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C'est un gros village de cinq cents maisons, où il y a plusieurs caravanserais, et des jardins et des eaux en abondance.

Le 23, nous partîmes plus tard que nous n'avions fait les jours précédens, afin de ne pas arriver à Ispahan avant le jour. Nous fîmes les neuf lieues dont nous en étions éloignés, dans de belles plaines, et tirant toujours au midi, comme en nos précédentes traites. Nous passâmes tant de caravanserais et de villages, en approchant de cette grande ville, que nous crûnes être dans ses faubourgs, deux heures avant que d'y arriver (*). Nous y entrâmes à cinq heures du matin, le vingt-quatrième jour de juin, tous en bonne santé, grâces à Dieu, après avoir fait cent trentequatre lieues persanes, depuis Tauris.

Etant arrivés à Ispahan, nous allâmes loger, mon associé et moi, au couvent des capucins, qui est presque au cœur de la ville, et peu éloigné du palais royal. J'y trouvai un sac de lettres qui m'étoient adressées de presque toutes les parties du monde. Celles de Constantinople m'apprenoient le détail de la campagne des Turcs en Pologne. L'année précédente, ayant passé, sans

(*) « De Michiacour, dit Tavernier, on vient à Aganura, autre › carvanserai assez mal bâti, et d'Aganura, après avoir fait trois » lieues dans des campagnes grasses et fertiles, on arrive à Ispa» han ». (L-s.)

presque aucune opposition, le grand fleuve de Niester, ils en ravagèrent les plus belles provinces, et prirent cette célèbre forteresse de Caminiek, qui étoit le boulevard de la Pologne. On me mandoit, entre les autres choses, que l'armée ottomane avoit passé le Danube sur un pont long de cinq cents pas géométriques, construit par les soins et aux dépens du prince de Moldavie; et parce que la fabrique en plut pas au grandseigneur, il dépouilla ce pauve prince de sa principauté, et le condamna à une amende de cent cinquante mille écus.

Mes lettres des Indes contenoient la relation du voyage de M. de la Haye, vice-roi de Madagascar, qui étoit parti de la Rochelle, avec une escadre considérable, au commencement de l'année 1670. On l'avoit envoyée sur les mémoires de M. Carron, directeur général de la compagnie françoise (*), pour exécuter de grands desseins,

(*) Carron avoit fait un très-long séjour au Japon, pour le service de la compagnie hollandoise des Indes orientales. A son retour en Europe, il éprouva, de la part de cette même compagnie, des tracasseries et des désagrémens, dont le grand Colbert profita pour l'attirer en France et l'attacher au gouvernement. Il le chargea de négocier, au nom du roi, un traité de commerce avec l'empereur du Japon. Mais Carron étant mort en route, cet utile et beau projet avorta, et les Hollandois continuèrent de faire le commerce du Japon, à l'exclusion des autres nations d'Europe. Carron a peu écrit sur le Japon, ou du moins

et, entr'autres, pour se saisir de Banca, petite île située à l'orient de celle de Sumatra, et assez proche de Batavia. Cette petite île de Banca, qui est déserte, n'étoit tenue de personne avant ce temps-là. M. Carron la jugeoit un lieu propre pour être le magasin principal de la compagnie françoise aux Indes, et il projetoit de s'en emparer à l'imprévue; mais les Hollandois qui veillent avec grand soin pour la domination qu'ils ont fondée en ce pays-là, donnèrent juste dans le dessein de cette flotte françoise, dès qu'ils la virent équipée. On publia vainement en France, qu'on la destinoit pour les Indes occidentales, ils ne furent point les dupes de ce prétexte; ils dépéchèrent l'un sur l'autre trois vaisseaux d'avis à Batavie, avec ordre au conseil, de prendre possession de Banca (*); ce qui fut exécuté avant

on n'a publié de lui que des Notes sur le Japon, avec des remarques de M. Hagenaar. Ces notes parurent d'abord dans le tome II de la Collection de Voyages de Melchisedech Thévenot, et furent réimprimées dans le tome II des Voyages de la compagnie hollandoise des Indes orientales; le même ouvrage a été traduit en allemand, à la suite des voyages de Schouten et de Mecklin. Nuremberg, 1663 et 1672, in-8.o; et en anglois, Londres, 1663. Les observations de Hagenaar méritent peu de confiance. (L-s.)

(*) Banca fait partie des îles de la Sonde; elle est située vis-àvis du fleuve de Palambang, qui arrose la partie orientale de l'ile de Sumatra, d'où il tire son nom, et qui est très-fertile en poivre. C'est sur les bords de ce fleuve, et conséquemment dans l'ile de Sumatra, que le roi de Palambang, qui est aussi celui de

même que M. de la Haye arrivât aux Indes. Son voyage fut long; et pour son malheur il alla

cun,

Banca, fait sa résidence. Banca est connue dans toute l'Asie, par ses mines d'étaim. Ces mines furent découvertes en 1710 et 1711; elles sont abondantes et paroissent inépuisables; elles ont sept principales ouvertures, et sont exploitées par des Chinois; les inspecteurs et les mineurs sont de cette nation. Ces inspecteurs délivrent le métal au roi de Banca, à raison de cinq rixdalles les cent vingt-cinq livres angloises; celui-ci le vend aux Hollandois, quinze rixdalles ou cinquante-huit shellings sterlings le quintal anglois. La compagnie hollandoise des Indes orientales ne prend pas toujours tout l'étaim exploité dans l'année; car, en 1770, le gouverneur de Batavia arrêta de ne pas recevoir, par an, plus de vingt-cinq mille picols de cent vingt-cinq livres chade Palambang; et comme cette année-là on en avoit reçu cinq mille picols au-delà du nombre fixé, il annonça que l'année suivante la compagnie n'en accepteroit que vingt mille, et qu'on préviendroit le roi de cette nouvelle mesure. Les Hollandois prirent toutes les précautions imaginables pour empêcher les étrangers de participer au produit des mines d'étaim. Mais les vaisseaux qu'ils établirent en croisière, à l'entour de Banca, ne purent empêcher que de nombreux armateurs particuliers n'achetassent et n'emportassent une grande quantité de ce métal. M. Radermacher place l'ile de Banca vers 2° 40′ de latit. méridionale, et 120° 3' long. La Compagnie hollandoise des Indes y construisit une loge pour la première fois, en 1685; et depuis cette époque elle y entretient un résident, chargé spécialement de la traite de l'étaim de Banca. Ce métal, que la nature, jusqu'à présent, paroît avoir relégué en Europe, dans le sein des montagnes de Cornwalis, est bien moins rare en Asie; car les mines de Moluc, de Sumatra, de Borneo et du Pegon ne sont pas moins abondantes que celles de l'ile de Banca, et fournissent d'amples approvisionnemens aux Chinois, qui font une prodigieuse consommation d'étaim. Voy. les Verhandelingen van het Bataviaasch genootschap der Konsten en Weetenschappen. (Mémoires de la société de Batavia, etc.) 1.ste deele, bladz 9 en 10; pages 75 et

relâcher

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relâcher à Madagascar, où s'étant entêté de faire la guerre aux peuples de l'île, à la sollicitation des François qui y étoient établis, il y perdit six mois de temps et près de mille hommes, qu'on pouvoit employer plus utilement ailleurs; car il ne gagna rien contre ces nègres ; mais, au contraire, il les irrita si fort, que depuis ils ne voulurent plus de paix ni de commerce avec les François, et qu'enfin ils les chassèrent de toute l'île.

M. de la Haye passa de Madagascar à Surate, et s'y arrêta jusqu'au commencement de l'an 1672, qu'il en partit avec M. Carron, contre les avis duquel il avoit ordre de ne point agir. La flotte étoit forte alors de six grands navires et de quatre flûtes. Elle relâcha à Goa, le 21 janvier, et y trouva le Grand-Breton, autre navire du roi, avec deux flûtes. Ces treize bâtimens tirèrent vers Ceylan, et arrivèrent le 21 de mars à la baie de Cotyari, communément dite la baie de

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76 du 1.er vol. de la trad. allemande du même ouvrage, intitulé: Abhandelungen der geselschaft der Kunste und Wissenschaften in Batavia, publié à Leipzig, en 1782. Macartney's, Embassy to China, vol. 1. p. 305 de l'édit. in-4.o, et tom. II, p. 101 de la traduction françoise, troisième édition. Observations sur le Voyage à la Chine de lord Macartney, par M. Charpentier de Cossigny, pag. 216 et 217 de son intéressant Voyage à Canton. Stavorinus's, Voyages to the east Indies etc. translated from the original dutch by Samuel Hall Wilcocke. Note du traducteur. Tom. I, p. 356 et 357. (L-s.)

Tome III.

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