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la convention du Bois de Vincennes, signée le 8 mai 1330. De part et d'autre, les demandes et doléances avaient été au préalable rédigées par écrit. Le mémorandum que remirent les commissaires français comprenait sept articles :

1° Ils demandaient la restitution intégrale des terres occupées par Edouard II, à la faveur des troubles de Guyenne, avant la convention du 31 mars 13271;

2o D'après une clause de la même convention, le roi d'Angleterre s'était engagé à payer au roi de France 50.000 marcs sterling. Cette somme n'avait point encore été payée;

3° Charles le Bel, en 1325, avait bien voulu reconnaître le fils d'Edouard II comme duc de Guyenne, mais moyennant une redevance de 60.000 livres parisis; les paiements de cette somme n'avaient point été effectués aux termes fixés 2;

4° Les gens de l'Agenais se plaignaient des impôts très lourds dont on les accablait à Bordeaux et ailleurs dans le duché de Guyenne : les gens du roi d'Angleterre violaient ainsi les conventions par lesquelles ils avaient juré de respecter et de sauvegarder les coutumes, libertés et franchises de l'Agenais; 5° La monnaie royale n'avait plus cours dans le fief anglais de Guyenne;

6o Les bannis du royaume de France avaient pu trouver un asile sur les terres du roi d'Angleterre;

7° Les châteaux des douze nobles qui avaient été bannis lors de la dernière convention de 1327 n'avaient point été abattus, selon la teneur des trêves; les nouvelles forteresses construites devaient être immédiatement rasées 3.

En même temps, les négociateurs anglais avaient formulé leurs requêtes, qui peuvent se résumer sous quatre chefs:

1° Ils demandaient la restitution de deux châteaux occupés, lun par le comte de Foix, l'autre par le comte d'Armagnac, restitution qui avait été prévue par la convention de 1327;

1. Rymer, I12, 186.

2. Rymer, 112, 142 (4 septembre 1325).

3. Rymer. II2, 186. Les bannis avaient demandé à rentrer en possession de leurs terres. Edouard avait envoyé son clerc, H. de Cantorbéry, auprès de l'archevêque de Toulouse, dépositaire de certaines lettres signées par Charles le Bel. Le 5 mai 1330, il écrivait au sire de Caumont qu'il ne pouvait oublier les services rendus à Edouard II, et qu'il avait chargé ses ambassadeurs à la cour de France de régler la question. Les négociateurs anglais n'attendaient que les fameuses lettres pour les exhiber au roi de France (Rymer, I13, 45; Vascon Rolls, 927, m. 10 dorso). La lettre est adressée à tous les bannis de 1327 (5 mai 1330, Woodstock).

2o La restitution d'une bastide appartenant à Amanieu de la Motte et que le vicomte d'Aulnaye avait occupée lors de la dernière guerre;

3o La restitution au sire de Puy Guilhem1 de son château et châtellenie de Puy Guilhem, selon ce qui avait été décidé en 1327;

4° La nomination de commissaires spéciaux, tant du côté anglais que du côté français, pour faire exécuter les paix antérieures et réparer les attentats commis contre les trêves.

Ces divers articles furent discutés successivement. 2 Les requêtes anglaises furent toutes adoptées sur le premier point, il fut décidé que les châteaux seraient rendus; sur les trois autres points, tout serait laissé à l'initiative des commissaires nommés.

Pour ce qui est des requêtes présentées par le roi de France, il fut décidé d'un commun accord que la restitution des terres s'effectuerait sans délai, que les privilèges de l'Agenais seraient sauvegardés, que la monnaie royale aurait cours dans le duché et que les officiers du roi d'Angleterre en feraient la proclamation, que le roi d'Angleterre ferait abattre les châteaux des bannis de 1327.

Quant à l'argent dû par le roi d'Angleterre au roi de France, la solution fut un peu plus compliquée. Si, des anciennes chartes, il résultait que le roi de France devait certaines sommes au roi d'Angleterre, on déduirait ces sommes de celles qu'Edouard devait payer à Philippe. La question des bannis fut plus épineuse, parce qu'elle soulevait la question de juridiction. Sans doute le Parlement de Paris, les sénéchaux et officiers du roi de France avaient le droit de prononcer la peine de ban contre les sujets du roi de France coupables de meurtres, vols ou méfaits; dans ce cas, les bannis ne trouveraient pas un asile en Guyenne en terre anglaise. Mais les Anglais s'opposaient formellement à ce que le Parlement de Paris, en vertu du privilège de suzeraineté, s'arrogeât le droit de bannir les sénéchaux ou officiers du roi d'Angleterre coupables de méfaits en terre anglaise. Ils voulaient rester maîtres chez eux, tandis que le roi de France, tout en paraissant animé des meilleures

1. Il s'agit ici de Puy-Guilhem (Dordogne, arrondissement de Bergerac, canton de Sigoulès). Arch. Nat.,

2. Rymer, 113, 46; - Vascon Rolls, 927, m. 5 (8 mai 1330); J. 635, n° 1 bis et 1 ter (originaux avec les sceaux),

intentions, n'entendait pas abandonner la plus mince partie de ses droits. A vrai dire, la convention du Bois de Vincennes n'était encore qu'un compromis. Etait-ce de propos délibéré que les plénipotentiaires ne s'étaient attaqués qu'à la dernière convention de 1327? mais, pour arriver à la concorde souhaitée, il fallait tout attendre du résultat de l'enquête qui allait s'ouvrir. Or elle ne pouvait se faire que grâce à l'étude des actes antérieurs à 1327, et remonter jusqu'à 1327 et plus haut, c'était se heurter aux mêmes difficultés dans lesquelles s'étaient embarrassés les rois précédents 1.

Les plénipotentiaires avaient jeté les bases de l'accord. Lest deux rois n'avaient plus qu'à le ratifier. Philippe VI de Valois consentit à apposer au bas de l'acte le grand sceau de majesté dès qu'Edouard III aurait donné sa ratification, selon les promesses des envoyés anglais qui devaient renvoyer l'accord scellé pour la fête de sainte Marie-Madeleine (22 juillet 2).

Pendant que les négociations se poursuivaient en France, Edouard n'avait pas cessé de s'inspirer des sages avis présentés par Henri de Cantorbéry: ce clerc avait été constamment auprès du roi, à Woodstock, du 26 mai au 11 juin et une seconde fois, à Oxford, du 9 au 20 juillet 3. Ce fut, sans doute, sur son avis que, le 8 juillet 1330, par lettres patentes, Edouard ratifia la convention du Bois de Vincennes. Le même jour, il nomma de nouveaux plénipotentiaires, au nombre de cinq, chargés d'abord de reporter en France la convention du 8 mai soumise à la ratification royale, puis d'éclaircir avec les conseillers de

1. Le 5 septembre 1330, dans une lettre qu'il écrivait à la reine Isabelle d'Angleterre, Jean XXII se déclarait très satisfait de voir les deux adversaires entrer en pourparlers. Mais le bruit avait couru que les plénipotentiaires s'étaient quittés sans grand espoir, « imperfecto negocio sine spe recesserunt ». Aussi exhortait-il la reine mère à faire signer une paix définitive (Ar. Vat., Reg. 116, n° 213, fo 69 verso).

2. Les ambassadeurs anglais quittèrent Paris à la fin du mois de mai. Adam de Orlton était de retour auprès d'Edouard III à Woodstock le 1er juin (R. O. Pipe Rolls, 175, m. 45). Quinze jours après, le 17, Guillaume de Ayreminne, retenu plus longtemps en France, rentrait également à Woodstock (Ambass. angl., nos XIV et XV) et, le lendemain, Jean de Shoreditch (Pipe Rolls, id.). Du 26 mai au 6 avril, Jean de Shoreditch avait été spécialement attaché à la personne de l'évêque de Norwich.

3. R. O. Pipe Rolls, 175, m. 45.

4. Rymer, 113, 48; Patent Rolls, 4, p. 1, m. 14 (8 juillet 1330, Woodstock). Les lettres patentes avaient été rédigées en plusieurs expéditions, avec la mention ou l'omission de clauses spéciales << sauf les droits du roi » ou « sauf les droits des sujets et vassaux ».

la cour de France les points encore douteux soulevés par les requêtes que les parties s'étaient réciproquement soumises à Amiens et sur lesquelles l'accord n'avait pu encore se faire, enfin d'estimer les dettes du roi d'Angleterre vis-à-vis du roi de France et inversement, ainsi qu'il avait été décidé lors des conférences du 8 mai1.

Les plénipotentiaires anglais? quittèrent le 16 juillet Woodstock, où ils reçurent du roi leurs dernières instructions 3, et débarquèrent à Wissant; ils rejoignirent Philippe VI qui était alors avec sa cour à Montargis. Le roi de France revenait d'Avignon, où il était allé officiellement rendre visite à Jean XXII. Les ambassadeurs anglais le suivirent dans ses

1. Quelques changements avaient été faits dans la composition de la nouvelle ambassade; des anciens plénipotentiaires, Edouard avait gardé l'évêque de Norwich, maître Jean Walewayn, chanoine d'Hereford, et maître Jean de Shoreditch; il y avait ajouté Thomas Sampson, professeur de droit civil, et remplacé l'évêque de Worcester par l'évêque de Coventry-Lichfield, Roger de Northburgh. Rymer, 113, 48-49; Patent Rolls, 4, p. 1, m. 14 (8 juillet, Woodstock). Ils avaient également à régler les conditions du mariage entre Jean et Aliénor.

2. L'évêque de Chichester ne fut pas envoyé comme ambassadeur. Un acte de Rymer du 20 septembre (Rymer, 113, 50) le désigne; mais Rymer a mal copié le rôle conservé au Public Record Office. L'évêque « de Cestre » est alors celui de Coventry-Lichfield, c'est-à-dire Roger de Northburgh (Déprez et Mirot, op. cit., n° XVII).

3. Le 17 juillet, un bref royal daté de Woodstock avait été adressé au trésorier de l'Echiquier pour le payement des gages de Thomas Sampson et de Jean de Shoreditch (Warrants for Issues Exchequer, no 1 B, liasse année 4). R. O. Pipe Rolls, 175, m. 45; Mirot et Déprez, Ambassades, nos XVI et XVII. Ils revinrent le septembre trouver le roi à Nottingham. Thomas Sampson quitta Londres le 22 juillet, alla trouver Philippe VI à Montargis, revint à Nottingham le 7 septembre. Jean de Shoreditch suivit le même itinéraire. (Pipe Rolls, 175, m. 46.)

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4. Les comptes de la cour pontificale nous prouvent que le roi de France séjourna à Avignon du 29 juin au 6 juillet 1330. Jean XXII offrit en son honneur un dîner auquel assistaient tous les cardinaux, les comtes et les barons (Ar. Vat., Intr. et Ex., 29, f° 35, et 98, fo 43 verso). « Comedit cum domino nostro dominus rex Francie et omnes cardinales et plures comites et barones et alii. » Id., 108, f 69 recto: « Pro guorgis claustri palacii domini nostri, tabulis pro mensa ipsius et pro adventu regis Francie. » Id., 108, f 85 verso: «Pro XV libris cum dimidia diversarum specierum de mensa receptarum quando rex Franciae fuit in curia. » – 108, f 86 verso: « Et pro viginti unciis et uno quarto cendati rubei pro parandis duobus pannis aureis positis in navigiis castri Novarum pro transitu regis Francie et paratura dictorum pannorum. » Philippe VI, qui venait d'avoir un nouveau-né, était allé en pèlerinage à Saint-Louis de Marseille. En revenant de Marseille, il était passé par Avignon (Grandes Chron., V, 338; Continuateur de Nangis, II, 116). Le pape avait longuement parlé avec lui du différend franco-anglais. Jean XXII avait proposé, comme moyen de concorde, un mariage entre les enfants des deux rois (Ar. Vat., Reg. 116, n° 213, f° 69 verso).

villas d'Ozouer1 et du Vivier-en-Brie 2. Les négociations reprirent sur les bases de l'accord du Bois de Vincennes du 8 mai passé, et dans le sens indiqué par les lettres royales du 8 juillet. Les plénipotentiaires discutèrent pendant près de six semaines. Bien que les procès-verbaux n'aient point été conservés, on peut, de l'issue des négociations, inférer que les débats furent très ardus. L'évêque de Norwich, bien qu'il eût reçu plein pouvoir et qu'il connût parfaitement les questions en litige, était inquiet de voir les événements prendre une mauvaise tournure. Philippe VI ne voulait pas ratifier les conventions du 8 mai, sous prétexte qu'Edouard, ajourné au Parlement de Paris pour préciser l'hommage d'Amiens, avait refusé de comparaitre 3. L'évêque crut bon de prévenir son maître en lui envoyant un messager spécial'. A ses yeux, les conseillers du roi de France. étaient de mauvaise foi ou faisaient preuve de mauvaise volonté; il n'y avait moyen de s'entendre ni sur la question de l'hommage, ni sur les réserves faites à Amiens à propos de l'Agenais et de certaines autres terres en Gascogne et dans le duché. Fort de la situation supérieure que lui donnait sa qualité de suzerain, Philippe VI avait ajourné Edouard à comparaître au Parlement de Paris, aux octaves de la Madeleine, 28 juillet 1330; le vassal ne comparut pas et fut mis une première fois en défaut. Le suzerain revint à la charge, et, le 1er septembre 13305,

1. Il y a trois localités, toutes trois en Seine-et-Marne, qui peuvent être identifiées: Ozouer-la-Ferrière, arrondissement de Melun, canton de Tournan; Ozouerle-Repos, arrondissement de Melun, canton de Mormant; Ozouer-le-Voulgis, arrondissement de Melun, canton de Tournan. Il s'agit sans doute d'Ozouer-laFerrière. Pipe Rolls, 175, m. 45 et 46.

2. Le Vivier-en-Brie (Seine-et-Marne, commune de Fontenay-Trésigny). L'itinéraire de Philippe VI, communiqué par M. Viard, donne les séjours suivants: 3 août, Galetas Loiret, Thoison, les Séjours des rois de France dans le Gálinais;

4 août, Courtenay (Arch. Nat., P. 132, no 34);

11 août, Fontainebleau (Arch. Nat., J. 349, n° 27 ter);

16 août, le Vivier-en-Brie (Arch. Nat., JJ. 66, no 474).

3. C'est ce qui ressort d'une lettre adressée par Edouard III, le 9 septembre 1330, au sénéchal de Gascogne et au connétable de Bordeaux : « Des queux choses nous avoms fait offrir au dit roi de France confirmacion, en covenable fourme, a ce que semble a nous et a nostre conseil, et il ne l'ad pas encore acepté. » Rymer, 113, 50; Vascon Rolls, 927, m. 5.

4. R. O. Pipe Rolls, 175, m. 45 et 46. Ce messager quitta Ozouer-en-Brie et se rendit jusqu'au port de Fowey. Un autre messager quitta le Vivier-en-Brie et aborda au même port.

5. Depuis le 24 août, Philippe était à Becoisel (Arch. Nat., X' 8845, fo 124 verso). Il y était le 30 (Arch. Nat., JJ. 20, f° 41 verso). Il y était encore le 2 septembre (Stein, Cartulaire de Crécy-en-Brie, p. 12), Becoisel (château), commune de Morcerf, canton de Rosoy-en-Brie.

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