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Les écrits des auteurs français étaient traduits en Allemagne et attentivement étudiés par les forestiers de ce pays qui en ont tire grand profit (1).

C'est aussi dans le cours du XVIIIe siècle que l'opération de l'aménagement commença à être envisagée en elle-même, indépendamment de tout règlement de police, de toute question d'administration et de personnel. Les aménagements tendirent à devenir ce qu'ils sont aujourd'hui; le règlement des coupes, autrefois accessoire dans l'acte de réformation, passa au premier rang et ce qui faisait l'objet principal des réformations ne fut plus que l'occasion de courtes mentions dans un mémoire introductif aux règlements proprement dits.

J'emprunte au Manuel forestier de Guiot (2) quelques indications sur la manière dont les officiers des maîtrises concevaient les opérations d'un aménagement à la veille de la chute de l'ancien régime. Je suivrai autant que possible, en l'abrégeant beaucoup, le texte du chapitre IV intitulé AMÉNAGEMENT GÉNÉRAL DES FORÊTS.

ART. I. (Est relatif à la reconnaissance des limites à la délimitation et au bornage.)

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ART. 2. Règlement général des forêts. « Les différents règlements et ordonnances de nos rois, qui doivent être exécutés par privilège (3)..., ont fixé à 60, 90, 100, 150 et 200 ans l'âge auquel les bois du domaine, mis en futaie, doivent être abattus (4)...

« Le règlement général des coupes d'une forêt dépend : « 1° De l'essence des arbres qui composent le massif;

« 2o De la qualité du sol;

« 3o Du débit le plus avantageux. »>

(1) Le traité Des semés et plantations de Duhamel a été traduit en allemand en 1765 par Schöllenbach; les mémoires présentés en 1721 par Réaumur à l'Académie des sciences sur l'accroissement des forêts l'ont été par Stahl dans le premier volume de son Magasin forestier.

(2) Manuel forestier, par M. GUIOT, garde-marteau en la maîtrise des Eaux et Forêts de Rambouillet, Paris, 1770, I volume in-12 de 302 pages.

(3) C'est-à-dire les règlements généraux ou ordonnances qui doivent être exécutés à défaut d'indications spéciales de règlements particuliers.

(4) Guiot est ici dans l'erreur : les règlements généraux n'ont indiqué que l'âge de 100 ans comme minimum, sans en préciser aucun.

ANN. FOREST.

(Suivent des développements sur ces trois points. Guiot admet que pour les pins et sapins dans le Midi de la France l'âge d'exploitation convenable est de 70 à 80 ans; pour les forêts de chênes il serait, en bon fonds, de 120 à 150 ans.)

«...La règle générale pour l'aménagement d'une forêt considérable est de la partager en plusieurs parties, dont chacune se coupe à un certain âge : ces parties se nomment triages. Chaque triage contient une révolution d'âge, c'est-à-dire doit être partagé en un certain nombre de coupes qui s'exploitent annuellement les unes après les autres.

« Il y a deux choses importantes à observer dans cette distribution la première est de placer la succession des coupes de manière que le débardage se fasse toujours par les anciens taillis.» (La seconde est de donner une étendue convenable aux ventes annuelles.)

ART. 3. (Cet article énumère les cas dans lesquels on peut régler les taillis à moins de dix ans : oseraies, arbres d'émonde, taillis de châtaignier ou coudrier produisant des cercles ou des échalas.)« Quand le débit du bois à charbon est assuré on gagne beaucoup de couper un taillis, même en essence de chêne, en bon fonds, dès l'âge de 10 ans. La vigueur de ce jeune bois donne une qualité particulière au charbon, que les cuisiniers savent estimer et apprécier. »>

ART. 4.

Défauts (inconvénients) des jeunes taillis (de moins de dix ans). (Le sol n'est pas suffisamment ombragé, les bruyères et herbes n'y disparaissent pas dans l'intervalle des coupes successives. Trop répétées, celles-ci épuisent les souches). « Les jeunes taillis sont exposés deux ou trois fois aux gelées du printemps et à la dent du bétail pendant qu'un vieux taillis ne le sera qu'une fois. » (Les brins du taillis ne donnent pas de graines fertiles avant 20 à 25 ans, et les baliveaux n'ont aucune valeur lorsqu'ils sont marqués dans des taillis trop jeunes.)

ART. 5. Des taillis âgés. « On peut assurer qu'il n'y a point de forêts dont le fonds, regardé généralement, ne puisse produire des taillis jusqu'à l'âge de vingt ans, sans aucune perte pour le propriétaire, quand même la plus grande partie des essences serait en bois blanc

« Le premier avantage d'un taillis de 20 ans est de donner déjà un peu de grand bois... >>

Le second avantage consiste dans les baliveaux réservés, dont on fait les grosses charpentes. Il n'y a pas de comparaison entre les baliveaux des jeunes taillis et ceux des taillis âgés...; un baliveau élevé sur un taillis de 25 ans aura au moins vingt-cinq pieds de tige, tandis que celui qui se trouve sur un taillis de 10 ans n'aura que dix pieds. Cette différence est dans la même proportion pour la grosseur... Quand même il n'y aurait pas avantage à couper un taillis une seule fois à 20 ans au lieu de deux fois à 10, il y en aurait beaucoup sur les baliveaux... Ce qui est certain est qu'un moderne de deux âges dans un taillis de 25 ans produit le double en charpente qu'un moderne de deux âges dans un taillis de 20 ans.

Le troisième avantage consiste dans le repeuplement... A 20 ans et au-dessus, la masse entière fournit une quantité prodigieuse de semences. Les bonnes essences s'élèvent au-dessus des bois blancs qu'elles font périr...

Ces trois avantages réunis devraient décider tout bon citoyen à régler ses bois à l'âge de 20 ans, et plutôt au-dessus qu'au dessous... Au lieu de couper 26 arpents de 15 ans, on n'en coupera que 20 à 20 ans ou 16 à 25 ans; la valeur de l'arpent aug mentera d'année en année... on sera remboursé avec usure de l'intérêt de l'argent... on augmentera son revenu de moitié en sus ou d'un tiers.

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ART. 6. Figures et séparations des ventes. « La figure d'une vente paraît d'abord de petite importance; mais ceux qui ont fréquenté les bois savent bien que ce n'est point une chose indifférente.» (Suivent des considérations sur l'inconvénient d'une forme trop irrégulière des coupes.) « Pour éviter un semblable défaut, il faut établir une laie sommière, et quelquefois deux. Ces laies, qui sont ordinairement de six pieds de largeur, servent de décoration, de routes de chasse et facilitent les visites des gardes du canton. Sur ces laies sommières on élève perpen. diculairement les laies simples qui doivent séparer les ventes et qui sont communément de trois pieds de largeur... » (On peut, du reste, éviter la perte de terrain et les frais de défrichement

qu'occasionnent les lignes d'aménagement.) « Pour cela il suffira de faire des fossés longs d'une toise chacun en les plaçant de dix perches en dix perches dans l'alignement que l'arpenteur aura dressé pour la séparation des coupes. Aux extrémités de chaque laye on fera un fossé à marteau (en forme de T)... » ART. 7. - Des massifs en réserve. (L'auteur résume la législation en vigueur de son temps sur les fonds de réserve et insiste sur l'utilité qu'il y aurait pour les particuliers à en instituer dans leurs bois.)

ART. 8. Desséchement (assainissement) des forêts.

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ART. 9. - Des chemins de débardage.

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ART. IO. Régénération naturelle des futaies. (L'auteur recommande une culture superficielle du sol en vue de faciliter la régénération.)

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Tous les forestiers étaient d'accord, dès la fin du xviie siècle, sur l'utilité de reculer l'âge d'exploitation pratiqué jusqu'alors pour les taillis dans la plupart des taillis à baliveaux. Ils donnaient, de cette mesure, les mêmes motifs culturaux que nous en donnons encore actuellement : le sol se détériore sous l'action de coupes trop fréquentes, il est envahi par les bruyères et les morts-bois; les bonnes essences disparaissent d'autant plus sûrement que les morts-bois fructifient et drageonnent avec abondance dans les jeunes taillis, ce qui n'est pas le cas pour la plupart des espèces précieuses. Enfin les baliveaux marqués dans les taillis trop jeunes ne viennent pas à bien, ils restent bas, branchus, étalés, plus nuisibles qu'utiles (2). Aussi tous les

(1) Je rappelle que si la forme d'exploitation forestière que nous appelons aujourd'hui taillis sous futaie a existé anciennement en France, son nom actuel ne date que du commencement du XIXe siècle.

(2) Les anciens forestiers ont beaucoup discuté sur l'utilité de réserver des arbres de futaie au-dessus des taillis.

La plupart des auteurs du XVIIIe siècle, RÉAUMUR, DUHAMEL, BUFFON, PLINGUET, etc., leur reprochent << de s'étendre en pommiers », de donner peu de bois d'œuvre et de médiocre

règlements, très nombreux, édictés soit par les réformateurs, soit par les grands-maîtres, prescrivent-ils des durées de révolution qui sont généralement de 25 ans, quelquefois davantage, rarement moins, dans les bois des communautés laïques ou ecclésiastiques.

Dans les forêts du domaine les âges d'exploitation de 30, 35 ou même 40 ans ne sont pas rares au XVIIIe siècle pour les taillis.

Le côté économique du sujet, la théorie des exploitabilités des taillis, a fait de même l'objet de nombreuses recherches au cours du XVIIIe siècle. Réaumur eut le mérite de poser la question le premier dans ses Réflexions sur l'état des forêts du royaume (1). Il aurait voulu voir instituer des expériences en vue de déterminer l'accroissement annuel du volume d'un arpent de taillis afin de reconnaître avec certitude vers quel âge il commence à diminuer. Buffon, en 1739, déclarait de même que la grandeur de l'accroissement annuel du volume passe par un maximum « qu'il faut saisir pour tirer de son taillis tout l'avantage et tout le profit possibles ». Ces deux auteurs sont néanmoins restés dans les généralités, sans préciser leur pensée, Duhamel (2), en 1764, alla plus au fond du sujet en calculant l'accroissement moyen du volume et de la valeur à différents âges. Ce dernier, qu'il appelait le prix de la feuille, était, d'après

qualité. VARENNE DE FENILLE (premier mémoire, p. 20 de l'édition de 1792) déclare qu'il croit les baliveaux plus nuisibles qu'avantageux; on a des moyens plus économiques et plus sûrs de se procurer en quantité suffisante des bois de bonne qualité ».

Par contre PANNELIER D'ANNEL (Essai sur l'aménagement, Paris, 1778, 2o édition en 1784), TELLÈS D'ACOSTA, grand-maître des Eaux et Forêts en Champagne (Instruction sur les bois de marine, Paris, 1780), de Perthuis (Traité d'aménagement, Paris, ans VII et XI) et quelques autres, comme Guiot cité ci-dessus font remarquer, ainsi que l'avait déjà fait du reste de Froidour (voir plus haut, page 43) que les défauts des baliveaux pro viennent surtout des durées de révolutions trop courtes adoptées dans les taillis. « A l'époque où Duhamel et Buffon ont écrit sur les bois (déclare de Perthuis), le plus grand nombre des forêts présentaient une grande quantité d'arbres n'ayant presque pas du tout de tige et des cimes énormes qui offusquaient le taillis. Ce mal provenait de ce que les réserves avaient été faites dans de jeunes taillis de 10 et 20 ans... si ces hommes célèbres avaient observé les futaies sur des taillis convenablement aménagés ils auraient vu que la hauteur de la tige et la largeur de tête des arbres sont toujours relatives à l'âge d'aménagement des taillis... Les baliveaux paient bien leur place, et si Buffon et Duhamel ont attribué des incon. vénients graves aux futaies sur taillis, ces inconvénients n'étaient que l'effet d'un aménagement trop rapproché, etc. ».

(1) Mémoires de l'Académie des Sciences, séance du 24 décembre 1721. (2) Exploitation des bois, tome I, p. 173 et suiv.

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