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des populations, des richesses agricoles, industrielles, commerciales. On donne aussi une attention plus grande qu'auparavant à l'étude des faits moraux qui se manifestent surtout par les crimes et délits. On s'efforce, en un mot, à tout constater, à tout inventorier, excepté les productions de l'esprit qui, de tous côtés, paraissent vouées à un oubli immérité.

Ces réflexions, suggérées par le travail que j'ai publié sous le titre de Manuel de statistique ethnographique universelle (1), ont fait naître en moi l'idée d'une statistique intellectuelle, que je considère comme un utile complément de toutes les statistiques existantes. Il s'agit d'opérer le relevé des œuvres de la pensée et de l'imagination, que les biographies générales ont enregistrées depuis les temps les plus reculés, de les classer par pays et par grandes branches de connaissances humaines, tellement que les richesses intellectuelles de chaque nation puissent apparaître aussi clairement, aussi méthodiquement, que les richesses matérielles dans les statistiques de l'agriculture, de l'industrie et du commerce. Aujourd'hui l'économie politique tient compte des richesses immatérielles aussi bien que des richesses matérielles.

De cette manière viendrait se combler une lacune fâcheuse qui se fait remarquer dans l'étude et la description des peuples; je crois même que ce travail serait d'une utilité réelle pour les études générales, dans lesquelles il servirait de guide: on cite souvent la littérature, la philosophie, la législation, la médecine, la peinture, la statuaire, etc., française, allemande, anglaise, italienne, espagnole, russe, etc.; une statistique intellectuelle, bien faite, montrerait les hommes et les œuvres qui, dans chaque branche d'art et de science, constituent les écoles propres à chaque nation; elle offrirait incontestablement de nouvelles facilités pour les études comparées d'un peuple à l'autre. En statistique, on établit des comparaisons entre les pays, sous le rapport de leur étendue, de leurs habitants, de leurs productions en tous genres; ne serait-il pas également intéressant, utile, instructif, de faire de semblables comparaisons pour tout ce qui rentre dans le domaine de l'intelligence ? C'est là un élément d'appréciation, auquel, à mon avis, la statistique ne peut désormais

(1) Bruxelles, 1847-1849, gr. in-8°.

rester indifférente; il doit conduire, il conduira à des conclusions nouvelles, utiles à l'administration et à la science.

Pour la Belgique en particulier, le gouvernement avait chargé l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts, de la rédaction d'une statistique intellectuelle, comprenant les œuvres. produites en Belgique depuis la révolution de 1830. A la page 574 du Bulletin de la séance du 3 juin 1848, on lit ce qui suit :

« Le secrétaire perpétuel fait connaître qu'il vient de recevoir de M. le ministre de l'intérieur une lettre qui concerne à la fois les trois classes et qui contient le passage suivant :

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La connaissance de l'état intellectuel de la Belgique « est devenue, pour l'administration, une nécessité à laquelle elle << doit se mettre en mesure de satisfaire; la seule nomenclature des « auteurs et de leurs œuvres serait déjà d'une grande utilité; mais « ce qu'il importe le plus au gouvernement, c'est de suivre les progrès qui ont pu et pourront encore se réaliser dans tous les genres. Une appréciation raisonnée, bien que sommaire, des « œuvres produites depuis notre émancipation politique, soit par « des indigènes, soit par des étrangers fixés dans le pays, serait, je <«< crois, le meilleur moyen d'atteindre le but que je viens d'indi« quer.

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« Un tel travail, qui devrait se continuer tous les ans, ne saurait « être convenablement exécuté que par l'Académie, qui, dans sa « constitution actuelle, réunit tous les éléments propres à constater « le mouvement intellectuel de la Belgique, sous le triple rapport « scientifique, littéraire et artistique.

« Le plan du travail, les moyens de l'exécuter, le mode de publi«cation, telles sont les premières questions à examiner, et je vous prie, Monsieur le secrétaire perpétuel, de les transmettre à l'Académie, avec prière de me faire connaître son avis sur chacune « d'elles. >>

"

« La classe décide, en ce qui la concerne, que la demande de M. le ministre doit être renvoyée à l'examen de la commission mixte, nommée par les trois classes pour la rédaction d'une biographie nationale. >>

L'Académie a décliné cette mission. Sur les conclusions de la commission mixte, la compagnie a pensé qu'elle ne pourrait entreprendre

un travail tel que celui dont il s'agit, et qu'il y avait lieu de prier le ministre de ne pas donner suite à sa demande.

Malgré cette décision, l'importance de la question reste entière. M.. Quetelet, à la page 250 de son ouvrage sur le Système social ('), a tâché de faire comprendre l'utilité qu'il y aurait à constater la part que les divers peuples ont prise au grand mouvement de l'intelligence.

A défaut d'un pareil travail, et en attendant qu'il puisse se faire, c'est y suppléer jusqu'à un certain point que de passer en revue la vie et les travaux d'une de nos grandes individualités littéraires : tout à la fois poète, historien, philosophe, critique, bibliographe, le baron de Reiffenberg, s'il avait encore été théologien et jurisconsulte, aurait résumé en lui toute la série des sciences transcendantes (2). Il est bon de noter ici ce qu'il a écrit, en 1845, à la page 102 du tome Ier du Bibliophile belge : « Dans un essai de logique, « nous avions énoncé quelques idées sur les quantités que la statisti<< que peut exprimer par des chiffres, et ailleurs nous avons rassemblé plus d'une fois des matériaux pour une Statistique intellectuelle. »

(1) Du Système social et des lois qui le régissent. Paris, 1848, vol. in-8°. (2) Pour prévenir les équivoques et les méprises, j'ai adopté le cadre ci-après des grandes branches de connaissances humaines. Les deux distinctions A et B me paraissent essentielles l'une tient au matérialisme, l'autre au spiritualisme, deux choses qu'il importe de ne pas confondre, aujourd'hui moins que jamais.

:

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FREDERIC AUGUSTE-FERDINAND-THOMAS baron DE REIFFENBERG appartenait à une noble et ancienne famille d'Allemagne ; il a obtenu reconnaissance du titre de baron par diplôme du 25 décembre 1842. Ses armes sont d'argent à trois bandes de gueules. Cimier un vol d'aigle blasonné comme l'écu. Supports deux lions d'or, armés et lampassés de gueules, tenant des bannières aux armes de l'écu.

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On trouve dans les biographies universelles cinq ou six personnages du nom de Reiffenberg:

Philippe de Reiffenberg, lieutenant général de l'électeur de Trèves. C'est sous ses auspices que l'imprimeur Feyrabend publia, à Francfort, l'an 1580, la première collection d'historiens belges, sous le titre d'Annales sive historic rerum belgicarum, vol. in-fol.;

Frédéric (ou François) de Reiffenberg, homme de guerre, mort le 12 mai 1595. Robertson l'appelle un soldat de fortune. Entre autres

exploits, il s'était emparé, pour son compte, de l'abbaye d'Echternach, dans le Luxembourg, le 1er septembre 1552;

Jean-Philippe baron de Reiffenberg, petit-neveu du précédent, fut bourgmestre noble de Coblence en 1681 et 1701, et possédait de profondes connaissances en antiquités et en histoire; l'illustre de Hontheim lui a rendu témoignage à cet égard. Il mourut le 4 février 1722, à l'âge de 77 ans ;

Philippe-Louis baron de Reiffenberg, cousin du précédent, entra dans l'état ecclésiastique et fut nommé, le 28 avril 1649, coadjuteur de l'électeur de Trèves. Ses ennemis réussirent à le faire déposer et enfermer dans le château de Koenigstein;

Enfin, Frédéric de Reiffenberg, né en 1719, dans le pays de Trèves, jésuite, historien, poëte latin et théologien ; il fut enlevé par une mort prématurée en 1764.

L'ouvrage, d'où ces détails sont tirés ('), ne fait pas mention d'un Justus Reiffenberg, que j'ai eu occasion de citer ailleurs (2). L'Annuaire de la noblesse de Belgique, par le baron Isidore de Stein d'Altenstein, année 1849, établit ainsi qu'il suit la généalogie de la famille Reiffenberg :

« Cette famille tire son nom d'un vieux château dont les ruines se voient encore non loin de Wiesbaden et qui a été longtemps le " chef-lieu d'un puissant Ganerbinat.

« Les seigneurs de cette ancienne terre salique jouissaient du « droit de guerre privée ou de Fehde. En 1362, ils firent la guerre « à la ville de Limpurg; en 1373, au comte de Falkenstein; plus « tard, à la ville de Francfort, aux landgraves de Hesse, etc.

<«<lls figurèrent dans les diètes de l'Empire et furent convoqués " nominalement à celle de Ratisbonne en 1471.

« Ils ont été constamment reçus dans tous les chapitres nobles. << Parmi leurs alliances, il y en a avec les maisons de Hohenlohe, «Nassau, Sponheim, Landskron, Hatzfeld, Stolberg, Leyen, Schwart« zenberg, Dalberg, Metternich, Eltz, Renesse, Raigecourt, etc.

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« Ils ont produit des Ministeriales imperii, des commandeurs de

(1) Biographie universelle, édition de Bruxelles, H. Ode, tome XVI, 1846. (2) Bibliographie historique de la statistique en Allemagne, avec une introduction générale; Bruxelles, 1845, gr. in-8°, page 20.

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