Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

Il n'y a pas de délai fatal pour l'accomplissement de ces conditions (argument du mot toujours).

Rappelons ici que les enfants mineurs d'un ex-Français qui recouvre sa qualité conformément à l'art. 18 peuvent être admis, en déclarant par anticipation qu'ils renoncent à la qualité d'étranger et adoptent la nationalité française, à s'engager volontairement dans les armées de terre et de mer, à contracter l'engagement conditionnel d'un an et à entrer dans les écoles du gouvernement (supra n. 129).

180. L'art. 18 a été modifié par les art. 12 et 25 du décret du 26 août 1811. Il résulte de l'art. 12 dudit décret, que le Français, qui a perdu sa qualité par une naturalisation acquise en pays étranger sans l'autorisation du gouvernement, ne peut la recouvrer qu'en vertu de lettres de relief accordées dans la forme des lettres de grâce. Il en est de même du Français qui a perdu sa nationalité pour avoir accepté, sans autorisation du chef de l'Etat, des fonctions publiques conférées par un gouvernement étranger. C'est du moins ce qui semble résulter de ces mots de l'art. 25 du décret : « Tout Français qui entre AU SERVICE d'une puissance étrangère.... >> le texte ne distingue pas entre les services civils et les services militaires. 181. IV. Une femme française perd sa nationalité par son mariage avec un étranger. Telle est la signification de l'art. 19 al. 1 qui est la contre-partie de l'art. 12 et dont la disposition s'explique par les mêmes motifs « Une femme française qui épousera un étranger suivra la » condition de son mari ».

Ce texte emploie des expressions trop compréhensives en disant que la femme suivra la condition de son mari; car notre loi ne peut pas, de sa propre autorité, conférer à une femme française une nationalité étrangère, celle de son mari. Il dépend bien du législateur français de faire perdre à une femme française sa nationalité dans telle circonstance déterminée; mais il ne dépend pas de lui de faire acquérir à cette femme une nationalité autre que la nationalité française. La femme française, qui épouse un étranger, ne peut acquérir la nationalité de son mari qu'en vertu de la loi du pays de celui-ci. Qu'arriverat-il donc si cette loi s'oppose à ce qu'elle l'acquière? Elle perdra la nationalité française sans acquérir celle de son mari, c'est-à-dire qu'elle n'aura plus de nationalité. Telle est la situation de la femme française qui épouse un Anglais. Elle perd sa qualité de Française d'après l'art. 19, et elle n'acquiert pas la nationalité anglaise, parce que la loi anglaise ne la lui confère pas. Elle est donc considérée comme étrangère partout. Non moins singulière est, en sens inverse, la situation de la femme anglaise qui épouse un Français : elle devient Française d'après l'art. 12, et elle reste Anglaise d'après la loi anglaise qui n'admet pas que le mariage influe sur la nationalité de la femme. Elle sera donc Française en France, Anglaise en Angleterre. Ce sont là des situations inextricables qu'engendre nécessairement le conflit des diverses législations et auxquelles il ne peut être remédié que par des traités.

PRÉCIS DE DROIT CIVIL.

3e éd., I.

7

La femme française qui épouse un étranger perd sa qualité de Française, alors même qu'elle est mineure. La loi ne distingue pas.

182. Une femme française épouse un Français; son mari perd la qualité de Français pendant le cours du mariage, par exemple en se faisant naturaliser étranger. La femme perdra-t-elle du même coup sa qualité de Française? Non. L'art. 19 ne dit pas que la femme doive nécessairement avoir la même nationalité que son mari, d'où il résulterait que toutes les fois que le mari change de nationalité la femme en change également : il dit seulement que la femme française qui épouse un étranger suivra la condition de son mari. Or ici la femme française n'a pas épousé un étranger, elle a épousé un Français; on est donc en dehors du texte de l'art. 19. On est aussi en dehors de son esprit. La pensée du législateur a été bien évidemment celleci: Le mariage constituant la société la plus intime qui puisse exister entre deux êtres, puisqu'il les confond en quelque sorte en un seul, erunt duo in carne una, il est assez rationnel de supposer que la femme française, qui épouse un étranger, consent à accepter la nationalité qui appartient à son mari lors du mariage. En la lui donnant, on ne blesse donc pas le principe que l'acquisition d'une nouvelle nationalité implique le consentement de celui qui l'acquiert. Mais on ne peut pas supposer, parce que cette supposition serait déraisonnable, que la femme entende accepter à l'avance, et les yeux fermés en quelque sorte, toute nationalité qu'il plaira à son mari d'acquérir pendant le cours du mariage.

Conformément à ce qui vient d'être dit, la femme française ne perdrait pas nécessairement sa nationalité pour avoir suivi son mari dans un pays étranger où celui-ci serait allé s'établir sans esprit de retour. C'est un devoir pour la femme de suivre son mari partout où il juge à propos de résider (art. 214), et on ne peut lui infliger à titre de peine la perte de sa nationalité, pour avoir rempli ce devoir. La destinée de la femme, au point de vue de la nationalité, ne sera donc en pareil cas liée à celle de son mari qu'autant qu'il sera démontré qu'elle s'est associée aux intentions de celui-ci, et qu'elle a comme lui perdu l'esprit de retour.

On voit que le mari n'a pas le droit de disposer de la nationalité de sa femme. Il n'a pas le droit non plus de disposer de celle de ses enfants. De là il résulte que l'événement, qui fait perdre à un Français sa nationalité, est sans influence sur celle de ses enfants déjà nés, qu'ils soient majeurs ou mineurs.

183. La femme française, qui a perdu sa nationalité pour s'être mariée avec un étranger, peut la recouvrer facilement après la dissolution du mariage. La loi lui offre à cet effet le bénéfice d'une naturalisation privilégiée dont l'art. 19 al. 2 indique les conditions : « Si elle » devient veuve, elle recouvrera la qualité de Française, pourvu qu'elle » réside en France, ou qu'elle y rentre avec l'autorisation du Roi, et en » déclarant qu'elle veut s'y fixer.

Deux hypothèses doivent être distinguées.

a.

[ocr errors]

La femme réside à l'étranger au moment de la mort de son mari. Il lui suffira, pour recouvrer la qualité de Française: 1. de rentrer en France avec l'autorisation du gouvernement; cette autorisation peut lui être refusée; 20 de déclarer qu'elle veut se fixer en France. Cette déclaration doit être faite devant l'autorité municipale du lieu où elle entend se fixer.

[blocks in formation]

La femme reside en France au moment où elle devient veuve.

D'après l'opinion qui compte le plus de suffrages en doctrine et en jurisprudence, la veuve redevient alors Française de plein droit, sans avoir aucune condition à remplir (1). On argumente de ces mots de l'art. 19: « Si elle devient veuve, elle recouvrera la qualité de Fran>>çaise, pourvu qu'elle réside en France... » La résidence en France, dit-on, voilà tout ce que la loi exige.

A notre avis, la loi exige davantage. Elle veut de plus que la femme déclare son intention de se fixer en France et par suite de recouvrer sa qualité de Française. Grammaticalement les mots Er en déclarant qu'elle veut s'y fixer, qui terminent l'art. 19, s'appliquent aux deux hypothèses prévues par le commencement de l'alinéa, c'est-à-dire au cas où la femme réside en France aussi bien qu'à celui où elle n'y réside pas. Il faut donc, d'après le texte, que la femme fasse une déclaration. Et cette exigence est tout à fait en harmonie avec les principes de la matière, suivant lesquels l'acquisition d'une nationalité nouvelle suppose la volonté de l'acquérir. L'opinion contraire fait acquérir à la veuve la nationalité française, sans qu'elle en ait manifesté la volonté, et alors peut-être qu'elle entend conserver la nationalité que lui a donnée son mariage. Si telle était la solution admise par la loi, elle consacrerait une inelegantia juris. Ajoutez que la femme a peut-être des enfants de son mariage; la mort du père n'apporte aucun changement à la nationalité de ces enfants, sauf à eux à réclamer plus tard la qualité de Français (art. 10 al. 2); ils restent donc étrangers, et la mère peut avoir intérêt à conserver la même nationalité qu'eux. Enfin, au point de vue pratique, quel inconvénient y a-t-il à exiger de la femme veuve, qui entend recouvrer la qualité de Française, l'accomplissement d'une formalité aussi simple que la déclaration exigée par l'art. 19 ?

Rappelons ici que les enfants mineurs de la femme française, qui a recouvré sa nationalité par le mode privilégié de l'art. 19, sont admis à opter avant leur majorité pour la qualité de Français, lorsqu'ils veulent, soit s'engager dans les armées de terre ou de mer, soit se présenter aux écoles du gouvernement (supra n. 130).

184. Si une femme française s'est mariée avec un étranger dont la loi nationale admet le divorce, il peut se faire que son mariage soit dissous par cette cause. Pourra-t-elle recouvrer alors la qualité de Française par le mode privilégié de l'art. 19? Oui, la loi ne parle, il est vrai, que de la femme veuve, expression qui suppose que le mariage s'est dissous par la mort du mari. Mais ici comme ailleurs la loi a statué de eo quod plerumque fit; elle n'a pas parlé du divorce, parce que ce n'est pas la cause normale de dissolution du mariage. D'ailleurs on ne voit aucune raison pour que la femme divorcée soit exclue du bénéfice accordée à la femme veuve.

185. V. La qualité de Français se perd par l'entrée au service militaire dans une armée étrangère ou par l'affiliation à une corporation militaire étrangère sans l'autorisation du gouvernement. C'est ce que décide l'art. 21 al. 1: « Le Français, qui, sans autorisation du Roi,. prendrait du service militaire chez l'étranger, ou s'affilierait à une » corporation militaire étrangère, perdra sa qualité de Français ». D'après la jurisprudence, l'engagement sans autorisation dans une armée étrangère, n'entraîne la perte de la qualité de Français qu'autant qu'il a été contracté en majorité.

[ocr errors]

La loi se montre plus sévère à l'égard de l'ex-Français, qui a perdu

(1) Cass., 13 janvier 1873, Sir., 73. 4. 33, et Bourges, 4 août 1874, Sir., 75, 2, 69.

sa nationalité pour avoir pris sans autorisation du service militaire à l'étranger, qu'envers celui qui l'a perdue pour toute autre cause. En effet l'art. 21 al. 2 dit : « Il ne pourra rentrer en France qu'avec la » permission du Roi, et recouvrer la qualité de Français qu'en remplis» sant les conditions imposées à l'étranger pour devenir citoyen; le tout » sans préjudice des peines prononcées par la loi criminelle contre les » Français qui ont porté ou porteront les armes contre leur patrie ». Ainsi l'ex-Français qui se trouve dans le cas de l'art. 21, est assimilé à un étranger ordinaire. Il ne peut acquérir la qualité de Français qu'en remplissant les conditions prescrites pour la naturalisation, qui n'est aujourd'hui obtenue qu'après trois ans de stage (supra n. 136).

Cette rigueur a été adoucie par les art. 12 et 25 du décret du 26 août 1811, desquels il résulte que l'ex-Français, qui se trouve dans le cas de l'art. 21 du code civil, peut recouvrer la qualité de Français en vertu de simples lettres de relief.

Le Français qui porte les armes contre sa patrie est passible de la peine de mort (C. pén. art. 75). C'est à cette peine que fait allusion la disposition finale de l'art. 21.

186. Un Français peut-il perdre sa nationalité par une abdication expresse? Il semble blen au premier abord que l'affirmative doive être admise. Dans tous les cas prévus par les articles de notre section, la perte de la qualité de Français est le résultat d'une abdication tacite; or l'abdication expresse semble devoir produire un effet au moins aussi puissant. Telle paraît bien en effet avoir été la première pensée du législateur : le projet faisait figurer l'abdication expresse parmi les causes qui entraînent la perte de la qualité de Français. Mais au conseil d'Etat on se ravisa, et l'abdication expresse disparut de la rédaction définitive de la loi. D'où il résulte d'une manière indubitable qu'elle n'entraîne pas la perte de la qualité de Français. En amendant la loi sur ce point, nous croyons qu'on l'a améliorée. En effet, si à première vue l'abdication expresse de la qualité de Français apparaît comme plus significative que l'abditation tacite, un examen approfondi conduit à reconnaître qu'elle l'est beaucoup moins. Les faits ont ici plus d'éloquence que les paroles: l'abdication expresse peut être le résultat d'un mouvement irréfléchi, tandis que les faits d'où la loi induit l'abdication tacite supposent une volonté fermement arrêtée chez leur auteur. Il fallait d'ailleurs éviter que des Français, qui se proposent de rester en France et d'y jouir de tous les avantages attachés à la qualité de Français, fussent tentés d'abdiquer cette qualité pour se soustraire aux charges qu'elle entraîne.

187. VI. La qualité de Français se perd par le démembrement d'une portion du territoire français.

C'est la contre-partie de ce qui a été dit au n. 140 relativement à l'annexion d'un territoire étranger à la France. Dans les deux cas les naturels suivent le sort du sol; ils changent de nationalité comme lui.

Quand le démembrement résulte d'un traité, la condition des naturels du pays démembré est ordinairement réglée par des clauses particulières. C'est ce qui a été fait par le traité franco-allemand du 18 mai 1871, dont l'art. 2 est ainsi conçu: « Les sujets français originaires des territoires cédés, domiciliés actuellement sur ce territoire, qui

voudront conserver la nationalité française, jouiront jusqu'au 1er octobre 1871 (1), et moyennant déclaration préalable faite à l'autorité compétente, de la faculté de transporter leur domicile en France et de s'y fixer, sans que ce droit puisse ètre altéré par les lois sur le service militaire, auquel cas la qualité de citoyen français leur sera maintenue... ».

Trois conditions étaient donc nécessaires pour que les habitants des territoires cédés devinssent allemands: 1o qu'ils fussent originaires de ces territoires; 2o qu'ils y fussent domiciliés actuellement ; 3° qu'ils n'eussent pas opté dans le délai légal pour la nationalité française. Malgré ce texte si clair, l'Allemagne éleva la prétention de considérer comme allemands tous ceux qui étaient simplement originaires des provinces cédées sans y être domiciliés, à moins qu'ils n'eussent opté dans le délai légal pour la nationalité française. En outre elle annonça, quelques jours avant l'expiration du délai accordé pour l'option, l'intention de considérer comme allemands tous ceux qui, étant simplement domiciliés dans les provinces cédées sans en être originaires, n'auraient pas opté pour la nationalité française dans le délai légal. Beaucoup furent ainsi surpris et ne mirent pas à profit le délai accordé pour l'option. Allemands en Allemagne, ils sont considérés comme Français en France.

Les Alsaciens-Lorrains qui ont usé régulièrement du droit d'option sont censés n'avoir jamais cessé d'être Français; les autres sont devenus Allemands à partir du 2 mars 1871, époque fixée par le traité pour le changement de souveraineté.

L'Alsacien-Lorrain, dénationalisé en 1871, qui veut redevenir Français, n'a que la ressource de la naturalisation, l'art. 18 ne pouvant recevoir ici son application (arg. des mots << pour l'une des causes indiquées dans l'art. 17 »).

188. VII. Enfin, la qualité de Français se perd par le trafic ou même la simple possession d'esclaves en pays étranger.

C'est ce qui résulte de l'art. 8 du décret du 27 avril 1848, ainsi conçu : « A l'avenir, même en pays étranger, il est interdit à tout Français de posséder, d'acheter ou de vendre des esclaves, et de participer soit directement soit indirectement à tout trafic ou exploitation de ce genre. Toute infraction à ces dispositions entraînera la perte de la qualité de citoyen français. Néanmoins les Français, qui se trouvent atteints par ces prohibitions au moment de la promulgation du présent décret, auront un délai de trois ans pour s'y conformer. Ceux qui deviendraient possesseurs d'esclaves en pays étranger par héritage, don ou mariage, devront, sous la même peine, les affranchir ou les aliéner dans le même délai à partir du jour où leur possession aura commencé ».

La loi du 11 février 1831 porta à dix ans le délai fixé à trois années par la disposition législative qui vient d'être rapportée, et à l'expiration de ce délai fut rendue, à la date du 28 mai 1858, une loi ainsi conçue. ARTICLE UNIQUE. Le paragraphe 2 de l'art. 8 du décret du 27 avril 1848 est modifié ainsi qu'il suit : Le présent article n'est pas applicable aux propriétaires d'esclaves dont la possession est antérieure au 27 avril 1848, ou résulterait soit de succession, soit de donations entre vifs ou testamentaires, soit de conventions matrimoniales »>.

Il y avait, paraît-il, vingt mille Français qui aimaient mieux perdre leur qualité de Français que leurs esclaves. Il a fallu, pour la leur conserver, leur permettre de

(1) Ce délai a été prorogé jusqu'au 1er octobre 1873 par l'article 4 d'une convention additionnelle du 11 décembre 1871, ratifiée par l'assemblée nationale le 9 janvier 1872, pour les sujets originaires des territoires cédés qui résidaient hors d'Europe.

« VorigeDoorgaan »