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serait bien mieux aplanie, si en améliorant la position. des maîtres, on exigeait d'eux des épreuves plus sérieuses, plus concluantes et qu'il est très-aisé d'imaginer. Il n'a été jusqu'ici question que de nos qualités, mais sommes-nous sans défauts? Nous en avons un grand, et le plus grand peut-être, l'inconstance.

Nos écoles de France et de Rome ont servi de modèle aux écoles des autres pays.

Pendant le XVIIIe siècle, toutes les académies de peinture, de sculpture et d'architecture fondées en Europe, ont été créées et dirigées par des Français; on peut citer celles de Vienne, de Berlin, de Dresde, de Copenhague, de Madrid, de Saint-Pétersbourg; les souverains étrangers envoyaient des pensionnaires étudier à Paris, et appelaient comme premiers peintres, premiers sculpteurs, premiers architectes, des artistes français.

Le nombre des œuvres d'art exécutées par nos artistes à l'étranger est considérable, et la plupart sont des ouvrages de premier ordre, et dont le livre de M. Dussieux nous donne une large idée.

Au moment où pour lutter avec nous nos voisins empruntaient et copiaient ses règlements, en 1863, l'administration mal conseillée a tenté de les changer complétement; se mettant en désaccord avec l'Institut que l'on trouvait suranné après la mort d'artistes, tels que Delaroche et Vernet, et qui cependant comptait encore parmi ses membres Ingres, Cogniet, Robert Fleury, Picot, Delacroix, Flandrin, Meissonnier, Guillaume, Jouffroy.

On a oublié tout d'un coup les services rendus, en lui retirant la direction de ces Ecoles d'où sont sortis tant d'artistes qui ont honoré la France; le temps heureusement a déjà fait justice d'une partie des changements essayés; on est revenu peu à peu à l'ancien état de choses,

mais une de ces malencontreuses créations a survécu, celle des ateliers de peinture, de sculpture et d'architecture au nombre de trois dans chaque section. Arrêtonsnous seulement à ceux de peinture: dans ces ateliers, on apprend à peindre, c'est-à-dire le métier, l'étude dessinée du modèle est négligée; or l'Ecole, comme on l'a vu précédemment, a été instituée pour donner un enseignement complémentaire, supérieur, général, fondé sur les grandes traditions classiques. Les élèves n'étaient admis à profiter de cet enseignement qu'à la suite d'un concours; ils se recrutaient parmi les élèves des ateliers d'artistes en renom, portant avec eux des caractères très-variés de tendance et de style, et venaient se fortifier et recevoir une heureuse influence de cet enseignement indépendant autant que libéral, et qui, quoi qu'on en ait dit, n'a jamais porté atteinte à l'originalité.

Il y avait donc deux phases bien distinctes, la première pour le métier, la seconde pour l'art; l'Ecole, en se substituant aux ateliers, est descendue à leur niveau et a cessé d'être une école spéciale de perfectionnement.

Une autre réforme tentée, mais qui heureusement n'a pas eu de durée, a été l'abaissement de 30 à 25 ans de la limite d'âge pour les grands prix. La conséquence naturelle de cette mesure était de réduire de cinq ans les études sérieuses, approfondies, continuées en vue de l'obtention du prix, et qui devenaient alors sans but direct et sans consécration. Une autre conséquence non moins funeste et à laquelle on n'avait même pas pensé, était l'impossibilité pour les futurs candidats de poursuivre leurs études littéraires classiques; il n'est pas besoin d'insister sur ce point. La limite d'âge à 30 ans n'a jamais empêché les génies précoces de devancer l'époque, et elle a permis à d'autres plus lents d'atteindre le but.

Il faut avoir passé par l'Ecole pour connaître l'émulation, les efforts énergiques d'hommes faits retenus sur ses bancs jusqu'à 30 ans dans l'espoir d'obtenir le prix. réservé à un seul d'entre eux; s'ils n'ont pas réussi dans le concours, il leur reste du moins pour les dédommager le talent; par leur travail persévérant ils ont acquis la science et perfectionné la pratique de leur art, et, s'ils sont heureusement doués, ils ont rendu complète leur éducation artistique.

J'ajouterai que l'Ecole des Beaux-Arts, tout en jouissant du précieux privilége de fournir des successeurs à ses maîtres pris eux-mêmes parmi les sommités de l'art, est toujours et malgré tout une pépinière inépuisable de sujets répondant à toutes les exigences de l'art et de l'industrie, et que, si les écoles de l'Europe cherchent à la suivre même de loin, elles sont toutes venues et elles viennent encore y puiser des leçons.

En résumé, mettant de côté l'art pur qui ne fait pas de conteste, nous avons par son influence sur l'industrie une situation enviée, acquise depuis longtemps et qu'on essaie de nous disputer. Nos voisins en quelques années, par des efforts très-grands et une volonté constante, ont réalisé des progrès très-réels; l'issue de la lutte ne peut pas être douteuse pour nous qui n'avons rien à créer; nous sommes préparés par nos instincts, par notre éducation, par le passé; le goût des arts est dans notre caractère, dans notre tempérament et nous les cultivons pour les jouissances qu'ils nous procurent.

Le mobile des Anglais est tout autre leurs instincts nationaux sont tournés vers le commerce, ce que nous faisons par goût est entrepris par eux comme un besoin de l'époque, une nécessité pour leur industrie, mais avec leur esprit de suite éminemment pratique ils

sont devenus des adversaires qu'on ne peut dédaigner. Cependant leurs progrès très-grands de 1851 à 1862, sont tout à coup devenus plus lents, moins sensibles; nos voisins paraissent avoir donné tout d'un coup ce qu'ils pouvaient espérer. Ils doivent en trouver la cause. dans l'absence d'éducation première, dans le manque de traditions; on n'improvisera pas plus une armée de professeurs qu'on ne changera en un jour le génie d'un peuple; avec du travail, beaucoup de travail on peut acquérir du talent; le génie ne se commande pas.

Enfin chez nous l'industrie s'ennoblit en s'élevant au niveau de l'art; en Angleterre c'est l'art qui est réduit à se faire industriel.

Sans nous enorgueillir d'une supériorité que nous ne conserverons qu'à la condition de nous renouveler sans cesse, pensons que les professeurs de nos maîtres étaient David, Regnault, Gros, Guérin, Gérard, Girodet, et nos maîtres, Vernet, Delaroche, Picot, Ingres, Drolling, Schnetz, Scheffer, Flandrin, Delacroix, Pradier, Bozio, David d'Angers, Cortot, Lemaire, Rude; mais je dois m'arrêter, la liste serait trop longue; on voit assez qu'il n'y a ni proportion, ni comparaison possible; tous ces noms plus européens que français, et tant d'autres qui pourraient être cités, évoquent le souvenir de chefsd'œuvre et appartiennent au XIXe siècle qui n'est pas fini. Nul ne sait ce qui nous est réservé, mais noblesse oblige, et si ce passé auquel on touche encore doit nous rassurer, l'union dans le travail et la constance dans les idées peuvent seules nous répondre de l'avenir.

RAPPORT du Secrétaire perpétuel sur les Travaux

de l'année académique 1874-1875.

MESSIEURS,

Comme à l'ordinaire je passerai rapidement sur une portion de nos travaux qui n'est pas la moins intéressante à bien des titres, mais qui rentrerait difficilement dans le cadre restreint de ce rapport: je veux parler des comptes rendus des volumes de Mémoires, que nous adressent régulièrement les sociétés correspondantes de la nôtre. Les envois de Lyon, d'Angers, de Lille, de Perpignan, de Pau, de Rouen, de Caen, etc., ont été étudiés cette année par MM. Chardon, Cougny, Courteville, Mercier, Ploix et Anquetil. Permettez-moi pourtant de signaler exceptionnellement le rapport de M. Ploix et la discussion qui s'est élevée sur une savante étude relative à un droit prétendu que je n'ai pas besoin de nommer, à un droit d'une odieuse immoralité qu'aucune législation, aucune coutume authentique écrite n'ont formulé, Dieu merci, et qui ne fut jamais que le fait d'une violence brutale dans ces siècles de ténèbres où nos conquérants barbares, dont il était de mode il y a cinquante ans (la mode se glisse jusque dans l'histoire) d'exalter les vertus, n'admettaient à l'égard des populations asservies qu'une morale et qu'une loi, celle du loup:

La raison du plus fort est toujours la meilleure.

Que l'institution du mariage soit conforme au droit naturel, il est malaisé de le contester, et les philosophes

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