Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

17. Si de plusieurs héritiers d'un créancier l'un reçoit sa portion du débiteur, l'hypothèque reste entière aux autres héritiers pour leur portion sur tout ce que ce débiteur avait hypothéqué à ce créancier (1).

18. L'hypothèque fait une affectation indivise de tout ce qui est hypothéqué pour tout ce qui est dû, et de telle sorte que, par exemple, si deux héritages sont hypothéqués pour une somme, cette affectation n'a pas cet effet, que chaque héritage ne soit engagé que pour une partie; mais que, de quelque valeur qu'ils puissent être, ils sont l'un et l'autre affectés pour toute la somme; et si un de ces héritages vient à périr, l'hypothèque demeure entière pour toute la dette sur celui qui reste (2). Et aussi, quoique le débiteur paie une moitié ou une autre partie de la dette, les deux héritages demeurent engagés pour tout ce qui reste: car c'est la nature de l'hypothèque, que tout ce qui est engagé serve de sûreté pour toute la dette, et les parties mêmes de chaque héritage sont toutes affectées pour tout ce qui est dû (3).

19. On ne peut engager et hypothéquer que les choses qui peuvent se vendre; et ce qui ne peut être vendu ne peut aussi être hypothéqué: car l'hypothèque n'a son usage que par l'aliénation qui peut se faire de la chose hypothéquée pour le paiement de ce qui est dû sous cette sûreté (4).

On a vu, dans la section 8 du Contrat de vente, quelles sont les choses qui ne peuvent être vendues. Mais il y a d'autres choses qu'on ne peut hypothéquer, quoiqu'on puisse les vendre. V. ci-après l'article 24 et les suiv.

20. Comme on peut vendre une chose qui appartienne à une autre personne (5), on peut de même l'hypothéquer, soit que le maître consente à l'hypothèque, ou qu'il la ratifie (6), ou que l'hypothèque soit conditionnelle, pour avoir son effet, lorsque celui qui engage une chose dont il n'est pas le maître, pourra le devenir (7) mais c'est un stellionat si le débiteur engage comme sienne une chose qu'il sait n'être pas à lui (8). Que si dans la suite il en devient le maître, l'hypothèque alors aura son effet (9), mais sans préjudice des hypothèques des créanciers de celui à qui elle était.

21. Celui qui ayant engagé un certain fonds spécifié et désigné à un créancier, l'engage à un autre, sans lui déclarer cette première obligation, commet une infidélité qu'on appelle un stellionat. Et si ce second créancier se trouvait en perte, ce débiteur n'ayant point de quoi satisfaire ses créanciers, il devrait en être

(1) L. 11, § 4, ff. de pign. act. (2) L. 19, ff. de pign. (3) L. 6, C. de dist. pign. L. 1, Č. de luit. pigu. L. 65, ff. de evict. (4) L. 9, § 1, ff. de pign. et hypoth. L. 1, § 2, ff. quæ res pign. vel hyp. dat. obl. n. p. V. ult. C. de reb al. n. alien. (5) V. l'art. 13 de la sect. 4 du contrat de vente. (6) L. 20, ff. de pign. act. (7) L. 16, § 7, de pign. et hyp. (8) L. 36, § 1, ff. de pign. aet (9) L. 41, cod. L. 5. C. aliena res pigu. dat. sit. V. l'art. 21 de la sect. 3.

puni, selon que le fait pourrait le mériter; et à plus forte raison, s'il avait déclaré à ce second créancier que l'héritage qu'il lui engageait n'avait point été engagé à d'autres; car en ce cas le dol serait plus grand. Et quand même le débiteur aurait d'ailleurs des biens suffisans, il serait tenu des suites: et si, par exemple, ce fonds avait été donné à ce second créancier pour assigner une rente, le débiteur pourrait être contraint à cause de cette fraude de racheter cette rente, ou même être puni d'autres peines selon les circonstances. Mais on n'impute pas de stellionat à celui qui, ayant une fois obligé tous ses biens, oblige encore dans la suite ou tous ses biens en général, ou quelques-uns en particulier, ni à celui qui engage le même fonds à plusieurs créanciers, de qui toutes les créances ensemble n'excèdent pas la valeur du fonds (1). 22. Le tuteur, le procureur constitué, et autres qui ont le pouvoir, ou par leurs charges, ou par quelque ordre, d'emprunter, et engager les biens de ceux dont les affaires sont sous leur conduite, peuvent hypothéquer ces biens selon le pouvoir que leur en donnent, ou leurs charges, ou les ordres de ceux pour qui ils traitent. Mais si ce sont des biens de mineurs ou de quelque communauté, l'engagement et l'hypothèque qui en est la suite, n'ont leur effet qu'en cas que l'obligation soit tournée à leur profit, et que les formalités aient été observées (2). (C. civ. 457, 1989.) 23. On peut hypothéquer et engager, non-seulement les choses corporelles, c'est-à-dire sensibles, et qu'on peut toucher, mais aussi les choses incorporelles, comme les dettes, les actions et autres droits; et cette sorte de biens sont compris dans l'hypothèque générale, quoiqu'ils ne soient pas spécialement exprimés. Ainsi, le créancier pourra exercer le droit que lui acquiert l'affectation des biens, autant sur ces sortes de droits que sur les autres biens, et saisir entre les mains des débiteurs de son débiteur, ce qu'ils peuvent lui devoir jusqu'à la concurrence de ce qui est dû à ce créancier (3). (C. civ. 2081.)

Il faut remarquer sur cet article qu'il y a des droits qui sont de la nature des immeubles, comme les rentes, et que d'autres sont de la nature des meubles, comme une obligation à cause du prêt et autres dettes personnelles. Les rentes sont tellement sujettes à l'hypothèque, que le créancier y conserve son droit, quoiqu'elles passent hors des mains de son débiteur. Mais les obligations et autres dettes personnelles sont comme des meubles, et n'ont point de suite. Et quoiqu'on puisse les faire saisir pendant qu'elles sont encore au débiteur, on ne peut les suivre quand il en a fait un transport à une autre personne, et que ce transport a été signifié à celui qui est obligé envers ce débiteur, ou qu'il l'a accepté. Les offices sont immeubles, et susceptibles d'hypothè

(1) L. 36, § 1, ff. de pign. act. L. 1. C. de crim. stell. L. 36, in fin. ff. de pign. act. (2) L. 3, C. si alien. res pign. d. s. L. 1, eod. L. 11, ff. de pign. V. L. 27, ff. de reb. cred. (3) L. 4, Cod. quæ res pign. obl. poss. L. 5, C. de exerc. rei jud. L. 1, C. de præt. pign. L. 18, ff. de pign. act.

que. V. l'édit de février 1683. V. sur les saisies des effets mobiliers la fin du préambule de cette section. V. pour les choses corporelles et incorporelles l'art. 3 de la sect. a du tit. des Choses.

24. L'hypothèque générale, en quelques termes qu'elle soit conçue, ne s'étend pas aux choses dont l'humanité défend de dépouiller les débiteurs, et qui par conséquent ne doivent point être comprises dans l'hypothèque. Ainsi, un créancier ne peut saisir, ni prendre en gage les habits nécessaires, ni le lit, ni les autres meubles et ustensiles d'une pareille nécessité : et les débiteurs ne peuvent même obliger spécialement ces sortes de choses; car le créancier ne pourrait stipuler un tel engagement sans blesser l'équité et les bonnes mœurs (1).

25. Les bêtes de labourage, les charrues, et les autres choses nécessaires pour labourer et cultiver les héritages, ne sont point sujettes à l'hypothèque, et ne peuvent être saisies, non-seulement par la présomption que l'intention du débiteur et du créancier n'est pas de dépouiller le débiteur des choses destinées à un usage si nécessaire, mais aussi à cause de la conséquence pour l'intérêt public (2). (C. civ. 578, 2119.)

Les hypothèques sur les meubles (qui avaient lieu dans quelques coutumes, telles que celle de Bretagne) n'ont plus lieu tant pour le passé que pour l'avenir (3).

26. Les choses qui ne sont point en commerce, et qui ne peuvent être vendues, comme les choses publiques, les choses sacrées, ne peuvent aussi être hypothéquées, tandis qu'elles demeurent destinées à ces sortes d'usages (4).

27. Les bienfaits du prince, les appointemens des officiers de guerre, la paie des soldats, sont des biens qu'on ne peut saisir : car il est de l'intérêt public qu'ils ne soient pas divertis de leur usage pour le service du prince et pour le bien public (5).

28. L'antichrèse est l'engagement d'un fonds dont le débiteur inet son créancier en possession pour l'avoir en gage, et pour en jouir, à condition d'en compenser les fruits avec les intérêts légitimes que doit le débiteur. Ainsi, par exemple, si un beau-père qui doit à son gendre la dot de sa fille, lui donne un fonds à jouir, dont les fruits tiennent lieu des intérêts de la dot, c'est une antichrèse et ce contrat donne au créancier, outre l'hypothèque, le droit de jouir (6). (C. civ. 2085, s.)

On doane ici pour exemple de l'antichrèse l'engagement d'un fonds pour une dot, parce que les intérêts de la dot étant dus au mari, cette

(1) L. 1, C. quæ res pign. poss. vel non. V. Exod. 22, 26; Deuter. 24, 6, 17; Job, 23, 4. V. les art. 14, 15 et 16 du tit. 33 de l'ordonnance du mois d'avril 1667, et celle d'Orléans, art. 28; de Blois, art. 57; l'édit du 16 mars 1595, et autres réglemens. (2) L. 7. C. quæ res pign. obl. poss. v. n. L. 8, eod. (3) Cass. 17 mars 1807. (4) L. 43, § 2, ff. quæ res pign. L. 21. C. de sacr. Eccles. (5) L. 4, C. de exec. rei judic. L. 5, C. quæ res pign. obl. p. v. n. L. ult. C. de pign. Nov. 53, cap. 5. (6) L. 11, § 1, ff. de pigu. et hyp. V. l'art. 4 de la sect. 4.

convention n'a rien d'illicite de sa nature. Mais l'antichrèse pour l'intérêt du prêt qui était permise dans le droit romain, comme l'était l'usure, est illicite par notre usage qui punit l'usure, et les contrats qui la pallient sous l'apparence d'autres conventions. V. l'art. 4 de la sect. 4 sur l'Usure. V. le préambule du tit. du Prêt, et la fin du préambule du tit. des Vices des convent.

[ocr errors]

La vente, dite faite à titre d'antichrèse, à toujours rachetable, est une vente à réméré, et n'est pas un contrat d'antichrèse (1). Les tribunaux peuvent sur de simples présomptions, notamment s'il y a vilité du prix, avec faculté de rachat et rélocation au vendeur, qualifier d'antichrèse un contrat de vente antérieur au code, mais non celui qui serait fait ainsi depuis le code (2).

29. Le créancier qui a droit de jouir du fonds qui lui est hypothéqué, peut le bailler à ferme (3).

30. Lorsque le créancier est mis en possession du meuble ou immeuble qui lui sert de gage, il a droit de le retenir jusqu'au paiement, et le débiteur ne peut l'en déposséder, ni user de sa chose propre sans le consentement de son créancier. Et si, par exemple, le gage est un meuble dont le créancier veuille permettre l'usage à son débiteur, ce sera une espèce de prêt à usage qui donnera au créancier le droit de reprendre sa possession, celle du débiteur, pendant l'usage qu'il fera de sa chose propre, n'étant que précaire (4). (C. civ. 2087.) "

La prescription d'une dette est légalement interrompue pendant tout le temps que le débiteur laisse jouir son créancier à titre d'antichrèse, de l'immeuble affecté à sa créance. D'après la nature même de l'antichrèse, son existence et sa durée supposent toujours l'existence et la durée de la dette qui y a donné lieu (5).

-

Est licite et valable, comme vente conditionnelle, la clause portant qu'à défaut de paiement d'une obligation, dans un délai fixé, le créancier sera propriétaire de l'immeuble affecté, par hypothèque, au paiement de sa créance. On ne peut appliquer dans ce cas, les articles 2078 et 2088 qui défendent toute stipulation autorisant le créancier à s'approprier l'objet mobilier donné en gage, ou immeuble donné à antichrèse (6).

31. S'il arrive que le gage qu'un créancier a pris pour sa sûreté ne suffise pas pour son paiement, et qu'on ne puisse lui imputer aucune faute qui ait diminué la valeur du gage, il ne laissera pas de recouvrer le surplus de sa dette sur les autres biens de son débiteur (7).

32. On peut hypothéquer ses biens, non-seulement pour ses propres dettes, mais encore pour celles des autres, de même. qu'on peut s'obliger pour d'autres personnes (8).

(1) Cassation, 4 mars 1807. (2) Rejet, 22 mars 1810. (3) L. 25, ff. de pign. L. 11, § 1, eod. (4) L. 35, § 1, ff. de pign. act. (5) Cass. 27 mai 1812. 6) Toulouse, 16 mars 1812. (7) L. 28, ff. de reb. cred. L. ult. § 4. C. de jur. domin. imp. L. 9, ff. de distract. pign. L. 1o, C. de obl. et act. (8) L. 5, § ult. ff. de pign. et hyp.

33. Si un débiteur engage ce qui est à un autre, et que celui-ci consente à l'hypothèque, ou que par quelque acte il marque qu'il l'approuve, comme s'il souscrit l'obligation, ou l'écrit de sa main, l'hypothèque aura son effet: car autrement il aurait impunément participé à la fraude faite à ce créancier; et il en serait de mème quand ce serait un père qui aurait engagé un fonds de son fils (1).

SECTION II.

Des diverses sortes d'hypothèque, et comment elle s'acquiert. Comme l'hypothèque est un accessoire des engagemens, et qu'il y des engagemens où l'on entre par des conventions, d'autres qui se forment sans convention, l'hypothèque peut aussi s'acquérir: ou par une convention, et c'est une hypothèque conventionnelle; ou sans convention par le simple effet de la loi, et c'est une hypothèque qu'on peut appeler légale. Ainsi, lorsqu'un vendeur oblige ses biens pour la garantie de ce qu'il vend, et l'acheteur les siens pour le paiement du prix, ce sont des hypothèques conventionnelles. Ainsi, lorsqu'un tuteur est appelé à cette charge, ses biens sont hypothéqués pour tout ce qu'il pourra devoir de son administration, et cette hypothèque, qui est acquise au mineur par la loi sans convention, peut être appelée une hypothèque légale (2). Ainsi, les biens des officiers comptables, et ceux des personnes qui sont appelées à ces charges qu'on appelle municipales, pour la levée des deniers publics, sont hypothéqués pour ce qu'ils en devront (3). Ainsi, les condamnations en justice donnent l'hypothèque (4); et c'est par l'autorité de la loi que toutes ces sortes d'hypothèques ont été établies indépendamment des conventions.

L'hypothèque conventionnelle s'acquérait dans le droit romain par le simple effet d'une convention, si l'hypothèque y était stipulée même sans écrit (5), et sans qu'il fût besoin du ministère d'un officier public, à quoi l'empereur Léon apporta le tempérament de la présence de trois témoins personnes de probité (6). Mais par notre usage les conventions ne donnent point d'hypothèque, quand même elle serait exprimée, si elles ne se passent par-devant notaires; car sans cette forme il serait facile aux débiteurs qui voudraient frauder leurs créanciers, de donner aux derniers d'anciennes hypothèques par des andidates. Ainsi, quand on parlera dans la suite d'hypothèque conventionnelle, il faut toujours l'entendre des conventions par-devant notaires.

1. On peut hypothéquer ou tous ses biens généralement, ou

(1) L. 26, § 1, ff. de pign. et hyp. V. les art. 12 et 15 de la sect. 7, et la remarque sur cet art. 15. (2) V. l'art. 36 de la sect. 3 des Tuteurs. (3) V. ciaprès les art. 19 et 20 de la sect. 5. (4) V. l'art. 4 de cette sect., et la remarque qu'on y a faite. (5) L. 4, ff. de pign. (6) L. 11. C. qui pot, in pig.

« VorigeDoorgaan »