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que

Louis XVI vivoit encore, lorsque la nation avoit reçu ses sermens, et qu'en retour elle lui en avoit prêté de parfaitement libres, lorsl'ascendant politique des privilégiés étoit entièrement anéanti, quelle assurance dans l'avenir ne falloit-il pas pour risquer, en faveur d'un nom, tout ce qu'on possédoit déjà de biens réels!

que

L'ambition du pouvoir se mêloit à l'enthousiasme des principes chez les républicains de 1792, et quelques-uns d'entre eux offrirent de maintenir la royauté, si toutes les places du ministère étoient données à leurs amis. Dans ce cas seulement, disoient-ils, nous serons sûrs que les opinions des patriotes triompheront. C'est une chose fort importante, sans doute, le choix des ministres dans une monarchie constitutionnelle, et le roi fit souvent la faute d'en nommer de très-suspects au parti de la liberté; mais il n'étoit que trop facile alors d'obtenir leur renvoi, et la responsabilité des événemens politiques doit peser toute entière sur l'assemblée législative. Aucun argument, aucune inquiétude n'étoient écoutés par ses chefs; ils répondoient aux observations de la sagesse, et de la sagesse désintéressée, par un sourire moqueur, symptôme de l'aridité qui

résulte de l'amour-propre : on s'épuisoit à leur rappeler les circonstances, et à leur en déduire les causes; on passoit tour à tour de la théorie à l'expérience et de l'expérience à la théorie, pour leur en montrer l'identité; et, s'ils consentoient à répondre, ils nioient les faits les plus authentiques, et combattoient les observations les plus évidentes, en y opposant quelques maximes communes, bien qu'exprimées avec éloquence. Ils se regardoient entre eux, comme s'ils avoient été seuls dignes de s'entendre, et s'encourageoient par l'idée que tout étoit pusillanimité dans la résistance à leur manière de voir. Tels sont les signes de l'esprit de parti chez les François : le dédain pour leurs adversaires en est la base, et le dédain s'oppose toujours à la connoissance de la vérité; les girondins méprisèrent les constitutionnels jusqu'à ce qu'ils eussent fait descendre, sans le vouloir, la popularité dans les derniers rangs de la société ; ils se virent traités de têtes foibles à leur tour, par des caractères féroces; le trône qu'ils attaquoient leur servoit d'abri, et ce ne fut qu'après en avoir triomphé, qu'ils furent à découvert devant le peuple : les hommes, en révolution, ont souvent plus à craindre de leurs succès que de leurs revers.

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CHAPITRE IV.

Esprit des décrets de l'assemblée législative.

L'ASSEMBLÉE Constituante avoit fait plus de lois en deux ans que le parlement d'Angleterre en cinquante; mais au moins ces lois réformoient des abus et se fondoient sur des principes. L'assemblée législative ne rendit pas moins de décrets, quoique rien de vraiment utile ne restât plus à faire; mais l'esprit de faction inspira tout ce qu'elle appeloit des lois. Elle accusa les frères du roi, confisqua les biens des émigrés, et rendit contre les prêtres un décret de proscription dont les amis de la liberté devoient être encore plus révoltés que les bons catholiques, tant il étoit contraire à la philosophie et à l'équité! Quoi! dira-t-on, les émigrés et les prêtres n'étoient

ils pas les ennemis de la révolution? Ce motif étoit suffisant pour ne pas élire députés de tels hommes, pour ne pas les appeler à la direction des affaires publiques; mais que deviendroit la société humaine, si, loin de ne s'appuyer que sur des principes immuables, l'on

pouvoit diriger les lois contre ses adversaires comme une batterie? L'assemblée constituante

ne persécuta jamais ni les individus, ni les classes; mais l'assemblée suivante ne fit que des décrets de circonstance, et l'on ne sauroit guère citer une résolution prise par elle, qui pût durer au-delà du moment qui l'avoit dictée.

L'arbitraire, contre lequel la révolution devoit être dirigée, avoit acquis une nouvelle force par cette révolution même ; en vain prétendoit-on tout faire pour le peuple : les révolutionnaires n'étoient plus que les prêtres d'un dieu Moloch, appelé l'intérêt de tous, qui demandoit le sacrifice du bonheur de chacun. En politique persécuter ne mène à rien, qu'à la nécessité de persécuter encore; et tuer,

n'est pas détruire. On a dit, avec une atroce intention, que les morts seuls ne reviennent pas; et cette maxime n'est pas même vraie, car les enfans et les amis des victimes sont plus forts par les ressentimens que ne l'étoient par leurs opinions ceux même qu'on a fait périr. Il faut éteindre les haines et non pas les comprimer. La réforme est accomplie dans un pays quand on a su rendre les adversaires de cette réforme fastidieux, mais non victimes.

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CHAPITRE V.

De la première guerre entre la France et l'Europe.

ON ne doit pas s'étonner que les rois et les princes n'aient jamais aimé les principes de la révolution françoise. C'est mon métier, à moi, d'être royaliste, disoit Joseph II. Mais comme l'opinion des peuples pénètre toujours dans le cabinet des rois, au commencement de la révolution, lorsqu'il ne s'agissoit que d'établir une monarchie limitée, aucun monarque de l'Europe ne songeoit sérieusement à faire la guerre à la France pour s'y opposer. Le progrès des lumières étoit tel dans toutes les parties du monde civilisé, qu'alors, comme aujourd'hui, un gouvernement représentatif, plus ou moins semblable à celui de l'Angleterre, paroissoit convenable et juste; et ce système ne rencontroit point d'adversaires imposans parmi les Anglois, ni parmi les Allemands. Burke, dès l'année 1791, exprima son indignation contre les crimes déjà commis en France, et contre les faux systèmes de politique qu'on y avoit adoptés; mais ceux du parti aristocrate qui, sur le conti

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