à ce temps-là, mais pas aussi promptement que la laitue, ni avec la même facilité et la même force. Il y faut une irritation plus forte, ou un aiguillon, ou stimulus plus puissant et plus combiné, afin qu'on excite la distillation de l'humeur laiteuse dans cette plante, qui n'obéit pas à l'attouchement plus léger et plus délicat, et au premier appulse, comme la faitue, qui aussitôt qu'elle a été touchée en quelque façon que ce soit, quoique légèrement, transmet ou élance une portion du suc laiteux, ou suc propre qu'elle contient. Cette sueur ou distillation ne se fait jamais, disois-je, avec la même force que dans la laitue, d'où sort quelquefois l'humeur si énergiquement, qu'elle s'élance bien loin dans l'air en forme de jets, ou d'arrosage de vapeur ce n'est pas avec cette impétuosité qu'on parvient jamais à faire sortir l'humeur de l'épineux, tout puissant que puisse être le stimulus qui le tourmente: ce n'est pas un jet, c'est une simple distillation qui se fait dans cette plante, quelle que soit l'irritation qu'on y fait. les On n'obtient point de distillation dans l'épineux par feuilles qui embrassent la tige ( amplexicaules) comme dans la laitue, mais seulement dans les calices, et surtout dans les contours de petites feuilles ou morceaux qui les composent ; tandis que dans la laitue le calice distille partout la même humeur laiteuse. L'épineux, de même que la laitue, ne perd point cette faculté, lorsqu'il est plongé dans l'eau; et la plante même, tout-à-fait arrachée du terrein, ou bien quelque branche de cette plante la conservent quelque temps; d'où il est clair que l'irritabilité se conserve dans ces parties, même dans ces circonstances. On voit donc des faits exposés, que l'épineux a dans quelque partie un degré d'irritabilité capable de se faire discerner; mais l'on voit aussi de tous ces rapports, qu'il n'est pas si parfait dans l'épineux que dans la laitue, et que par conséquent il est à un degré bien moindre. Je n'ai pas eu le temps de porter mes observations sur les autres espèces de ces deux plantes laitue et épineux, pour voir, si à l'époque de la fleuraison, ou en autre temps, elles montrent par une pareille distillation, de posséder en quelque partie quelque degré, sensible d'irritabilité, quoiqu'il fût probable qu'elles en eussent. J'y en ai trouvé, mais dans la simple écorce des fruits lorsqu'elle est verte, ou dans les péricarpes des mêmes plantes. Je n'ai pu obtenir une distillation accoutumée, ni par les feuilles, ni par les tiges, ni par où posent les organes de la fructification, ni par aucun autre lieu ou partie de ces plantes, quelque irritation que j'y fisse, excepté par les capsules vertes qui contiennent les semences. C'est dans ce lieu seulement, que ces plantes montrent de posséder quelque irritabilité, , parce que c'est là le seul, qui irrité transmet l'humeur laiteuse accoutumée; et cette irritation a été toujours causée par un aiguillon, ou frottement, et jamais par une opération capable de blesser, ou déchirer, ou offenser dans une façon quelconque la surface desdites capsules, en y produisant une solution ou la marque d'une force innée telle que l'irritabilité (1). Je mis à végéter de petites plantes de laitue fleurie avec ses racines, dans l'eau jointe à des sels; savoir, au muriate de soude, et au nitrate de potasse en quantité fort discrète, dans des vases divers, et je les y tins à l'air ouvert pour (1) Il y a des mouvemens dans les plantes qui n'appartiennent point à Pirritabilité, mais qui sont de purs effets de l'élasticité propre de quelque partie, parmi lesquels il en est un curieux propre au bouillon blanc. verbascum sinuatum). Je le touchai légérement, croyant qu'il n'ait jamais été décrit. Ces fleurs du bouillon blanc tombent, un choc, ou commotion quelconque ayant été faite à la tige de la plante, elles ne tombent pas sur-le-champ, mais quelque moment après que la plante a souffert de choc elles ne tombent pas non plus toutes à la fois, mais plusieurs l'une après l'autre ; de sorte que si l'on vouloit, on pourroit profiter de cette particularité de la plante pour faire un jeu, et en imposer aux ignorans ; savoir, en ordonnant qu'à un mot, à un signe, la plante se dépouille de ses fleurs, ayant cependant eu auparavant l'adresse de choquer ou par un bâton, ou par le pied, la tige de la plante, sans que per sonne en soit averti. Ce phénomène vient de l'élasticité des calices ou récipiens des fleurs de la plante. Ces fleurs sont monopetales et ne dépendent d'aucune des parties du calice, mais y sont appliquées: aussi les parties du calice, qui sont douées d'élasticité, et qui se trouvent dans un état forcé, lorsqu'elles sont élargies pour servir de base, et recevoir la fleur, toutes les fois qu'on choque la plante, sont mises par ce choc au point de se rehausser, et de se fermer en vertu de leur élasticité; c'est par là, que si par ce choc la fleur se détache un peu, elles, pour se resserrer et sortir de cette situation forcée, l'expulsent et la font tomber. En un mot, c'est là un jeu d'élasticité des parties du calice, par laquelle échappe la fleur monopétale, qui y étoit circulairement enchâssée, et qui tenoit par force élargies les parties du calice même. quelques jours; mais je ne m'apperçus, que moyennant l'union des sels, si par le véhicule de l'eau quelque petite portion en étoit absorbée, se fit plus grande leur irritabilité; au contraire elles montrèrent par une distillation plus foible de diminuer toujours, en restant dans l'eau, cette faculté vitale (1). Au lieu des sels neutres, je mêlai dans l'eau des acides; mais en telle quantité, qu'à peine le goût les manifestoit ; et j'y mélai, surtout en diverses proportions avec l'eau dans des vases différens, de l'acide nitrique, de l'acide muriatique oxigéné ou termoxigené, et puis je mis à végéter dans chacun de ces vases, plusieurs petites plantes de laitue bien fleuries, mais pas avec un succès meilleur, parce que dans aucun temps de leur demeure dans l'eau, elles ne témoignèrent point une plus grande irritabilité; mais elles en firent voir plutôt une diminution de jour en jour, puisqu'en comparaison des plantes, qui végétoient en terre et dans l'eau pure, leur distillation fut toujours en progrès plus foible: mais quand je me servois d'eau mêlée avec une quantité plus grande d'acide, les plantes que j'y tenois à végéter, montroient évidemment qu'elles souffroient dans leur économie universelle, et l'irritabilité répondoit à leur état de souffrance en finissant plus vite. J'appliquai cette espèce de stimulus à la surface des plantes pour voir s'il agissoit extérieurement. J'introduisis pourtant une branche détachée d'une plante de laitue dans une cloche de verre pleine de gaz acide muriatique oxigéné ou termoxigéné; et l'en ayant tirée depuis peu de momens, je l'irritai; mais il s'y fit voir la distillation accoutumée. Je tins une plante de laitue plongée plus long-temps dans ce gaz, mais alors elle montra d'avoir souffert, et l'irritabilité étoit diminuée notablement. Les vapeurs nitreuses, et les vapeurs soufrées produisirent un effet encore 'pire. Il semble donc que ces aiguillons ou stimulus, qui ont été si loués pour exalter l'irritabilité des animaux, ne sont pas appropriés à l'irritabilité dés végétaux (2). Ce n'est (1) Mémoire sur la vitalité des plantes. Journal de Pise; Journal d'Agriculture de Milan. (2) Pour moi je crois que des faits, qu'on admet comme des épreuves pas ce que montrent les observations présentes, l'irritabilité végétale susceptible de quelques stimulus, qui sont les plus excitans pour les animaux, et qui agissent en ravivant l'irritabilité; l'oxigène ou termoxigène qui entre dans la formation de l'acide nitrique, et surtout du gaz acide muriatique oxigéné, est le premier des stimulus pour l'irritabilité des animaux, et il a été, à ce qu'il semble, paresseux quand il étoit convenablement appliqué, et nuisible quand il l'étoit trop pour l'irritabilité végétale. Je fis plonger des plantes de laitue dans une eau doret dont il sortoit des exhalations mauvaises pendant l'été, et je les y tins pendant 24 heures : les en ayant tirées, et ayant examiné par des stimulus, plusieurs fois l'état de leur irritabilité, je rencontrai qu'elles l'avoient entièrement perdu, et que les vases qui contenoient le suc propre, étoient si privés d'irritabilité qu'ils ne faisoient sortir leur humeur, pas même par les blessures faites tout exprès dans lesdites plantes. İl semble que les évaporations putrides, ou les substances pourries, jointes à l'eau par une action amortissante, ôtent l'irritabilité auxdites plantes, comme elles l'ôtent aux ani maux. certaines de l'action stimulante de quelques substances, ou principes, dans l'économie végétale, ne sont point décisifs. On croit communément que l'oxigène ou termoxigène est un puissant stimulus pour les végétaux, de ce qu'on a observé que l'oxigène accélère la germination des semences; d'où on a conclu qu'il l'accélère, parce qu'il accélère le développement des foetus, ou embryons des plantes, moyennant l'action de stimulus qu'il exerce sur leur système vasculaire, qui rend plus active la circulation. Mais comme par les observations que M. de Saussure le fils a énoncées, il semble que l'oxigène qui entre dans la germination, n'est absorbé,' ni combiné dans ce procédé, mais qu'il s'emploie tant à former l'acide carbonique, qui se développe dans telle opération, et qu'il se consomme de la sorte, je pense qu'on peut douter avec tout le fondement, que ce principe n'exerce, ni même alors, aucune fonction de stimulus par rapport à l'économie végétale, comme l'on croit communement, mais qu'il sert seulement à soustraire de la substance de la semence germinante, le charbon, élément qui, comme l'on peut voir de quelqu'une de mes observations touchant l'action de la lumière sur les semences qui germinent, insérées dans les Opuscules choisies de Milan, semble nuire au développement de l'embryon, et dont la nature semble tendre alors à se débarrasser, comme élément contraire ou superflu; et il semble enfin que c'est là la raison par laquelle l'oxigène accélère la germination. Ayant pris une plante de laitue, lorsque la saison d'été marquoit le degré 25 du thermomètre de Réaumur à l'ombre, je la plongeai dans l'eau chaude au degré 50 du même thermètre, chaleur dans laquelle j'avois observé que la tissure organique des végétaux ne souffroit aucune lésion. La plante distilla volontairement dans cette chaude liqueur, et à tout appulse, quoique léger, elle distilloit avec plus de facilité, que dans l'air à la même température. Ensuite je la plongeai en un instant dans l'eau froide, à 4 degrés au-dessus de o, et quelques momens écoulés, afin qu'elle en sentît l'impression ou l'effet, je l'irritai de nouveau; alors elle fut plus rétivé à la distillation, et il y falloit une irritation plus forte pour la faire distiller. Il semble que l'irritation végétale est exaltée par la chaleur et affoiblie par le froid. En effet les végétaux ralentissent au froid leurs fonctions, s'ils ne les suspendent entiè rement et la saison du printemps, qui ramène la chaleur, rend à l'économie végétale l'énergie accoutumée, par laquelle il semble que l'irritabilité assoupie est réveillée, leur vie se réanime c'est par là que l'état où les végétaux passent l'hiver, peut avec plus de raison être comparé à l'état d'engourdissement ou léthargie que souffrent en cette saison beaucoup d'animaux. Ce froid engourdit les ani, maux, parce que, comme personne ne l'ignore, il amortit leur irritabilité, et cela arrive par une action directe du même froid sur la fibre musculaire, qui est le siége de l'irritabilité, indépendamment de la sensibilité et de la circulation, comme l'a demontré Spallanzani. Je laissai dans un puits profond, où le thermomètre étoit au 12° degré au-dessus de o, une plante entière et bien fleurie, de laitue, en la transférant du potager, où le thermomètre marquoit 26 degrés à l'ombre, et je l'y tins, pour quelques heures, mais par les racines seulement dans l'eau. L'en ayant tirée, je la mis aux épreuves accoutumées de l'irritation, pour reconnoître de la distillation la force de l'irritabilité, et, depuis des tentatives plusieurs fois répétées, la distillation succéda, ce qu'il me sembla, à l'irritation à peu près comme auparavant, savoir, avant qu'elle fût plongée dans la profondeur du puits, ou bien avant qu'elle restât dans une fraiche température: aussi je ne pus appercevoir une différence sensible dans le degré de l'irritabilité. |