Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

Ces mondes qui se meuvent sur nos têtes avec tant » de régularité, sont-ils assujettis dans leurs mouvemens » à des lois immuables, ou ces lois doivent-elles insen»siblement s'altérer et les détruire? La nature a-t-elle >> mis en eux des principes de permanence ou des germes » de destruction?

>> C'est un être fragile qui n'a qu'une existence éphé» mère sur l'une des moindres planètes du système >> solaire, c'est l'homme qui demande à l'univers s'il » doit être éternel; l'univers auquel il ose mesurer son » intelligence, lui répond que les mondes ne présentent >> aucun signe de décadence ni de vétusté; qu'un prin>>cipe conservateur, dépendant de leur action mutuelle, » assure leur stabilité; qu'ils n'éprouvent dans leurs » élémens aucune altération réelle ou constamment >> croissante; que les corps célestes ne doivent point » s'accélérer jusqu'à se réunir un jour aux foyers des » forces qui les animent, que les accélérations doivent » se changer tour-à-tour en retardemens, et les retarde» mens en accélérations; que si les orbites varient dans » leurs inclinaisons, elles ne parviendront jamais à se » confondre; que jamais aucune génération ne verra la » coïncidence de l'écliptique et de l'équateur, ou l'éga» lité constante des jours et des nuits sur toute la terre ; » que dans le ciel tout est périodique, que le même » ordre de choses doit toujours s'y reproduire, et le » système du monde se balancer dans cet état d'oscil» lation perpétuelle. »

En terminant cette analyse, nous croyons pouvoir avancer que l'Histoire de l'Astronomie depuis 1781, par M. Voiron, peut paraître dignement à côté de celle de Bailly et servir à la compléter; qu'elle renferme, comme celle de son prédécesseur, une instruction solide jointe aux qualités du style; nous croyons pouvoir en recommander la lecture aux jeunes gens qui se livrent à l'étude des sciences exactes : elle leur inspirera le désir de connaître à fond les travaux des grands astronomes de notre siècle; mais ce qui doit la recommander davantage, c'est le suffrage du géomètre célèbre, M. Laplace, à qui cet ouvrage est dédié et qui l'a jugé digne d'être appuyé de son nom. J. L. B.

[ocr errors]

LITTÉRATURE ET BEAUX-ARTS.

TRAITÉ DE L'EXISTENCE DE DIEU DÉMONTRÉE PAR LES MER

VEILLES DE LA NATURE ET LES PREUVES PUREMENT INTEL

LECTUELLES ; par M. F. DE SALIGNAC DE LAMOTTE FENELON. Nouvelle édition, augmentée des principales découvertes de la physique et de plusieurs observations nouvelles sur les harmonies de la nature; par LOUIS-AIMÉ MARTIN. A Paris, chez Demonville imprimeur-libraire, rue Christine, no 2.

[ocr errors]

Il existe un livre antérieur à toutes les conceptions de l'esprit humain, un livre plus éloquent, plus propre à prouver l'existence de Dieu que tous les ouvrages sortis de la main des hommes; un livre qui parle au cœur avant de se faire entendre à l'esprit, qui emploie pour persuader non pas de froids et subtils raisonnemens, mais le sentiment et l'admiration; un livre où tous les yeux peuvent lire, que tous les hommes peuvent consulter, et qu'un grand roi a désigné par ces paroles célèbres Cæli enarrant gloriam Dei. Mais ce livre qui nous instruit si puissamment, ce livre qui nous remplit d'admiration et de reconnaissance, est aussi pour nous un sujet de doutes et d'incertitudes; ses pages sublimes ne sont pas toutes également intelligibles pour l'homme.

Comment au milieu de tant de prodiges, de grandeur et de bonté, expliquer tant de désordres apparens? Le même être a-t-il produit le mal et le bien? Est-ce le même pouvoir qui couvre la terre de moissons et de richesses de tous les genres, et qui la dévaste par les tempêtes, les volcans, et ces horribles convulsions du globe qui engloutissent quelquefois des contrées toutes entières ? Comment l'homme est-il alternativement l'objet de ses prédilections et de son courroux? et par quelles voies concilier tant d'effets opposés et contradictoires ?

Telles sont les objections que peut se faire le sage

SETS

MERCURE DE FRANCE, MAI 1811.

209

occupé de la contemplation de la nature; et qes objec tions seraient de la plus haute considération, il était démontré que l'homme fût le centre de l'hivers et l'unique objet des desseins de l'Etre-Suprême.

C'est pour y répondre que plusieurs écrivains célèbres ont composé des livres sur l'existence de Dieu mais ceux qui se sont livrés à cette tâche honorable, n'ont point envisagé leur sujet de la même manière. Les uns; plus réservés et plus sages, se sont contentés de prouver qu'il existe une cause supérieure et intelligente, en convenant modestement que les forces de l'esprit humain sont insuffisantes pour résoudre tant de mystères qui déconcertent nos idées. Les autres, plus confians, ont entrepris de tout expliquer, et de démontrer aux esprits forts que nous vivons ici dans le meilleur des mondes possibles.

Fénélon avait l'ame trop tendre pour ne pas incliner vers ce dernier parti. Toutes les qualités de sa belle ame sont empreintes dans son Traité de l'existence de Dieu. Ce n'est pas l'ouvrage d'un dialecticien, c'est celui d'un homme sensible qui se livre au doux plaisir de l'admiration et de la reconnaissance. Il peint les beautés de la nature, les bienfaits du créateur, les merveilles du monde; il voit le bien, il oublie le mal.

A.

Son livre touchera les ames douces et sensibles comme la sienne; mais il ne convaincra pas les esprits rebelles et obstinés. Occupé tout entier à décrire les merveilles qui le frappent, il ne songe point à prévenir les difficultés qu'on peut lui opposer. Nalle objection n'est présentée ou résolue ; il ne donne rien à la dialectique. Mais s'il préfère l'admiration au raisonnement, il admire du moins en sage, il sait s'arrêter où il convient. Il ne prétend point non plus nous asservir à l'autorité de ses jugemens. Jamais l'esprit de parti ne l'égare, jamais une expression injurieuse ne s'échappe de sa plume noble et modeste. Grande leçon pour quelques-uns de nos jeunes écrivains qui, en affectant le titre d'hommes religieux, distribuent si libéralement les titres d'athées et d'impies.

Reproduire un ouvrage de ce mérite, c'est rendre

[ocr errors]

service aux lettres et à la morale; le reproduire avec des notes sur la physique et l'histoire naturelle, c'est travailler pour l'avantage des sciences et l'instruction des jeunes gens. M. Aimé Martin avait plus de droit qu'un autre à s'occuper de ce travail. Ses Lettres à Sophie, sur la physique, malgré les reproches que la critique a pu leur faire, annoncent un talent aimable réuni à beaucoup d'instruction. Son admiration pour Fénélon décèle un cœur honnête, un esprit sage et judicieux.

L'étude de la physique porte naturellement l'ame vers la divinité; car comment vivre au milieu des merveilles sans en admirer l'auteur? Plus les connaissances s'étendent, plus l'esprit de l'homme est propre à concevoir l'existence d'un être suprême. Les idées de la divinité sont informes et confuses chez les peuples sauvages, ce n'est que chez les nations éclairées qu'elles se perfectionnent et s'épurent.

Mais il ne faut pas non plus substituer la subtilité au raisonnement, il ne faut pas que le désir d'exercer notre esprit égare notre jugement. Toutes les preuves de l'existence de Dieu ne sont pas également solides et convaincantes. Les argumens tirés du consentement des peuples ont peu de force; d'abord parce qu'il n'est pas démontré que l'idée de Dieu soit répandue chez tous les peuples; ensuite parce qu'elle se trouve presque toujours défigurée par les plus grossières superstitions; enfin, parce que l'erreur est souvent plus répandue chez les nations que la vérité. Il en est de même des argumens tirés de l'intérêt des hommes. Il importe, dites-vous, à la société que Dieu existe, donc il existe véritablement. Mais nous serions trop heureux, si nous possédions réellement tout ce qu'il nous importe de posséder. Parmi les preuves physiques, le spectacle de l'Univers, l'ordre admirable qui règne dans le grand tout, l'accord sublime des parties qui le composent, forment un faisceau d'argumens auquel il est difficile de résister; mais ces preuves ne doivent point être pressées trop vivement. Notre nature est trop faible pour tout comprendre, et nous devons nous arrêter où les lumières nous manquent. Comment l'homme qui n'est qu'un atôme perdu dans l'immensité

des mondes, aurait-il le secret du grand être ?«< Tout ce » que nous voyons du Monde, dit Paschal, n'est qu'un » trait imperceptible dans l'ample sein de la nature. Nous » avons beau enfler nos conceptions, nous n'enfantons » que des atômes auprès de la réalité des choses. C'est » une sphère infinie dont le centre est par-tout, la cir» conférence nulle part. » Cependant la plupart des auteurs de nos jours qui ont écrit sur l'existence de Dieu, ont prétendu nous dévoiler tous ses desseins; il n'est pas une difficulté qui les arrête, pas un phénomène dont ils ne nous offrent l'explication. Que de brillantes rêveries n'a-t-on pas débitées sur les contrastes, les consonnances et les harmonies? On a mêlé le roman à l'histoire, et les chimères à la vérité. Ce n'est pas ainsi qu'écrivait Fénélon ;.toutes ses idées sont d'un esprit sage et juste.

« Je ne prétends pas, dit-il, pénétrer la nature toute » entière: qui le pourrait? Je ne prétends pas même >> entrer dans aucune discussion de physique; je ne veux

parler que de ce que tout le monde sait, et qui ne » demande qu'un peu d'attention tranquille et sérieuse.»> L'ouvrage de ce sensible et touchant écrivain n'est donc pas destiné aux savans: ce n'est qu'une instruction simple et naturelle, mise à la portée de tout le monde. Mais M. Martin a pensé que dans l'état actuel de nos connaissance, on pouvait mêler un peu de science aux leçons de son modèle ; d'ailleurs les notions de physique répandues dans l'ouvrage de Fénélon ne sont pas toujours exactes, et son livre étant destiné à l'instruction de la jeunesse, il était important de rectifier les erreurs qui peuvent s'y trouver. C'est ce que M. Martin a fait avec beaucoup de soin; mais peut-être devait-il imiter davantage la sage discrétion de son modèle. Le zèle l'a emporté trop loin, il a voulu pénétrer les secrets les plus impénétrables, expliquer tous les mystères, résoudre tous les problêmes. Il s'est livré à toutes les inspirations de son imagination jeune, vive et brillante, et pour prouver davantage, il a souvent atténué toute la force de ses preuves.

Sans doute il est impossible de méconnaître les causes finales qui se manifestent sans cesse dans le spectacle de

« VorigeDoorgaan »