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an. Il est vrai aussi que le gouvernement lui avait conféré, par lettres patentes du 22 septembre 1756, une prébende de chanoine dans l'église de St-Pierre à Louvain, sans qu'il l'eût demandée; mais ce bénéfice ne lui valait que 500 fl. par an; et encore fallait-il, pour gagner cette modique somme, fréquenter les offices pendant cinq heures du jour et y chanter, fatigue à laquelle la faible poitrine de Paquot ne pouvait résister. Il fut même sur le point de renoncer à ce bénéfice, parce que sa conscience lui défendait d'accepter le traitement d'une charge dont il ne remplissait pas les devoirs. En 1760, ses amis lui avaient procuré la présidence du collège de Houterlé, à Louvain, dans l'intention de lui assurer par là un logement. Malheureusement pour Paquot, il dut défrayer lui-même sa table, table de président, à laquelle il était loin de pouvoir suffire. De manière que la présidence du collège de Houterlé était pour lui plus onéreuse que profitable.

L'avoir de Paquot consistait donc dans une somme annuelle de 371 fl., qu'il retirait de sa place de professeur d'hébreu. Il manquait de tout; et on prétend même qu'il n'avait pas de quoi se chauffer en hiver.

Il avait peu d'espoir d'améliorer sa position. Tous les bénéfices et toutes les places tant soit peu lucratives à Louvain, dépendant soit du magistrat, soit de l'université, il ne put jamais espérer aucune faveur; car ses talents, et surtout sa manie pour la polémique, lui avaient attiré la jalousie et la haine de plusieurs personnages influents. Il ne pouvait même se flatter de l'espoir de devenir un jour docteur en théologie : en effet, un doctorat coûtait dans ce temps-là 3,000 fl., somme trop élevée pour lui.

Marie-Thérèse, toujours prête à soutenir les hommes de talent, prit enfin sa misère en considération, et voulut surtout favoriser en lui le littérateur. Elle avait pour exemple les faveurs accordées par ses prédécesseurs à Erasme, à Juste-Lipse et à Puteanus. Le premier jouissait d'une pension de 1,200 fl., et les deux derniers chacun d'une somme annuelle de 1,000 fl. Elle-même avait accordé 420 fl. par an au docteur Robert, quoiqu'il jouit de bénéfices et de traitements montant ensemble à 5,000 fl.

L'impératrice écrivit donc à son beau-frère, Charles de Lorraine,

une lettre que nous croyons assez intéressante pour la reproduire ici.

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Monsieur, mon très-cher et amé beau-frère et cousin. Mon chancelier de cour et d'état m'a rendu compte de la relation de V. A. R. du 18 mars dernier, par laquelle vous m'informez des mérites de Léon Natalis Paquot, licencié en théologie et professeur de la langue hébraïque, en mon université de Louvain, ainsi que du cas où il se trouve d'avoir à peine de quoi vivre; touchée de compassion pour ce savant homme, et me faisant un plaisir de réparer le tort qu'ont ses collègues de lui marquer plus de jalousie que d'envie de concourir à son avancement, je lui accorde une pension de six cent florins courant sur mes finances, et le titre de mon historiographe. V. A. fera en conséquence les dispositions nécessaires pour le faire jouir de ces bienfaits, en faisant insérer dans a commission les motifs qui me portent à les lui accorder. A tant, etc.

» De Vienne, le 7 avril 1762.

» MARIE-THÉRÈSE. »

Quelques jours après, c'est-à-dire le 23 avril, sa commission d'historiographe fut signée. Elle portait qu'étant informée des talents, de l'activité infatigable et des capacités de son cher e bien amé Léon Natalis Paquot, ainsi que de la médiocrité des ressources que ses bénéfices lui procuraient, l'impératrice avait jugé que ce savant était digne de la protection qu'elle accordait volontiers au mérite. En conséquence, elle lui donnait le titre de son historiographe avec une pension annuelle de 600 fl.

On sait que Paquot ne jouit pas longtemps de cette faveur, et qu'elle fut supprimée en 1782. Sa position devint donc précaire comme avant sa nomination d'historiographe, jusqu'à ce qu'il fût nommé, en 1787, professeur d'écriture sainte et bibliothécaire du séminaire de Liége.

Quant aux autres détails relatifs à sa vie, nous renvoyons à la

biographie de ce savant, publiée par M. Goethals (1), et à la notice

que

M. De Reiffenberg lui a consacrée dans son Annuaire de la Bibliothèque royale, année 1841, pag. 172. C. PIOT.

(1) Lectures relatives à l'histoire des Sciences, etc., t. III, p 273.

Une anecdote littéraire extraite de mes mémoires d'outre-tombe.

Le roi Guillaume Ier donnait des audiences publiques les mercredis de chaque semaine. Tout le monde y était admis suivant l'ordre d'inscription, avec la seule différence que les corps passaient avant les individus. Le monarque, patient et laborieux, écoutait chacun avec bonté et n'oubliait rien de ce qu'on lui remontrait.

Déjà l'orage qui brisa son sceptre en deux, grondait à l'horizon. La cour allait partir pour La Haye; le roi donnait en quelque sorte une audience d'adieu, et c'était l'aimable prince de Chimay qui remplissait les fonctions de chambellan, lui si courtois, si poli, si fidèle aux traditions de l'ancienne bonne compagnie. On était reçu dans le cabinet du Roi, qui se tenait debout, appuyé contre une table. La porte demeurait ouverte, on pouvait tout voir, mais sans entendre clairement ce qui se disait.

Après une réception nombreuse où nous étions nous-même, où se présentèrent humblement plusieurs de ceux qui donnèrent plus tard et avec audace le signal de l'insurrection, après une réception où M. Isidore Plaisant sollicitait une place de notaire à Ixelles, où un autre, qui s'éleva plus haut que lui, briguait le poste de substitut dans une ville obscure, on croyait la liste épuisée, quand arriva un homme jeune encore, mal vêtu, la mine effarée et la démarche incertaine. Quoiqu'il n'eût pas d'habit de cour, on l'introduisit comme s'il eût été un ambassadeur. En se voyant face à face avec son maître, le pauvre hère ne s'en émut pas davantage. " Vous avez, Sire, devant vous, une victime de l'injustice. J'avais un emploi dans le

contrôle de la marque des métaux, on me l'a ôté. Expliquezvous, lui dit le Roi sans humeur. - Avant de m'expliquer, répond le solliciteur, je demanderai à Votre Majesté la permission de me servir de la langue qui m'est le plus familière. — Parlez la langue que vous voudrez, lui répart sèchement le roi, qui songeait aux fâcheuses contestations dont on le fatiguait relativement à la langue officielle du royaume. Aussitôt notre homme (il s'appelait C**) tire de sa poche un chiffon de papier, et se met à frédonner sur un air connu (six liards la botte d'oignons) le grimoire suivant :

Rex Wilhelmus primus,

Je t'en fais l'oremus;
Du fantasque Plutus
Corrige les abus;
Las! cet olibrius
M'a traité rasibus

Et je suis sans quibus
Dans un cruel blocus.

Aux bontés de ses rois

Tout brave homme a des droits.

En honnête montois

J'ose élever la voix.

Sire, au Pays Leusois,
Ma femme est aux abois,
Enceinte de trois mois,
Pour la quinzième fois.

Cette quinzième fleur
Dans six mois, sauf erreur,
Naîtra, mais par malheur

Je suis dans la douleur!

Mais tu m'exauceras,

O roi des Pays-Bas,
Et sans plus d'embarras
Mieux tu me placeras.

Et le roi que dit-il? le roi se prit à rire. Il promit au sieur C. d'avoir soin de lui. Quelques semaines plus tard ce poëte montois prenait soin de lui-même; les armes à la main pour l'indépendance nationale, il faisait une guerre acharnée aux receveurs des contributions. On Tом. II.

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assure que son patriotisme ne lui a pas été cependant fort propice, et qu'il est retombé dans l'état dont il se plaignait au farouche Guillaume. Nous n'avons plus entendu parler de lui qu'à l'occasion d'une cantate sur la garde civique ou bourgeoise, composée dans le style des couplets qu'on vient de lire.

Or, l'anecdote que je viens de raconter est vraie, de toute vérité, malgré son invraisemblance. Il fallait voir la longanimité inaltérable du monarque, l'inquiétude du prince de Chimay que consternaient celle violation trop flagrante de l'étiquette et le sans-façon du sieur C. Le tableau était à la fois grotesque et noble, grotesque à cause de ce personnage, noble et touchant par la condescendance pleine de dignité et de bonhomie du souverain. Rendons justice à tout le monde, même aux rois. DE RG.

Lettres inédites d'hommes plus ou moins célèbres.

(Voy. p. 52).

V.

Lettre de Jean-Jacques Chiflet aux Bollandistes.

MONSIEUR ET Ro PÈRE,

« Je renvoye à V. R. les vies de S. Odille avec mes très humbles remerciements. A mon avis elles sont fort apocryphes. Quant à celle dont le P. Vignier rapporte quelques fragments ex MS. codice Pistorii Balbi, vulgo le Bègue, il faudra que V. R. en procure une copie entière par la voye du R. P. Labbe, qui est amy dudit P. Vignier, de l'œuvre duquel je me sers présentement pour l'origine de la maison d'Austriche, en laquelle il a laissé encore quelques espines à retran

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