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et dans laquelle il a joué un rôle brillant (vous ne l'ignorez pas, quoiqu'il ne vous en ait point parlé), vous a entretenus du passé de notre colonie, de son état présent et de l'avenir qui devra couronner la persévérance de nos efforts.

Enfin M. Albert Lefaivre vous a dans deux conférences entretenus d'une de nos colonies qui doit nous être chère à bien des titres, le Canada qui, tombé depuis plus de cent ans sous la domination anglaise, a su rester français de cœur, de langue, de mœurs, de religion, et qui, de toutes parts enserré par la race anglo-saxonne, nonseulement a gardé sa nationalité, non-seulement a vu croître sa richesse et sa population dans des proportions extraordinaires, non-seulement a résisté au flot de l'immigration sous lequel ses nouveaux maîtres ont voulu le submerger, mais a exercé sur tous les éléments étrangers qu'on y a versés une influence telle que, de Toronto jusqu'à l'embouchure du Saint-Laurent, l'étranger se croirait encore en pleine France. Et l'on dit que le génie de la France est de soi impropre à la colonisation! M. Lefaivre vous a montré qu'il y est éminemment propre, à une condition pourtant, c'est que les colons n'appartiendront point à cette engeance tarée et profondément dépravée qui s'est trop longtemps abattue sur les rives de l'antique Numidie, et qui nous diffame encore aujourd'hui aux yeux de l'Arabe toujours frémissant.

C'est le sort des mots de disparaître dans la langue usuelle avec la chose qu'ils représentent. Nos pères savaient ce que c'était qu'un pouillé ; les antiquaires seuls et les chartriers aujourd'hui savent que c'était l'état et le dénombrement de tous les bénéfices compris dans une circonscription déterminée. Notre confrère M. l'abbé Gauthier s'est consacré à recueillir tous les matériaux

de ce travail pour la circonscription du diocèse actuel de Versailles, où ne manquaient autrefois ni les abbayes ni les bénéfices. De pareils travaux ne se peuvent lire; on les imprime et ils sont utilement consultés. Mais le travail de M. l'abbé Gauthier est plus étendu, et il y a joint des notices, un peu sommaires peut-être, mais son cadre l'exigeait, sur les saints nés dans le diocèse, ou qui l'ont habité, ou dont les reliques ont pu y être transportées, et quelques-unes de ces notices ont été lues dans plusieurs séances.

M. Chardon, qui souvent vous a entretenus des œuvres d'art envoyées chaque année au Salon, a recherché si les anciens ou plutôt si les Grecs, le seul peuple artiste de l'antiquité, ont connu nos concours et nos expositions modernes; et il vous a montré qu'ils ont connu comme nous, mieux que nous, sous toutes leurs formes, les jouissances que procure l'amour et la passion des beaux-arts. Les Propylées dans Athènes, vous a-t-il dit, le temple de Junon à Samos, celui de Diane à Ephèse, étaient de véritables musées, et la Grèce entière une exposition permanente où se succédaient les œuvres de chaque génération. Il vous a rappelé les prix fabuleux qu'atteignaient les œuvres des Apelle, des Protogène, des Praxitèle, ces œuvres que couvraient d'or les Attale, les Démétrius, les Nicomède, et avec quelle impatience le peuple attendait le jour où il pouvait contempler les productions nouvelles des peintres et des sculpteurs. Enfin il vous a montré Apelle, Phidias, Zeuxis, Polyclète exposant leurs ouvrages aux yeux de la foule, tantôt pour rechercher le jugement et la critique du public et en tenir compte, tantôt pour donner à celui-ci une leçon de bon goût.

L'usage toutefois, comme il n'est que trop ordinaire,

ne laissait pas de dégénérer en abus, et M. Chardon yous a signalé des imposteurs qui, ne songeant qu'à se faire applaudir, ne dédaignaient pas, en vue du succès, de recourir à un véritable charlatanisme à bon droit répudié et flétri par les véritables artistes. Gratuites le plus souvent, ces expositions étaient parfois payantes, et les artistes exigeaient des visiteurs une redevance plus ou moins élevée. Ces expositions souvent aussi, comme de nos jours, résultaient de concours qui rapprochaient des artistes de nature et d'origine différentes, jaloux de soutenir leur réputation et l'honneur de leur patrie. Les Athéniens ouvraient le Prytanée à ceux qui avaient remporté le prix, et qui partageaient cet insigne honneur avec les grands hommes d'Etat et les plus illustres capitaines ce traitement, si on le compare au sort si précaire réservé aux lauréats de l'Ecole des beaux-arts, n'estil pas de nature à inspirer de tristes et amères réflexions? Du reste, les juges des concours anciens, vous a dit M. Chardon, comme nos jurys modernes, étaient parfois, et non toujours sans raison, accusés de partialité ; on leur reprochait de s'inspirer parfois de considérations étrangères à l'art, et M. Chardon vous a prouvé par plus d'un récit que, comme de nos jours, les juges étaient l'objet des récriminations et des colères des artistes plus ou moins justement condamnés.

Du reste, ces concours publics et pour ainsi dire officiels ne suffisaient pas à l'esprit grec, et la rivalité des artistes savait se donner une plus libre carrière. Il y avait souvent entre eux des provocations, des défis, de véritables duels, vous a dit M. Chardon, à coups de cauterium et de cestrum, à coups d'éponge et de pinceaux de crin.

M. Chardon a terminé son étude par quelques rappro

chements entre les expositions de la Grèce antique et les expositions modernes; il a recherché le caractère des unes et des autres; et s'il a penché pour les premières, c'est que les Grecs, en se pressant aux expositions, reconnaissaient que les artistes appartiennent à cette élite qui honore un peuple, le représente devant l'avenir, et voulaient leur donner avant tout non pas la fortune, mais la gloire; que les artistes grecs de leur côté ne descendaient pas au rang de marchands, et ne rivalisaient pas, comme il n'arrive que trop souvent de nos jours, à qui exposerait les objets les plus variés et les plus bizarres pour provoquer et pour satisfaire les fantaisies de la foule : ils s'efforçaient de l'élever jusqu'à eux, ils ne se dégradaient pas en descendant jusqu'à elle. Ils méritaient qu'on leur appliquât ce que l'auteur de l'Epître aux Pisons a dit des poètes de leur nation :

C'est aux Grecs que la Muse a donné le génie,
Donné la voix sonore et la pleine harmonie;

Peuple heureux dont la gloire est l'unique souci.

La gloire! et non pas l'arithmétique comme chez les Romains. Et puisque M. Chardon nous a conduits dans Athènes, chez ce peuple qui par un heureux privilége a su réunir dans les arts et dans les lettres la grâce la plus exquise de la jeunesse et la robuste vigueur de la maturité, laissez-moi vous rappeler ce court passage du même poète, encore qu'il soit dans toutes les mémoires:

Aussitôt que la Grèce eut déposé les armes

Et d'un sort plus clément put savourer les charmes,

De sa prospérité s'enivrant volontiers,

Elle ne rêva plus qu'athlètes et coursiers ;

Puis de polir le bronze ou le marbre ou l'ivoire

Tour à tour lui parut le comble de la gloire;

Puis d'un vivant tableau les tons harmonieux
Captivèrent ensemble et son âme et ses yeux;
Puis des joueurs de flûte elle fit ses délices;
La tragédie enfin fut l'un de ses caprices.
Fantasque jeune fille aux instincts délicats
Dont la nourrice encor surveille les ébats,
Sa passion s'éteint sitôt qu'elle possède :
Haine, amour, un excès l'un à l'autre succède;
Et voilà chez les Grecs quel fruit ont rapporté
La paix et le bon vent de la prospérité.

L'acquisition faite l'année dernière au prix de deux cent mille francs, pour le compte de l'Etat, d'une fresque attribuée à Raphaël, a donné lieu à des critiques trèsvives et à des controverses prolongées non-seulement parmi les artistes, non-seulement dans la presse périodique, mais encore dans un bon nombre d'Académies et de sociétés savantes.

M. Fontaine vous a entretenus de cette controverse, mais lorsque l'acquisition était déjà consommée en vertu d'un vote législatif; et il vous a présenté les arguments invoqués par les partisans ou par les adversaires de l'acquisition, après quoi il a examiné les points suivants : 1° La fresque est-elle réellement du peintre d'Urbin? 2o Quel est son état de conservation? 3° L'acquisition à un prix très-élevé d'une œuvre inférieure à des œuvres du même maître que nous possédons était-elle d'une réelle utilité? 4° Enfin quelle peut en être la valeur effective?

Pour vous permettre d'asseoir un jugement dans une matière des plus délicates, M. Fontaine a cru devoir vous rappeler les divers procédés employés dans les temps anciens pour l'exécution des peintures décoratives détrempe, cire, encaustique, fresque, et vous a montré les avantages et les inconvénients de chacun.

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