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pôtre oppose tant de raifons & de preuves, ce font les Pharifiens: Ces certains zelateurs de la loi, qui alloient prêchant par tout, qu'il faloit étre circoncis, qu'il fa-loit obferver la loi de Moïle, qu'il faloit garder toutes fes ceremonies, que cette alliance que Dieu avoit donnée à Moïfe, étoit une alliance eternelle & qui ne devoit jamais prendre fin. Et au contraire Saint Paul prêchoit par tout, que la loi étoit un miniftere de mort & de condamnation ; qu'elle n'avoit point été donnée pour juftifier les hommes, mais comme un pedagogue pour les amener à Jefus-Chrift; que la loi avoit été introduite pour étre une ombre, & pour nous reprefenter le corps des graces qui font dans Jefus Chrift: que fi quelqu'un vouloit étre circoncis & obferver la loi de Moïfe, Jefus Chrift ne lui profiteroit de rien. Voilà ce qui faifoit crier les feditieux contre Saint Paul, ⋆ qu'il enfeignoit un chacun, contre le peuple, contre la loi, contre le temple. Si quelqu'un eft d'humeur de nier cela, fçavoir que Saint Paul dans cette Epître aux Romains, difpute contre les Juifs Pharifiens; je déclare que je ne veux pas difputer contre lui. Car il

n'y auroit aucune feureté à fe prendre à un tel homme, puifqu'il feroit capable de nier que le Soleil soit chaud & lumineux, & de dire que le blanc eft noir, & le noir blanc. *Actes 21.

Voici donc à mon avis, un point gagné. C'eft que Saint Paul difputoit contre les Pharifiens. Or prefentement voyons qu'elle pouvoit étre la controverfe avec ces genslà. Selon la fuppofition de nos cenfeurs, il doit avoir eu en veuë de prouver contre les Pharifiens, que l'homme doit étre juftifié par la foi feule, c'est à dire, par le feul acte de la foi, fans que les bonnes œuvres de charité, de repentance, de pieté, de devotion & de mifericorde, ayent eu part à cette œuvre de nôtre juftification devant Dieu, que comme des fuites & des effets Mais je vous prie, à quel propos auroit-il entrepris de prouver cette these contre des gens entre lefquels jamais cette queftion n'a été agitée? Y a-t-il quelqu'un qui nous puiffe prouver que les Pharifiens ayent été en difpute ou entr'eux, ou avec Saint Paul touchant la juftification par l'acte de la foi, ou par la jonction des bonnes œuvres avec la foi ? Tout le monde tombe d'accord, que les Juifs qu'on appelle aujourd'hui Traditionnaires, par oppofition aux Caraïtes, font les fucceffeurs des Pharifiens & des zelateurs de la loi, & que leurs écrits ne font que les commentaires de la Theologie des anciens Pharifiens. Mais paroit-il par le Talmud ou par les autres livres des Juifs, qu'il y ait jamais eu aucune dispute dans leur Theologie, fur cette question; fçavoir fi l'homme eft justifié par la foi ou

par les œuvres. C'eft une controverfe qui pouvoit avoir lieu dans la Theologie de l'ancien Teftament auffi bien que dans celle du nouveau. Car fous l'œconomie legale aufli bien que fous l'Evangile, il y avoit foi & œuvres. Dieu commandoit que l'en crût à fes paroles, auffi bien comme il or-. donnoit que l'on obeïft à fes commandemens. La foi fut alloüée à justice, c'est à dire, à juftification, au Patriarche Abraham. Les Juifs lifoient cela dans leur loi. Le Prophete Efaye dit, Si vous ne croyez, vous ne ferez point affermis. Et le Prophete Habacuc, que le jufte vivra de fa foi. Les Juifs pouvoient donc déja difputer entr'eux fur cela. Mais y a-t-il quelque trace qu'ils l'ayent fait, & qu'ils ayent eu aucune controverfe là-deffus Je pofe en fait qu'il n'en eft rien; & de là je conclus, que ç'auroit été un égarement à Saint Paul de leur aller prouver une verité, fur laquelle ils n'avoient jamais émû aucune question dans leur Theologie.

Mais il paroît, dira-t-on, que les Pharifiens étoient grands jufticiaires, & qu'ils donnoient infiniment à leurs œuvres & à leur fainteté; je l'avouë. Jefus-Christ introduit un Pharifen, difant à Dieu, Jete rens graces, que je ne fuis point comme les autres hommes, je jeûne deux fois la femai

ne,

je donne de mes biens aux pauvres, gut. Ces gens difoient, n'approche pas de moi, car

je fuis faint. Et ils croyoient fe fauver beaucoup moins par les œuvres d'une folide pieté & d'une veritable mifericorde, que par de certaines obfervances volontaires qu'ils s'étoient impofées. Que faloit-il faire pour combatre l'orgueil de ces gens-là? Il faloit leur reprefenter le neant de l'homme, la grandeur de Dieu, l'imperfection des bonnes œuvres, la rigueur de la juftice divine, la vanité de leurs obfervances, la neceffité de l'humilité chrêtienne, la grace de Dieu qui feule nous peut fauver, l'inutilité de ces traditions humaines, dans l'obfervation defquelles ils mettoient toute leur efperance. Et en effet c'est là la matiere des fermons de Jefus-Chrift contre les Pharifiens. C'eft ce que Saint Paul preffe fortement en difputant contr'eux dans toutes fes Epîtres. Mais que feroit à cela cette difpute, qu'il faut étre juftifié par la vertu de la foi feule, & non par les bonnes cuvres? Je fçai bien qu'on l'y peut ramener, & dire, fi la foi feule nous juftifie, fans que la charité & les bonnes œuvres evangeliques entrent dans les caufes de la juftification, on ne peut donc pas à plus forte raifon étre juftifié par l'obfervation des ceremonies, ni par des jeûnes, ni par l'exatitude à payer les difmes, & à s'aquitter des autres devoirs prefcrits par la loi. Mais c'eft un détour; & il ne faloit pas faire fon principal & fon tout dans une difpute d'un

argument, qui n'eft proprement qu'une preuve indirecte. Si pour combatre les Pharifiens, & la haute opinion qu'ils avoient du prix de leurs œuvres; la bonne & la principale voye étoit de leur faire voir, qu'en general l'homme ne peut étre justifié par aucune efpece d'oeuvres, pourquoi le Seigneur Jefus-Chrift ne s'en eft-il pas fervi? pourquoi a t-il laiffé à Saint Paul la gloire de cette invention ? pourquoi n'a-t-il pas prouvé à ces Pharifiens, que toute l'opinion qu'ils avoient de leur juftice étoit vaine, parce qu'il faloit étre juftifié par la feule foi? Il s'eft feulement occupé à leur prouver que leurs œuvres ne valoient rien, que leur interieur étoit corrompu, qu'ils étoient des hypocrites, que toutes leurs traditions étoient vaines, & que Dieu ne leur tenoit aucun compte de l'observation de ces commandemens de leur façon. N'eftpas clair par la differente maniere dont Jefus-Chrift & Saint Paul ont combatu les Pharifiens & les Docteurs de la loi, qu'ils n'ont pas eu en veuë la même question, ni la même chofe ? Ce n'eft pas que Saint Paul dans fes difputes ne perce auffi l'enflure du Pharifaïsme, & qu'il ne combate la fuperbe opinion de ceux qui vouloient étre fauvez par le merite de leurs œuvres. Mais ce n'eft point cela precifement qu'il veut dire, quand il établit que l'homme eft juftifié par la foi fans les oeuvres de la

il

loi.

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