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quées, en ressentit un funeste ébranlement. Cet éclat si vif dont le sacerdoce avait brillé au 4o et au commencement du 5° siècle parut subitement éclipsé. Au milieu de cette grande révolution, lorsque la violence envahissait tout, l'Eglise s'était posée comme le seul pouvoir représentant de la justice et du droit, comme le seul refuge contre la force brute; bientôt, à défaut de moyen plus efficace de protection, elle ouvrit son vaste sein aux populations nouvelles. Tout ce qui était faible, pauvre, opprimé; vainqueurs et vaincus, serfs et barbarcs, s'y précipitèrent en foule; tous y vinrent chercher un asile; les uns contre la tyrannie de leurs maîtres, les autres contre la tyrannie de leurs propres passions et l'abrutissement de la vie barbare. Faut-il donc s'étonner que cette multitude ait apporté jusque dans le sanctuaire son ignorance avec tous les vices inséparables de sa condition? Faut-il s'étonner de tout ce qu'il en coûta d'efforts aux plus grands hommes de ce tems, aux conciles, aux papes surtout, pour faire refleurir les sciences et la discipline ecclésiastique ?

Notre âge a eu aussi son invasion des Barbares, et la date n'en est point si éloignée qu'on n'aperçoive encore la grandeur des ruines entassées. Ce que l'Eglise eut alors à souffrir n'a pas besoin d'être rappelé, c'est elle surtout qui a supporté les plus rudes des coups portés cà et là par ces Barbares modernes.

Mais des jours de loisir studieux et d'influence scientifique semblent arriver pour le clergé. Quoique tous les vides du sanetuaire soient loin d'être remplis, et tous les besoins des populations satisfaits, cependant ceux qui dans les rangs de la milice sainte se sentent portés à la retraite et à l'étude peuvent commencer à suivre leurs goûts et à se livrer à leurs inspirations. Dès ce jour même, il n'y a point de ville importante où l'on ne puisse compter des prêtres parmi les citoyens les plus éclairés. On citerait difficilement quelque branche des travaux intellectuels, quelque champ de la science qui ne soit cultivé, fécondé par des membres du clergé. Les preuves qu'il a faites naguères dans l'ordre de l'éloquence, aux yeux de la capitale assemblée, lui assurent dans l'admiration publique une place qu'on serait mal venu à lui disputer. Il est peut-être encore des localités reculées où cette impulsion générale n'a pu pénétrer : mais ce qui s'est fait en trente ans est tel qu'on a lieu de s'é

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tonner beaucoup plus de la grandeur des succès obtenus, que des résistances qui s'obstinent encore. Quelles sont à ce moment les maisons d'éducation les plus progressives, celles où le mode d'enseignement est plus en harmonie avec les besoins du siècle, celles où une instruction plus solide et plus étendue est jointe à une éducation plus sociale, sinon les maisons tenues par des ecclésiastiques, élevées et entretenues à leurs frais, dirigées par eux seuls ? L'Université qui les inspecte et les rançonne est obligée d'en convenir chaque jour.

Tandis qu'un mouvement marqué se prononce dans la génération nouvelle, pour venir, hommes et enfans, demander au clergé la science et la foi, et ceci, certes, sans qu'on puisse reprocher à ses membres les manœuvres frauduleuses ou les faveurs du pouvoir, les chefs du sacerdoce ont apprécié combien il importait de donner aux lévites eux-mêmes toutes les facilités pour se livrer à des travaux plus approfondis et plus étendus que n'exige communément l'éducation cléricale. Un grand nombre de diocèses possèdent déjà des établissemens de hautes études, et en peu d'années, il en sortira une nouvelle troupe d'élite capable de répondre à toutes les exigences du siècle des lumières.

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Un autre fait, sur lequel nous croyons devoir particulièrement insister, c'est l'accession au sacerdoce des classes riches et instruites. Personne plus que nous n'est pénétré d'admiration pour le zèle, les vertus, les immenses travaux du jeune clergé : troupeau dévoué qui se hâta de recueillir l'héritage des martyrs, et de venir au secours de l'Eglise quand elle n'avait plus à lui mettre que les fatigues, la pauvreté, le mépris des hommes. Mais sorti en général des rangs intermédiaires de la société, il lui était impossible de posséder cette connaissance des hommes et des choses, cette science presque universelle, cette érudition variée, que ce monde frivole auprès duquel pourtant le prêtre est appelé à exercer son ministère, recherche partout et estime si haut. Non, certes, on ne saurait imputer à sa faute ce qui était une nécessité de sa position. Le défaut d'ouvriers, et l'abondance de la moisson lui laissait à peine le tems de recueillir la science indispensable des choses saintes. Eh bien! ce dernier thême de critiques si injustes et si souvent répétées, va être enlevé aux ennemis de notre foi.

Les hautes conditions ont compris le devoir qui leur était im

posé. Elles reçurent jadis de l'Eglise la science et la richesse ; il était juste qu'elles acquittassent cette dette de huit siècles, en apportant la science et la richesse au service de l'Eglise. On n'a point oublié la surprise qui saisit tout à coup le monde opulent, lorsque, il y a quelques années seulement, on vit l'héritier d'une des plus grandes maisons de notre vieille France, un prince de Rohan, frappé d'un de ces coups qui partent plutôt de la miséricorde que de la colère divine, entrer au séminaire de Saint-Sulpice, courber sa tête sous les ciseaux de son évêque, en attendant qu'il la courbât bientôt pour ne la plus relever sous le poids de travaux qui devaient sitôt l'opprimer.... Cet exemple et cette mort ne furent point perdus pour l'Eglise : les cendres de ceux qui meurent pour elle sont fécondes. Que de noms pourrions-nous citer ici, de jeunes hommes que le monde environnait de toutes ses séductions, auxquels l'ambition applanissait ses voies, et qui ont préféré servir obscurément dans les rangs les plus humbles des ministres du Seigneur! Si. nous nous abstenons de toute indication plus formelle, c'est que nous serions bien sûrs de blesser, par des louanges directes, ces âmes avides de dévouement et d'oubli, et que d'ailleurs, il n'est aucun de nos lecteurs qui ne place ici, et sans notre secours, le nom de quelque ami, noble enfant des familles les plus recommandables de sa ville ou de sa province.

La ville de Strasbourg a été témoin d'un fait qu'il est impossible de passer sous silence. L'un des profeseurs les plus distingués de l'Université, amené par ses recherches, à embrasser le Christianisme, ne rougit pas d'entrer dans le Sanctuaire et d'y faire pénétrer après lui neuf disciples, tous placés dans une position avantageuse selon le monde. Du nombre étaient trois Israélites, tous trois avocats; des médecins, un élève de l'Ecole Polytechnique, et un avocat général près la Cour royale de Besançon. Ces prêtres, jeunes hommes du monde, courageuseformaient ment dévoués aux travaux de l'Eglise de notre Dieu, une famille de savans et de saints. Quelques nuages se sont élevés tout récemment sur un de ces élus; notre désir sincère et notre prière auprès de notre Dieu sont de les voir bientôt disparaître.

Les sciences, la magistrature, le barreau, le commerce, les ⚫ grandes fortunes territoriales, ont offert lcurs prémices. Chaque

profession honorable a ses représentans auprès des autels. Une seule, née, pour ainsi dire, avec le siècle, dont le siècle se glorifie, et qui est appelée à exercer sur lui une influence encore inappréciable, manquait à l'appel. Le journalisme faisait défaut : si des prêtres n'avaient pas craint de descendre au rang de journaliste, on n'avait point encore vu de journaliste devenir prêtre : cette lacune vient d'être remplie avec éclat. Un homme, qui doit en très-grande partie sa fortune et sa célébrité à la rédaction d'une des feuilles politiques les plus répandues et les plus influentes, vient de quitter la route qui aboutissait de toutes parts à l'illustration et aux grandeurs mondaines, pour embrasser l'état ecclésiastique. Encore un puissant auxiliaire, qui apporte à la défense de notre sainte cause, un beau talent, un nom distingué, une grande influence; et, ce qui vaut mille fois mieux, une ardente foi, et ce courage qui fait renoncer aux jouissances terrestres, pour se dévouer au service de ses frères ! Il y a cela de particulier dans ce fait, que ce n'est pas le Clergé qui entre dans la politique, mais la politique qui va au Clergé. Car, comme l'a dit un évêque, en parlant de M. de Genoude, son entrée dans les ordres est une vocation dans une vocation.

Nous avons déjà parlé avec détail, dans un précédent numéro ', de cette noble démarche de M. de Genoude, de ses projets pour la gloire de la Religion, de la maison des hautes études qu'il se propose de former dans son château de Plessis-les-Tournelles, et des diverses grandes entreprises qui se préparent sous ses auspices. Dès ce jour, une partie de ses promesses est accomplie. La publication de la Raison du Christianisme se poursuit avec une constance et une rapidité dignes de tout éloge. Pour donner une juste idée de l'importance de cet ouvrage, nous ne saurions rien faire de mieux, que de nous placer au point de vue de celui qui en a conçu l'idée, en citant quelques fragmens de la préface si remarquable, placée en tête du premier volume.

Après un coup d'œil jeté sur le combat intellectuel qui se livre, depuis la réforme, pour et contre le Christianisme, après avoir prouvé que toutes les chances de la lutte tournent au pro

Voir le n° 52, tom. ix, p. 395 et suiv. Voir aussi ce que nous avons dit de l'ouvrage que nous analysons ici, dans le n° 47, tom. vii, p. 403 des Annales.

fit de nos croyances, l'auteur appelle ainsi le 19′ siècle à recueillir le fruit de l'expérience de ses devanciers.

«C'est au XIXe siècle à recueillir les fruits de ces immenses travaux, et à se les rendre propres. C'est pour lui que les plus grands esprits des deux communions auront livré tant de combats; et les préventions qui ont maintenu cette lutte sont si complètement évanouies, qu'on ne saurait expliquer la continuité et l'ardeur de ces efforts, sans le but d'utilité qui se révèle maintenant, puisque ce grand combat a fait briller d'un plus vif éclat le flambeau de la religion, allumé en Europe, afin qu'il fût vu du monde entier.

» Nous arrivons à une grande époque, celle où la civilisation qui, depuis 300 ans, a été en controverse, va se développer de nouveau; car cette controverse, après avoir porté sur tous les points qui intéressent l'existence de l'homme, est maintenant épuisée. Le débat est cios, et le Siècle délibère.

› Le moment approche donc où la vérité va triompher, et acquérir enfin, pour les hommes, force de chose jugée.

»Tous les articles du Symbole ont été, depuis 300 ans, attaqués et niés, et tous ont été défendus et rétablis. Les réponses à toutes les objections existent donc, et il est impossible aujourd'hui de trouver un argument contre le Christianisme, qui n'ait pas été détruit par les plus grands génies de notre Europe, qui est la gloire de l'humanité. Les bibliothèques contiennent maintenant tout ce qu'il faut pour rétablir l'édifice des croyances chrétiennes. On peut, pour ainsi dire, appuyer le Symbole de Nicée sur la déclaration des plus grands génies de l'Univers.

Le Protestantisme et le Philosophisme, depuis trois cents ans, en voulant arracher le flambeau de la Foi, des mains de l'Église catholique, l'ont donc fait, comme nous venons de le dire, briller d'un plus vif éclat. Il était donné à cette époque de voir toutes les erreurs s'associer pour combattre le Christianisme; le Socinianisme et le Matérialisme, la négation de la divinité de Jésus-Christ, et de l'existence du Créateur de l'univers, auront été le terme des erreurs des trois derniers siècles.

Mais au milieu de ces attaques, tous les points fondamentaux du Catholicisme auront été mis hors de contestation, non par les efforts individuels des esprits qui ont pris part à la lutte,

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