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principaux personnages de l'épopée homérique, c'est l'indice, entre tant d'autres qu'on pourrait rassembler, de ce désir nostalgique qui ramenait l'Hellénisme moribond vers ses origines comme vers une Fontaine de Jouvence. Non que notre Nestor fût nécessairement de sang grec : sa famille était peut-être égyptienne, mais l'éducation. les traditions, le milieu social l'avaient hellénisée.

Sous l'histoire de Phèdre et d'Hippolyte, en deux lignes, une inscription métrique, formée comme le numéro 113 du recueil de Kaibel (1), d'un hexamètre, suivi de trois pentamètres :

δεῦρ ̓ ἴδε τὰς χάριτας χαίρων, φίλε, ἅς τινας ἡμῖν
τέχνη ταῖς ψήφοις ἔμβαλε, πηξαμένη

τὸν Φθόνον ἐκ μέσσου καὶ ὄμματα Βασκανίης,
τῆς ἱλαρῆς τέχνης πολλάκις εὐξάμενος.

Ici vois avec plaisir, ami, les charmantes choses que pour nous l'Art a formées avec les cubes du mosaïste, à la stupeur (anaμévn) complète (en μéoσov) de l'Envie aux yeux jaloux...

J'arrête ma traduction à la fin du deuxième pentamètre, ne voyant pas à quoi se rapporte le troisième.

Deuxième tableau. La pompe de Dionysos. Le dieu, AIONYCOC, est assis dans un char dont EPWC est le cocher, et que traînent un Centaure et une Centauresse. Celle-ci joue de la grande lyre, celui-là de la flûte phrygienne). L'inscription T¤Ã¤TH, entre Dionysos et le Centaure, est-elle le nom de la Centauresse, ou s'applique-t-elle à la fête orgiastique que le tableau représente? J'opterais pour la première hypothèse (3). A côté du char de Dionysos court une panthère, elle semble lapper le vin qui tombe de la cruche du dieu. Derrière la

Cette épigramme a été copiée par FRANKEL à la villa Gilloteau à Nice (Arch. Ztg., 1874, p. 148). «Prope Nicaeam Italorum, écrivait KAIBEl en 1878. Ce prope Nicaeam Italorum en dit long sur les sentiments gallophobes de ce professeur de l'Université allemande de Strasbourg : il ne pouvait les contenir, même dans une compilation épigraphique! (Dict. des Antiq., s. v. TIBIA, p. 312.

Lexicon de ROSCHER, S. v. TELETE.

panthère, un pampre. Devant le char, Silène, en tunique, portant une outre sur les épaules, et tenant une tasse de la main droite. Devant Silène, dansent un Bacchant, CKIPTOC, ceint de la nébride, et une Bacchante quasiment nue le Bacchant fait sonner des cliquettes, la Bacchante des crotales. Rangée inférieure à gauche, un cratère, puis HPAKAHC (peau de lion, massue) ivre et titubant; un jeune Satyre (petites cornes pointant sur la tête, pedum) le soutient. Ensuite, panthère et canthare. Ensuite, Pan le chèvre-pieds (grandes cornes de bouc et nébride), une grappe dans une main, cliquettes dans l'autre. Puis, dans le champ, syrinx et cliquettes. Puis, un Bacchant nu (nébride, pedum), qui souffle dans une corne. Enfin, une Bacchante décemment vêtue (chiton et manteau) qui danse, le thyrse dans une main, dans l'autre le tambourin.

Troisième partie. Moins haute que les deux autres, elle est formée d'un grand titulus à queues d'aronde (une couronne dans chacune), entouré d'une zone d'oiseaux, tant sauvages que domestiques, à la picorée parmi les herbes du Nil (à gauche en bas, une oie picore les graines d'un lotus). Le titulus renferme quatre lignes qui sont autant d'hexamètres :

Εἴ με φιλεῖς, ώνθρωπε, χαίρων ἐπέβαινε μελάθρων,
ψυχὴν τερπόμενος τεχνήμασιν οἶσιν ποθ' ἡμῖν.
Πέπλον ίμερόεντα Χαρίτων ἡ Κύπρις ὕφανεν

λεπταλέη ψηφίδι, χάριν δὲ ἐνεθήκατο πολλήν.

Si tu es un ami, ô homme, entre, le cœur joyeux, dans cette grand' salle, pour avoir le plaisir de regarder les travaux d'art qui sont ici.

Le voile charmant des Grâces, c'est Cypris elle-même qui en a figuré le tissu en menus cubes de mosaïque, et elle a donné à son ouvrage beaucoup d'agrément.

Le dernier distique, qui ne se rapporte pas au pavement où il est écrit, concernait-il une autre mosaïque contenue dans la même salle ou dans le même édifice, et

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qui aurait été peut-être comme le portrait de Nestor, non pas un pavement, mais une décoration murale? Je n'ose décider. Les inscriptions de notre mosaïque, avec la graphie erronée NAOIC et le vers faux ou incomplet de la première, avec le dernier vers de la deuxième, lequel ne se rapporte à rien, avec le distique final de la troisième, semblent indiquer que Nestor ne fut pas tout à fait capable de diriger le travail de son mosaïste. Peut-être, malgré son nom et son goût pour l'art grec et la mythologie hellénique, ne comprenait-il pas très bien le grec, du moins le grec poétique.

Cette mosaïque est certainement d'époque assez basse. On s'en rend compte d'abord à la forme des lettres ensuite à l'orthographe EAPA- enfin à certains détails archéologiques, notamment aux cercles brodés sur la tunique d'Hippolyte et sur celle de Silène : des broderies de cette forme sont caractéristiques du Bas-Empire: on en a retrouvé sur les tissus coptes, on en voit sur des terres cuites (1) et sur des fresques (2). Tout à fait intéressante, pour dater approximativement notre mosaïque, la figure de Phèdre : le laticlave (3) de sa robe (détail pour lequel on se reportera à la planche III du mémoire de M. Clédat), le fauteuil où Phèdre est assise ("), la façon dont elle est coiffée, le double rideau suspendu par des anneaux à une tringle(), tout indique le commencement du Bas-Empire. Je ne puis apprécier, n'ayant pas vu l'original, n'en ayant même pas vu de reproduction coloriée, ce que valait la mosaïque de Cheikh Zouède au point de vue de la qualité et de l'harmonie des tons. Les mosaïques étant avant tout des tableaux en couleur, on ne saurait les juger équitablement si l'on n'en connaît que des repro

ductions en noir sur blanc.

(1) Perdrizet, Terres cuites grecques d'Égypte de la coll. Fouquet, p. 6, pl. VI.

(2) J. CLÉDAT, Le Monastère de Baouit, pl. LV (tunique de Saint Sisinnios).

Dict. des Antiq., s. v. CLAVUS, p. 1224. (Terres cuites grecques d'Egypte, p. 58.

(5) Cf. la mosaïque de Théodora, à Saint-Vital de Ravenne.

BECUEIL CHAMPOLLION.

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