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pour la fortification de l'église de Chitry (1364); la quittance donnée aux habitans de Chitry pour leur part des sommes payées par l'abbé de Saint-Germain et Jean de Beaulieu, pour l'éloignement des gendarmes qui avaient envahi une partie de l'Auxerrois (1376); la concession d'un droit sur le sel, par le roi Charles V, pour la réparation des murailles d'Auxerre (1378); la permission aux religieux de Saint-Germain de fortifier le village d'Héry (1381, mai); de nouvelles lettres d'octroi sur le sel pour la réparation des remparts d'Auxerre (1388); des lettres-patentes de Charles VI, condamnant les habitans d'Auxerre à contribuer à la mise en état de la forteresse de Saint-Bris (1393-1394); et enfin, l'autorisation dudit Charles VI donnée au chapitre d'Auxerre de fortifier partie de la ville de Cravan, où se trouve déjà un petit fort, suivant un plan dressé par le bailli de Sens et d'Auxerre, et autres gens à ce (1384) (1). Les bourgeois de Cravant étaient d'ailleurs payés pour sentir l'utilité de cette mesure, car ils avaient déjà été plusieurs fois pillés, soit par des routiers débandés, soit par les habitants des campagnes.

Il y avait en effet de quoi prendre; Cravant était une localité riche et ancienne. Bien avant l'établissement des Phocéens à Marseille, les Phéniciens venaient changer aux Bouches du Rhône, l'ambre et l'étain. L'ambre venait de la Baltique, l'étain des Cornouailles et du Sorlingues. Ces deux précieuses marchandises, déposées chez les Calètes, à l'embouchure de la Seine, remontaient cette rivière, pénétraient dans l'Yonne, en passant par Autrike et Cravant, pour, par une voie de terre qui traversait Alise SainteReine, reprendre à Châlon des bateaux, qui les conduisaient sûrement et commodément à destination (2).

Au XIII et au XIVe siècle, le commerce existait toujours en cette région, mais il avait changé d'objet. C'étaient les vins de la Haute-Bourgogne, qui, venant par un chemin à peu près identique, s'embarquaient à Cravant pour faire escale à Paris, et de là, après un débit considérable, être transportés dans la Flandre.

Il était donc indispensable de protéger un pareil entrepôt. Mais au moyen-âge, on n'était pas si pressé que de nos jours, puis l'argent n'était pas commun, si bien que le plan, conçu en 1384, n'était

(1) V. Lebeuf édit. Challe et Quantin, t. IV. Nos 186 et suiv. et Ann. de l'Yonne, p. 62-104.

(2) V. Rougemont, les Sémites en Occident. L'âge de Bronze, p. 115 et suiv. Le trajet se faisait en trente jours. V. Fr. Hist. græc., t. III. Posid. fr. 48.

pas encore complètement exécuté, plus de quarante ans après, c'est-à-dire lors de la bataille de Cravant (1423-30 juillet). Ce n'était pourtant pas la faute du chapitre. Les fortifications de Cravant, comme on va le voir, constituaient une de ses principales préoccupations.

En effet le 19 mai 1408 (1), le sous-chantre, receveur de Cravant, parle avec ses collègues de la nécessité de couvrir les murs du château de Cravant, et de divers travaux qu'on doit y faire. Il est convenu qu'il aura à s'arranger avec les ouvriers, et à préparer le devis des dépenses.

Le 15 avril 1409.- Prêt par le chapitre de cent écus aux habitans de Cravant, très probablement pour aider aux travaux de la forteresse, puisqu'il est spécialement mentionné que ce prêt est consenti à l'occasion de la transaction intervenue entre eux et le chapitre, au sujet de l'élection du capitaine.

Le 13 juillet, même année.-Les habitans de Cravant sont accusés par devant le bailli du chapitre d'avoir levé une taxe, probablement encore pour l'édification de la forteresse, plus considérable qu'il ne leur était permis de le faire. Enfin le 17 décembre, même année, le chapitre leur permet de s'imposer jusqu'à concurrence de 100 livres dans le même but.

Le 30 du même mois, en remplacement d'Adam de Digoigne (2), récemment décédé, on élit Jean Mougin, écuyer, seigneur d'Ecolives, capitaine de Cravant, avec toutes les charges, mais aussi tous les privilèges attachés à cet emploi.

Le 2 juin 1410, le chanoine Jean Jouvency est envoyé à Cravant, pour encourager les habitans à terminer les fortifications de leur ville, et les mettre d'accord au sujet des dépenses qui en doivent résulter.

Le 23 août, même année, la vigilance est recommandée au capitaine Jean Mougin, à cause de la situation troublée où se trouve actuellement le pays, et pour l'y exciter, on lui fait don de douze écus. On était alors au plus fort de la guerre entre les Armagnacs et les Bourguignons, et Auxerre tenait pour Jean-sans-Peur, duc de Bourgogne.

Le 30, le chapitre permet aux habitans de s'assembler pour traiter de l'élection du capitaine, et de la part que doit y prendre le chapitre. Un délégué du chapitre et le maire de la localité devront assister à la réunion.

(1) Il ne faut pas oublier qu'à cette époque l'année commençait à Pâques.

(2) Il était de la maison d'Arcy-sur-Cure qui avait eu souvent maille à partir avec les gens de Cravant.

Le 14 novembre 1410, le trésorier et le chanoine Jean Alepte, vont à Cravant, pour visiter les terrains vides appartenant au chapitre, et les vendre ou les louer. Ils devront également s'occuper de la réparation de la tour du fort du chapitre, et des murs qui l'enceignent, ainsi que traiter avec les habitans des appointements du capitaine, qui demande de l'augmentation.

Le 28 mars, même année (1), on s'occupe en Chapitre de fortifier de gros murs le château de Cravant, et si l'on ne peut rendre la fortification complète, il faudra au moins la commencer, surtout du côté de la porte. Le chanoine Hugues des Noues est chargé d'aller presser la rentrée des fonds que doivent les habitans, et faire préparer le toisé de l'ouvrage à entreprendre.

Le 17 avril 1411, il est traité en chapitre des appointemens du capitaine de Cravant, et de la construction des murs de la maison du Chapitre. Hugues des Noues est envoyé à Cravant pour les mettre en adjudication.

Le 23 avril, même année, Hugues des Noues va partir, et on lui recommande de faire en sorte que les entrepreneurs des nouvelles fortifications soient munis de bonnes et valables cautions.

Le 15 juillet, même année, Hugues des Noues retourne à Cravant, il est chargé d'exhorter les habitans à réparer la forteresse, et même de les y contraindre s'il y a lieu.

Le 10 août, on reçoit au trésor vingt écus qui doivent être donnés ou prêtés au maître maçon Girard, pour l'œuvre de la forteresse de Cravant.

Le 27 janvier 1411, Hugues des Noues, receveur de Cravant (camerarius), est invité à rendre ses comptes, et à gager d'une façon sûre les sommes inscrites au livre du trésor, sous la rubrique, fortifications de Cravant.

Le 1 février, même année, Hugues des Noues est envoyé de nouveau à Cravant, pour organiser avec le capitaine la garde de cette ville. Ledit chanoine demande que si, à cette occasion, il lui arrive quelques dommages, le Chapitre soit tenu de le garantir, le doyen répond que c'est juste, il en prend l'engagement pour cette fois.

Le 23 mai 1415. Conclu que le receveur de Cravant devra faire continuer le rempart commencé de la forteresse du Chapitre près de la tour, avec l'argent que doivent les habilans, si pourtant ceux-ci consentent à le payer.

Le dernier document de la série consiste en un accord entre les

(1) Se rappeler que l'année commençait à Pâques.

habitans et le Chapitre, qui consent à diverses modifications et augmentations aux fortifications de Cravant, et à y employer une partie des impôts arriérés que lui doivent les habitans de cette ville: il est daté de la fin de 1423 (nouveau style), c'est-à-dire après la bataille de Cravant. La ville avait été un moment au pouvoir d'une troupe de dauphinois, guidée par le Bâtard de la Baume, mais elle avait été reprise presque aussitôt par les Bourguignons. Ce La Baume devait appartenir à la famille de Montrevel, et je crois bien que c'est de lui qu'il est question dans l'inventaire des Archives de l'Ain, séries D et E (E. 156-158 et suiv.).

Quoiqu'il en soit, ceux qui désireraient avoir de plus amples détails sur la ville de Cravant et ses remparts, n'ont qu'à consulter l'excellente monographie donnée sur cette ville par mon prédécesseur, M. Quantin, dans l'Annuaire de 1840 (p. 62 et suiv.). Ils y verront que la première pierre de ces fortifications a été posée en 1387 par le grand archidiacre du Chapitre, qui y avait été spécialement député. La forteresse se composait d'ailleurs d'un château dont le premier noyau était très ancien, et contenait très vraisemblablement la maison seigneuriale, la Domus capituli, et de l'enceinte de la ville.

III. Le troisième article de ce petit recueil en est le moins important. Il s'agit tout simplement du réglement de la succession d'un bâtard, Guillaumin de Meaux, fils naturel de Jean de Meaux, en son vivant apothicaire à Auxerre, lequel Guillaumin était mort sans postérité. Cette succession est dévolue au roi, comme comte d'Auxerre. Elle consistait principalement dans une maison, sise grande rue de Saint-Germain, qu'achète Jean d'Esponnes, chanoine d'Auxerre. Le Chapitre profite de l'occasion pour se faire payer l'arriéré d'une rente qui lui est due sur le minage et prévôté d'Auxerre et de Mailly-le-Château.

IV, V et VI. — Les numéros quatre, cinq et six, donnent les renseignements les plus complets sur une curieuse affaire, à laquelle avait déjà touché défunt M. Quantin. En effet dans le tome IV de sa réédition de Lebeuf, aux preuves, p. 209, il publie des lettres de grâce et de rémission du roi Charles VI, en faveur d'un clerc nommé Perrin Chantepinot (1), appartenant à l'une des plus anciennes familles bourgeoises d'Auxerre, et qui se trouvait

(1) Il était garde du sceau de la prévôté d'Auxerre en 1364. On trouve dans le livre de rentes de l'Hôtel-Dieu un Regnaut Chantepinot en 1335. En 1369-1371, Pierre Chantepinot, c'est évidemment le même que Perrin, prend à bail des gouverneurs des Grandes Charités d'Auxerre, une pièce de pré sise au faubourg de Notre-Dame-la-d'Hors.

mêlé fortuitement à l'assassinat de Jean Richesse, curé de Varzy, commis le 6 janvier 1381 au soir, par les gens du guet, assistés de quelques indigènes, dans des circonstances que nous allons raconter. Le roi relève Perrin Chantepinot de la peine et amende corporelle, criminelle et civile, mais il réserve les droits aux dommages et intérêts de la partie lésée, et enjoint à l'accusé de faire, à titre de pénitence, dans le délai d'un an, un pèlerinage à pied à Saint-Ladre d'Avallon. Or les documents qui suivent font la lumière complète sur cette affaire. Ce sont les lettres de rémission données aux complices de Perrin Chantepinot, savoir pour l'écuyer Gautier Dalengoye (1), ancien marin qui avait pris part à l'expédition de Jean de Vienne, contre les côtes d'Angleterre, pour le sergent Jean Quaquetot, dit Taconnet, et pour la veuve du sergent Beaudoin le Canaz, à laquelle on permet de faire décrocher de la potence et ensevelir son mari, qui avait été exécuté à la suite de ce meurtre. Il y a en outre aux archives nationales des lettres semblables données en faveur de Regnaut de Lyée et de plusieurs autres.

Il résulte d'une lecture attentive de ces pièces qu'en 1381, le guet ou police d'Auxerre, composé d'une vingtaine de sergents, ou à peu près, et commandé par le châtelain Guillaume Pasté qui mourut peu après, avait eu fréquemment maille à partir avec les chapelains, les habitués, les chanoines-clercs, et la partie la plus jeune du Chapitre d'Auxerre. Ces jeunes gens, fort turbulents de leur nature, violents comme on pouvait l'être au XIV siècle, surtout en Bourgogne, et en pleine guerre de cent ans, se répandaient le soir par la ville, insultant, et parfois pillant les passants, outrageant les femmes. De là des rixes et des batteries de toute sorte. La police avait naturellement tenté de mettre fin à tous ces excès. Mais elle n'était pas toujours la plus forte, et notamment le 1er janvier 1381, assaillie par des forces supérieures, elle avait dû prendre la fuite. De plus le dimanche suivant, un des sergents du guet, Jean d'Asnières, s'étant laissé surprendre isolé, avait été battu comme plâtre et mis tout en sang. Il en était résulté bien entendu une haine très vive entre eux et les gens du Chapitre. C'est pourquoi. les policiers, résolus de se venger, le jour des rois, invitèrent à souper à leur taverne, plusieurs bourgeois de la ville, aussi montés qu'eux contre les chanoines. Comme c'était jour de grande

(1) Je retrouve ce Gautier Dalengoye en novembre 1388, sergent à Sens, où il dresse procès-verbal pour refus d'obéissance et tapage nocturne à Nicolas Bourbelin, Pierre Chaurat, Colin Petit et autres particuliers. Arch. nat. JJ. 133, fo 90 20.

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