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11me Année

N° 3

28 janvier 1889

LA

SEMAINE JUDICIAIRE

JOURNAL DES TRIBUNAUX

(JURISPRUDENCE SUISSE ET ÉTRANGÈRE)
PARAISSANT A GENÈVE TOUS LES LUNDIS

Adresser les lettres et communications Case 2463.

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SOMMAIRE. Tribunal fédéral. Jenny-Beck c. Direction militaire du canton de Fribourg militaire en uniforme; délit commis en dehors du service; arrêts de rigueur; prétendue violation de l'art. 58 Constit. fédér.; art. 1er loi fédér. du 27 août 1851; recours; refus. Cour de justice civile. Epoux Bousser c. dame veuve Berthet demande d'aliments : 1o augmentation d'une rente viagère; jugement sur chose non-demandée; double titre; excès de pouvoir; annulation; 2o art. 63 loi du 20 mars 1880; déboutement; 3° demande reconventionnelle; absence de connexité; inobservation de l'art. 5 loi genev. de procéd. civ.; irrecevabilité. Mivelaz c. Comptoir d'Escompte, Roussy ès qual. et Bousquet ès qual. société en nom collectif; dissolution; jugement ultérieur de faillite; opposition, art. 551 et 573 C. O.; déboutement. Tribunal

de commerce. Hoirs Cavin c. Cie P.-L.-M. et Mottu: chemins de fer; transport de marchandises; avarie; clause d'irresponsabilité des tarifs; faute du voiturier; condamnation. Dame Bard c. dame Gallay expertise ordonnée d'office; avance des frais par égales parts. Dame Ferrand c. Datoly: expertise; consentement des deux parties; avance des frais par égales parts. criminelle de janvier 1889. Faits divers.

TRIBUNAL FÉDÉRAL.

AUDIENCE DU 6 DÉCEMBRE 1888.

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Session

Militaire en uniforme; délit commis en dehors du service; arrêts de rigueur; prétendue violation de l'art. 58 Constit. fédér.; art. 1er loi fédér. du 27 août 1851; recours; refus.

Jenny-Beck contre Direction militaire du canton de Fribourg. Jean Jenny-Beck, capitaine d'administration et restaurateur à

Morat, se trouvait, le 1er juin 1888 au soir, après une inspection militaire, en uniforme dans son établissement, en compagnie de quelques personnes. Après l'heure de fermeture, se présenta le gendarme Vonlanthen qui, pris de vin, apostropha Jenny et l'injuria, tout en constataut l'état de contravention dans lequel il se trouvait. Il s'ensuivit une dispute et une batterie, dans laquelle le gendarme fut désarmé, et finalement mis à la porte.

Le lendemain, 2 juin, Jenny signala ces faits à la Direction militaire du canton de Fribourg et demanda la punition du gendarme Vonlanthen, lequel, de son côté, adressa un rapport, le 5 dit, à la même autorité.

Après enquête, le Directeur militaire a infligé à J. Jenny-Beck une punition de huit jours d'arrêts de rigueur à subir, à ses frais, à la caserne de Pérolles, pour conduite inconvenante, ivresse et voies de fait envers un agent de l'autorité; les deux tiers des frais de l'enquête furent mis, en outre, à la charge du recourant, par 32 fr., 35 c.

C'est contre cette décision que J. Jenny-Beck recourt au Tribunal fédéral, concluant à ce qu'il lui plaise d'annuler, pour violation des art. 58 de la Constitution fédérale et 5 de la Constitution fribourgeoise, interdisant toute distraction du for du juge naturel.

A l'appui de ces conclusions, le recourant fait valoir en résumé:

Le 1er juin 1888 au soir, Jenny ne se trouvait plus sous la juridiction militaire. L'art. 1er de la loi fédérale sur la justice pénale pour les troupes fédérales, du 27 août 1851, ne lui est pas applicable; il ne vise que le port public de l'uniforme, ce qui résulte de sa comparaison avec l'art. 92 ibidem. Or, dans l'espèce, les faits incriminés se sont passés dans le domicile de Jenny, à une heure où l'établissement était fermé au public.

Le recourant ajoute que, pour le cas où son recours serait écarté, il a adressé au Conseil fédéral un recours éventuel, basé sur l'application fausse et arbitraire du Code pénal militaire.

Dans sa réponse, la Direction militaire conclut au rejet du recours. Il est constaté qu'au moment où la scène en question a eu lieu, J. Jenny-Beck portait son uniforme et que les faits signalés se sont passés dans la salle à boire d'un établissement public, en présence de plusieurs consommateurs et, par conséquent, en public.

L'art. 92 précité loi fédér. du 27 août 1851 ne présente aucune

similitude avec l'art. 1er; il vise seulement le cas où un citoyen usurpe un grade qu'il ne possède pas.

Arrêt. I. Le recourant estime avoir été soustrait à son juge naturel par le fait que la Direction militaire l'a considéré et puni comme se trouvant sous la juridiction militaire, alors que les faits visés ressortissaient à la compétence du juge pénal ordinaire.

La seule question litigieuse est, dès lors, celle de savoir si l'espèce actuelle est justiciable de l'autorité militaire, auquel cas il n'est pas contesté que la Direction militaire n'ait eu le droit, conformément à l'art. 181 loi fédér. sur la justice pénale pour les troupes fédérales, d'infliger la punition dont est recours.

II. Or l'art. 1er, litt. b. de la même loi, qui règle la compétence pénale des autorités militaires, dispose que « sont soumis aux dispo<sitions du présent code les militaires qui, en dehors du service, < sont, à une occasion quelconque, revêtus de leur habit militaire. > C'est en vain que le recourant voudrait contester l'application de cette disposition en l'espèce, par le motif que ledit article ne viserait que le port public de l'uniforme, et parce que le délit pour lequel ledit recourant a été puni, aurait été commis dans son domicile, à une heure où celui-ci n'était plus accessible au public.

En effet, comme d'ailleurs la Direction militaire l'a fait justement remarquer dans sa réponse, le texte de l'art. 1er, litt. b ci-haut reproduit, ne distingue nullement entre le soldat porteur de son uniforme dans sa demeure particulière, et le soldat se trouvant hors de chez lui; il exclut même toute distinction semblable, en astreignant aux dispositions pénales dont il s'agit les militaires revêtus de l'uniforme en dehors du service et à une occasion quelconque.

L'art. 92 de la même loi, qui punit le militaire portant publiquement les marques distinctives d'un grade qui ne lui appartient pas, ou une décoration à laquelle il n'a pas droit, prouve précisément que l'art. 1er n'a pas voulu faire de distinction de ce genre, et restreindre son application aux seuls cas de port public de l'habit militaire.

En ce faisant, le législateur a sans doute voulu imposer au soldat, dans toutes les circonstances, le respect de son uniforme et l'astreindre à la discipline militaire, dès le moment où il le revêt, que ce soit publiquement ou non.

III. Il résulte de ce qui précède, qu'au moment où les faits relevés à la charge du recourant se sont passés, celui-ci était, du fait

seul du port de son uniforme, justiciable de la juridiction militaire, et qu'il est, dès lors, superflu de rechercher si la salle où ces faits se sont produits doit être considérée, au moment où ils ont eu lieu, comme un établissement public ou comme un local privé.

P. c. m., le recours est écarté.

COUR DE JUSTICE CIVILE.

AUDIENCE DU 23 AVRIL 1888.

Présidence de M. BARD.

Demande d'aliments: 1o augmentation d'une rente viagère; jugement sur chose non-demandée; double titre; excès de pouvoir; annulation; 2o art. 63 loi du 20 mars 1880; déboutement; 3o demande reconventionnelle; absence de connexité; inobservation de l'art. 5 loi genev. de procéd. civ.; irrecevabilité. Epoux Bousser contre dame veuve Berthet.

A l'audience du 16 avril 1888, M. Burgy, procureur général, pose les conclusions suivantes :

Attendu que la demande de la veuve Berthet contre sa fille et son gendre tendait au paiement d'une pension alimentaire, en vertu des art. 63 et suiv. de la loi du 20 mars 1880;

Attendu que le dispositif du jugement attaqué est ainsi conçu :

< Dit et prononce que la rente annuelle et viagère due à Madame << veuve Berthet par les défendeurs est fixée à 2000 fr., au lieu et < place de celle de 1500 fr., ténorisée dans l'acte notarié du 7 janvier 1888;

<< Dit et prononce que ladite rente annuelle et viagère de 2000 fr. < sera payable par mois et d'avance, au domicile de la demanderesse, < par les défendeurs, et cela avec intérêts de droit dès le 3 février << 1888, date de l'exploit introductif;

« Les y condamne solidairement au besoin. »

Considérant que ce jugement ne statue pas sur la chose demandée, c'est-à-dire sur la demande d'aliments;

Que, par contre, il statue sur une chose non-demandée, en changeant les dispositions d'un acte authentique dont la nullité ou la rescision n'est pas prononcée et n'est même pas demandée;

Enfin, en condamnant les mariés Bousser solidairement au paiement d'une rente viagère de 2000 fr., il donne à la veuve Berthet un

deuxième titre exécutoire pour les premiers 1500 fr. qui lui sont déjà dûs en vertu d'un acte authentique;

Et pour les derniers 500 fr., en leur donnant le caractère d'une rente viagère, il excède son pouvoir, car une condamnation en paiement d'aliments n'est jamais viagère, mais, au contraire, est toujours essentiellement révocable si le besoin vient à cesser;

Considérant qu'un semblable dispositif ne peut, en tout cas, pas être maintenu.

En ce qui touche le bien-fondé de la demande d'aliments:

Considérant que l'art. 63 de la loi du 20 mars 1880 oblige les descendants à fournir des aliments à leurs ascendants dans le besoin;

Considérant que la veuve Berthet possède actuellement une rente viagère de 1500 fr., et en outre, un droit d'habitation dans un appartement meublé;

Considérant que ces ressources, quoique modestes, excluent l'idée de dénuement et de besoin qui, seule, donne ouverture à une demande d'aliments;

P. c. m., le Procureur général conclut à ce qu'il plaise à la Cour:

réformer le jugement dont est appel dans toute la partie de son dispositif relative à une rente viagère;

débouter la veuve Berthet de sa demande d'aliments;

confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré non-recevable à la forme, la demande reconventionnelle des mariés Bousser;

et vu la qualité des parties, compenser les dépens de première instance et d'appel.

Arrêt. En fait: La dame Berthet a formé, le 3 février 1888, contre les mariés Bousser, une demande en paiement d'une somme de 100 fr. par mois, à titre de pension alimentaire.

Il résulte des documents versés aux débats que la dame Bousser a reçu de feu Berthet, son père, par contrat de mariage, une somme de 50,000 fr., qui n'était exigible qu'au décès du donateur; que, par son testament olographe du 21 mars 1872, feu Berthet a légué à sa veuve intimée l'usufruit de tous les biens qu'il délaissait, et la nue propriété de ces mêmes biens aux enfants nés et à naître de dame Bousser, sa fille; que, par acte notarié du 28 août 1875, portant partage de la succession de feu Berthet, succession dont l'actif se composait pour la presque totalité de deux immeubles situés à

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