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DOCUMENTS

SUR LA VENTE DES MANUSCRITS

DU

COLLÈGE DE CLERMONT

A PARIS.

(1764.)

Les manuscrits du Collège des Jésuites de Clermont, ou de Louis-leGrand, à Paris, aujourd'hui dispersés à Berlin, Cheltenham, Leyde, Londres, Oxford, Paris, etc., sont facilement reconnaissables, quand ils ne portent pas l'ex-libris manuscrit : Collegii Parisiensis Societatis Jesu, à la mention, ordinairement inscrite au premier feuillet de chacun d'eux : Paraphé au désir de l'arrest du 5 juillet 1763. MESNIL1. Le texte de cet arrêt du Parlement de Paris fournit quelques détails nouveaux sur les mesures prises lors de la mise en vente des manuscrits du Collège de Clermont et sur la rédaction du catalogue de cette belle collection, qui devait être mise en vente l'année suivante, en 1764. Voici la teneur de l'arrêt, qui se trouve, à la date du 5 juillet 1763, dans le registre X1b 8944 du Conseil secret du Parlement aux Archives nationales 2:

Vu par la Cour, toutes les Chambres assemblées la requête presentée par le Procureur général du Roy contenant que dans la bibliothèque des cy-devant soi-disant Jésuites du Collège de Clermont, il se trouve un très grand nombre de manuscrits, qui, malgré l'état d'imperfection dans lequel sont quelques uns, peuvent être d'une valeur très considérable pour leur rareté, leur antiquité et leur objet; que l'intérêt des créanciers, celuy même des lettres, exige des mesures et des soins pour faire le discernement de ces divers monumens et pour en apprécier le mérite, mais que cet examen ne peut être fait que par des savans, versés dans ce genre de littérature, habitués à déchifrer des écritures de toutes langues et de tous âges, capables de distinguer par les règles d'une sage critique les productions de chaque siècle, instruits de celles qui sont sorties de la plume de chaque auteur en particulier, ou que l'erreur et l'intérêt leur ont faussement

1. Les manuscrits provenant de la maison professe et du noviciat des Jésuites portent aussi la même mention. Tous ces manuscrits, en petit nombre et à la différence de ceux du Collège de Clermont, sont aujourd'hui conservés à la Bibliothèque nationale.

2. Il y en a une copie dans le volume 265 (fol. 493-496 vo) de la collection du Parlement à la Bibliothèque nationale.

attribué; que la réunion de ces connoissances et de ces talens que l'on doit chercher dans les personnes qui feront l'examen de ces manuscrits semble désigner pour ces opérations délicates un ordre qui s'est acquis à juste titre la plus grande célébrité en ce genre; que les Bénédictins en ont fait dans tous les tems une étude particulière, et que rien n'est plus propre que leur travail et leur nom à donner du poids au jugement qui sera porté de ces manuscrits, à l'estimation qui en sera faite et au catalogue raisonné qui en sera dressé.

Que, dans la bibliothèque de la Maison professe et du Noviciat, il peut se trouver de semblables manuscrits suceptibles des mêmes soins; qu'il y a surtout dans la bibliothèque de la Maison professe des manuscrits, parmy lesquels il peut s'en trouver qu'il est important de ne confier qu'à des mains sûres.

Que les Bénédictins paroissant mériter à tous égards le choix et la confiance de la Cour, il n'étoit plus question que de prendre quelques précautions pour ce transport et la conservation de ces manuscrits, et de régler en quelque manière l'objet du travail des savans religieux qui en seront chargés; que c'est le motif des conclusions que le Procureur général du Roy prendra par la présente requête.

A ces causes requeroit le Procureur général du Roy qu'il plût à la Cour ordonner qu'en présence de tel des conseillers de la Cour, qu'il plaira à la Cour commettre, et par telles personnes qui seront choisies par ledit conseiller tous les manuscrits qui se trouveront dans les bibliothèques du Collège de Clermont, de la Maison professe et du Noviciat desdits cy-devant soi-disant Jésuites, et qui formeront des cahiers ou volumes, seront paraphés sur la première page de chacun desdits volumes ou cahiers, avec indication du nombre de feuillets contenus dans ledit volume ou cahier; que les feuilles détachées seront mises en liasses et paraphées par première et dernière par lesdites personnes que ledit conseiller aura commis, et procès-verbal du tout dressé par ledit conseiller; que tous lesdits manuscrits et liasses seront ensuite placés dans des coffres, ou mannes, qui seront scellées du sceau dudit conseiller, portés en cet état en la maison des religieux de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prez et remis entre les mains du bibliothécaire de laditte abbaye, ou autre religieux que le supérieur général des Bénédictins voudra choisir', lequel religieux

1. D. Tassin, dans l'Histoire littéraire de la congrégation de Saint-Maur (1770), p. 668, donne les détails suivants au sujet du transfert des manuscrits à Saint-Germain-des-Prés : « Lorsque les manuscrits du Collège et de la Maison professe des Jésuites de Paris eurent été déposés dans l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés par ordre du Parlement, Dom Ursin Durand, Dom Tassin, Dom Clément, religieux des Blancs-Manteaux, Dom Patert, Dom Housseau et Dom Grenier, religieux de Saint-Germain, furent chargés d'exa

s'en chargera sur ledit procès-verbal, du consentement dudit supérieur général, après toutesfois que lesdits scellés apposés par ledit conseiller auront été par lui reconnus et levés; pour, par ceux desdits religieux que ledit supérieur général choisira être lesdits manuscrits et feuilles détachées vûs et examinés, et d'iceux dressé un catalogue ou notice raisonné, et pareillement par lesdits religieux donné leur avis sur le prix de chaque article desdits manuscrits et feuilles détachées, en observant de marquer ceux qu'ils estimeront devoir être vendus conjointement ou séparement, lesquels catalogue et avis seront ensuite remis à tel libraire qu'il plaira à la Cour commettre pour procéder à l'estimation prescrite par les règlemens de la librairie, et être ensuite par le Procureur général du Roy requis et par la Cour ordonné ce qu'il appartiendra ordonner; que l'arrest qui interviendra sur la présente requeste sera signifié au supérieur général de ladite congrégation.

Ladite requête signifiée du Procureur général du Roy, ouy le rapport de Mr Joseph-Marie Terray, conseiller, tout considéré;

La Cour ordonne qu'en présence de Mr Henry-Philippe Chauvelin, conseiller, que la Cour commet, tous les manuscrits qui formeront des cahiers, volumes ou feuilles détachées et qui se trouveront dans les bibliothèques du Collège de Clermont, de la Maison professe et du Noviciat desdits cy-devant soi-disant Jésuites, à l'exception cependant de ceux que les commissaires de la Cour, nommés par les arrêts de la Cour des six août et sept septembre mil sept cent soixante-deux', ont ordonné, le quatre du présent mois, lors du procès-verbal par eux dressé audit Collège de Clermont, leur être representés par les libraires au jour par eux indiqué, seront paraphés sur la première page de chacun desdits volumes ou cahiers, avec indication du nombre des feuillets contenus dans ledit volume ou cahier, que les feuilles détachées seront mises en liasses et paraphées par première et dernière par un des greffiers de la Grande Chambre, et en leur absence par telles personnes que ledit conseiller aura commis, et

miner soigneusement ces manuscrits, de les ranger par classes, d'en fixer l'âge et d'en former un catalogue raisonné. Après plus d'un mois d'un travail assidu, on abandonna à Dom Clément le soin de perfectionner et de mettre au jour ce catalogue. »

1. Ces pièces étaient au nombre de quatre : 1o une bulle de Grégoire XIII, du 18 juin 1521 (en double exemplaire); 2° récit, en latin, du supplice d'Edme Campian; 3° récit, en français, du supplice de Jean Chastel et de Jean Guignard; 4o lettre du Père Cotton au général des Jésuites au sujet de l'affaire de Sautarel. (Arrêt du Parlement du 6 août 1762.) — L'arrêt du 7 septembre 1762 est relatif à la mise sous scellés, après inventaire, des titres et papiers du Collège de Clermont et à la levée de ces scellés.

procès-verbal du tout dressé par le même conseiller; que tous lesdits manuscrits et liasses seront ensuite placés dans des coffres ou mannes, qui seront scellés du sceau dudit conseiller, portés en cet état en la maison des religieux de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prez et remis entre les mains du bibliothéquaire de ladite abbaye ou autre religieux que le supérieur général des Bénédictins voudra choisir, lequel religieux s'en chargera sur ledit procès-verbal du consentement dudit supérieur général, après toutesfois que lesdits scellés apposés par ledit conseiller auront été par lui reconnus et levés; pour par ceux desdits religieux que ledit supérieur général choisira être lesdits manuscrits et feuilles détachées vus et examinés, et d'iceux dressé un catalogue ou notice raisonnée, et pareillement par lesdits religieux donné leur avis sur le prix de chaque article desdits manuscrits et feuilles détachées, en observant de marquer ceux qu'ils estimeront devoir être vendus conjointement ou séparément, lesquels catalogue et avis seront ensuite remis à (en blanc), libraire, que la Cour commet pour proceder à l' estimation prescrite par les règlemens de la librairie, et être ensuite par le Procureur général du Roy requis, et par la Cour ordonné ce qu'il appartiendra; ordonne que le présent arrest sera signifié au supérieur général de ladite congrégation.

Fait en Parlement, toutes les Chambres assemblées, le cinq juillet 1763.

...

MOLÉ. TERRAY.

...

Le catalogue des manuscrits du Collège de Clermont parut par les soins de D. Clément1 sous le titre de : Catalogus manuscriptorum codicum Collegii Claromontani, quem excipit Catalogus mss. Domus professæ Parisiensis (Parisiis, in Palatio, apud Saugrain, Leclerc, 1764, in-8°). Un avis placé en tête du catalogue (p. vIII) disait que les manuscrits seraient << vendus en détail au jour qui sera par la suite indiqué, à moins que l'on ne fasse avant le 1er septembre prochain, à Messieurs les administrateurs du Collège de Louis-le-Grand, des offres convenables pour acquérir la totalité. »

L'érudit hollandais Gérard Meerman, connu surtout par son Novus Thesaurus juris civilis et canonici et ses Origines typographicæ, qui devaient paraître l'année suivante, entra en pourparlers avec le Bureau d'administration du Collège par l'intermédiaire du libraire De Bure le jeune. On tomba d'accord pour estimer à 15,000 livres les 856 manuscrits du Collège de Ciermont, soit un peu plus de 17 francs le volume 2. Mais, avant d'accepter les

1. Dom Clément, l'auteur de l'Art de vérifier les dates, dont le premier volume parut la même année, fut secondé dans la rédaction du catalogue par de Guignes et Bernard pour les mss. orientaux et par Bréquigny pour les mss. grecs et latins (voy. p. vi et 326 du Catalogue).

2. Le Journal du Suédois Lidén, analysé par M. A. Geffroy dans les Archives des missions (1oo série, t. V, p. 384), dit à ce propos : « Rien n'était

offres de Meerman, le Bureau du Collège décida de faire une démarche auprès du bibliothécaire du roi, Armand-Jérôme Bignon1. Nous lisons, en effet, dans le Registre des délibérations du Bureau d'administration du Collège de Louis-le-Grand, à la date du 13 novembre 17642:

M. le président Rolland3 a rendu compte que, suivant et confor. mément à la mission verballe qui luy avoit éte donnée aux précédens Bureaux de déclarer au sr De Bure le jeune, marchand libraire, que les manuscrits ne seroient vendus que pour quinze mille livres, ledit De Bure en a fait part à son comettant, M. Gerard de Meermann, pensionnaire de la ville de Roterdam, lequel offroit laditte somme, sur quoy il a été arrêté que la délibération sur lesdites offres sera continuée au prochain Bureau ordinaire du 29 du présent mois, et que pendant ledit temps lesdittes offres seroient par M. le président Rolland communiquées à M. Bignon, bibliothécaire du Roy.

Le 6 décembre, le président Rolland faisait part à ses collègues de l'insuccès de sa démarche auprès de Bignon et le Bureau du Collège concluait aussitôt marché avec le mandataire de Meerman 1.

plus naturel, ni plus simple que de transporter à la Bibliothèque royale ces collections précieuses; mais on n'avait pour cela ni temps, ni argent, ni bon vouloir. On les vendit donc aux enchères. Heureusement, un M. Meerman, de la Haye, les acheta en bloc pour 15,000 livres, somme bien au-dessous de leur valeur. M. Brottier (le bibliothécaire du Collège) m'a dit qu'à compter seulement les honoraires des copistes et le papier, la valeur totale montait à 60,000 livres. >>>

1. Le Journal de Lidén parle en ces termes de Bignon : « Bibliothécaire depuis 1743, M. Bignon, commandeur, prévôt et maître des cérémonies des ordres du roi, prévôt des marchands, etc., plus brillant par ses titres et ses rubans que par son érudition. Il n'a que le nom de commun avec le vieux et savant Bignon, qui fut bibliothécaire royal en titre et en réalité. Celui-ci ne met jamais le pied à la Bibliothèque..... Conservateur des manuscrits, M. Béjot, petit homme fort aimable. » (Archives des missions, 1re série, t. V, p. 386.)

2. Archives nationales, MM. 305, fol. 179 vo.

3. Sur la part prise par le président Rolland aux affaires du Collège de Clermont, on peut consulter le Recueil de plusieurs ouvrages de M. le président Rolland (Paris, 1783, in-4°).

Les besoins d'argent trouve dans le Recueil

4. Archives nationales, MM. 305, fol. 190 et vo. durent hâter la conclusion du marché; voici ce qu'on de toutes les délibérations importantes prises depuis 1763 par le Bureau d'administration du Collège de Louis-le-Grand (Paris, 1781, in-4°, p. 528) : « Le Parlement ayant, par son arrêt du 24 janvier 1764, envoyé le Collège de Louis-le-Grand en possession des biens dépendant de ce collège, et notamment de la bibliothèque, à la charge de payer 25,000 livres à M. le prince de Tingry (pour les boursiers de Harlay; délibération du 9 août 1764)....., le Bureau, qui, d'ailleurs, avait besoin de fonds pour venir au secours des

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