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DESCRIPT.DES RUINES DE BABYL., PAR M. RAOUL-ROCHETTE. 365

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Des deux dernières classes des productions de la sculpture babylonienne, Pierres gravées en relief et cylindres gravés en creux. — - Procédés

d'art des Babyloniens.

Bétyle du cabinet du roi.

MM. Millin; Sylvestre de

-

Figures en bronze. - Tombeau de Daniel.Explications auxquelles il a donné lieu. Sacy; Münter. Sa description; comparaison de ses diverses parties avec d'autres monumens. - Cylindres, leur usage. Le dieu Oannès.

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Dans la revue que M. Raoul-Rochette a entreprise des principaux monumens de la sculpture babylonienne, il a rencontré successivement plusieurs colosses en métaux précieux et des figures sculptées en relief sur les rochers. Pour terminer cette revue, il lui reste à examiner encore des sujets tout entiers, composés souvent de plusieurs personnages que l'on trouve gravés en relief sur la pierre ou en creux sur des cylindres. L'étude de ces monumens est d'une haute importance pour l'histoire générale comme pour l'histoire de l'art; on y trouve des documens nombreux et souvent inconnus, sur les religions, les mœurs, les habitudes et les croyances de ce peuple antique et mystérieux, dont les annales sont muettes, les édifices en ruines et dont nous ne saurions prendre quelque connaissance que par la comparaison de tous les renseignemens qui nous restent. En même tems cette classe de monumens pourrait devenir une mine féconde d'intéressans rapprochemens. Avant d'aborder le sujet de cette leçon, il importe de résumer sous un même point de vues les différens procédés d'art employés par les anciens

Voir le 3o article dans le N• 63 ci-dessus, p. 203 de ce volume.

Babyloniens. Ce tableau sera à la fois le complément des leçons précédentes et l'introduction de celle-ci.

La plupart des statues babyloniennes étaient, comme nous l'avons vu, faites de bois, recouvert de plaques d'or. Jérémie nous représente l'artiste sculptant un tronc d'arbre qu'il revêtira d'un métal précieux, après lui avoir donné une forme humaine. Les Babyloniens connaissaient pourtant la fonte en bronze la preuve en est dans la statue de Sémiramis mentionnée par Diodore d'après Ctésias. Ils sculptaient enfin la pierre et le marbre comme nous l'avons vu pour le colosse de Sardanapale, placé sur son tombeau, aux portes de Ninive. Nous savons qu'un voyageur a trouvé dans les ruines de Babylone une statue en granit ensevelie sous le sable, et qui reste encore maintenant à demi-découverte et exposée aux intempéries des saisons et aux outrages des hommes. L'argile était le seul élément des constructions babyloniennes et la plupart de ces briques avaient des inscriptions cuneiformes (Voir la Note A ); quelques-unes même des bas-reliefs. Enfin les monumens les plus intéressans peut-être de la plastique babylonienne sont de petites tablettes d'argile avec des bas-reliefs estampés sur une des faces, et que les Babyloniens des classes inférieures portaient suspendues à leur cou comme des amulettes. Ces tablettes nous sont parvenues en assez grand nombre ; le cabinet des antiques en possède plusieurs; on y remarque ordinairement des animaux sacrés, des lions, des vaches ou quelques-uns des animaux fabuleux décrits par Bérose. M. de Beauchamp rapporte en outre qu'il a vu dans les ruines de Babylone de petites idoles en terre revêtues d'une couche d'émail peint.

De ces différens ordres de monumens, un assez petit nombre seulement sont parvenus jusqu'à nous; les uns ont été détruits par tant d'invasions successives, par tant de vicissitudes de religions et de peuples, les autres gisent sous des monceaux de ruines dans des profondeurs où la main de l'homme aura de la peine pénétrer. Ainsi, nous ne connaissons les statues colossales de bois revêtu de lames d'or ou d'argent que par les descriptions des écrivains anciens. Les figures en bronze sont en petit nombre dessinées dans le recueil des voyageurs. M. Rich a rapporté de ses recherches une figurine en bronze, mutilée en partie, d'un style grossier, remarquable cependant par sa rareté ; cette figurine représente un homme nu, la tête couverte d'une sorte de turban (circonstance qui témoigne de la haute antiquité de cette coiffure dans l'Orient), assis ou plutôt accroupi sur ses talons, et tenant entre ses jambes un cône tronqué. Les figures d'animaux sont plus communes, et représentent principalement des lions, dés taureaux, des béliers, des coqs, etc.

Les pierres chargées des sculptures en relief sont au nombre des débris les plus curieux de l'art et de la religion des Chaldéens. Près de Suze, on voit un bloc de granit qui, suivant les traditions locales conservées jusqu'à nos jours, n'est autre que le tombeau de Daniel. En effet, si nous ne pouvons lui assigner avec certitude une origine aussi ancienne et aussi illustre, tout nous autorise, malgré la différence des lieux, à le considérer comme un produit

de l'art babylonien. C'est un carré couvert sur deux de ses faces d'inscriptions en caractères cuneiformes, semblables à ceux des monumens de Babylone. Au-dessus de ces caractères sont deux rangées de représentations symboliques d'hommes et d'animaux. On y remarque une figure qui a les traits caracté ristiques des deux natures, et un monstre qui réunit un corps de sanglier, une tête d'homme avec des cornes et des jambes de bouc. Du reste, ce monument ne nous est pas assez connu pour que nous en puissions tenter une restitution et une explication certaine. Les trois dessins que l'on a publiés ont entre eux des différences telles que nous sommes forcés de suspendre notre examen jusqu'à ce que nous ayons des renseignemens plus exacts. C'est pour les indigènes une sorte de talisman auquel s'attache une vénération superstitieuse. Ni les prières ni les offres des ambassadeurs ou des riches voyageurs n'ont pu les déterminer à laisser enlever ce bloc qui appartient à un peuple anéanti depuis tant de siècles. Espérons que nous pourrons un jour connaître, sinon par le monument lui-même, du moins par une empreinte fidèle, tous les détails de ces reliefs (Voir la Note B).

Du reste, nous possédons au cabinet des antiques un monument original, dont l'examen repose sur des bases certaines, et qui a donné lieu aux plus importantes et aux plus fécondes discussions, c'est le célébre Bétylė, trouvé par un voyageur français, M. Michaud, à Tackht-Kesra, dans cette localité si féconde en cylindres et en pierres gravées. M. Millin l'a publié pour la première fois, et un illustre savant français, M. le baron Silvestre de Sacy, la pris pour sujet d'une savante dissertation. Depuis cette époque l'évêque de Seelend, M. le docteur Münter, l'a examiné de nouveau dans son ouvrage sur la religion des Babyloniens. Ce bétyle est une pierre noire, de forme ovoïde, longue de plus d'un pied, chargée en partie de caractères cunéiformes, et en partie de bas-reliefs d'animaux monstrueux. M. Millin a pensé d'abord qu'il était Persépolitain, mais les caractères cunéiformes, les basreliefs, le style du monument tout entier, doivent le faire attribuer avec certitude à l'art et à la religion des Chaldéens.

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Les bétyles (Guitulos) étaient, comme on le sait, des aérolithes, des pierres tombées du ciel 1, phénomène singulier dont les anciens ignoraient la cause, connue seulement depuis vingt ans par la science moderne (Voir la note C.), auxquelles ils attachaient une puissance singulière, et qui trouvent leur place dans toutes les mythologies. Celui dont il s'agit avait aussi reçu de son origine une destination religieuse, et les dessins qu'on y remarque le démontrent avec certitude. Dans l'examen de ce bétyle, la forme d'abord doit attirer notre attention. Cette forme ovoïde a été expliquée par des circonstances de peu d'importance. Les uns ont cru que le bétyle roulé dans les eaux du Tigre l'avait prise naturellement; les autres ont pensé que c'était une pyramide tronquée et imparfaite. Cette forme même semble à M. Raoul-Rochette mo

› Dans la mythologie grecqne, Bétyle était le nom de la pierre que Rhé donna à dévorer à Saturne à la place de Jupiter. — C'était aussi le nom du frère de Saturne. (Note du D.)

tivée par une croyance religieuse, conforme au but du monument tout entier. L'on a trouvé dans les ruines de Babylone un assez grand nombre de petits barils d'argile qui vont se rétrécissant vers les deux extrémités; leur forme présente avec le bétyle des analogies frappantes au premier coup d'œil. Du reste, ces petits barils sont inédits, on en ignore encore l'usage, et la ressemblance que nous venons d'indiquer peut mettre sur la voie d'une expli cation véritable( Voir la note D). Quoi qu'il en soit, la forme ovoïde avait chez les anciens Chaldéens une signification hiératique; dans leur cosmogonie, d'après les documens que Sanchoniaton nous a conservés, le monde est représenté sous la forme d'un œuf; c'est d'un œuf que la création est sortie. Il y a au musée de Glasgow une médaille grecque classée parmi les médailles inconnues, et dont l'explication a présenté jusqu'à présent des difficultés insolubles. On y voit un personnage à double tête, barbue et imberbe, placées en sens inverse, avec quatre ailes déployées, deux en bas, deux en haut ; il porte à la main un corps sphérique, de figure ovoïde. Ce personnage ne semble être autre que le Démiurge assyrien, tenant à la main le symbole de la création. D'autres médailles reproduisent le même type, avec quelques différences de dispositions. Tantôt la figure est entière, vêtue ou non vêtue', dans l'attitude de la marche ou dans celle du repos, avec un nombre plus ou moins grand d'ailes, mais toujours avec l'œuf, signe distinctif du demiurge. Ainsi, la forme ovoïde du bétyle, symbole de la création du monde, nous donne déjà la base d'une interprétation que d'autres observations vont confirmer.

La partie inférieure du monument est, comme nous l'avons déjà dit, occupée par des inscriptions en caractères cunéiformes; la partie supérieure, consacrée aux figures, est enveloppée entièrement par un immense serpent. Tous les savans qui ont étudié ce monument lui accordent une signification cosmogonique, M. Sylvestre de Sacy y voit Aschmogh le serpent infernal, la grande couleuvre, dont il est si souvent parlé dans le Zend-Avesta 1, M. Münter le puvos (Rhynos), cette puissance malfaisante qui domine une partie du systême mythologique des Babyloniens. Sur la partie supérieure du bétyle, on rencontre trois astérismes qui semblent à M. Münter l'indication des trois cieux étoilés, mais qu'on peut regarder avec plus de probabilité comme l'astre de Bel, entre les planètes de Jupiter et de Vénus (Voir la note E ). Au-dessus est une figure symbolique dans laquelle M. Münter reconnaît Sirius. A côté est un monstre tel que ceux que Bérose nous représente, ornant le temple de Bélus, qui est un composé informe du poisson, de la chèvre et de l'oiseau ; l'on n'a pu déterminer encore à quel ordre d'idées il se rapporte.

1 C'est Ahriman qui, sous la forme d'une couleuvre, sauta du ciel en terre, et qui produit les animaux venimeux, détruit la végétation et enfante l'hiver ; ailleurs c'est la première production d'Ahriman, opposée au premier ouvrage d'Osmusd sur la terre. Monumens antiques inédits ou nouvellement expliqués par Millin. Tom. Ier pag. 62.

Plus loin est un scorpion, animal employé fréquemment pour indiquer une influence malfaisante 1.

L'on voit encore perché sur un meuble que l'on avait d'abord pris pour un autel ou une base, mais qui paraît à M. Raoul-Rochette être un coffre (Voir la note F), un oiseau de proie, probablement un épervier; à côté est un autre oiseau de l'espèce des gallinacées, une poule dans l'attitude de la marche, et au-dessus un petit bateau qui a la forme des bateaux qui maintenant encore naviguent sur l'Euphrate. Ces trois figures placées les unes à côté des autres ne semblent pas sans relation avec le reste du monument et sa signification générale. Dans le récit du déluge de Noé, deux oiseaux, le corbeau et la colombe, jouent un rôle important, le corbeau ne revint pas et la colombe retourna dans l'arche, tenant dans son bec le rameau d'olivier, signe de la clémence de Dieu et de la fin du déluge. Toutes les traditions diluviennes, celle de Deucalion chez les Grecs et de Xisuthrus chez les Chaldéens, ont un oiseau qui vient annoncer que le fléau est épuisé et que les eaux se retirent. La présence de ces oiseaux rapprochés de la barque, qui est vraisemblablement l'arche de Xisuthrus, pourrait faire penser que le bétyle porte les symboles d'une inondation générale. Uue circonstance particulière vient appuyer cette conjecture. Nous avons remarqué que l'épervier était placé sur un coffre; or, c'était sous la forme d'un coffre que les traditions orientales représentaient le monde, tel est aussi quelquefois le signe de l'arche qui a survécu au cataclysme de toute la création. Sur les médailles d'Apamée en Phrygie, surnom e Kibutos, coffre, ville dont les origines se trouvent liées au déluge de Deucalion, on voit d'un côté la tête de Septime-Sévère, empereur, sous le règne duquel elle a été frappée, et de l'autre un coffre ou une arche qui contient deux personnages, l'un mâle, l'autre femelle, le couple qui après le déluge a repeuplé le monde, et au-dessus la colombe qui vole apportant dans son bec la branche d'olivier. Mais ce qui a le plus préoccupé les numismates, c'est l'inscription qui est écrite sur ce coffre; on a cru pouvoir la lire NŒE, et en effet, il eût été très-curieux de retrouver dans une ville grecque le nom du patriarche qui dans la Bible a échappé au désastre général. Par malheur ces caractères ne sont que l'indication du titre de NEOKOPON que prenait cette ville, avec une légère transposition dont on a de nom. breux exemples 3. Le bétyle contient en outre plusieurs figures de ces ani

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Voyez dans la Symbolique de Creuzer, tom. 1er, page 700, différens détails sur l'influence malfaisante attribuée au Scorpion dans les cosmogonies de l'Orient.

Genèse, ch. vi et vin.

3 Les Annales ont traité fort au long la question des médailles d'Apamée, et en ont donné la figure dans le n° 44, tom. vi, p. 144. On y verra prouvé qu'il ne peut y être question que du déluge de Noé. Ce n'est point. 227 que l'on lit sur les médailles, mais seulement

Quant à vouloir faire

de M, NENKOPON, le docteur Milles seul a avancé cette opinion, qui pas soutenable, dit le savant numismate Eckhel. TOME XI.-N° 65. 1835.

n'est

(Note du D.).

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