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connaît lui-même, et se demande si quelque puissance supérieure n'agissait pas en secret sur lui.

Et, cependant, le désenchantement arriva bientôt. Il faut voir dans son livre, comment il fut accablé peu à peu; on le repousse de toutes les sociétés; on lui parle de sinistres desseins formés par le peuple contre lui; ce n'est rien que ces difficultés, mais il est mal compris par ses auditeurs, mal apprécié; les hommes à passions basses se disent ses amis. Bref, il en vient à juger que ceux qu'il cathéchise ne sont guère dignes des peines qu'il se se donne pour eux et des privations qu'il s'impose. Car il est privé de l'amitié et des caresses de sa famille. Oh! c'est que c'est une privation bien grande que celle des joies du foyer; un père et une mère, qui vous voient prospérer avec orgueil; une épouse qui vous aime et se glorifie plus de son amour et du vôtre que de toutes les gloires; des enfans, qui remplissent une maison de bruit et de vie. Oh! oui, tous ces visages comme toutes ces voix amies, valent mieux que toutes les sciences et que toutes les gloires.... Et le cœur du jeune Saint-Simonien en était brisé, et, ne trouvant aucune compensation à tant de privations, il tournait ses espérances vers le Ciel, et s'écriait : « Bienheureux ceux qui souffrent persécution pour la justice. » Et ces paroles, tirées d'une religion qu'il voulait renverser, jetaient encore une espèce de consolation au fond de son cœur.—Enfin, ne pouvant soutenir sa situation, il ferme son école et se retire à la campagne, dégoûté, sceptique, ni Chrétien, ni Saint-Simonien.

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Les chrétiens clairvoyans prévoyaient la même fin aux grandes joies des St.-Simoniens de Paris. Il m'en souvient encore: à cette époque, il m'arrivait souvent de dîner au Palais-Royal avec plusieurs rédacteurs d'un journal catholique qui alors attirait à lui de nombreuses sympathies. Après le dîner, nous passions une partie de la soirée au café Valois, où se rendaient aussi plusieurs St.-Simoniens, entre autres, MM. D., M., P., R.; ceux-ci soulevaient de nombreuses discussions, qui transformaient le café en salle de conférences, au grand déplaisir de la dame du comptoir. Il me semble les entendre accordant de magnifiques funérailles au Christianisme, et proclamant la glorification de la religion nouvelle. « Voyez-nous, disaient-ils, déjà nous avons › des églises et des apôtres dans toutes les villes; Hoart, à Tou

→louse; Lemonnier, à Montpellier; Laurent, Rennes, Leroux, ›à Lyon; Talabot, à Brest; Bouffard, à Limoges; Jules Leche>valier et Adolphe Guéroult, à Rouen; Duverger, en Belgique; » d'Eichthal, en Angleterre, etc.; nous sommes partout, vi» vans, vainqueurs, et le Christianisme est partout vaincu, » muet, mort....... » Et nous répondions : « Vous êtes des enfans, la » prospérité d'un jour vous fascine; ce que vous avez dé bon, » vous l'avez volé au Catholicisme; c'est là ce qui fait votre vie. › Ce qui vous est propre est peu de chose, et c'est ce qui vous perdra. Voyez : déjà vous êtes divisés en vous-mêmes; le pan» théisme vous gagne; vous n'avez pas de morale; ce que vous ⚫ voulez mettre à sa place n'a pas de nom. C'est le moment » où vous allez tomber; car c'est le moment où il vous faut agir > et développer vos preuves, votre doctrine, votre morale; vous

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» verrez..... D

Mais eux soutenaient et expliquaient leur panthéisme, déve loppaient et défendaient leur morale. Que si parfois quelque vieux voltairien, sortant du rôle d'auditeur passif, s'avisait de lancer quelques-unes de ses vieilles plaisanteries contre le Christianisme ou le sentiment religieux, ils le tançaient fièrement, et se fatiguaient jusqu'à demander répit à défendre l'immutabilité de leur croyance et l'immortalité de leur foi..... Et cependant huit mois ne s'étaient pas passés, que tout ce bruit avait cessé ; les chaires étaient muettes, les fonds à sec, le Globe mort, le Père et les apôtres réduits à une retraite forcée... Le St.-Simonisme avait passé, et le Christianisme poursuivait tranquillement sa carrière, sans presque avoir fait attention à l'existence de ce faible ennemi.

Mais c'est dans un autre article que nous ferons l'histoire des dogmes, de la décomposition et de la mort du St.-Simonisme. A. BG

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DE L'INFLUENCE DES PAPES SUR LES BEAUX-ARTS,

DEPUIS LE IV SIÈCLE JUSQU'A NOS JOURS.

Troisième Article.

depuis le IX siècle jusqu'a LA FIN DU XV'.

Déjà, dans un premier article, nous avons vu comment les pontifies de l'Eglise chrétienne, à mesure qu'ils sortaient des catacombes qui les avaient cachés, s'occupèrent à conserver les monumens qui si long-tems avaient été témoins des supplices de leurs frères, et ouvrirent aux arts et aux sciences une nouvelle carrière à parcourir, celle de décorer et d'orner le culte nouveau, pur et céleste, dont ils étaient les premiers gardiens. En effet, nous avons suivi pendant neuf siècles les arts et les pontifes, et nous avons vu ces derniers se montrant les pères, les conservateurs, les protecteurs des arts et des artistes, sauvant les uns et les autres de la barbarie qui les dévorait et du paganisme au service duquel ils s'étaient humiliés. Dans un second article, nous avons parlé fort au long du bel ouvrage qui nous a conservé l'histoire de la naissance de l'art chretien, et nous avons donné quelques explications servant à faire connaître la langue parlée dans les vieux livres qui s'occupent de nos monumens'. Aujourd'hui nous allons reprendre notre narra

Voir l'article inséré dans le N° 5g, t. x, p. 347, et celui qui a paru dans le N° 61, ci-dessus, p. 53 des Annales.

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tion, et prouver par des faits que la salutaire influence des Souverains Pontifes sur les beaux-arts n'a jamais été interrompue, qu'au contraire elle s'est toujours soutenue à la hauteur du rôle que les premiers Papes s'étaient donné, et que le plus souvent ils ont dévancé leur siècle et leurs contemporains.

DE LA FIN DU IX AU X SIÈCLE.

Cette époque est généralement nommée par les écrivains modernes siècles d'ignorance, tems de ténèbres, et cependant, çà et là brillent encore quelques lumières, qui sont d'autant plus vives qu'elles étaient entourées de plus d'obscurité. Les monastères échappés aux flammes et aux dévastations des barbares, par une permission toute providentielle, ouvrent leurs asiles pour y recueillir tout ce qui n'est pas détruit. Peintures, dyptiques, reliquaires, vases sacrés, objets d'art chrétiens ou profanes, manuscrits grecs et romains, ouvrages des Pères et Docteurs de l'Eglise, les moindres vestiges de l'antiquité, tout est ramassé précieusement du milieu des ruines. C'est alors que sont copiés et sauvés de l'entière destruction, les anciens auteurs: Tite-Live, Térence, Horace, Cicéron, Virgile, et à leur tête Homère. Ce sont de pauvres moines chrétiens qui passent le jour et la nuit à recueillir ces trésors de l'esprit humain pour les transmettre à la postérité 1; plusieurs furent les martyrs de la science '.

La haute impulsion donnée aux lettres par Charlemagne s'était éteinte sous l'influence des barbares. Cependant, au milieu de ce chaos et de ce bruit d'armes, tout n'est pas perdu sans retour, et les successeurs de saint Pierre vont être chargés de consoler le monde aux abois, et de faire sentir aux peuples désolés que tout n'est pas destiné à périr.

1 Voir à ce sujet deux articles remarquables des Annales. Le 1er intitulé : Des monastères qui ont conservé les auteurs profanes, N° 2, p. 93 du tom. 1; l'autre intitulé : Des manuscrits perdus et retrouvés dans le moyen-âge, N° 51, p. 193, du t. ix des Annales.

* On connaît le dévouement héroïque de plusieurs religieux qui se laissèrent mutiler, martyriser, plutôt que de livrer les images sacrées, les livres saints, les trésors des églises, et qui, privés de la main droite, essayèrent de peindre encore des sujets pieux de la main gauche.

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Nous avons vu dans notre premier article, que ce fut au milieu de ces tristes circonstances que Léon IV fut élu, en 847. Pendant tout le tems de son pontificat il ne cessa d'encourager les arts et les artistes. Ce qu'il fit exécuter, malgré la rigueur des tems, est encore étonnant. En effet, outre ce que nous avons déjà fait connaître, on doit à ce Pape l'achèvement des travaux, long-tems suspendus, du vaste hôpital dit in Saxia, ainsi que la reconstruction de l'église Sainte-Marie de la Pitié, dite aussi in Campo Sancto, remarquable par ses belles peintures et ses sculptures. On y voit, entre autres tableaux curieux, diverses compositions du célèbre Perrugin. La ville de Porto, presque détruite par les Sarrasins, fut reconstruite par ordre de Léon IV, qui l'entoura de bonnes murailles et la repeupla de familles corses, chassées de leur pays.

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Nous avons parlé déjà de ce que la seule ville de Rome lui doit, et des travaux qu'il fit exécuter pour la mettre à l'abri des incursions fréquentes des Sarrasins. Nous ajouterons que quinze tours fortifiées furent construites par ses ordres, pour compléter la défense de cette capitale. Après huit ans de pontificat, Léon IV mourut en 855.

X' SIÈCLE.

De cette époque, à 905, c'est-à-dire pendant un espace de cinquante ans et plus, 14 Papes se succèdent et meurent presque tous dans l'année de leur pontificat.

Serge III est élu en 905. Il fait restaurer l'église dédiée à saint Martin, célèbre évêque des Gaules. Cette église n'était primiti

• Nom qui lui vient de ce que le premier édifice fut élevé par les ordres d'Ina, roi des Saxons, au vir• siècle. Nous verrons plus tard cet hospice reconstruit par les ordres d'Innocent vii.

⚫ Cette église est ainsi nommée à cause d'un grand cimetière dans lequel sainte Hélène fit déposer, dit-on, une grande quantité de terres apportées de la montagne du calvaire, sur quatorze grands vaisseaux. La ville de Pise offre, comme on sait, cette même particularité.

3 L'histoire ecclésiastique nous a transmis la mémoire de la défaite complète des Sarrasins, au pied des fortifications dues à l'activité de Léon IV, qui, privé du secours des puissances chrétiennes et réduit aux seules milices de Rome, resta vainqueur de ces barbares.

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