dus dont beaucoup n'étaient pas mauriennais ils s'étaient abattus sur notre pays comme des oiseaux de proie. Voilà ce que Marcoz affecte d'ignorer dans la lettre où il prend fait et cause pour les Jacobins, instruments de la tyrannie révolutionnaire. Le Conseil municipal, dans sa réponse, proteste contre l'accusation d'un complot organisé contre les terroristes, déclarant que c'était là une manœuvre hypocrite des Jacobins qui prétendaient, « par leur hypocrisie patriotique », capter la confiance du député. Voici ce document curieux : St-Jean, le 15 Thermidor, an 3. Citoyen, La municipalité de cette commune est surprise que vous pensié (sic) qu'elle aye dans son sein des scélérats capables de se porter à des massacres. Il n'y a que des malveillants qui peuvent vous avoir dit qu'il s'en préparait; mais les signalés ennemis de la chose publique vous en ont imposé; ils craignent, ils cherchent, sous le manteau du patriotisme dont ils s'affublent, un abri, et, pour le trouver, ils recourent à la calomnie, ils supposent ce qui n'est jamais venu à l'idée de personne. Vous vous trompez certainement lorsque vous dite que vous voyez se préparer une faction contrerévolutionnaire en cette commune; il n'y en aura jamais aucune, l'esprit public est bon, attaché à la république et à la représentation nationale; et si quelquefois des individus attachés à l'armée ont chanté avec enthousiasme le Réveil du peuple devant quelques individus qui s'en sont affectés, il n'en est rien arrivé, par les mesures que le conseil s'est empressé de prendre. Il n'y a de faction que parmi ces malveillants qui ont prétendu, par leur hypocrisie patriotique, capter votre confiance. Cette municipalité proteste une entière soumission et dévoûment aux lois, elle s'y conformera toujours exactement en tout et partout, elle n'est pas dans le cas de craindre la réaction terrible que vous dites se préparer, sa fidélité aux principes de la Révolution est constante et notoire. Salut et fraternité. Le maire, les officiers municipaux et membres du conseil général de la commune de St-Jean-de-M. Marcoz ne se trompait pas en prédisant une nouvelle explosion de terrorisme, une recrudescence du jacobinisme. Le triomphe du parti honnête et modéré ne dura pas longtemps. Après le 18 Fructidor an V (4) septembre 1797), une seconde Terreur éclata, moins sanguinaire, mais plus vaste et plus longue que la première elle remplaça la guillotine par la déportation; au lieu de tuer d'un seul coup, elle faisait mourir à petit feu. En Savoie, en Maurienne spécialement, c'est pendant cette époque que les prêtres furent traqués comme des bêtes fauves, que plusieurs d'entre eux furent capturés et envoyés à l'île de Rhé et de là dans la Guyane. Ceux des émigrés qui étaient rentrés chez nous dans l'illusion que la Révolution était finie durent repasser les frontières et prendre de nouveau le chemin de l'exil. Les Jacobins se vengeaient du mauvais moment qu'ils avaient passé après la chute de Robespierre. «La réaction terrible » annoncée par le député Marcoz avait de nouveau déchaîné sur notre pays les fureurs de la persécution. APPENDICE. L'histoire du Club des Jacobins de St-Jean nous renseigne suffisamment sur l'esprit qui animait les associations similaires qui existaient dans d'autres localités de la Maurienne. On peut, d'ailleurs, constater cette communauté d'idées par les deux documents suivants qui concernent l'un la Société populaire d'Aiguebelle et l'autre celle des Fourneaux. Extrait in parte qua du procès-verbal porté sur les registres de la Société, séance du 6 Germinal an 2 de la République : ... « Un membre a fait la motion que, pour rendre la fête du décadi plus solennelle, il fallait joindre à l'anéantissement des tours et pigeonnières le tableau des monstres barbares qui existent encore tant dans les ci devant église et chapelle de cette commune que dans une maison de celle de Randens; lesquels ont si longtemps frappé nos regards et entretenu des espérances dans le coeur des fanatiques qu'ils auraient déjà dû être réduits en cendres, et a conclu par sa motion qu'ils soient brûlés en public au pied de l'arbre de la Liberté le décadi prochain, ce qui a été adopté et la Société arrêtant en cette conformité a commis les citoyens Ferley et Berthier pour en faire la demande à la municipalité... >> Cet extrait des registres de la Société, le seul que j'aie pu trouver, est consigné dans le registre des délibérations de la municipalité d'Aiguebelle; il porte au bas l'empreinte en cire du sceau de la Société. (1) (1) Les archives de la Société d'histoire et d'archéologie de Maurienne possèdent un « Etat des meubles que la Société populaire de Modane a retenu (sic) pour son usage, lors du dépouillement de l'église de cette commune, savoir: dix bancs, un garde-robe. trois chandeliers, une sonnette. » « Certifié véritable par les membres composant le bureau. » « A Modane ce 25 pluviose, 3° annee républicaine. » « LE BOUTTEUX, GUILLERMON, CHANIET, séc". » Ce qu'il y a a remarquer, c'est que pas un de ces noms n'appartient a Modane. Le second document, beaucoup plus important, nous a été communiqué par M. Laymond, notre collègue dans la Société d'histoire et d'archéologie de Maurienne : Les Fourneaux le 3 Germinal an 2 de l'ère républicaine, Citoyens administrateurs, Les Sociétés populaires sont les sentinelles vigilantes, sont les reverbères qui dévoilent et déjouent les projets des malveillants, et dénoncent aux autorités supérieures la récalcitrance et la mauvaise volonté des autorités constituées à mettre à exécution les lois et les décrets de la Convention, ainsi que les arrêtés des représentants du peuple dans les départements. La Société Montagnarde d'instruction des Fourneaux avait pris le double engagement d'instruire les habitants de cette commune des principes de la Révolution, d'expliquer tous les décadis les décrets de la Convention et les arrêtés des autorités supérieures et de saper insensiblement les anciens préjugés qui tiennent encore ces individus sous le poids énorme du plus monstrueux fanatisme. Tant que la Société fondée s'est tenue aux instructions et aux mots, on a paru goûter la Révolution. Nous étions satisfaits, citoyens administrateurs, de voir que nos soins n'étaient pas inutiles et que nous avions travaillé avec quelque avantage : nous ne nous arrêtions point à ce que disaient des patriotes qui connaissaient sans doute mieux que nous les malades que nous avions à traiter, que nous perdions notre temps, et que, malgré tous nos soins à faire chérir la Révolution à des individus qui jusqu'à ce moment n'en avaient retiré que des épines, nous ne parviendrions jamais à arracher le bandeau qui couvre et pèse sur leurs yeux nous n'en voulions rien croire, et nous avons continué nos instructions avec tout le zèle qui nous anime pour le bonheur de nos concitoyens et le plus grand avantage de la République. Aujourd'hui que nous avons plus fait que de parler, aujourd'hui que des mains révolutionnaires se sont hâtées de faire droit à l'arrêté du représentant du peuple Albitte, qu'on affectait de méconnaître; auaujourd'hui que toutes les parties de la République s'empressent de rendre hommage à la raison universelle et que les sans-culottes des Fourneaux joints à leurs frères de Modane brûlent d'impatience d'élever un autel à cette Divinité tutélaire du genre humain et de lui faire hommage des dépouilles du fanatisme, la municipalité des Fourneaux ainsi que les habitants n'ont plus contenu leur hypocrisie et leur fourbe empressement à venir à nos séances; ils se sont dévoilés et se sont montrés ce qu'ils sont. Par un arrêté d'Albitte tous les clochers doivent être démolis, parce que ces édifices ne servent qu'à entretenir le fanatisme et peuvent servir de retraite. aux brigands. Eh bien, la municipalité des Fourneaux ne se contente pas seulement de désobéir à la loi, elle méprise encore la réquisition de l'agent national du district. D'après cette réquisition le clocher devait être démoli dans la huitaine; on n'a encore mis bas que la croix malgré nos fréquentes pétitions, et la cloche y serait encore sans le zèle révolutionnaire dest officiers de santé qui se sont empressés de la mettre à bas. Par un décret de la Convention, on ne devait laisser qu'une cloche par commune. La municipalité des Fourneaux n'était pas contente d'une cloche, il lui en fallait trois. Nous avons fait partir la seconde qu'on tenait cachée dans le clocher, et nous venons de découvrir la troisième bien cachée dans la sacristie. Les autorités constituées qui ne doivent être formées que de zélés patriotes et qui ne doivent rien négliger |