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Octobre était sur son déclin,
Lorsque fort ému, l'avouerai-je ?
Je franchis le seuil du collège
Pour débuter le lendemain.

Les tilleuls, veufs de leur feuillage,
Privaient la cour de son décor,
Mais les rayons d'un soleil d'or
Inondaient l'azur sans nuage.

C'était un dimanche, et du soir
Les chants vibraient sous la coupole,
Chants par qui l'âme au ciel s'envole,
Chants de foi, d'amour et d'espoir.
L'œil fixé sur le péristyle,
Grave et recueilli j'écoutais,
Et librement j'interprétais
Ces beaux versets de l'Evangile :

« Le Seigneur a fait de son bras
Eclater la toute-puissance;

Il a confondu la jactance
Et les conseils des potentats.
Par lui de leur char de victoire
Les forts roulent précipités,

Et les humbles sont exaltés
Au plus haut comble de la gloire.

« De son peuple en vain rançonné
Il prend en pitié la détresse;
Au spectacle de sa richesse
Le monde s'arrête étonné;
De nos spoliateurs avides,
Frappés d'un vertige soudain,
Sans plus songer à son butin

La horde s'enfuit les mains vides. »>

Enfin, M. Anquetil a voulu ajouter à une œuvre antérieure du même genre la traduction en vers français d'un satirique latin, appartenant il est vrai à une époque

de décadence, et qui n'a pu préserver du mauvais goût triomphant son mâle et vigoureux genre, mais dont Boileau, un juge sévère pourtant, a pu dire que ses écrits, pleins de feu, partout brillent aux yeux, et que ses vers, tout pleins d'affreuses vérités, étincellent pourtant de sublimes beautés. Les trois quarts des satires sont traduites, e l'auteur espère terminer son travail l'an prochain.

Un poète a dit qu'on ne vit jamais, mais qu'on attend la vie; l'auteur aussi attend la vie, mais de plus il vit, car il travaille. Il travaillait aussi, même à la veille de sa mort, l'excellent confrère que nous avons perdu le 9 août dernier, enlevé par un mal foudroyant, à l'heure même où, pour la vingt-deuxième fois, vous le confirmiez, par acclamation, dans les fonctions de trésorier qu'il remplissait, vous savez avec quel zèle. Il travailla aussi jusqu'au dernier jour de sa vie, et déjà plus qu'octogénaire, l'homme qui fut, il y a quarante-quatre ans, l'un des principaux fondateurs de notre Société, j'aurais pu dire le principal, sans crainte de rien exagérer, ni d'être démenti. M. Théry en fut élu le premier président, et la présidait encore pour la troisième fois dix ans plus tard, lorsqu'il dut quitter Versailles pour aller administrer l'importante Académie de Montpellier. Eloigné de nous depuis près de trente-quatre ans, M. Théry ne cessa pas jusqu'au dernier moment de prendre le plus vif intérêt à nos travaux, et chaque fois que l'un de ses collaborateurs du vieux temps l'allait voir, il ne manquait jamais de lui demander comment va notre chère, notre bien chère Société? Il ne nous oublait pas, ce n'est que justice à nous de ne le pas oublier aujourd'hui.

LA SEMAINE SAINTE

A SÉVILLE

PAR M. L'ABBÉ J. CORBLET, MEMBRE TITULAIRE

Je ne viens pas ici vous décrire les merveilles de Séville, ses élégants patios embaumés du parfum des orangers, les féeriques décors de l'Alcazar, les admirables Murillos du Musée, les richesses bibliographiques de la Colombine, ni les splendides jardins de M. le duc de Montpensier. Je veux uniquement vous entretenir des cérémonies de la semaine sainte qui attirent à Séville un tel concours d'étrangers qu'il n'est pas facile alors de s'y loger. Les hôteliers abusent largement de la circonstance en louant leurs chambres de 25 à 35 francs par jour. Pour moitié de ce prix, on trouve bien à gîter dans une modeste casa de Huespedes, espèce de pension bourgeoise, essentiellement espagnole; mais heureux les palais cuirassés qui peuvent supporter les âcres senteurs de la cuisine à l'huile! Quant à moi, j'ai dû me résigner, pendant dix jours, à ne manger que des œufs à la coque et des oranges, en sorte que je n'étais pas toujours d'humeur à répéter avec les Espagnols : Qui n'a pas vu Séville n'a pas vu de merveille, Quen no ha visto Sevilla no ha visto a maravilla.

Arrivé dans la capitale de l'Andalousie le 13 avril, veille du dimanche des Rameaux, j'assistais dès le lendemain matin aux offices de la cathédrale, observant surtout les usages liturgiques qui diffèrent des nôtres.

Ce ne sont pas des branches de buis, mais des tiges de palmier et d'olivier que l'archevêque officiant bénit avant la messe et distribue ensuite aux membres du clergé, ainsi qu'aux fidèles. La grande palme que l'archevêque porte à la procession est tressée, nattée, frisée, bouclée, recoquillée, enrubannée d'une façon fort ingénieuse par les sœurs de je ne sais plus quel couvent; mais, franchement, je préfère beaucoup les palmes restées dans leur majestueuse simplicité. Elles proviennent toutes des environs d'Elche, qui en fournissent non seulement à toute l'Espagne, mais encore à l'Italie et au midi de la France. Par un procédé particulier qui demande de grands soins, on fait blanchir les palmes sur l'arbre même. Comme elles se vendent environ deux réaux et qu'on en expédie plus de cent mille de la ville d'Elche, c'est là, pour cette localité, un bénéfice annuel d'une cinquantaine de mille francs. De même que chez nous, on garde, dans l'intérieur des maisons, le rameau bénit; mais, au lieu de livrer au feu la palme desséchée de l'année précédente, on l'attache souvent horizontalement à l'un des balcons de fer ouvragé qui donnent sur la rue.

Quand la procession des Rameaux est revenue de la porte occidentale de Saint-Michel, un chanoine monte en chaire pour expliquer le sens de la cérémonie qui vient de s'accomplir et commenter le chant du Gloria, laus. Dans toute l'Espagne, j'ai remarqué combien le clergé s'applique à exposer les rites mystérieux de la liturgie. C'est plus nécessaire là que partout ailleurs : les

églises sont généralement trop sombres pour qu'on puisse aisément se servir d'un paroissien ou de tout autre livre de piété; aussi se borne-t-on à suivre de l'œil toutes les cérémonies, et, pour s'y associer fructueusement, les fidèles doivent en comprendre le mystique symbolisme.

Il est assez curieux de voir les assistants se grouper autour de la chaire, entre le coro et la capilla mayor. Pas un banc, pas une chaise. Les hommes se tiennent debout, laissant les meilleures places aux femmes; cellesci s'agenouillent sur le sol tapissé de sparterie, s'accroupissent, font plusieurs signes de croix successifs, se baisent le pouce et jouent aussitôt de l'éventail, l'ouvrant et le fermant avec la plus gracieuse dextérité.

Ce jour-là, comme pendant toute la semaine sainte, la foule était immense : comment s'en étonner si l'on n'exagère pas en estimant à quarante mille le nombre des étrangers arrivés dans les murs de Séville. En vain ai-je demandé combien de personnes pouvait contenir ce vaste édifice du xv° siècle, partagé en cinq nefs, percé de neuf portes, éclairé par quatre-vingt-treize fenêtres et flanqué de trente-sept chapelles dont quelques-unes sont grandes comme des églises. Je dois pourtant le dire, Théophile Gautier a singulièrement exagéré en prétendant que « Notre-Dame de Paris se promènerait la tête haute dans la nef du milieu » de la cathédrale de Séville; notre basilique parisienne serait au contraire fort embarrassée de sa tête et chercherait vainement le moyen de faire mouvoir ses tours de 66 mètres d'élévation, sous une voûte qui n'en a que 40, c'est-à-dire 4 de moins que la cathédrale d'Amiens. Mais la métropole andalouse est assurément l'église qui tient le premier rang pour la longueur. Elle mesure 198 mètres, tandis que Saint

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