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mais dont l'œuvre funéraire est néanmoins remarquable en elle-même.

Nicolas Blassel (1) (1587-1659) sculpteur amiénois, offre l'exemple unique d'un artiste qui, au milieu des tendances classiques, emploie une iconographie funéraire franchement chrétienne.Tous les tombeaux qu'il a exécutés sont du type de priant (2), unifié par l'introduction de la Vierge ou des saints patrons ou d'une scène religieuse.

A la première classe appartiennent les tombeaux de Chanoine Lucas (1628-35) et de Jean de Sachy et de sa femme (1644), tous les deux à la cathédrale d'Amiens. Dans le dernier, la Vierge avec l'enfant est debout au centre, pendant qu'aux deux côtés s'agenouillent les époux, exactement d'après la manière des tableaux à donateurs du moyen âge. On peut opposer cette composition à celle du mausolée de Louis de Brézé où il est presque impossible de trouver la Vierge qui est placée derrière les colonnes, aux pieds du cadavre du grand sénéchal. La Vierge garde sa place importante dans le tom

1. Voir l'Euvre de Blassel, célèbre sculpteur amiénois, par M.A. Dubois. Amiens, 1862, et le Livre des Epitaphes inventées par M. Blasset d'Amiens à Paris chez Drevet. On y voit des dessins de tombeaux de beaucoup de types.

2. C'était probablement la première disposition qu'on employait dans les premiers tombeaux du type de priant. Voir celui de la femme de Philippe III, Isabelle d'Aragon, à Cosenza (Calabre) cité par M. Mâle (l'Art religieux à la fin du moyen dge, 1908, p. 465-66). On voit la même manière de grouper dans les tableaux et les vitraux à donateurs.

beau (1) que Blassel exécute en 1641 pour Jacques Mouret. Pagès a laissé une description de cette œuvre malheureusement perdue:

<< La Vierge, de grandeur naturelle, est assise et tient l'Enfant Jésus entre ses bras. Au-dessus, on voit la figure de la Mort qui, couchée et à demi-enveloppée d'un suaire, présente une couronne de laurier à Jésus-Christ (2). »

Cette description trop courte fait ressortir un fait très significatif. C'est l'apparition déjà en 1641 de l'allégorie où la Mort, sous la forme d'un squelette, joue un rôle. Mais, en même temps, il faut se souvenir de la grande différence entre la Mort vaincue par des personnages chrétiens et la Mort qui lutte dans les allégories grandioses du xvine siècle. On voit un très intéressant exemple de ce dernier genre en germe, dans un tombeau par Gérard Van Opstal (1594-1668) qui date des années comprises entre 1630, l'année de son entrée à Paris, et 1668 : « Dans l'église des Incurables on voit de lui les figures posées sur le tombeau de messire Jean-Baptiste Lambert, conseiller et secrétaire du roi. Elles représentent la Foi et l'Espérance et au-dessous de la table où est gravée l'épitaphe, paraît la figure de la Mort, armée de son dard qui poursuit des génies de la Douleur, en forme d'enfants. Les uns fuient devant elle. Mais d'autres veulent arrêter sa course pour exprimer que

1. Autrefois au cimetière Saint-Denis, Amiens. 2. Cité par Dubois, p. 38.

la Mort brave la résistance des jeunes gens et, par là, faire allusion au trépas de M. Lambert qui était encore jeune quand il mourut. (1) »

Les tombeaux de Claude Pierre (1652) (2), d'Antoine Niquet et du jeune Blassel (3) forment un groupe ou un saint patron remplace la Vierge. Le mausolée du fils du sculpteur représente l'enfant agenouillé et conduit par le petit saint Jean-Baptiste, son patron, et par l'Enfant Jésus. C'est le tombeau d'enfant par excellence. Dans le monument funéraire d'Antoine de Baillon, le mort s'agenouille devant un Christ à la colonne, thème curieux qu'on voit aussi dans une autre œuvre à la cathédrale d'Amiens, savoir le tombeau de Pierre Burvy (xvio siècle).

L'église de Saint-Rémi d'Amiens contient le mausolée (1632) de Nicolas Le Lannay et de sa femme. Cette œuvre est la seule de Blassel qui manque d'unité. Le fond est divisé en trois niches dont l'une, celle du centre, est occupée par un ange. Aux deux côtés du portique s'agenouillent les époux qui, comme presque toujours dans les tombeaux de ce genre, n'ont aucun rapport l'un avec l'autre ou avec l'ange. Le soubassement est orné de figures couchées nues d'après la manière du tombeau de Henri II, conception pas en harmonie avec le génie de Blassel.

1. Mémoires inédits sur la Vie et sur les Ouvrages des membres de l'Académie royale de peinture et de sculpture, etc., publiés par MM. Dussieux, Soulié, etc. Paris, 1854, t. I, p. 178. 2. A la cathédrale d'Amiens.

3. Au musée d'Amiens.

Au soubassement, se trouvent les quatre figures des vertus cardinales en marbre blanc incrusté dans le marbre noir.

En 1657, notre sculpteur se rendit à Abbeville où on lui attribue la décoration en marbre blanc de l'épitaphe de Gabriel Briet (1), qui remplace celle du tombeau de Martin Galand et de Marguerite Boistel par François Cressent (2).

On y remarque un enfant appuyé sur une tête de mort et soufflant des bulles de savon qui rappelle l'ange pleureur si célèbre du tombeau du chanoine Lucas.

Puis, Blassel est l'auteur présumé de la statue de l'Enfant Jésus écrasant la tête du serpent qui décore l'épitaphe de Charles Vitry à la cathédrale d'Amiens. Ce thème fut peut-être imité plus tard par Robert Le Lorrain, dans le tombeau de Joseph Benoit (3). Mais ce genre de tombeau choisi par Blassel fut une exception (4) au xvIIe siècle comme en général,

1. A la cathédrale d'Abbeville.

2. Vers 1708-1710. Autrefois à la chapelle de l'Oratoire d'Amiens. Voir Dict. sculp. fr., t. II, p. 137.

3. Voir plus loin chap. 1.

4. Cependant il était très populaire en Flandre. Le tombeau d'Eugène d'Allamont par Jean Delcourt (1673) à la cathédrale de Gand en est un exemple remarquable. Le prélat est agenouillé devant un squelette qui lui montre un rouleau. A droite et à gauche sont la Vierge avec l'enfant et saint Michel, les adversaires de la Mort. On y voit le même genre de l'allégorie chrétienne que nous avons noté dans le tombeau de Jacques Mouret, par Blassel. Reproduit par Henri Rousseau. La Sculpture en Belgique aux xvII et xvшr siècles. Bruxelles, 1911, p. 76.

même au siècle précédent, le personnage religieux disparut et on ne voit que le priant agenouillé devant un prie-Dieu dont le livre est quelquefois supporté par un ange.

Dans les tombeaux de famille de ce type, on n'essaye pas d'introduire l'unité entre les priants. Par exemple celui de la famille de Rostaing (1) ne comprend que deux statues agenouillées sans rapport l'une avec l'autre.

Jacques Sarrazin 1588-1660.-L'œuvre funéraire de Sarrazin résume les tendances contradictoires du temps, tantôt réaliste, tantôt classique.

Probablement le premier monument funéraire exécuté par lui, fut le fameux monument du cœur de Louis XIII (2), commandé par Anne d'Autriche en 1643. Il se composait de deux anges d'argent qui tenaient, en volant, le cœur du roi, au-dessus d'une arcade qui était décorée de quatre bas-reliefs des

vertus.

La Douleur représentée sur le médaillon ovale qui

1. Autrefois au couvent des Jacobins. Aujourd'hui à l'église Saint-Germain-l'Auxerrois. Exécuté vers 1645. L'architrave du premier étage est supporté par deux cariatides (V. Millin, Ant. Nat., t. I, no 5, planche 3, p. 15).

2. Autrefois à l'église des Pères de Jésus (à gauche du maîtreautel). Détruit sauf les quatre bas-reliefs qui se trouvent au musée du Louvre (nos 818-819-20-21). Voir le Mercure de France, janvier 1738. Le monument du cœur de Louis XIV exécuté par Guillaume Coustou l'aîné, en 1714, était tout à fait semblable en composition à l'œuvre de Sarrazin. Jeté au creuset en 1804. Voir Dict. sculp. fr. t. I, p. 117-118.

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