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ruës, et amenèrent le Roy, qui estoit merveilleusement ravy de voir des ours si bien contrefaicts, jusques devant l'église; qui mist pied à terre, suyvant la coustume de nos roys, pour adorer: auquel lieu l'attendaient l'evesque et le clergé, avec la croix et les reliques en forme de station, où fut chanté ung motet en fort bonne musique, tous en chappes assez riches et aultres ornements.

L'adoration faicte, les ours dessus dicts remenèrent le Roy en son logis, devant lequel ils firent mille gambades, toutes propres ou approchantes du naturel des ours; comme de luycter et grimper le long des maisons et des pillers des halles ; et (chose admirable) ils contrefaisoient si naturellement par ung merveilleux artifice en leurs cris, le hurlement des ours, que l'on eust pensé estre parmy les montaignes et voyants que le Roy, qui desja estoit en son logis, prenoit ung grandissime plaisir à les regarder, ils s'assemblèrent tous cent, et firent une chimade ou salve à mode de chiorme de galère, tous ensemble, si espouvantable, qu'un grand nombre de chevaux sur lesquels estoient valets et lacquets attendent leurs maistres devant le logis du Roy, rompirent resnes, brides, croupières et sangles, et jettèrent avec les selles tout ce qui estoit dessus eux et passèrent (tant fut grande leur frayeur) sur le ventre de tout ce qu'ils rencontrèrent, qui fut le comble. de la risée, non pas pour tous, car il y en eust beaucoup de blessez; mais pour le désastre ils ne laissèrent une carolle ou danse ronde, leurs espieux bas; parmi laquelle les Suisses s'abandèrent; car ils sont comme patriotes des ours, d'autant qu'il s'en trouve en leurs montaignes, comme en celles de Savoye, estants toutes nommées Alpes; où le Roy confessa n'avoir reçeu en sa vie aultant de plaisir pour une drollerie champestre, qu'il fist lors, et leur fit donner deux mille escus.

Finalement le Roy passa le Montcenys, Suze et Vil

liane et vint à Thurin, première ville et place de renom. de tout ce qu'avait conquis en Piedmont, autrement de-là les monts, le feu roy son père, François-leGrand. >>

Séance du 1er Décembre 1902.

Présidence de M. le Chanoine Truchet.

Après la lecture et l'approbation du procès-verbal de la dernière séance, le président signale les principaux ouvrages reçus pendant le mois de novembre.

1o Trois livraisons de l'Armorial et Nobiliaire de Savoie, les 10, 11 et 12e du 4 vol. Elles sont en grande partie consacrées à cette grande famille de Montmayeur, qui va du Xe au XVIIe siècle, occupant les plus hautes charges à la Cour et dans l'armée de Savoie. Sur elle plane le sombre drame de l'exécution, en 1465, du président de Fésigny. M. de Foras ne croit pas que la lumière ait encore été faite, malgré le livre très documenté de M. Mugnier (Société savois. d'hist. et d'Archéol.), et il ne paraît pas possible de ne pas y voir la complicité du duc Louis de Savoie. L'auteur de cette exécution, Gaspard III de Montmayeur, était fils de Gaspard II et frère d'Amédée, d'abord abbé de St-Michel de la Cluse, puis évêque de Maurienne, qui mourut en 1422. M. de Foras ne parle pas du tombeau de cet évêque. Il est dans la chapelle de Ste Thècle, l'ancienne sacristie, qu'il fit réparer. On y voit l'écusson célèbre d'argent à l'aigle éployée de gueules, languée, becquée et membrée d'azur.

2o Le Dictionnaire saroyard, de MM. Constantin et Désormaux, que M. l'abbé Gros apprécie en ces termes :

«Messieurs, vous vous rappelez que notre Société a souscrit au Dictionnaire savoyard, de MM. Constantin et Désormaux. Outre l'exemplaire souscrit, elle a

reçu un second exemplaire envoyé en hommage par M. Désormaux, professeur au lycée Berthollet. Je suis votre interprète en lui adressant nos plus vifs remerciments pour cette délicate attention.

Le Dictionnaire savoyard comble une lacune qui était à regretter dans les Sociétés savantes de la Savoie. Tous les champs de l'érudition et de la science avaient été explorés ; seule, la langue populaire de notre pays avait été négligée. Elle n'avait été l'objet que d'études fragmentaires et éparses, bien défectueuses au point de vue si important de la notation de la prononciation. Voici enfin une œuvre sérieuse qui fixe par l'écriture, pour le conserver à perpétuité, le vocabulaire de nos patois, au moment où des causes multiples les corrompent et les menacent d'une ruine totale. Sans doute ce n'est pas un dictionnaire universel comment pourrait-il l'être ? — mais il embrasse les principaux dialectes du parler savoyard, et celui de la Maurienne y est suffisamment représenté. Comme il n'y a pas de vocabulaire ni de prononciation commune à toute la Savoie, les auteurs ont indiqué pour chaque mot et chaque forme la localité d'origine, l'acte de naissance.

D'un autre côté, ils ont aplani la principale difficulté des études linguistiques, je veux dire la notation de la prononciation. Leur système est à la fois simple et exact il tient le juste milieu entre la notation purement phonétique et la notation soi-disant orthographique, n'introduisant des signes spéciaux que pour un petit nombre de sons inconnus au français.

Le Dictionnaire s'annonce comme le commencement d'une série d'études philologiques savoyardes. Ce premier ouvrage nous permet de bien augurer des puinés.

Comme témoignage de reconnaissance à M. Désorinaux et comme encouragement à poursuivre ses études de philologie savoisienne, M. le Président propose

de lui décerner le titre de membre honoraire de la Société d'histoire de Maurienne. L'assemblée souscrit de tout cœur à cette proposition et prie le Secrétaire d'annoncer sa nomination à notre nouveau et distingué confrère.

M. le chanoine Truchet lit ensuite la note suivante sur une fourniture de morions:

La Société a publié (1) le procès-verbal de la saisie opérée en 1381 pour restitution de deux jaquettes militaires ou cottes de mailles appartenant à la commune de Montdenis. Il en résulte que les communes avaient à leur charge l'attirail nécessaire aux soldats qu'elles étaient tenues de fournir pour les cavalcades ou expéditions. M. l'abbé Rechu, curé de Montvernier, a trouvé dans ses archives une nouvelle preuve de ce fait. Malheureusement le sommet de la feuille est pourri et les premières lignes manquent.

L'acte est fait à La Chambre devant la maison du notaire Jean Bourgeois, qui le reçoit. « Me Jehan de prato (Dupré), notayre ducal de Montvernier, au nom de la communauté du dict lieu..... confesse debvoir faysant de son debte et affère propre, en l'absence des scindies du diet lieu, à noble François de Tigniact baron de Ribens sieur de Brun et cappitayne retenu pour le service de Son Altesse de deux centz hommes de gens de guerre de pied présent et acceptant pour luy et les siens scavoir la somme de quarante florins Savoye et ce par cause de prix non payé de vendiction de huict morrions (2), lesquels le dict sieur créancier promet de deslivrer à huict des souldards de la diete communaulté de Montvarnier qui sont enroollés soubs la charge du dict sieur de Brun pour le service de Sa diete Altesse, payables les dicts quarente florins..... entre cy et la prochaine venant feste de la sainct An

(1) 2a série, t. 4, 1° part., p. 192.

(2) Armure de tête en forme de chapeau rond, plus légère que le casque.

dré avec despens, et ce nonobstant une lettre missive par le dict sieur créancier envoyée aux scindics de la dicte communaulté de Montvarnier dattée à La Chambre de ce mesme jour par laquelle il confesse havoir heu et receu la dicte somme de quarante florins du dict Me Jehan de prato..... »

Deux faits permettent de fixer approximativement la date de ce contrat. En 1599, François de Tignat était depuis quelque temps déjà gouverneur du fort de StJean et de la province de Maurienne. Il avait épousé Jeanne, une des six filles d'Urbain du Pont, et quelques années après ce mariage, Urbain étant mort, le partage de son hoirie lui donna la maison-forte et le fief du Villaret. Or parmi ses titres le contrat qui nous occupe ne met ni celui de gouverneur de la province, ni celui de seigneur du Villaret. Il ne les possédait donc pas encore à cette époque. Peut-être peut-on dater ce contrat de l'année 1589, où Charles-Emmanuel Ier chargea Mgr de Lambert et Urbain du Pont d'organiser la défense de la Maurienne.

La valeur du florin de cette époque pouvant être évaluée à 4 fr., en puissance d'argent actuelle, on voit que le morion coûtait 20 fr.

En 1565, la mestralie de Modane avait aussi acheté des arquebuses et des corselets pour ses miliciens (1). M. le chanoine Truchet dépose sur le bureau une série de cinq notices sur des sujets divers, qu'il réunit sous le titre, élastique à dessein, de « Fragments historiques Les nobles Sauvage, 20 Noble Jean Rambaud et la peste de 1565, 3o Serfs et hommes-liges de la cathédrale de Maurienne au XIIe siècle, 4o . . 5o La Chapelle et l'Hermitage de Ste Thècle.

Il fait la lecture de ce dernier fragment, qui nous donne des renseignements intéressants et inédits sur un des plus curieux chapitres de notre histoire locale.

(1) V. Mémoire de M. l'abbé Gros, Travaux de la Société, 2a série, L. 1, 2 part., p. 232,

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