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CHAPITRE VIII

L'ÉVOLUTION DES CLASSIFICATIONS LES GRANDES ŒUVRES SYSTÉMATIQUES

Il faut, passant toute l'Antiquité et le Moyen Age, arriver jusqu'à PIERRE BELON pour trouver le premier essai d'une classification reposant sur des bases un peu acceptables. Le pionnier français de l'ornithologie a constaté en effet certaines « différences », pour employer son langage, dans le genre de vie des oiseaux : les uns vivant de rapine, d'autres fréquentant les eaux, ou le bord de l'eau ou les terrains marécageux, d'autres vivant encore sur la terre ferme, dans les bois, dans les buissons ou dans les prairies. C'est une tentative de groupement, mais strictement faite à un point de vue biologique.

ALDROVANDE suit la même directive et parle successivement des oiseaux rapaces, des terrestres et des aquatiques.

Cette classification enfantine entraîne des erreurs manifestes, qui ont échappé à ces vénérables ancêtres. Nous voyons ainsi Aldrovande rapprocher les faucons, les coucous, l'autruche, les perroquets, les corbeaux et les pies; plus

1. Voir Chapitre 1oг.

loin il fait voisiner la perdrix, l'ortolan et l'œdicnème, ou place sur le même plan le pigeon et le moineau.

Ce n'est qu'à la fin du XVIIe siècle que l'on voit apparaître le fondateur de la classification ornithologique, l'Anglais Willughby.

FRANCIS WILLUGHBY, né en 1635 d'une noble famille de Middleton, montra dès ses plus jeunes années un zèle ardent pour l'étude. Il fit ses classes à l'Université de Cambridge, où il se lia d'amitié avec un camarade, de sept ans plus âgé que lui et dont il devint le « pupil », JOHN RAY (ou Wray), né en 1628. Les deux étudiants contractèrent au Collège une amitié profonde qui ne se démentit jamais, et qui leur valut une touchante confraternité scientifique, un échange constant de services mutuels.

John Ray se destinait au pastorat, mais il avait une passion si forte pour l'histoire naturelle qu'il sut la communiquer à son jeune ami. Tous deux cependant se complétèrent en suivant deux voies différentes, car Willughby se sentait attiré tout spécialement vers la zoologie, tandis que Ray l'était vers la botanique.

Ayant dû abandonner le poste qu'il occupait à Cambridge, parce qu'il ne voulut pas souscrire à l'« Acte d'Uniformité » de 1661, John Ray fut dès lors défrayé de tous dépens grâce à la générosité de son « pupil ». De 1663 à 1666, les deux inséparables compagnons firent un grand voyage en Europe et parcoururent la France, l'Espagne et l'Italie, recueillant une ample moisson de notes et de documents scientifiques.

De retour en Angleterre, Willughby et Ray se mirent en devoir de dresser l'inventaire de

leurs collections et d'écrire la relation de leur voyage. Malheureusement Willughby qui était d'une santé frèle et délicate ne vécut pas longtemps. A sa mort, survenue le 3 juillet 1672, à l'âge de trente-sept ans, il laissait un manuscrit inachevé sur les Oiseaux, et, à son condisciple et maître, une pension viagère de 60 livres sterling.

En reconnaissance des services rendus et en hommage à la mémoire de son jeune ami, John Ray paracheva l'œuvre de celui-ci et la publia avec l'aide financière de la veuve du regretté zoologiste.

Si Willughby reste assurément le principal auteur de l'ouvrage, il n'est donc pas aisé de faire le départ exact de ce qui revient aux deux collaborateurs, toujours si étroitement unis, dans ce volume in-folio, écrit en latin, et qui porte le titre, très long comme on les aimait à l'époque, si long qu'il tient toute la page liminaire, et que voici in-extenso:

Francisci Willughbeii | de Middleton in agro Warwicensi, Armigeii, | e Regia Societate, | Ornithologiae | Libri tres: | In quibus | Aves | Omnes hactenus cognitae, | In Methodum | Naturis | Suis convenientem redactae,

Accurate describuntur: | Descriptiones | Iconibus Elegantissimis | Et | VivarumAvium Simillimis | Aeri incisis illustrantur, | Totum Opus recognovit, digessit, supplevit | Joannes Raius | 1.

1. Trois livres d'Ornithologie, de François Willughby, de Middleton dans le pays de Warwick, écuyer et membre de la Société royale, Livres dans lesquels sont soigneusement décrits tous les oiseaux connus jusqu'ici, selon une méthode conforme à leur nature:

Cet ouvrage de 307 pages parut à Londres en 1676. Plus brièvement connu sous le titre de : Ornithologiae libri tres, il est en effet composé de trois « Livres » : le premier traite des Oiseaux en général, le second des Oiseaux terrestres et le troisième des Oiseaux aquatiques. Le texte est suivi de 77 planches en noir, mais les figures sont en général si mal faites, contrairement aux promesses affichées à la première page, qu'on a souvent de la peine à reconnaître les oiseaux qu'elles sont censées représenter.

Bien que sa tournure d'esprit l'ait porté surtout à s'occuper de botanique, John Ray, surnommé le « Père de l'histoire naturelle anglaise », s'intéressa aussi aux questions zoologiques. On lui doit entre autres un Synopsis Methodic a Avium, petit volume de 198 pages dont la rédaction fut achevée en 1694, mais qui ne fut publié qu'en 1713, après la mort de l'auteur, survenue en 1705.

Dans ce « Synopsis », Ray a adopté dans ses grandes lignes la classification de Wiliughby. Chaque groupe y est étudié en un court chapitre, dans lequel sont brièvement décrites les espèces connues à la fin du XVIIe siècle.

Les Ornithologiae Libri tres de Willughby font époque dans l'histoire de la science des oiseaux. L'auteur conçut et mena à chef un de ces perfectionnements capitaux qui sont le point de départ d'une direction nouvelle dans les sciences il fut le créateur de la systématique ornithologique, il établit la première classifica

les descriptions sont illustrées de dessins très élégants, gravés sur cuivre, et ressemblant aux oiseaux en vie, Jean Ray a revu, mis en ordre et complété tout l'ouvrage.

tion rationnelle, il sut grouper méthodiquement les membres plus ou moins épars jusqu'alors de la classe des Oiseaux. Et cette classification est si remarquable qu'elle a en partie survécu et que Linné l'a largement mise à contribution, de sorte que l'Angleterre peut s'honorer d'avoir donné naissance au précurseur de l'illustre naturaliste suédois.

Cette classification, évidemment, est loin d'être satisfaisante, mais elle n'en reste pas moins la souche directe des classifications modernes.

Willughby-Ray, aussi bien leurs deux noms sont-ils pour toujours inséparables, ont classé les Oiseaux non seulement d'après leur habitat, leur genre de vie et leur taille, mais ils ont fait entrer dans les caractéristiques des groupes des principes morphologiques, en particulier les éléments tirés de la forme du bec, de la longueur relative des ailes et de l'organisation des pattes. Ils ont de plus inventé toute une terminologie scientifique pour dénommer les groupes que créa leur clair génie.

Willughby-Ray établissent tout d'abord deux groupes fondamentaux d'Oiseaux : les terrestres et les aquatiques.

Les Oiseaux terrestres sont soit à ongles et bec recourbés (Aves uncungues), soit à bec et ongles plus droits et moins crochus (Aves rectungues).

Les Oiseaux à bec recourbé se nourissent les uns de fruits, ce sont les perroquets (Psittaci), les autres de chair, ce sont les Rapaces (Carnivorae et Rapaces), diurnes et nocturnes.

Les Rapaces diurnes peuvent se subdiviser en grands (majores) et petits (minores).

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