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» qu'il faut haïr; et le pauvre Collot-d'Herbois >> a droit à cet accent si tendre avec lequel on a » sollicité pour lui l'intérêt de la chambre. » Oui, je rends justice à la sincérité du très-ho» norable secrétaire de la guerre : il n'a rien » feint, j'en suis sûr; le son de sa voix n'a été » que l'expression de son âme, chaque fois » qu'il a imploré la miséricorde pour le pau» vre Collot-d'Herbois, ou appelé de tous les >> coins de la terre, la haine, la vengeance et » la tyrannie, pour exterminer le général la » Fayette, sa femme et ses enfans, ses compa»gnons et ses serviteurs.

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>> Mais moi qui sens autrement, moi qui » suis encore ce que j'ai toujours été, moi qui » vivrai et mourrai l'ami de l'ordre, mais de la >> liberté ; l'ennemi de l'anarchie, mais de la ser» vitude, je n'ai pas cru qu'il me fût permis de garder le silence après de tels outrages, après » de tels blasphèmes vomis dans l'enceinte d'un >> parlement anglois, contre l'innocence et la » vérité, contre les droits et le bonheur de l'es>> pèce humaine, contre les principes de notre .» glorieuse révolution; enfin contre la mé» moire sacrée de nos illustres ancêtres, de ces >> hommes dont la sagesse, les vertus et les » bienfaits seront révérés et bénis par le peu

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Malgré l'incomparable beauté de ces paroles, tel étoit l'effroi qu'inspiroit alors aux Anglois la crainte d'un bouleversement social, que le mot de liberté même ne retentissoit plus à leur âme. De tous les sacrifices qu'on peut faire à sa conscience d'homme public, il n'en est point de plus grands que ceux auxquels s'est condamné M. Fox pendant la révolution de France. Ce n'est rien que de supporter des persécutions sous un gouvernement arbitraire; mais de voir l'opinion s'éloigner de soi dans un pays libre; mais d'être abandonné par ses anciens amis, quand parmi ces amis il y avoit un homme tel que Burke; mais de se trouver impopulaire dans la cause même du peuple, c'est une douleur pour laquelle M. Fox mérite d'être plaint autant qu'admiré. On l'a vu verser des larmes au milieu de la chambre des communes, en prononçant le nom de cet illustre Burke, devenu si violent dans ses passions nouvelles. Il s'approcha de lui, parce qu'il savoit que son cœur étoit brisé par la mort de son fils: car jamais l'amitié, dans un caractère. tel que celui de Fox, ne sauroit être altérée par les sentimens politiques.

Il pouvoit être avantageux toutefois à l'An

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gleterre que M. Pitt fût le chef de l'état dans la crise la plus dangereuse où ce pays se soit trouvé; mais il ne l'étoit pas moins qu'un esprit aussi étendu que celui de M. Fox soutint les principes malgré les circonstances, et sût préserver les dieux pénates des amis de la liberté, au milieu de l'incendie. Ce n'est point pour contenter les deux partis que je les loue ainsi tous les deux, quoiqu'ils aient soutenu des opinions très-opposées. Le contraire en France devroit peut-être avoir lieu; les factions diverses y sont presque toujours également blåmables; mais dans un pays libre, les partisans du ministère et les membres de l'opposition peuvent avoir tous raison à leur manière, et ils font souvent chacun du bien selon l'époque; ce qui importe seulement, c'est de ne pas prolonger le pouvoir acquis par la lutte, après que le danger est passé.

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serons,

CHAPITRE XV.

Du fanatisme politique.

LES événemens que nous avons rappelés jusqu'à présent ne sont que de l'histoire, dont l'exemple peut s'offrir ailleurs. Mais un abîme va s'ouvrir maintenant sous nos pas; nous ne savons quelle route suivre dans un tel gouffre, et la pensée se précipite avec effroi, de malheurs en malheurs, jusqu'à l'anéantissement de tout espoir et de toute consolation. Nous pasle plus rapidement qu'il nous sera possible, sur cette crise affreuse, dans laquelle aucun homme ne doit fixer l'attention, aucune circonstance ne sauroit exciter l'intérêt : tout est semblable, bien qu'extraordinaire ; tout est monotone, bien qu'horrible; et l'on seroit presque honteux de soi-même, si l'on pouvoit regarder ces atrocités grossières d'assez près pour les caractériser en détail. Examinons seulement le grand principe de ces monstrueux phénomènes, le fanatisme politique.

Les passions mondaines ont toujours fait partie du fanatisme religieux; et souvent, au

:

contraire, la foi véritable à quelques idées abstraites alimente le fanatisme politique; le mélange se trouve partout, mais c'est dans sa proportion que consistent le bien et le mal. L'ordre social est en lui-même un bizarre édifice on ne peut cependant le concevoir autrement qu'il n'est; mais les concessions auxquelles il faut se résoudre, pour qu'il subsiste, tourmentent par la pitié les âmes élevées, satisfont la vanité de quelques-uns, et provoquent l'irritation et les désirs du grand nombre. C'est à cet état de choses, plus ou moins prononcé, plus ou moins adouci par les mœurs et les lumières, qu'il faut attribuer le fanatisme politique dont nous avons été témoins en France. Une sorte de fureur s'est emparée des pauvres en présence des riches, et les distinctions nobiliaires ajoutant à la jalousie qu'inspire la propriété, le peuple a été fier de sa multitude; et tout ce qui fait la puissance et l'éclat de la minorité, ne lui a paru qu'une usurpation. Les germes de ce sentiment ont existé dans tous les temps; mais on n'a senti trembler la société humaine dans ses fondemens qu'à l'époque de la terreur en France : on ne doit point s'étonner si cet abominable fléau a laissé de profondes traces dans les esprits, et la seule réflexion TOME II.

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