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Masson pour la taxation des forêts jardinées, comme on l'em ployait dans les futaies pleines.

La raison d'être du jardinage est la dissémination des coupes. Pour la réaliser le plus complètement possible, il faudrait par. courir chaque année l'étendue entière de la forêt. Cela est manifestement impossible pour peu que cette étendue soit un peu considérable, lors même qu'il n'y aurait pas d'autres inconvénients au fait de revenir tous les ans en coupe sur le même empla cement. On est donc obligé de partager la forêt en un certain nombre de fractions qu'on appelle des coupons ou divisions, et l'on parcourt une division chaque année de façon à parcourir la forêt entière en une durée de rotation marquée par le nombre des coupons.

La formation de divisions entraîne cette conséquence grave que la coupe, qui devrait être disséminée sur toute l'étendue, se trouve concentrée sur une fraction de cette étendue seulement. On perd donc en partie le bénéfice du jardinage, dont on altère le caractère de plus en plus, à mesure que le nombre des divi. sions devient plus grand et la coupe, par suite, plus concentrée. On réduira conséquemment le nombre des divisions à un chiffre d'autant plus faible que la forme jardinée sera plus étroitement imposée. On admet d'ordinaire que ce nombre ne doit jamais dépasser quinze ou vingt au plus; en allant plus loin, on perd tout l'avantage de la forme jardinée et il serait préférable d'adopter la forme de la futaie pleine. Pour la commodité de l'exposition, je supposerai toujours, dans ce qui va suivre, qu'il a été formé 10 coupons.

La formation des coupons a encore une autre conséquence. La possibilité par volume (appelons-la P) a été calculée en fonction du matériel de l'ensemble de la forêt; elle correspond à son état moyen. En la récoltant dans un coupon en particulier on prélève sur celui-ci une contribution trop faible si ce coupon est plus riche que la moyenne, trop forte si ce coupon est un coupon pauvre. On laissera donc s'enrichir de plus en plus les parties riches, où s'accumuleront finalement les bois surannés, dépérissants, tandis que dans les parties pauvres le matériel

se réduira, les arbres faits disparaîtront et seront remplacés par des perchis, des fourrés ou des vides (1).

Il y a deux manières de remédier à cet inconvénient.

Les premier, le meilleur, consiste à taxer chaque division comme si elle était seule. Ainsi, pour le coupon no 1 on calculera, par le procédé habituel, une taxe P1, pour le no 2 une taxe p1, etc. On parcourra la première année le coupon I en y prélevant un volume 10 p1 (puisqu'on n'y revient que tous les dix ans); la deuxième année, on prendra 10 P2 dans le coupon 2 et, dans la durée de la rotation, on aura coupé 10 (P1 + P2+ + P10), ce qui est évidemment égal à 10 P.

...

Ce système a l'avantage de l'ordre, de la simplicité dans les assiettes, et celui de proportionner exactement la contribution de chaque coupon à ses facultés productrices. En revanche, il a la conséquence de fournir un revenu qui peut être fort inégal d'une année à l'autre (2). Cet inconvénient est cependant le plus souvent assez peu grave. Les forêts jardinées sont reléguées dans des régions peu habitées, elles manquent de débouchés, de moyens de transport. Elles sont exposées à des accidents fréquents par suite de la rudesse du climat, de leur situation en haute montagne, tels que chablis, bris de neige, dégâts d'ava lanches, éboulis, etc. Le rapport soutenu, l'application d'un aménagement rigoureusement réglé y sont plus ou moins des chimères et il serait illusoire de trop s'y attacher. C'est pourquoi ce premier système, qui consiste à parcourir chaque année exactement une division entière, est presque toujours ou devrait presque toujours être suivi, surtout dans les forêts de l'État.

Lorsqu'on a des raisons particulières de rechercher un rapport

(1) Il convient de remarquer que cet inconvénient ne se produirait pas avec l'emploi d'une possibilité réglée par pieds d'arbre. Dans ce cas, on couperait tout naturellement des gros arbres, représentant un fort volume par conséquent, dans les parties riches, tandis que dans les parties pauvres l'enlèvement d'un même nombre d'arbres qui seraient forcément plus petits, ces parties étant pauvres précisément parce que la croissance y est plus lente, ne prélèverait qu'une coupe en relation avec la production plus faible.

C'est un avantage certain de la possibilité par pieds d'arbre que de proportionner auto matiquement la contribution de chaque division à sa richesse ou à sa productivité; ce résultat ne s'obtient évidemment qu'aux dépens du rapport soutenu.

(2) Il est évident que l'inégalité des revenus sera fort atténuée si l'on multiplie le nombre des séries d'aménagement dans la forêt jardinée. On est du reste nécessairement amené à cette multiplication pour éviter la formation de divisions, et, par suite, d'assiettes de coupes annuelles qui seraient trop étendues si elles dépassaient 20 à 25 hectares au maximum.

soutenu on peut adopter un autre système. On peut couper rigoureusement chaque année la possibilité calculée P, sauf à étendre la coupe sur une étendue supérieure à celle d'une division quand on opère dans des parties pauvres et à la concentrer sur une étendue moindre quand on opère dans des parties riches. On réalise ainsi le rapport soutenu, mais on introduit le désordre dans l'assiette des coupes (1). Il peut devenir avantageux dans ce cas de former un nombre de coupons plus élevé que celui des années de la rotation, de diviser la forêt destinée à être parcourue en dix ans en 15 ou 20 coupons, de façon à pouvoir arrêter chaque coupe annuelle aux limites, repérées sur le terrain, d'un des coupons, qui prennent ainsi le caractère de véritables parcelles d'aménagement.

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Un forestier français, Gurnaud (2), a préconisé, vers le milieu du siècle dernier, l'adoption d'une méthode dans la forme jardinée, qu'il appelait la méthode du contrôle, et qu'il estimait applicable à toutes les essences et à toutes les forêts sans exception.

Gurnaud commençait par affirmer (sans du reste en fournir

(1) Ce système est plus commode dans l'application que le précédent, qui oblige le forestier marquant une coupe à parcourir une étendue fixe en répartissant convenablement sur cette étendue le prélèvement d'une possibilité également fixée. Il laisse l'opérateur libre de concentrer la coupe à sa guise; il peut en résulter des abus sur lesquels je n'ai pas à insister.

(2) Gurnaud (A.), né à Besançon en 1825, élève à l'École forestière en 1845. Gurnaud avait essayé d'obtenir que les forêts de Chaux (Jura; la plus grande, à cette époque, de nos forêts feuillues après Orléans) et de Levier (Doubs; la plus belle de nos sapinières doma. niales) lui fussent livrées comme champ d'expérience pour l'application de théories nouvelles sur le traitement des forêts. L'Administration des Forêts refusa de donner suite à pareille demande, et on ne saurait s'en étonner lorsqu'on relit les brochures, publiées en 1865 et 1866, dans lesquelles Gurnaud ne craint pas de déclarer qu'il est nécessaire de faire une coupe générale, pour un milliard et demi de francs, du matérie! qu'il estimait surabondant dans les forêts de l'État. (La loi de finances du 29 décembre 1873 estimait la valeur totale, fonds et superficie, des forêts de l'État français à 1.262 millions de francs). Dépité, sans doute, de ce refus, Gurnaud entreprit dès lors de susciter des difficultés entre l'Administration et les communes forestières du pays où il vivait, dans la montagne du Jura: la situation s'envenima au point qu'il dut être rayé des cadres des agents forestiers par décision du 9 décembre 1866. Gurnaud mourut à Nancray (Doubs) en 1898.

aucune justification) (1), que la forme d'exploitation la plus avantageuse est celle d'une exploitation d'arbres où toutes les dimensions sont confusément mêlées. Il est reconnu que la coupe d'une partie du matériel imprime une accélération immédiate à la végétation de ce qui reste sur pied, mais que cet effet dure peu, si bien qu'il faut renouveler la coupe très fréquemment sur la même place, tous les six ans par exemple. En conséquence, les forêts seront partagées en suites de six coupes annuelles, et parcourues avec des rotations de six ans par des coupes recépant les sous-bois à l'exception des semis, et enlevant des arbres pris çà et là. Les différentes dimensions d'arbres seront représentées dans chaque division de façon à ce que le taux d'accroissement de l'ensemble du matériel de la division soit celui qui conviendra au propriétaire. Tous les six ans, on fait un inventaire, calcule les accroissements et taux d'accroissement de toutes les catégories d'arbres dans toutes les divisions. C'est la répétition de ces inventaires, ou le contrôle, qui donne les indications pour fixer non seulement la quotité (par volume) de la coupe, mais encore la proportion dans laquelle la coupe portera sur les différentes catégories de diamètres. Gurnaud indique, pour déduire de la comparaison des inventaires successifs la grandeur des accroissements et du taux d'accroissement, un procédé de calcul assez inexact, qui constitue cependant la partie la plus intéressante de ses écrits.

Je me bornerai à faire ici, au sujet de la méthode du contrôle, les remarques suivantes :

1o Les procédés dont nous disposons pratiquement pour cuber un peuplement sur pied sont forcément imparfaits. Les inventaires de peuplements sont toujours entachés, quelque

(1) Les premières recherches de Gurnaud sur l'aménagement suivirent de près sa sortie de l'École forestière. Il raconte lui-même qu'en 1853 il soumit au directeur de cette école une série de mémoires exposant ses projets de réforme. Parade lui aurait répondu : « Souvenez-vous que les doctrines actuelles sont en possession et que vous ne les déposséderez que par des faits. » Ces faits, Gurnaud ne put jamais les produire.

Les théories de Gurnaud restèrent flottantes et indécises jusqu'à sa mort. Il semble qu'il n'ait réussi qu'imparfaitement à concevoir lui-même sa propre méthode; il ne réussit jamais à l'exposer clairement. Son œuvre, assez considérable, est disséminée en une foule de petits écrits ou même de tracts de quelques pages, ayant souvent l'allure de véritables pamphlets. Je m'abstiendrai, pour ce motif, d'en rien désigner ici. Actuellement, la méthode du contrôle n'est plus appliquée en France que par quelques très rares propriétaires de petites sapinières situées surtout dans le Jura.

précaution qu'on puisse prendre, d'erreurs qui atteignent facilement 5, 6 ou 7% du volume et davantage, en plus ou en moins (1). Deux inventaires successifs, même bien faits, si le premier est entaché d'une erreur de 7 % en moins, le second d'une pareille erreur en plus, peuvent donner de l'accroissement une valeur exagérée de 150 ou 200%, et cette erreur se retrouvera égale dans le calcul du taux d'accroissement (2).

(1) La Station de recherches forestières suisse a fait, en 1898, des constatations détail lées et exactes de l'importance de l'erreur qu'on est exposé à commettre lors du cubage de peuplements équiennes de futaie sur pied. Le cubage avait été effectué par les procédés les plus perfectionnés en usage dans les stations suisse et allemande; puis les peuplements cubés abattus et les tiges cubées individuellement par tronçons.

Des peuplements d'épicéa d'âge moyen, qui sont ceux qui se prêtent le mieux à un cubage sur pied relativement exact, ont revélé des erreurs sur le volume variant de 2,8 à 6,3%L'emploi des tarifs de cubage des stations de recherche allemandes ont donné des erreurs atteignant 12,3% dans les mêmes peuplements.

On a objecté aux chiffres ci-dessus qu'il est bien invraisemblable que des forestiers atten. tifs commettent des erreurs de 10 et même de 5% dans les dénombrements d'arbres et mesurages de diamètres d'un peuplement. Il convient de remarquer que les erreurs sur le volume ne proviennent pas seulement d'erreurs matérielles de dénombrement et de mesurage, mais encore, et surtout, de l'imperfection des méthodes. Ces deux natures d'erreur peuvent fort bien s'ajouter pour aboutir à l'erreur définitive sur le volume des bois sur pied. Il est du reste évident que les chiffres indiqués ci-dessus donnent des valeurs limites possibles de l'erreur sur le taux de l'accroissement, limites qui ne seront pas habituellement atteintes lorsqu'on opère sur de faibles étendues, avec des ressources suffisantes en hommes, en temps et en argent, et dans des peuplements bien homogènes, purs, d'âge moyen. Il n'en est pas moins certain qu'il serait singulièrement imprudent de vouloir baser un chiffre de possibilité (comme le prescrivait Gurnaud) sur deux inventaires successifs opérés à bref intervalle dans des forêts de quelque importance.

Voir, au surplus, les Mitteilungen de la Station de recherches suisse, VIe volume, Zurich, 1898, pages 107 et suivantes, et mon Économie forestière, 2o édition, Paris, Librairie agricole, rue Jacob, 26, page 167.

(2) Dans un de ses derniers écrits, Gurnaud promet un taux d'accroissement d'ensemble de huit (sic) pour cent pour une forêt où sa méthode serait pratiquée. Antérieurement (1890), il avait annoncé des taux de douze à quinze, et même de dix-sept à dix-huit pour cent, à ceux qui suivraient sa méthode. Ces taux s'entendent toujours comme s'appliquant à l'accroissement de l'ensemble du matériel en bois de tous âges dans des forêts étendues, En 1886, sur l'initiative de Puton, alors directeur de l'École nationale des Eaux et Forêts. la station de recherches forestières de cette école entreprit l'application, à titre d'expérience, de la méthode du contrôle dans un canton de 66 hectares de la forêt domaniale de Champenoux, près de Nancy.

La série du contrôle de la forêt de Champenoux est située en sol argileux (marnes supraliasiques) profond, frais, de bonne ou assez bonne qualité. Les peuplements en avaient été traités, de temps immémorial, en taillis sous futaie à une révolution de 35 ans. Le taillis était formé de charme et de bois blanc, la réserve de chêne, charme, hêtre et bois blancs; elle comprenait, à l'hectare, en moyenne, 116 arbres dont 79 de 20 centimètres et plus de diamètre cubant ensemble 31m3, 5. Ce volume, de même que ceux que j'indiquerai plus loin, ne comprend que les troncs des arbres, ce que Gurnaud appelait le matériel principal, et qu'il divisait en petits bois mesurant de 20 à 35 centimètres de diamètre à hauteur d'homme, en bois moyens mesurant 40 à 55 centimètres et en gros bois mesurant 60 centimètres et plus.

L'aménagement de la série du contrôle fut réglé par Gurnaud lui-même dans un manuscrit

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