Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

le massacre de la Saint-Barthélemi; mais ce fut une reine italienne qui donna son esprit de ruse et de dissimulation aux instrumens dont elle se servit. Les moyens employés pour accomplir la révolution ne valoient pas mieux que ceux dont on se sert pour ourdir une conspiration: en effet commettre un crime sur la place publique, ou le combiner dans son cabinet, c'est être également coupable; mais il y a la perfidie de moins.

L'assemblée législative renversoit la monarchie avec des sophismes. Ses décrets altéroient le bon sens, et dépravoient la moralité de la nation. Il falloit une sorte d'hypocrisie politique, encore plus dangereuse que l'hypocrisie religieuse, pour détruire le trône pièce à pièce, en jurant toutefois de le maintenir. Aujour.d'hui les ministres étoient accusés; demain la garde du roi étoit licenciée; un autre jour l'on accordoit des récompenses aux soldats du régiment de Châteauvieux qui s'étoient révoltés contre leurs chefs; les massacres d'Avignon trouvoient des défenseurs dans le sein de l'assemblée; enfin, soit que l'établissement d'une république en France parût ou non désirable, il ne pouvoit y avoir qu'une façon de penser sur le choix des moyens employés pour y parvenir;

et plus on étoit ami de la liberté, plus la conduite du parti républicain excitoit d'indignation au fond de l'àme.

Ce qu'il importe avant tout de considérer dans les grandes crises politiques, c'est si la révolution qu'on désire est en harmonie avec l'esprit du temps. En tâchant d'opérer le retour des anciennes institutions, c'est-à-dire, en voulant faire reculer la raison humaine, on enflamme toutes les passions populaires. Mais, si l'on aspire au contraire à fonder une république dans un pays qui la veille avoit tous les défauts et tous les vices que les monarchies absolues doivent enfanter, on se voit dans la nécessité d'opprimer pour affranchir, et de se souiller ainsi de forfaits en proclamant le gouvernement qui se fonde sur la vertu. Une manière sûre de ne pas se tromper sur ce que veut la majorité d'une nation, c'est de ne suivre jamais qu'une marche légale pour parvenir au but même que l'on croit le plus utile. Dès qu'on ne se permet rien d'immoral, on ne contrarie jamais violemment le cours des choses.

La guerre des François, qui fut depuis si brillante, commença par des revers. Les soldats, à Lille, après leur déroute, massacrèrent leur chef Théobald Dillon, dont ils soupçon

noient, bien à tort, la bonne foi. Ces premiers échecs avoient rendu la méfiance générale. Aussi l'assemblée législative poursuivoit elle sans cesse de dénonciations les ministres, comme des chevaux rétifs que les coups d'éperons ne peuvent faire avancer. Le premier devoir d'un gouvernement, aussi-bien que d'une nation, est sans doute d'assurer son indépendance contre l'envahissement des étrangers. Mais une situation aussi fausse pouvoit-elle durer? Et ne valoit-il pas mieux ouvrir les portes de la France au roi qui vouloit en sortir, que chicaner du matin au soir la puissance ou plutôt la foiblesse royale, et traiter le descendant de saint Louis, captif sur le trône, comme l'oiseau qu'on attache au sommet d'un arbre, et contre lequel chacun lance des traits tour à tour?

L'assemblée législative, lassée de la patience même de Louis XVI, imagina de lui présenter deux décrets, auxquels sa conscience et sa sûreté ne lui permettoient pas de donner sa sanction. Par le premier on condamnoit à la déportation tout prêtre qui avoit refusé de prêter serment, s'il étoit dénoncé par vingt citoyens actifs, c'est-à-dire, payant une contribution; et le second, on appeloit à Paris une légion de Marseillois qu'on savoit décidés à conspirer

par

que

contre la couronne. Quel décret cependant, celui dont les prêtres étoient les victimes! On livroit l'existence d'un citoyen à des dénonciations qui portoient sur ses opinions présumées. Que craint-on du despotisme, si ce n'est un tel décret? Au lieu de vingt citoyens actifs, il n'y a qu'à supposer des courtisans qui sont actifs aussi à leur manière; et l'on aura l'histoire de toutes les lettres de cachet, de tous les exils, de tous les emprisonnemens que l'on veut empêcher par l'institution d'un gouvernement libre.

Un généreux mouvement de l'âme décida le roi à s'exposer à tout, plutôt que d'accéder à la proscription des prêtres: il pouvoit, en se considérant comme prisonnier, donner sa sanction à cette loi, et protester contre elle en secret; mais il ne put consentir à traiter la religion comme la politique; et, s'il dissimula comme roi, il fut vrai comme martyr.

Dès que le veto du roi fut connu, l'on sut de toutes parts qu'il se préparoit une émeute dans les faubourgs. Le peuple étant devenu despote, le moindre obstacle à ses volontés l'irritoit. On vit aussi dans cette occasion le terrible inconvénient de placer l'autorité royale en présence d'une seule chambre. Le combat

entre ces deux pouvoirs manque d'arbitre, et c'est l'insurrection qui lui en sert.

Vingt mille hommes de la dernière classe de la société, armés de piques et de lances, marchèrent aux Tuileries sans savoir pourquoi ; ils étoient prêts à commettre tous les forfaits, ou pouvoient être entraînés aux plus belles chosuivant l'impulsion des événemens et des hommes.

ses,

Ces vingt mille hommes pénétrèrent dans le palais du roi; leurs physionomies étoient empreintes de cette grossièreté morale et physique dont on ne peut supporter le dégoût, quelque philanthrope que l'on soit. Si quelque sentiment vrai les avoit animés, s'ils étoient venus réclamer contre des injustices, contre la cherté des grains, contre l'accroissement des impôts, contre des enrôlemens militaires, enfin contre tout ce que le pouvoir et la richesse peuvent faire souffrir à la misère, les haillons dont ils étoient revêtus, leurs mains noircies par le travail, la vieillesse prématurée des feml'abrutissement des enfans, tout auroit excité de la pitié. Mais leurs affreux juremens entremêlés de cris, leurs gestes menaçans, leurs instrumens meurtriers, offroient un spectacle épouvantable, et qui pouvoit altérer à ja

mes,

« VorigeDoorgaan »