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concept, ni comme mot; les ordres du roi (wdw: Urk., I, 38, 108, 109, 128) transcrivent ce que le roi aime ou ce qu'il déteste» (1); il n'y a pas d'autre droit que le bon plaisir du roi, tempéré par le sentiment de la Justice divine, que le roi défend sur terre, comme Osiris le fait dans la nécropole (Rec., XXIX, 88) et Ra au ciel (BREASTED, Religion and Thought, 17).

Cependant, pour administrer l'Egypte, le roi a besoin d'auxiliaires i les choisit dans la famille royale, qui. sans être divine, participe quelque peu de la condition surhumaine de son chef. Dans les textes memphites, nous constatons quels rôles importants jouent autour du roi ses femmes (hm-t nswt, Ţ sa'm, cf. BORCHARDT-SETHE, Sahoura, II, 117, n. 1) (2), ses fils (sy mr-f « son fils chéri"), ses petits-fils (ourh nswt, Rec., XII, 143; Sah., II, 76, n. 7), et aussi les amis (¶¦ smrou, cf. mêmes références) et les féaux ou attachés (imahou, Rec., XIX, 122). Dans ce personnel, presque exclusivement, les rois recrutent leurs agents, dont les principaux sont: 1° les prètres: prophètes ou serviteurs du dieu (11 ḥm-ntr); lecteurs ou officiants (sm, hry-hb). 2° les juges, dont le premier est le vizir taty; sous la IV dynastie, tous les vizirs sont fils de roi; sous la Ve, la plupart sont petits-fils de roi (A. WEILL, Veziere). 3° les hauts fonctionnaires du palais, du trésor (1 le chancelier du dieu), des magasins, des domaines, des armées, parmi lesquels de très nombreux chefs du secret (3) des différents services; ceux-ci ne sont pas encore ce que nous appelons des secrétaires; ils détiennent, par la confiance du roi, les divers secrets magiques, religieux, ou pratiques (métiers, industries) qui font le prestige de la

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dieu), quand le roi épouse d'autres femmes que ses sœurs.

(3) Pour la varieté des chefs du secret, cf. l'index des titres de miss Murray; l'importance de ces secrets apparaîtra plus loin, p. 346.

royauté (); beaucoup sont parents du roi; tous, ses féaux. Etre chargé d'un office royal, c'est participer aux choses divines; aussi, quand il choisit un grand fonctionnaire, le roi le consacre-t-il par une onction (wrḥ), ou lui rend-il hommage" (nd), comme il fait aux êtres divins (Rec., XXVIII, 184, C. R. Acad. Inscr., 1915, 554; 1916, 108). Pour rémunérer ses agents, le roi leur sert des rentes alimentaires pendant leur vie et après leur mort; il leur donne la quasi-propriété de terres détachées du domaine royal, avec faculté de les aliéner, après autorisation par charte royale (Rec., XXIX, 63. 70); une partie de ces terres reste aux descendants pour fournir tombeau et offrandes.

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Les parents et les agents du roi, outre leur participation au gouvernement, jouissent donc de privilèges religieux; le roi leur permet encore d'imiter les rites magiques, dont il use lui-même, pour survivre après la mort. Ces rites secrets, inventés par Isis pour Osiris, ont été de toute antiquité appliqués aux rois : aussi, la « mort du roi (min nswt) ne ressemble pas à la mort de tout mort" ( A- - mt n mt nb, = Pepi, 665); elle aboutit non à la destruction, mais à la vie (Ounas, 206) pourvu, toutefois, que le roi prouve devant le tribunal des dieux, que sur terre, comme Osiris, il a pratiqué la justice (Ounas, 453). Il y a un tel intérêt, pour la société des hommes, à ce que le roi reste, après la mort, l'Intermédiaire vivant et le Défenseur de son peuple auprès des dieux, que l'Égypte entière travaille à préparer les moyens qui garantiront au roi cette vie d'outre- tombe il lui faut un tombeau inviolable, tel : les Pyramides, des cercueils, pour garder la momie incorruptible, des offrandes quotidiennes réelles ( htp nswt, Ounas, 84), ou suscitées par la force magique de la voix ( pr-hrw nswt, Ounas, 86). Pour rappeler la momie à la vie, on pratique des rites magiques : l'ou

que

A ce sujet, cf. FRAZER, Les origines magiques, chap. IV. Sur la survivance, dans l'Egypte pharaonique, de la croyance aux pouvoirs surnaturels et secrets du roi, cf. mes Mystères égyptiens, 179 et suiv.

verture de la bouche et des yeux" (wip ra' irty); il existe des formules qui conduisent le roi dans l'Occident, chez Osiris, et qui le font monter au ciel, auprès de Ra, le soleil maître de l'Univers, d'où il gouvernera le monde. Le roi devient, par ces moyens, un dicu Osiris justifié Osiris ma'a-hrou); les rites l'ont espiritualisé (sia hout, BREASTED, Rel., 55), ont fait de lui, au ciel, un être immatériel, à noms et formes multiples (ba'âme, ka', rn «nom»; † shm « puissance") tout en conservant sur terre son corps indestructible. De ces moyens de survie après la mort, que les rois possédaient à un degré suprême, ils ne communiquaient à leur famille et à leurs amis que la moindre part. Pour la conservation et l'alimentation des cadavres, les rois sont généreux : ils accordent tombeau, stèles funéraires, sarcophages, cercueils, momies, statues, offrandes (A htp rdj nswt offrande que donne le roi»); dans des nécropoles groupées autour des pyramides royales, ils concèdent les terrains nécessaires pour construire le tonibeau et produire les offrandes (Rec., XIX, 123 et suiv.). De même, les rites qui font revivre la momie (sia'bout, a ipra', Mten, IIIe dynastie, L. D., II, 4-5) et sortir les offrandes à la voix (T pr-hrou) sont révélés par le roi à son entourage. Mais l'existence d'outre-tombe promise aux parents et amis du roi ne comporte, à ce moment, que le séjour dans le tombeau, et des voyages sur les beaux chemins de la divine région inférieure, ou «à l'Occident, auprès d'Osiris, là où voyagent les attachés imakhou). D'accès au ciel, il n'est pas question; seul, le roi ira vivre auprès de Ra. D'ailleurs, sauf par l'intermédiaire du roi, les hommes, même de la famille royale, n'entretiennent aucun rapport avec les dieux. En dehors

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(1) Voir GARDINER, The tomb of Amenemhet, p. 79-93. A l'époque envisagée, on trouve dans les tombeaux soit une formule bipartite (type: Mast., p. 108) qui promet au défunt, de la part du roi, 1° un tombeau, 2° des offrandes aux jours de fêtes de la nécropole; soit, un peu plus tard, une formule tripartite, promettant 1° le tombeau, 2° des offrandes, 3° le voyage auprès d'Osiris sur les beaux chemins où circulent les imakhou (type: Mast., p. 149).

pour

des titres sacerdotaux, et des formules par lesquelles le roi annonce qu'il a fondé tel service d'offrandes, pour tel -défunt, auprès d'Osiris, d'Anubis ou de Geb, jamais les dieux ne sont nommés, ni figurés, dans les tombeaux de cette époque (Mast., p. 38, 50). La piété personnelle n'existe pas et ne peut exister: quand le roi veut faire une grande faveur à un de ses courtisans, il prie le dieu lui(dwa'-n-f n ƒ ntr, Urk., I, 42, 44); mais aucun sujet du Pharaon ne connaît le secret de parler aux dieux. Jusqu'à quel point les fonctions familiales ou officielles, confiées par le roi à ses parents et amis, donnaient-elles droit à ces privilèges religieux ? La réponse est donnée par de nombreux textes qui nous apprennent que la possession d'un tombeau et des rites funéraires, la promesse d'une survie auprès d'Osiris, constituent la récompense suprême que le roi accorde à ceux de ses sujets qui se sont distingués par leurs services administratifs (Rec., XIX, 123-130). Nous avons vu plus haut que les grands fonctionnaires sont sacrés par le roi; avoir accès aux charges, c'est bénéficier des secrets divins du roi; aussi, disent les Égyptiens, cela conduit à la dignité d'imakhou (Rec., XIX, 126); cela fait d'un homme le client du roi, et l'initie à ces mystères" qui permettent de braver la mort (cf. mes Mystères égyptiens, 91). En ce sens, droits religieux, civils et politiques, sont inséparables et connexes: les uns et les autres ne vont qu'aux parents et aux amis du roi (1). Un texte de la Xlle dynastie rappelle cet état de fait en ces termes : ŠICHEME

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»

; «l'ami du roi repose en paix comme un imakhou; mais il n'y a pas de tombeau pour celui qui se rebelle contre Sa Majesté; son corps est jeté à l'eau » (Caire, 20538, II, 18-19).

En somme, jusque vers l'an 2500 av. J.-C., droits religieux et politiques n'existent que pour la gens royale;

(1) Tous les tombeaux de la IV dynastie publiés par Mariette (les Mastabas) sous lettre B appartiennent à des petits-fils de roi :

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royaume ;

elle constitue toute la haute administration du elle vit groupée, dans la résidence royale, autour du roi vivant, et se retrouve, dans la nécropole, autour du roi mort. On peut évaluer le nombre de ces privilégiés à 500 par règne. Quant à la masse de la population, millions de citadins, paysans, artisaus, serfs de la glèbe, ils travaillaient pour le roi et la société, bâtissaient les prodigieuses pyramides et les belles tombes privées, sans pouvoir se réclamer d'un statut légal, d'un droit politique ou religieux. On retrouve, à même le sable, leurs corps, non momifiés, sans cercueils, munis de pauvres amulettes et de maigres provisions (Mast., 20); pour eux il n'y avait participation ni à la vie politique, ni à la vie religieuse officielles; pour eux il n'existait nul paradis, à moins que, par fortune, le roi eût distingué l'un d'eux et l'eût introduit parmi ses amis et ses serviteurs."

Reportons-nous 500 ans plus tard, vers l'an 2000, au début de la XIIe dynastie, et visitons une des grandes nécropoles du Moyen Empire, par exemple, celle d'Abydos : là, dans le voisinage d'un cénotaphe d'Osiris (autour du dieu et non plus du Pharaon), se pressent tombeaux et stèles funéraires; pêle-mêle, nous y lisons les noms de fils et filles de rois, de vizirs, de fonctionnaires, de bourgeois, d'artisans, de simples particuliers sans charges administratives; tous réclament, en leur nom et en celui de leurs parents, de leurs amis, de leurs serviteurs, l'offrande royale, l'accès au ciel, et proclament qu'ils sont des dieux, des » «Osiris justifiés Osiris ma'a hrw. Tous les ↑➡ Egyptiens, sans distinction de classe, ont donc obtenu le privilège de la mort royale; nous verrons plus loin (p. 351) que ceci n'est pas un vain mot. Cette évolution a eu des conséquences capitales dans la vie sociale;quoiqu'elle ait demandé plusieurs siècles pour se réaliser, à certains moments, rapide et violente, elle a pris le caractère d'une révolution.

RECUEIL CHAMPOLLION.

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