Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

et économiser ainsi le temps pendant lequel les locomotives à vapeur chauffent inutilement; enfin, on ne perd pas une énorme quantité de chaleur coûteuse à remuer les bielles, les manivelles, les transmissions pesantes, dont les chocs et les frottements absorbent inutilement une partie de la force motrice.

Le système de M. J.-J. Heilmann permettra certainement, sans modifier grandement les voies, de réaliser pour des vitesses moyennes de 90 à 100 kilomètres à l'heure, ce qui constitue déjà un grand progrès et pourra être poussé plus loin avec quelques précautions.

La locomotive Heilmann a été essayée, au Havre, le 21 août 1893, sur une voie qui relie les ateliers des Forges et Chantiers de la Méditerranée aux Chantiers de Graville et au champ de tir du Hoc. Cette ligne, d'environ 2 kilomètres de longueur, comporte des courbes de 80 mètres de rayon et des rampes assez fortes, telles qu'on n'en rencontre point sur les lignes ordinaires. Malgré ces difficultés, la locomotive Heilmann s'est comportée d'une façon parfaite. Le peu de longueur du trajet ne permettait pas de lancer la machine à grande vitesse, et il était difficile, sur un parcours aussi restreint, aussi accidenté, et en grande partie sur la voie publique, de dépasser 30 à 40 kilomètres à l'heure. Mais, à cette allure, on a déjà pu constater la douceur du roulement de la machine, et jusqu'ici les prévisions de l'inventeur se sont réalisées en tous points. Grâce à la disposition spéciale des bogies à essieux, le passage au joint des rails est pour ainsi dire inaperçu.

Actuellement la locomotive est rentrée aux ateliers, pour être soumise à diverses expériences ayant pour but de déterminer le rendement des machines à vapeur, celui des dynamos et celui des moteurs. Ceux-ci ont déjà, du reste, fonctionné à une vitesse correspondant à 110 kilomètres à l'heure.

On peut donc espérer voir bientôt la locomotive Heilmann entrer en service sur une de nos grandes lignes de chemins de fer.

4o La Compagnie du chemin de fer du Nord a entrepris une série d'essais en vue d'établir la locomotion électrique sur son réseau, particulièrement pour exploiter les prolongements en souterrain des lignes qu'elle doit exécuter dans Paris, vers les Halles et l'Opéra.

La Compagnie ne se propose pas, au moins tout d'abord, de réaliser les énormes vitesses de 120, 150 et 200 kilomètres à l'heure, qui sont l'idéal et le but final des recherches sur l'application de l'électricité au matériel des voies ferrées. La première chose qu'elle voudrait obtenir de l'électricité, c'est de franchir les rampes aux vitesses admises aujourd'hui, à la descente, en ne donnant pas aux machines des dimensions et des puissances excessives, et en ne développant d'énergie que proportionnellement au travail nécessaire pour franchir les diverses déclivités de la voie.

La locomotive du chemin de fer du Nord doit comporter deux organes générateurs d'électricité : une dynamo et une batterie d'accumulateurs; l'un produit l'électricité avec un moteur à vapeur, l'autre l'emmagasine lorsque la traction du train n'exige pas la puissance totale de la dynamo, et il la restitue lorsque les besoins de la traction excèdent la puissance de la dynamo. En un mot, les dynamos et les accumulateurs travaillent ensemble pour franchir les rampes, et, à la descente, la dynamo charge les accumulateurs, qui suffisent à la traction du train,

Dans la machine d'essai qui doit servir à l'étude des divers organes de ce système électrique, on a toutefois, pour simplifier les études, supprimé le moteur et la dynamo, et l'on n'a recours qu'aux accumulateurs.

La locomotive électrique d'essai de la Compagnie du Nord se compose donc, tout simplement, du bâti à trois essieux d'une ancienne locomotive à vapeur, type Mammouth, arrivée à sa limite d'usure. Les roues de ce bâti ont 1,40 de diamètre; quatre machines dynamo-électriques motrices sont calées sur les essieux à l'extérieur des roues, et leurs anneaux extérieurs ou inducteurs sont

suspendus aux châssis par de forts ressorts, destinés à neutraliser les trépidations.

Chacune de ces machines développe normalement une force de 30 chevaux-vapeur, qui peut être portée à 100 chevaux par machine au moment du coup de collier ou démarrage, et à 60 chevaux lorsqu'il s'agit de gravir une

rampe.

Les accumulateurs électriques, au nombre de 80 éléments, du type de la Société du travail électrique des métaux, pèsent, avec les bacs qui les contiennent, leurs acides et leurs accessoires, 18 000 kilogrammes environ. Une batterie d'accumulateurs de ce genre ne permet que de marcher sans interruption pendant 5 heures et de ne parcourir qu'un peu plus de 200 kilomètres.

La locomotive électrique se complète par un frein électrique puissant et par un sifflet également électrique.

Ces essais sont volontairement modestes, et l'on n'en attend pas les vitesses extrêmes auxquelles on peut espérer atteindre un jour. Mais il ne faut pas oublier que rien dans le passé n'instruit nos ingénieurs sur ce qui peut se produire dans les conditions nouvelles où ils se trouvent placés.

5o Nous avons rendu compte dans notre dernier Annuaire du travail concernant la traction électrique sur les voies ferrées entrepris à la Compagnie de Paris-LyonMéditerranée, par M. H. Bonneau et M. Desroziers. Depuis lors cette étude a été poursuivie, et les divers moyens de réalisation ont été envisagés.

Dans leur première étude, MM. H. Bonneau et Desroziers laissaient planer quelque incertitude sur le procédé à employer pour utiliser le courant électrique. Ils écartaient, jusqu'à nouvel ordre, les accumulateurs comme trop lourds par rapport à la puissance développable. Mais depuis lors les accumulateurs ont fait de grands progrès et leur emploi est devenu pratique. Il serait déjà possible, grâce aux nouveaux accumulateurs, pour des lignes à très grande circulation de voyageurs, telles

que celle de Paris à Nice, par exemple, de mettre en marche des trains de luxe électriques très rapides, en demandant aux voyageurs un supplément de 15 francs entre Paris et Lyon (512 kilom.), de 2 francs entre Paris et Marseille (862 kilom.) et de 35 francs entre Paris et Nice (1086 kilom.). Le trajet de Paris à Nice s'effectuerait ainsi en 12 heures au lieu de 22 heures, celui de Paris à Lyon en 5 heures au lieu de 9, etc. Comme il s'agit ici de traction de luxe, le résultat financier ne manquerait pas d'être satisfaisant.

La locomotive électrique, nécessaire pour réaliser ce programme, a été étudiée dans tous ses détails. Elle développerait 1200 chevaux de 75 kilogrammètres, à la vitesse de 120 kilomètres à l'heure. Son truc général est monté à l'arrière sur 3 essieux formant un empâtement rigide de 4,700, et à l'avant sur un bogie à 4 roues de 1,250 de diamètre; la longueur totale, entre tampons, est de 11 mètres environ. Les deux essieux moteurs, à roues de 2m,36 de diamètre, sont placés dans la partie centrale et entourés par les dynamos motrices dont les induits, en forme de plateaux, sont portés par des arbres creux enveloppant les essieux. Les dynamos sont suspendues à l'intérieur du châssis : les longerons du truc sont extérieurs aux roues et solidement entretoisés. Les entretoises, situées entre les deux roues motrices et de chaque côté, sont en forme de fer à cheval, ce qui permet au machiniste-électricien d'accéder en tout temps aux dynamos, de les visiter, de régler les balais collecteurs de courant, enfin de surveiller les machines avec autant de facilité que si elles se trouvaient placées dans une station fixe. Tout le mécanisme est enfermé dans une sorte de grand wagon éclairé par des ouvertures vitrées, et dans lequel le vent ni la poussière ne peuvent pénétrer. Le mécanicien est placé à l'avant de la machine, ayant sous la main les appareils de manœuvre électriques et le frein continu.

L'ensemble de cette locomotive pèserait 58 000 kilo

grammes, dont 4000 kilogrammes d'accumulateurs placés dans le bogie; son aspect est puissant et gracieux tout à la fois.

<< Il paraît certain, dit M. de Nansouty dans le Génie civil, qui donne un croquis de ce nouveau moteur, que la locomotive a été étudiée à ce point de vue, en même temps qu'à celui de la traction proprement dite, et il convient d'en féliciter nos ingénieurs. Sans arriver, du premier coup, à donner aux locomotives électriques la grâce ct la légèreté de lignes qui caractérisent nos locomotives à vapeur françaises, ils ont déjà évité l'écueil de l'aspect lourd et disgracieux qui caractérise trop souvent les constructions du même genre exécutées à l'étranger. >>

En résumé, sans prétendre que la locomotive à vapeur ait terminé sa carrière, on aperçoit déjà, d'une façon certaine, sa réforme dans un temps donné.

2

Les chemins de fer électriques à l'étranger.

A Liverpool, on a installé, en 1893, un chemin de fer électrique à fils aériens.

Les docks de Liverpool occupent, sur la rive droite de la Mersey, un développement de 10 kilomètres. Pour desservir ce long parcours, le seul système employé jusqu'à ces derniers temps était une ligne de tramways à traction par chevaux, qui longeait péniblement les docks. Aussi a-t-on remplacé ce système par un chemin de fer électrique aérien. Comme un arrêt du Parlement interdit l'emploi des locomotives dans l'intérieur des docks, les tramways électriques ayant fait pendant ces dernières années de rapides progrès, c'est ce système qui a été adopté pour la voie ferrée qui longe les docks.

La station génératrice d'électricité occupe la partie centrale des docks de Bramley-Moore, bâtiments massifs, en pierre de taille et voûtés. Sur leur terrasse vient

« VorigeDoorgaan »