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vous m'avés fait efperer: mais toutes ces pensées, & tous ces mouvements que je viens de vous descouvrir, ne naiffent en mon cœur que de l'intereft qu'un bon citoyen doit prendre au bien public, & de la cognoiffance particuliere que j'ay des chofes fur lefquelles je raifonne. S'il vous plaist de les recevoir auffi comme des preuves de mon zele & de ma fidelité à voftre fervice, vous ne vous

efloignerés pas de la verité; quoy que je ne pretende point de la faire paroistre en cefte occafion, ny autrement que par de folides effects; qui n'eftans point des payemens d'une debte, ne

re

recognoiffent aucun autre principe que la paffion avec laquelle je veux eftre toute

ma vie,

MONSEIGNEVR,

Voftre tres-humble, tres-
obeiffant & tres-affe-
Єtionné ferviteur

A la Haye ce I de

Novembre 1642.

Samuel Sorbiere.

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de

THOMAS MORVS

à

PIERRE EGID E.

"Ay honte, mon cher Egide, de m'acquit ter fi tard de ma promeffe ; & que vous ayez attendu toute une année, ce que vous esperiés, fans doute, de recevoir dans fix mois. En effect vous fcaviés bien, qu'en ce traicté de la Republique d'Vtopie je n'avois ny à inventer ny à dispofer les matieres, & qu'il ne falloit que reciter naifvement ce que vous & moy avions ouy raconter à Raphael. Vous jugiés auffi que mon travail feroit abregé des ornemens du language, aufquels je n'aurois pas à m'estudier ce difcours ayant efté conçeu fur le champ, Jans preparation, & par un homme moins verfe en la langue Latine qu'en la langue Grecque de forte que plus je negligerois mon ftile, plus je m'approcherois de la verité de la chofe, qui est le principal but que je debvois me propofer. le vous advoue franchement que ma peine eftoit fi fort abregée par tout ce que vous allegués, qu'il ne me reftoit prefque rien à faire. Et certes s'il en euft efté autrement l'invention ou l'œconomie de cest ouvrage euffent peu exercer long temps un homme docte & de bel esprit, c'est

à dire, un plus habile que je ne fuis, & s'il eust fallu adjouter à la verité les fleurs de l'Eloquence, tous les efforts de ma plume n'euffent pas empefché que le plus long ter me que j'euffe peu choifir ne fuft trop court. Mais estant delivré de tous ces foins, & n'ayant qu'à efcrire fimplement ce que j'avois ouy, il est certain que la chofe demeuroit fort aifée. Toutesfois la violence de mes affaires a efté telle, qu'ils m'ont defrobé ce peu de loifir qui m'eftoit neceffaire: car pendant que je vay tous les jours au barreau, que j'inftruis un proces, que je fuis arbitre ou juge d'un autre, que je reçois des vifites de compliment & d'affaires, que je fuis prefque toute la journée hors du logis, & plus sou vent pour autruy que pour moy mesme, vous ne fcauriez croire combien peu de temps il me reste pour l'eftude. Ce n'est pas encore tout. Eftant de retour à la maison il faut que je m'entretienne äveĉque ma jemme, que je me divertiffe avecque mes enfans, que je dife quelque mot à mes gens. Ie conte tout cela parmi mes affaires, puis qu'il faut que je m'y occupe, fi je ne veux vivre chez moy en estranger, fi je veux fatif faire an debvoir qui m'oblige de rendre ma converfation douce à ceux que la Nature ou le hafard m'ont donné pour compagnons de la vie. Et de vray pourveu que nous apportions à cefte courtoifie le temperament neceffaire à fe conferver le respect, à empefcher que la trop grande familiarité ne degenere en mefpris, nous guignons merveil

leufe

leufement par là les affections de ceux qui nous fervent. Mais cependant les jours, les mois, de les années s'efcoulent que je my prends pas garde. Quand est ce done que je puis avoir le loifir d'efcrire? Car je n'ay rien dit encore du fommeil ny des heures du repas; quoy que le premier emporte prefque la moitie de noftre vie, que quelques uns ne confument pas moins de temps à la table. De moy je n'ay dentier que ce que je retranche à la neceffité de ces deux occupations, qui eftant peu de chofe m'a traifné dans des longueurs inevitables; j'ay neantmoins enfin achevé ma befongne, & je la vous envoye maintenant,afin que vous preniés la peine d'y jetter les yeux, que fi j'ay rien oublié vous m'en advertiffiés. Car je ne voudrois pas fi fort prefumer de ma memoire que de penser que rien ne luy peut eftre efchappé, bien que je ne m'en deffie pas tout à fait, & pleut à Dieu que j'euffe une pareille mesure d'efpris & d'erudition. Mais Tehan Clement mon page qui eftoit avecque nous, comme vous fcavés que je le meine par tout ou je pense qu'il peut apprendre quelque chofe, esperant beaucoup des progrés qu'il a faits aux langues Grecque & Latine, m'a jetté dans une grande doute. Car il me femble qu'Hythlodée nous difoit que le pont d Amaurote fur l'Anydre avoit cing cents pas de long; &lehan affeure qu'il faut en ofter deux cents, la largeur de la riviere n'eftant que de trois cents pas. le vous prie de r'appeller voftre memoire la deffus;

d'au

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