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survivante, ou le droit en vertu duquel la personne survivante recueille le patrimoine du défunt. C'est dans ce dernier sens que la loi dit que «< la propriété des biens s'acquiert et se transmet par succession » (article 711). « Hæreditas nihil aliud est quam successio in universum jus, quod defunctus habuit, » dit le fr. 62, D., De regulis juris, 50, 17. C'est aussi en ce sens qne Chabot de l'Allier dit : « La succession est la manière dont les biens, les droits, les dettes et les charges des personnes qui meurent passent à d'autres personnes qui entrent en leur place. (Rapport au Tribunat, no 5, Locré, X, 214).

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Les personnes qui ont le droit de recueillir la totalité ou une quote-part (indivise) d'une hérédité sont appelées successeurs universels ou successeurs à titre universel, ce mot pris en sens général. Le terme successeur est générique et comprend diverses espèces.

1232. On peut être appelé à une hérédité soit par la loi, soit par la volonté du défunt. Dans le premier cas, la succession est appelée légitime ou ab intestat; dans le second, testamentaire. Exceptionnellement, la loi permet aussi la transmission d'une succession en vertu d'une convention stipulée dans un contrat de mariage, elle est contractuelle.

Le nom d'héritiers est spécialement donné aux parents légitimes du défunt que la loi appelle à sa succession, soit en tout, soit en partie. Les autres personnes auxquelles la loi défère dans certains cas la succession, et qui ne sont pas parents légitimes du défunt, sont nommés ses successeurs irréguliers: ce sont l'enfant naturel, les père et mère de l'enfant naturel, le conjoint survivant et l'État.

Ceux à qui la succession est transmise par la volonté du défunt sont appelés légataires universels ou légataires à titre universel, quelquefois aussi héritiers institués (art. 1002, 1037), et ceux qui la recueillent en vertu d'un contrat de mariage, donataires universels ou à titre universel.

B. La succession est-elle fondée en droit naturel?

1233. La commission nommée par le gouvernement le 24 thermidor an vii (voy. no 3) dit, dans son discours préliminaire au projet de code civil:

<< Le droit de succéder a-t-il sa base dans la loi naturelle, ou simplement dans les lois positives? De la solution de ce grand problème dépend le système que l'on doit établir. »

Les auteurs du code ont jugé cette question digne d'un examen sérieux; nous suivrons leur exemple.

Elle a reçu les solutions les plus opposées par les philosophes, et la grande diversité des législations positives en cette matière fournit un argument de plus au scepticisme. Tandis que nous pouvons constater, dans toutes les législations civilisées, une certaine homogénéité de principes dans les institutions civiles et sociales les plus importantes, par exemple dans le droit de la famille, la propriété, les conventions et les obligations; nous rencontrons la plus grande divergence dans les systèmes de successions qui ont régné ou qui règnent encore chez les différentes nations, divergence qui témoigne d'une absence d'idées universellement admises dans cette partie du droit. Ainsi, pour ne citer que quelques exemples, d'après presque toutes les coutumes d'origine germanique, l'époux survivant recueille une partie des biens de son conjoint prédécédé, de préférence à tous ses parents, même descendants; le code civil ne l'appelle à la succession de son conjoint que lorsque celui-ci n'a pas laissé de parents jusqu'au douzième degré. D'après le droit romain, le plus proche ascendant du défunt, qui n'a laissé ni descendants, ni frères ni sœurs germains, ni descendants d'eux, succède seul et exclut tous les parents plus éloignés, ascendants ou autres de l'autre ligne; d'après le code civil, si le défunt n'a laissé ni postérité, ni frère, ni sœur, ni descendants d'eux, la succession se divise en deux lignes, paternelle et maternelle, et l'ascendant même le plus proche d'une ligne, par exemple le père ou la mère, doit partager la succession de son enfant avec les parents collatéraux, même jusqu'au douzième degré de l'autre ligne. Le droit romain et le code civil défendent de faire des conventions sur une succession future; le droit germanique et beaucoup d'anciennes coutumes permettent les pactes successoraux, et ce genre de conventions est et était très-usité dans les pays régis par cette législation; il était anciennement très-fréquent dans les maisons souveraines. D'après le droit romain, le droit anglais, le droit américain et les coutumes germaniques, les substitutions fideicommissaires

sont permises à des degrés même éloignés; le code civil les prohibe d'une manière générale (art: 896) et ne les admet qu'exceptionnellement et avec la charge de rendre au premier degré seulement (art. 1048 et suiv.). D'après le code, la quotité de biens dont peut disposer celui qui laisse des descendants ou ascendants est très-restreinte (art. 913, 915); le droit anglais et le droit américain ne reconnaissent pas d'héritiers à réserve, et toute personne peut disposer de la totalité de ses biens en faveur de qui il lui plaît, qu'elle ait des enfants ou non.

1234. Parmi les auteurs qui se sont occupés de cette question, ceux du xvIe siècle et leurs partisans du xvi, tels que Hugo Grotius, Puffendorf, Barbeyrac, Wolf, admettent le droit de tester comme une conséquence de la liberté de disposer de sa propriété. Le propriétaire, disent-ils, peut aliéner purement et simplement, ou sous une condition, d'une manière révocable ou irrévocable, sous réserve de l'usufruit ou de la possession; la disposition testamentaire contient une aliénation révocable pour le cas de mort, sous réserve de la possession et de l'usufruit durant la vie. Ils admettent la succession ab intestat comme étant le testament tacite ou la volonté présumée du défunt. Kant nie qu'il

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ait une succession ab intestat d'après le droit naturel, et il fonde la succession testamentaire sur la volonté du testateur de donner les biens à une personne déterminée, et sur la volonté de l'institué d'accepter cette disposition. Pendant l'intervalle entre la mort du testateur et l'acceptation par l'institué, la succession n'est pas res nullius, mais une res vacua ou jacens, qui attend son propriétaire, et que l'institué a reçu du défunt le droit exclusif d'accepter.

D'après d'autres écrivains, par exemple Fichte, Gros, Haus, aucune espèce de succession n'est fondée sur le droit naturel, mais la succession n'est pas non plus contraire au droit naturel; elle. peut donc s'établir par le contrat social (école des socialistes), c'est-à-dire par une convention de tous les membres de l'État conclue dans l'intérêt de la paix publique ou par la loi. Selon eux, les biens laissés par une personne défunte sont à la rigueur res nullius et appartiennent au premier occupant. Mais tous les membres de l'État sont censés avoir renoncé à la faculté d'acquérir par occupation les biens d'un défunt, afin d'en laisser la libre disposition au propriétaire, tant pendant sa vie que pour le temps

où il ne sera plus. Cette volonté peut être expresse ou tacite. En l'absence d'une volonté exprimée, la loi règle la succession d'après la volonté présumée du défunt.

Ces idées étaient aussi celles des principaux jurisconsultes qui ont concouru à la rédaction du code civil. Dans le discours préliminaire au projet du code civil, Portalis, qui en était le rédacteur, après avoir énoncé que le droit de propriété en soi est une institution directe de la nature, continue: «< Mais le droit de propriété finit avec la vie du propriétaire; conséquemment, après la mort du propriétaire, que deviendront ses biens rendus vacants par son décès?

« Le bon sens, la raison, le bien public ne permettent pas qu'ils soient abandonnés; il y a de puissants motifs de convenance et d'équité de les laisser à la famille du propriétaire; mais à parler exactement, aucun membre de cette famille ne peut les réclamer à titre rigoureux de propriété. »

Après avoir établi que l'État ne doit pas succéder aux biens des particuliers, mais qu'il doit seulement intervenir dans toutes les questions qui concernent l'ordre et le partage des successions, l'auteur conclut ainsi :

« Il est nécessaire qu'un tel ordre existe, comme il est nécessaire qu'il y ait des lois. Le droit de succéder en général est donc d'institution sociale; mais tout ce qui regarde le mode du partage dans les successions n'est que de droit politique et civil. » (Discours préliminaire, p. L-LI.)

Chabot (de l'Allier) dans son Rapport fait au Tribunat, dans la séance du 26 germinal an xi (16 avril 1803), no 3, professe la mème théorie en ces termes :

<< La société civile est la seule source de la propriété, etc.

<< Mais si l'homme, dans l'état de nature, n'avait pas le droit de propriété, il ne pouvait le transmettre lorsqu'il mourait; car on ne peut transmettre, on ne peut donner ce qu'on n'a pas.

<< La transmission des biens par succession n'est donc pas du droit naturel, mais du droit civil. » (Locré, X, 213.)

Et la même thèse est soutenue par Siméon, orateur du Tribunat, dans son discours au Corps législatif, prononcé dans la séance du 29 germinal an xi (19 avril 1803), no 8 :

« Aussitôt que nous mourons », dit-il, « tous les liens qui

tenaient nos propriétés dans notre dépendance se rompent; la loi seule peut les renouer. Sans elle, les biens destitués de leurs maîtres seraient au premier occupant. Chaque décès ramènerait l'incertitude et les désordres que l'état social a fait cesser. La succession est donc une institution civile, par laquelle la loi transmet à un propriétaire nouveau et désigné d'avance la chose que vient de perdre son propriétaire précédent. » (Locré, X, 279-280.) Plusieurs auteurs allemands du XIXe siècle admettent que la succession est fondée en droit naturel, comme une conséquence nécessaire des liens de la famille. Quelques auteurs considèrent le patrimoine comme une propriété commune de la famille, et l'ouverture de la succession comme l'entrée en possession par les membres de la famille dans un patrimoine qui était déjà commun. (Hegel, Philosophie du droit, § 178; Ahrens, Cours de droit naturel, 5e édition, p. 471.) Ce dernier, tout en admettant l'idée de la copropriété de la famille (p. 471), établit ainsi les principes qui se rapportent à la fois aux deux espèces de successions :

« Le but du droit est de fournir les conditions pour le développement de l'homme dans tous ses rapports, pour la satisfaction de tous ses besoins spirituels et physiques, pour l'accomplissement de tous ses devoirs. Parmi ces rapports se distinguent ceux de la famille. La nature a doué tous les hommes de sentiments de respect, de gratitude, d'amour envers leurs parents et leurs descendants, et a établi entre eux des devoirs réciproques. « Ces rapports affectifs et moraux, fondés dans la nature humaine, doivent, par cela même, être reconnus et protégés par le droit. Or, la succession testamentaire et ab intestat est une condition nécessaire à la conservation des affections de famille et à l'accomplissement des devoirs qu'elle impose. »>

En ce qui concerne spécialement le droit de tester, le même auteur le considère comme une émanation du droit de personnalité. Il rejette comme erronée la thèse, exprimée d'une manière absolue, que la volonté de l'homme ne peut avoir d'effet après sa mort.

<«< De même que l'activité affective, morale ou physique de tout homme, dans quelque sphère subordonnée qu'il ait vécu », dit-il, « s'étend sans contredit par ses effets au delà de la tombe, de même il n'y a pas de raison sociale qui s'oppose en droit à ce

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