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rantit au voyageur la libre circulation d'un lieu à un autre, sous la protection des autorités civiles et militaires (). Les ambassadeurs, ministres et consuls ont le droit d'en délivrer à leurs nationaux, soit pour rentrer chez eux, soit pour passer à l'étranger.

S'il est aujourd'hui généralement reconnu en principe, qu'en temps de paix tout gouvernement doit accorder le libre passage sur son territoire au voyageur non suspect et muni d'un passe-port régulier, à plus forte raison doit-il en être ainsi pour les agents diplomatiques en mission.

Mais pour que ces agents, en temps de guerre, puis

(1) L'utilité des passe-ports pour la sûreté publique et la protection des intérêts particuliers est incontestable. La faculté de voyager étant de droit commun, des passe-ports ne peuvent être refusés aux individus qui ne sont point l'objet de poursuites judiciaires, et lorsqu'il n'est point fait opposition par une tierce personne à leur délivrance, en vertu d'un jugement obtenu par elle et emportant contrainte par corps contre le débiteur. Mais pour pouvoir franchir la frontière d'un pays étranger, il faut que le passe-port soit parfaitement en règle, c'est-à-dire, qu'ayant été délivré par l'autorité compétente, il ait été visé par la légation ou le consulat du pays où se rend le voyageur. A la frontière de tout territoire nouveau, le passe-port est soumis en outre à l'obligation du visa d'entrée. Tout cela est d'ordre public, et la petite gêne que ces formalités imposent aux voyageurs est plus que compensée par les entraves que cette gène apporte à la circulation des vagabonds, des gens sans aveu et des repris de justice. Constatons toutefois que l'obligation des passe-ports à l'intérieur n'a jamais été un obstacle bien sérieux contre la circulation des criminels, toujours habiles à se fabriquer de faux titres, ou à en falsifier d'originairement valides. En Angleterre, les nationaux voyagent à l'intérieur sans passe-ports; la police russe elle-même, qui pousse les précautions jusqu'à l'excès quant aux voyageurs arrivants, n'est guère plus difficile à l'égard des Russes voyageant dans l'intérieur de l'empire.

sent se rendre en toute sûreté au lieu de leur destination, il est indispensable qu'indépendamment de leurs passe-ports nationaux ils soient munis de sauf-conduits, c'est-à-dire de laissez-passer spéciaux, délivrés par celle des parties belligérantes dont ils doivent franchir le territoire (1).

Le commandant en chef d'une armée, et au besoin tout chef militaire supérieur, peut délivrer, pendant la durée des hostilités, des sauf-conduits plus ou moins larges. Cette faculté, délégation supposée de la puissance publique, ne repose, de fait, que sur la nécessité impérieuse de pourvoir dans certains cas à la gravité des circonstances et à l'urgence des communications.

(1) Ce fut pour ne s'être pas mis en règle à cet égard que, pendant la guerre de Succession, le maréchal de Belle-Ile allant de Francfort, où il était ambassadeur extraordinaire, à Berlin, en qualité de ministre de France près la cour de Prusse, fut arrêté, en passant par Elbingerode, par un bailli de l'électeur de Hanovre, roi d'Angleterre, et conduit à Windsor, sans que la cour de Versailles ait jamais prétendu que le droit des gens eût été violé par cet acte. Voy. Causes célèbres du droit des gens, T. I, p. 285.

CHAPITRE V.

DES DROITS ET DES PRÉROGATIVES DES

AGENTS DIPLOMATIQUES.

$ 23.

De l'inviolabilité (').

Les agents diplomatiques sont en possession de certaines prérogatives dérivées du droit des gens universel et positif, et puisées dans la nature même de leurs fonctions (). L'une des plus importantes est leur inviolabilité. Tout acte qui y porte atteinte est une injure faite au caractère dont ils sont revêtus. (3). L'inviolabilité entraîne après soi l'exemption de la juri

(1) La personne des agents diplomatiques est sacrée (sancti habentur legati; Digest.), leur demeure inviolable, et réputée faire partie du pays qu'ils représentent. « On pourrait, dit MONTESQUIEU, leur imputer des crimes s'ils pouvaient être poursuivis pour des crimes, on pourrait leur supposer des dettes s'ils pouvaient être arrêtés pour des dettes.>> Maxime trop absolue; voy. § 26.

(2) Ces immunités ont été introduites pour les mettre en état de remplir avec sûreté les fonctions dont ils sont chargés; c'est là leur véritable mesure, et c'est d'après ce principe que doivent être jugées toutes les prétentions et toutes les contestations auxquelles el'es peuvent donner lieu.

L'inviolabilité commence au moment où le ministre a mis le pied sur le territoire où il doit résider, s'il a fait connaître son caractère officiel.

diction du pays où l'envoyé réside; cette exemption est fondée non sur une simple convenance, mais sur la nécessité. En effet, comment un ministre public pourrait-il exercer ses fonctions avec la dignité, la liberté, la sûreté qu'elles exigent, s'il était dans une dépendance quelconque du souverain auprès duquel il réside? Mais l'immunité dont il s'agit n'assure point l'impunité. Si le ministre oublie lui-même sa dignité, s'il perd de vue qu'il ne doit ni offenser, ni être offensé; s'il se permet des empiétements, des actes arbitraires; s'il ose troubler l'ordre public, manquer aux habitants, aux fonctionnaires, au souverain lui-même; s'il conspire; s'il se rend odieux, suspect ou coupable, il doit être réprimé, mais par son constituant seul c'est un devoir pour celui-ci ; c'est une condition tacite, mais essentielle, de l'admission de son agent. Le souverain auprès duquel cet agent réside peut aussi, selon les circonstances, prendre des mesures de sûreté à son égard; il peut interrompre toute communication, tout rapport avec lui; il peut même le renvoyer de ses États ('), et, en cas de résistance,

(1) Nous citerons le cas suivant comme exemple : Le marquis de La Chétardie, ambassadeur de France à Saint-Pétersbourg, avait eu la principale part à la révolution qui plaça Élisabeth sur le trône de Russie. La confiance que cette princesse avait en lui paraissait entière, et on avait lieu de s'attendre qu'il disposerait de sa politique; elle annonçait une grande inclination pour la France. La Chétardie s'était immiscé dans les intrigues de cour qui portèrent Bestucheff à la direction des affaires. Il ne tarda pas à s'en repentir.

S'étant absenté de son poste pendant une année, ce diplomate retourna à Saint-Pétersbourg, en 4743, sur les instances réitérées de la souveraine qu'il avait si habilement contribué à élever au trône. Il s'y rendit avec l'espoir, en apparence très-fondé, de culbuter le

employer la force pour le contraindre à en sortir : car, en pareil cas, le ministre se met en état d'hostilité directe, et devient lui-même l'auteur de la violence qu'il subit. Il manque aux obligations que le caractère dont il est revêtu lui impose; il détruit par là même ce caractère, et par conséquent les prérogatives qui y sont attachées (').

Quoique le caractère public de l'agent diplomatique ne se développe entièrement, et ne lui assure la jouissance de tous ses droits qu'après la remise des lettres de créance et son admission officielle, il est re

ministre dont les mauvaises dispositions à l'égard de la France avaient rendu son retour nécessaire. Il affecta publiquement, à son passage à Copenhague et à Stockholm, de prédire la chute de Bestucheff, lequel, étant averti, prit ses mesures.

Ayant réussi, frauduleusement, à se procurer le chiffre de l'ambassadeur, le ministre russe intercepta une lettre de La Chétardie à sa cour, où il s'exprimait sur la tzarine dans les termes les plus injurieux. Cette lettre fut mise sous les yeux de l'impératrice indignée; et comme La Chétardie avait ajourné à la chute de Bestucheff la remise de ses nouvelles lettres de créance, portant reconnaissance, jusque-là différée, du titre d'impératrice*, cette princesse se crut avec raison autorisée à ne considérer ce diplomate que comme un simple étranger admis à sa cour; elle ordonna, en conséquence, son expulsion immédiate de l'empire, après l'avoir dépouillé du cordon de ses ordres dont elle l'avait précédemment décoré. Le droit des gens ne fut donc point violé dans cette circonstance : aussi la tzarine eut-elle soin de faire répéter dans toutes les cours où elle avait des ministres que cette affaire était personnelle au marquis de La Chétardie, et qu'elle n'altérait en rien la bonne harmonie qui subsistait entre la Russie et la France.

G.-F. DE MARTENS, VATTEL, T. IV, ch. vII.

(1) GÉRARD DE RAYNEVAL, T. I, ch. xiv. § 244. — J.-L. KLUBER, § 203.

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Voy. T. II, Lettres réversales. - Par suite de cette affaire, le titre impérial ne fut reconnu par la cour de France qu'en 1745.

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