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Dans son rôle principal, Hathor est la pupille du soleil, et par là les Egyptiens faisaient d'Hathor la déesse de la beauté, qu'ils plaçaient principalement dans les yeux. Puis viennent les titres de déesse à la belle face, de belle déesse, de déesse de l'amour. En même temps, Hathor est représentée comme la personnification de l'harmonie générale du monde, qui n'existe et ne dure que par le concours harmonieux de toutes ses parties. Aussi est-elle la divine mère, celle qui fait germer les plantes, celle qui produit le pain, celle qui donne la vie aux mortels, celle qui porte la fécondité et l'abondance dans toutes les parties du monde, l'amour n'étant fécond qu'à condition d'ètre harmonieux. L'un des caractères les plus fréquents sous lesquels les inscriptions du temple nous montrent Hathor, est aussi celui qui l'attache à toutes les idées de rajeunissement, d'épanouissement, de résurrection, et on en trouve les preuves jusque dans les motifs de décoration choisis pour les frises et les soubassements où les fleurs qui poussent, les tiges qui se croisent et s'entrelacent, les scarabées qui alternent avec le phénix, nous représentent à chaque pas l'éternelle jeunesse et l'éternelle

beauté de la nature. C'est même comme symhole de ces idées de renouvellement qu'Hathor est appelée très-fréquemment dans le temple la déesse Sothis (Sirius). Hathor est ainsi l'étoile qui fixe et gouverne le retour périodique de l'année (1), qui annonce la crue du fleuve; elle est l'étoile dont l'apparition à l'horizon oriental en même temps que le soleil levant annonce le renouvellement de la nature. Comme l'Aphrodite des Grecs, Hathor n'est donc pas seulement la déesse de la beauté physique; l'Hathor des Egyptiens est l'image de cette harmonie générale nécessaire à l'entretien et à la vie du monde; ce qu'on a voulu résumer en elle, c'est la notion et la personnification du Beau.

Peut-être, si le temple de Dendérah était un temple d'origine pharaonique, exempt par conséquent d'influences grecques, les inscriptions ne nous feraient-elles pas aller au-delà. Mais il est évident que, dans l'arrangement de certains tableaux inévitablement placés en face de toutes les portes d'entrée et où le roi fondateur est re

(1) Le premier jour de l'année chez les Egyptiens était fixé au 21 juillet, jour où Sothis et le soleil se montrent simultanément à l'horizon du matin.

présenté offrant à la divinité une statuette de la vérité (1) on a voulu nous représenter Hathor non-seulement comme la déesse du Beau, mais aussi comme la déesse du Vrai. Selon l'habitude, des inscriptions accompagnent ces tableaux. Devant le roi sont les paroles que le roi est censé prononcer; devant la déesse est la réponse que la déesse est censée faire au discours du roi, Dans toutes les chambres qui ne sont pas le sanctuaire le texte est de part et d'autre assez banal. « Je << t'offre la Vérité, dit le roi, je l'élève vers toi, ô • Hathor, dame du ciel, etc. » La déesse répond : «Que la Vérité soit avec toi! Que tu vives par «<elle! Que tu triomphes par elle de tes enne

mis, (c'est à dire que le mensonge soit vaincu << par la vérité). » Mais dans le sanctuaire, la banalité des textes disparait, et en entrant dans la chambre le roi s'écrie: « Je t'offre la Vérité, «ô déesse de Dendérah, car la Vérité est ton « œuvre, car tu es la Vérité elle-même. » Le rôle philosophique d'Hathor s'accuse donc ici de plus en plus nettement.

(1) La Vérité est représentée par une petite statuette de femme assise dans une corbeille et la tête surmontée d'une plume recourbée. Le roi tient la corbeille dans sa main étendue et la présente à la déesse debout devant lui.

Un troisième attribut d'Hathor, non moins caractéristique que les deux précédents, nous est révélé précisément par le soin que l'on a pris de lui assigner une place spéciale dans le temple ; je veux parler du temple des terrasses. Là Hathor n'est plus l'Hathor de l'étage inférieur; elle se transforme en Isis; elle devient la déesse qui s'attache à Osiris, le suit de chambre en chambre et assiste à la résurrection du dieu. Or Osiris, selon la tradition conservée par Plutarque, est le principe du bien. « Osiris, dit Plutarque, aime à << faire le bien et son nom, entre plusieurs acceptions, exprime, dit-on, une qualité active et bienfaisante. » Plus loin, Plutarque nous montre Isis et Osiris, tantôt gouvernant l'empire du bien, tantôt présidant à l'intelligence, principe de tout bien. « Isis, dit Plutarque, a un amour <«inné pour le bon principe.» D'ailleurs, sans aller jusque sur les terrasses, l'intérieur du temple ne nous transporte-t-il pas dans le même milieu quand, au nombre des neuf emblèmes du temple, nous voyons apparaître au premier rang le sistre. «Le sistre, dit Plutarque, signifie que les << êtres doivent toujours être en mouvement et « dans l'agitation; qu'il faut les exciter forte<<ment et comme les réveiller de

l'état de lan

gueur et d'engourdissement dans lequel ils << commencent à tomber. Ils disent que le son de << cet instrument éloigne et met en fuite Typhon. >> La mort vaincue au profit de la vie, le mal supprimé au profit du bien, le mensonge écarté par la vérité, tel est donc le symbole dont le sistre est le signe véritable, et on voit par là que les mêmes idées d'harmonie générale, c'est-à-dire du Beau et du Vrai, dont nous avons trouvé de si ingénieuses applications dans l'intérieur du temple, sont ici augmentées des idées du Bien.

Le temple de Dendérah présente donc un certain arrangement de ses parties dont, sans doute, un temple d'origine pharaonique ne laisserait pas voir de traces, et c'est par là que se trahit l'influence du temps où il a été bati. Evidemment les écoles platoniciennes qui florissaient alors à Alexandrie ont rayonné jusqu'à Dendérah, et toute la décoration du temple est composée pour résumer synthétiquement, sous le voile des divinités locales et de leurs attributs, les trois parties fondamentales de la philosophie le Beau, le Vrai et le Bien, tous trois identiques.

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