassation a décidé dans plusieurs arrêts. L'administration de l'enregistrement soutenait qu'en pareil cas l'acheteur devait payer le droit de mutation afférent aux ventes immobilières, non seulement pour le terrain mais aussi pour la haute futaie. Cette double vente, disait la régie, de la futaie à couper d'abord et du terrain ensuite, à un acquéreur qui, une fois devenu propriétaire du total, ne coupe pas la futaie, ne peut être qu'un moyen détourné de frauder le fisc en lui soustrayant une partie des droits de mutation qui lui sont légitimement dus; les tribunaux ne sauraient prêter la main à cette fraude; ils doivent au contraire la démasquer et la réprimer. Cela est incontestable. Mais la régie de l'enregistrement oubliait que la fraude ne se présume pas : elle doit être prouvée. Or cette preuve n'était pas fournie, et, comme en définitive il n'est pas impossible que les parties, dans de semblables circonstances, aient agi sans intention frauduleuse à l'endroit du fisc, on s'explique que la cour de cassation ait repoussé les prétentions de la régie.

1218. V. « Les tuyaux servant à la conduite des eaux dans une maison » ou autre héritage sont immeubles, et font partie du fonds auquel ils » sont attaches » (art. 523).

Il y a quelque difficulté sur le point de savoir si ces tuyaux sont immeubles par leur nature ou par destination. La place de l'article, qui est encadré au milieu de ceux consacrés aux immeubles par destination, semble indiquer que c'est à cette dernière catégorie qu'appartiennent les tuyaux dont il s'agit. Mais les termes du texte seraient plutôt favorables à l'opinion qui les considère comme étant immeubles par leur nature. En effet la loi dit que ces tuyaux « font partie du fonds >>; elle n'exige pas en outre, comme elle le fait pour les objets qui doivent devenir immeubles par destination (art. 522 et 524), que les tuyaux aient été incorporés à l'immeuble par le propriétaire. Aussi la plupart des auteurs, faisant prévaloir l'argument tiré des termes de l'art. 523 sur celui résultant de la place qu'il occupe, considèrentils lesdits tuyaux comme appartenant à la catégorie des immeubles par leur nature. Il ne paraît pas d'ailleurs y avoir lieu de distinguer, en ce qui concerne les maisons, entre les tuyaux intérieurs et les tuyaux extérieurs, ni entre ceux qui amènent l'eau dans la maison, et ceux qui servent à l'écoulement des eaux pluviales ou des eaux ménagères.

§ II. Immeubles par destination.

1219. On donne ce nom à des objets mobiliers, que la loi répute immeubles parce qu'ils ont été attachés à un fonds par le propriétaire

de ce fonds pour son service, son exploitation, son utilité ou son ornement; ils en deviennent alors les accessoires et empruntent à ce titre sa nature juridique.

Le droit romain ignorait les immeubles par destination et notre ancien droit les connaissait à peine.

intérêt

L'immobilisation par destination présente cependant un grand elle établit entre une chose mobilière et un immeuble le lien qui rattache l'accessoire au principal, et empêche que mille événements ne viennent séparer deux choses qui doivent rester étroitement unies.

Ainsi la loi déclare immeubles par destination les animaux et les ustensiles aratoires qu'un propriétaire a attachés à la culture de son fonds. De là il résulte que ces animaux et ustensiles ne pourront pas être saisis mobilièrement et par suite séparément du fonds (C. pr. art. 592-1o). Si au contraire ces objets conservaient leur nature de choses mobilières, comme dans notre ancien droit, les créanciers du propriétaire pourraient les saisir mobilièrement, par suite séparément du fonds, et mettre ainsi le propriétaire dans l'impossibilité de cultiver son domaine. De même, si le propriétaire d'un fonds se marie sous le régime de la communauté, les animaux et ustensiles qu'il a attachés à la culture, étant immeubles par destination, lui demeureront propres avec le fonds lui-même (arg. art. 1404). Ils tomberaient au contraire dans la communauté, comme le décidait notre ancien droit, s'ils conservaient leur nature de choses mobilières (arg. art. 1401-1o). Enfin les animaux attachés à la culture et les ustensiles aratoires, étant immeubles par destination, passeront avec le fonds dont ils sont une dépendance au légataire de ce fonds. On les verrait au contraire tomber entre les mains du légataire des meubles ou rester aux héritiers, s'ils conservaient leur nature de choses mobilières.

1220. Conditions requises pour qu'un objet mobilier devienne immeuble par destination. Pour qu'un objet mobilier devienne

immeuble par destination il faut :

1° Qu'il ait été placé sur un fonds; car il ne peut devenir immeuble par destination qu'en qualité d'accessoire d'un fonds.

2° Qu'il y ait été placé dans l'intérêt du fonds, c'est-à-dire pour son service, son exploitation, son utilité ou son ornement.

3° Enfin qu'il ait été placé par le propriétaire du fonds. L'immobilisation par destination suppose nécessairement le fait du propriétaire; elle ne pourrait pas résulter du fait d'un locataire, d'un fermier, ni même d'un usufruitier. La raison en est que l'immobilisation par destination a lieu dans l'intérêt du fonds; or, le propriétaire est seul le représentant de cet intérêt. Celui qui place un objet sur un fonds en qualité de locataire, de fermier ou mème d'usufruitier, l'y place vraisemblablement pour la durée de sa jouissance seulement; il agit dans son propre intérêt, plutôt que dans celui du fonds qui ne lui appartient pas. Lui prêter une intention contraire, ce serait supposer qu'il a entendu faire une donation au propriétaire, puisque celui-ci, à l'expiration du bail ou de l'usufruit, reprendrait avec son fonds les accessoires prove

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