DES ALTERATIONS QUE LE MOUVEMENT DES PLANETES ET DES COMETES PEUT EPROUVER PAR LA RESISTANCE DES MILIEUX QU'ELLES TRAVERSENT, ET PAR LA TRANSMISSION SUCCESSIVE DE LA PESANTEUR (1). L'auteur prouve qu'en supposant les Planètes et les Comètes se mouvoir dans un fluide élastique, tel que seroit le fluide lumineux, dans l'hypothèse que la lumière seroit l'effet de la vibration d'un pareil fluide, leurs mouvemens seroient retardés; ces corps se rapprocheroient de plus en plus du Soleil, leur orbite deviendroit de plus en plus circulaire, sans que le plan de ces orbites changeât. Mais si la lumière est une émanation du Soleil, elle produira également une altération dans les mouvemens des Planètes et des Comètes, et elles les retardera. Ces petites altérations constituent ce qu'on appelle les équations séculaires. L'altération produite dans les mouvemens de la Lune par l'impulsion de la lumière du Soleil, seroit beaucoup plus considérable que dans les mouvemens de la Terre: ainsi l'équation séculaire de la Terre est à celle de la Lune, comme 1 à 63.169. Mais si cette lumière est une émanation du Soleil, la masse de cet astre doit diminuer sans cesse, et il doiten résulter dans le moyen mouvement de la Terre une équation séculaire d'un signe contraire à celle que produit l'impulsion de la lumière, et qui est incomparablement plus grande. Les deux équations séculaires dues à la diminution de la masse du Soleil, et à l'impulsion de sa lumière, sont dans le rapport de-1 à 0,0002129. L'impulsion de la lumière du Soleil sur la Lune n'influe pas d'un quart de seconde sur son équation séculaire. < Il résulte, dit l'auteur (page 324, tome IV), de l'analyse » précédente, que depuis deux mille ans (que datent les > observations sur lesquelles on peut compter), la masse du >> Soleil n'a point éprouvé un deux millionième de diminution, ni » d'accroissement. >>> Il examine ensuite la supposition que l'attraction soit l'effet de l'action d'un fluide particulier, le gravifique. (1) Mécanique Céleste, tome III, pag. 296, et tome IV, page 313. Tome LXVII. SEPTEMBRE an 1808. Ee i : « Si la gravitation étoit produite par l'impulsion d'un fluide >> vers le centre du corps attirant, dit-il, l'analyse précédente > relative à l'impulsion de la lumière solaire, donneroit l'équa>> tion séculaire due à la transmission successive de la force >> attractive.... >>> Il détermine cette équation par le calcul, et il ajoute : « Le résultat est que la vitesse du fluide gravifique est en>> viron sept millions de fois plus grande que celle de la lu>> mière, et comme il est certain que l'équation séculaire de >> la Lune est due presque en entier à la cause que nous lui >> avons assignée dans le sixième livre, on doit supposer au >> fluide gravifique une vitesse au moins cent millions de fois >> plus grande que celle de la lumière, c'est-à-dire qu'il fau>> droit supposer une semblable vitesse au moins à la Lune, » pour la soustraire à l'action de sa pesanteur vers la Terre. >> Les géomètres peuvent donc, comme ils l'ont fait jusqu'ici, >> supposer cette vitesse infinie. > Il est aisé de voir que l'équation séculaire de la Terre, >> due à la transmission successive de la gravité, n'est qu'un >> sixième environ de l'équation correspondante de la Lune, et >> par conséquent elle est nulle et insensible. Toutes ces théories diverses, ajoute-t-il, que nous venons de présenter, exigent de nouveaux travaux pour être perfectionnées. C'est ce qu'exécuteront dans la suite des siècles à venir les astronomes et les géomètres qui s'occuperont de ces savantes recherches. SUPPLEMENT AU TRAITÉ DE MECANIQUE CELESTE; Présenté au Bureau des Longitudes, le 17 Août 1808, PAR M. LAPLACE. EXTRAIT. MON objet, dans ce Supplément, dit l'auteur, est de perfectionner la théorie des perturbations planétaires, que j'ai présentée dans les second et sixième Livres de mon Traité de Mécanique Céleste. En cherchant à donner aux expressions des élémens des orbites, la forme la plus simple dont elles sont susceptibles, je suis parvenu à ne les faire dépendre que des différences partielles d'une même fonction, prises par rapport à ces élémens; et, ce qui est remarquable, les coefficiens de ces différences ne sont fonctions que des élémens eux-mêmes. Ces élémens sont les six arbitraires des trois équations différentielles du second ordre, qui déterminent le mouvement de chaque planète. En regardant son orbite, comme une ellipse variable à chaque instant; ils sont représentés, 1o par le demi-grand axe, dont dépend le moyen mouvement de la planète; 2o par l'époque de la longitude moyenne; 3o par l'excentricité de l'orbite; 4o par la longitude du périhélie; 5o par l'inclinaison de l'orbite à un plan fixe; 6o enfin par la longitude de ses nœuds. M. Lagrange a donné depuis long-temps, à l'expression différentielle du grand axe, la forme dont je viens de parler, et il en a conclu d'une manière très-heureuse, l'invariabilité des moyens mouvemens, lorsque l'on n'a égard qu'à la première puissance des masses perturbatrices; invariabilité que j'ai reconnue le premier, en ne rejetant que les quatrièmes puissances des excen Eez tricités et des inclinaisons, ce qui suffit aux besoins de l'Astronomie. J'ai donné dans le second Livre de la Mécanique Céleste, la même forme aux expressions différentielles de l'excentricité de l'orbite, de son inclinaison et de la longitude de ses nœuds. Il ne restoit donc qu'à donner la même forme aux expressions différentielles des longitudes de l'époque et du périhélie : c'est ce que je fais ici. Le principal avantage de cette forme des expressions différentielles des élémens, est de donner leurs variations finies, par le développement seul de la fonction que j'ai nommée R dans le second Livre de la Mécanique Céleste. En réduisant cette fonction, dans une série de cosinus d'angles croissans proportionnellement au temps; on obtient par la différenciation de chaque terme, les termes correspondans des variations des élémens. Je m'étois attaché à remplir cette condition, dans le second Livre de la Mécanique Céleste; mais on y satisfait d'une manière encore plus générale et plus simple, au moyen des nouvelles expressions de ces variations. Elles ont de plus l'avantage de mettre en évidence le beau théorème, auquel M. Poisson est parvenu sur l'invariabilité des moyens mouvemens, en ayant égard au carré des masses perturbatrices. Dans le sixième Livre de la Mécanique Céleste, j'ai prouvé au moyen d'expressions analogues, que cette uniformité n'est point altérée par les grandes inégalités de Jupiter et de Saturne; ce qui étoit d'autant plus important, que j'ai fait voir dans le même Livre, que ces grandes inégalités ont uneinfluence considérable sur les variations séculaires des orbites de ces deux planètes. La substitution des nouvelles expressions dont je viens de parler, montre que l'uniformité des moyens mouvemens planétaires n'est troublée par aucune autre inégalité périodique ou séculaire. Ces expressions me conduisent encore à la solution la plus générale et la plus simple des variations séculaires des élémens des orbes planétaires. Enfin elles donnent avec une extrême facilité, les deux inégalités du mouvement lunaire en longitude et en latitude, qui dépendent de l'aplatissement de la terre, et que j'ai déterminées dans le second chapitre du septième Livre. Cette confirmation des résultats auxquels je suis parvenu sur cet objet, me paroft intéressante, en ce que leur comparaison avec les observations donne l'ellipticité de la terre d'une manière au moins aussi précise, que les mesures directes avec lesquelles ils sont aussi bien d'accord qu'il est possible de l'espérer, vu les irrégularités de la surface de la terre. Dans la théorie des deux grandes inégalités de Jupiter et de Saturne, que j'ai donnée dans le Livre VII, j'ai eu égard aux cinquièmes puissances des excentricités et des inclinaisons des orbites. M. Burckhardt avoit calculé les termes dépendans de ces puissances. Mais j'ai reconnu depuis, que l'inégalité résultante de ces termes, avoit été prise avec un signe contraire. Je rectifie donc à la fin de ces recherches, les formules des mouvemens de Jupiter et de Saturne, que j'ai présentées dans le chapitre VIII du dixième Livre. Il en résulte un léger changement dans les moyens mouvemens et les époques de ces deux planètes; et ce changement satisfait à l'observation qu'EbnJunis fit au Caire en l'an 1007, de leur conjonction mutuelle, observation qui ne s'écarte plus des formules, que d'une quantité beaucoup moindre que l'erreur dont elle est susceptible. Les observations anciennes citées par Ptolémée, sont également représentées par mes formules. Cet accord prouve que les moyens mouvemens des deux plus grosses planètes du système solaire, sont maintenant bien connus, et n'ont point éprouvé depuis Hipparque, d'altération sensible: il garantit pour longtemps, l'exactitude des Tables que M. Bouvard a construites d'après ma Théorie, et que le Bureau des Longitudes vient de publier... Dans la même séance où j'ai présenté ces recherches au Bureau des Longitudes, M. Lagrange lui a pareillement communiqué de savantes recherches qui ont rapport à leur objet. Il y parvient par une analyse très-élégante, à exprimer la différence partielle de R, prise par rapport à chaque élément, par une fonction linéaire des différences infiniment petites de ces élémens, et dans laquelle les coefficiens de ces différences ne sont fonctions que des élémens eux-mêmes. En déterminant au moyen de ces expressions, les différences de chaque élément; on doit après les réductions convenables, retrouver les expressions très-simples auxquelles je suis parvenu, et qui, tirées de méthodes aussi différentes, seront par la confirmées. |