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pièces figurent dans quatre cahiers différents et, comme elles sont absolument semblables, les quatre abreviatores ont dû travailler sur un modèle commun. L'auteur de la minute n'a d'ailleurs pas fait une œuvre originale. Il suffit de se reporter aux documents de la légation envoyée en Hongrie sous Nicolas III, qui ont été publiés par Theiner1, pour voir que la bulle de nomination du cardinal d'Ostie en 1301 est absolument calquée sur celle de l'évêque de Fermo en 1278. Bien que la mission des deux légats ne fût pas la même, ces deux pièces, sauf des variantes presque insignifiantes, contiennent les mêmes généralités vagues présentées sous la même forme et dans le même ordre. Pour cette lettre particulière, les abreviatores ont donc travaillé sur une minute commune, ils n'avaient probablement que la responsabilité de la reproduction exacte de la pièce et celle de la rédaction des formules finales. Pour les autres lettres, on leur donnait simplement l'indication des pouvoirs accordés au légat3, et ils étaient chargés de la rédaction de la minute. Pour toutes, soit qu'ils en fussent les rédacteurs, soit qu'ils en fussent les copistes, ils ont pris soin de n'omettre aucune formule. Ces littere notate reproduisent chaque document dans son intégralité; l'adresse et la date y figurent au complet. Les corrections qu'on remarque en marge ne portent guère que sur des mots oubliés ou intervertis1.

Au premier abord, une telle dépense d'efforts pour un travail de pure forme étonne quelque peu, mais il suffit, pour en comprendre l'utilité, de se rappeler les règles de la chancellerie pontificale du temps de Boniface VIII publiées par M. Delisle.

La chancellerie pontificale, pour assurer l'authenticité de ses lettres, ne s'attachait pas seulement à certaines règles de rédaction, mais encore à des particularités extérieures d'écriture et

1. Potthast, no 21412-21449, Theiner, Monumenta Hungarie, I, 327, n° 544 et suivants.

2. Cette reproduction s'appliquait même à l'orthographe; ainsi, un des abréviateurs de nos cahiers ayant écrit sanctionis avec l'orthographe habituelle, on lit en marge la note suivante : « In originali ponitur sanxionis per X. »

3. La liste de ces pouvoirs est à peu de chose près la même pour les deux légations.

4. D'après le nom que portent ces fonctionnaires de la chancellerie pontificale, on pourrait croire qu'ils étaient spécialement chargés d'observer les règles sur les abréviations, il n'en est rien; il y a dans ces cahiers des abréviations arbitraires et qui changent suivant le rédacteur.

5. Mémoire sur les actes d'Innocent III. Paris, 1857, p. 23.

d'abréviations. Le soin d'observer ces dernières incombait aux grossatores; il était donc prudent de les décharger de toute autre préoccupation, et il fallait leur fournir un document définitif qu'ils n'eussent plus qu'à transcrire suivant les règles. Cette division du travail avait un autre avantage, surtout pour les lettres destinées à des particuliers : elle rendait plus difficile, par la complication même qu'elle entraînait, la supposition de documents pontificaux. Un faussaire, avant même d'arriver jusqu'au bureau de la bulle, devait s'assurer de la complicité d'un abreviator et d'un grossator; il avait à déjouer un contrôle qui s'exerçait aussi bien lors de la rédaction que lors du grossoiement de la lettre pontificale.

C'est ce qui excuse ce luxe de précautions dont ces littere notate nous semblent fournir un curieux témoignage.

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RAPPORTS A PHILIPPE VI

SUR

L'ÉTAT DE SES FINANCES.

M. de Boislisle a publié, il y a quelques années, un texte fort intéressant, qu'on peut à juste titre appeler Rapport à Philippe VI sur ses finances. Ce n'est pas, en effet, un budget dans le sens propre du mot, c'est une sorte de compte administratif présentant le tableau des opérations d'un exercice écoulé; c'est, en un mot, un des documents nécessaires à l'établissement d'un budget subséquent. Malheureusement, ce rapport n'était pas daté: M. de Boislisle a très heureusement comblé cette lacune et l'a attribué à l'année 1335 environ. Ce document est extrêmement curieux en raison surtout des totaux de recettes et de dépenses qu'il donne. Leur comparaison avec les tableaux dressés par M. Boutaric dans son livre sur Philippe le Bel donne les résultats les plus intéressants. Toutefois, quelques détails de ce rapport concernent des faits d'une importance trop restreinte, tandis que d'autres, d'un intérêt plus général, tels que les dépenses des divers corps de l'État, ne s'y trouvent pas.

Les deux rapports à Philippe VI, publiés ici, donnent des renseignements aussi complets: le premier a de grandes analogies avec celui qu'a édité M. de Boislisle; le second ne se borne pas à fournir des totaux 2; il entre dans le détail des recettes, des dons faits par le prince, des dépenses nécessaires au fonctionnement des services publics. Le rédacteur de cette deuxième pièce prend soin d'indiquer l'augmentation dans les dépenses, et cela non pas depuis une des précédentes années du même règne; il remonte jusqu'à celui de Philippe le Bel, qui, dans l'esprit des contemporains, paraît avoir été

1. Annuaire-Bulletin de la Société de l'histoire de France, 1875, p. 86. 2. Ceux-ci sont très souvent inexacts.

le règne modèle, sous lequel tous les services avaient été établis el organisés de la même façon qu'ils fonctionnaient encore au milieu du XIVe siècle. Il va sans dire que cette conviction, qui faisait tout dater de l'époque de Philippe le Bel, si elle reposait dans certains cas sur une base sérieuse, manquait parfois de fondement : c'était souvent une légende. On en a la preuve, entre autres, dans l'article qui concerne les gens des requêtes du palais; c'est Philippe le Long qui modifia leur ancienne organisation et non pas Philippe le Bel. Il faut donc n'admettre qu'avec la plus grande réserve l'attribution à Philippe le Bel de l'état ancien, visé dans le second rapport à Philippe VI imprimé ci-dessous. Ce que l'on peut admettre, c'est qu'il se réfère à la situation, telle qu'elle était dans le premier tiers du xive siècle.

Les deux rapports qu'on va lire se complètent sur certains points, quoiqu'ils aient été composés à deux époques assez éloignées l'une de l'autre. Le premier, rédigé probablement en 4332, se rapporte en effet à l'année 1331; le second est daté de 1344. Le premier, enfin, donne les recettes et les dépenses générales; le second entre davantage dans le détail.

A la vue de ces deux nouveaux documents, du même genre, en somme, que celui qu'a imprimé M. de Boislisle, on est tenté de se demander s'ils ne répondent pas à une règle que se serait tracée la Chambre des comptes sur l'ordre du roi et en vertu de laquelle elle aurait dû présenter à Philippe VI, à des époques déterminées, des rapports sur l'état des finances. Il semble, malgré tout, que cette hypothèse disparaisse en présence des premières lignes du rapport de 1344, qui contiennent une référence formelle au rapport de 1332. Il paraîtrait en résulter qu'aucun compte rendu n'avait été dressé entre celui de 1332 et celui de 1344 en tout cas, on ne relève aucune mention du document publié par M. de Boislisle et qui, cependant, aurait dû être cité, puisqu'il est de quelques années postérieur à celui de 1332. Quoi qu'il en soit, l'authenticité de ces trois textes ne saurait être révoquée en doute.

Les rapports de 1332 et de 1344 ont été relevés dans les copies faites par Ménant, il y a deux siècles environ, et conservées à la bibliothèque municipale de Rouen, dans le fonds de Leber'. Le texte en est très généralement correct; il est fidèlement reproduit ici : des notes, dont quelques-unes sont empruntées à la notice de M. de Boislisle, l'accompagnent; les autres se réfèrent, en général, au recueil

1. Extraits de la Chambre des comptes, t. VIII, fol. 54.

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des Ordonnances des rois de France'. On signalera seulement quelques extraits empruntés à un document conservé dans des copies faites au xve siècle sur des mémoriaux de la Chambre des comptes 2, et d'autres qui sont dus à une sorte de mémoire adressé à Philippe VI et dont je dois l'indication à mon confrère et ami M. Guilhiermoz, que je suis heureux de remercier ici.

H. MORANVILLÉ.

France, pour un an feni à l'Ascension l'an CCCXXX, xxxix" iiijc lxvj 1. xviij s. ij d. p. et tout le remanent de ce qui s'ensuit est à Paris par l'advaluement qui en est faict.

Normandie, pour un an feny à Pasques l'an 331, xlj iiije xix l. ij s. x d.3.

Champagne, pour un an feny à la Magdelaine l'an 329, xijm ve lix 1. ij s. iiij d..

Valoys et les autres terres que tenoit le Roy avant qu'il venist au royaume, xxxm vijxx xij 1. xij s. ix d. pour tout l'an 329 dessusdit.

Lille, Douay, Tournesis, la Leure et les autres revenues d'illec et de environ, rabateuz les gages que y prennent plusieurs serjens qui y sont en garnison, pour un an feny à la Saint-Jehan l'an 330, ve iiij vij 1. xviij s. x d.

Les seneschaussiées de la Languedoc avec la terre de nouvel acquise, vij vm vije xxx l. xvj d..

1. Quelques totaux ont été ramenés en monnaie actuelle, valeur intrinsèque au titre légal, à l'aide de la table V du savant mémoire de M. N. de Wailly. Nulle part, on ne s'est préoccupé de la valeur relative, pour laquelle il est impossible d'obtenir des résultats sérieux.

2. C'est le n° 2833 du fonds français à la Bibliothèque nationale.

3. En 1314, Philippe le Bel estimait le revenu de la Normandie sans le fouage à 100,000 livres. Contrairement à l'opinion de Boutaric, nous pensons que de cette somme il faut déduire les dépenses (Boutaric, p. 343).

4. C'est sans doute un arriéré, car la Champagne ne fut cédée à Philippe VI, en échange de la Navarre rendue à Jeanne, qu'en 1336.

5. On désigne sous ce nom ou sous celui de Lalleu une partie de l'arrondissement de Béthune.

6. Les sénéchaussées de Languedoc, en dehors de l'Agenois conquis en 1324, devaient rapporter, d'après l'estimation de 1314, 80,000 livres, d'où il faudrait déduire les sommes fournies par la Saintonge, le Périgord et le Limousin (Boutaric, 343). Sur les terres mentionnées comme récemment acquises, voir l'article de M. de Boislisle, p. 182 D.

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