Pagina-afbeeldingen
PDF
ePub

tanique. Ce bel établissement, fondé en 1626, sous le ministère du cardinal de Richelieu, fut d'abord exclusivement consacré à l'étude des plantes médicinales; on sait ce qu'il devint depuis, et nous le retrouverons un peu plus loin en parlant de Buffon. Christine, reine de Suède, voulut aussi à son tour participer à l'avancement des sciences et contribuer à leur progrès. Cette princesse éclairée fit venir à sa cour plusieurs savants célèbres, entre autres Descartes, qui avait mission de venir l'entretenir tous les matins, à cinq heures, sur la philosophie et les mathématiques. Il succomba à la rigueur du climat de la Suède. La Société royale de Londres fut fondée en 1645 et devint la source de nouveaux progrès, car ce fut la première société où l'on s'occupa de sciences exactes, et ses travaux furent bientôt connus dans l'Europe entière. Elle publia un recueil important intitulé: Transactions philosophiques, qui réunissait les faits les plus remarquables et les découvertes les plus utiles dans tous les genres. En 1666, Louis XIV fonda à son tour l'Académie des sciences de Paris à l'instar de la Société royale de Londres; jusque-là il n'existait en France que l'Académie française, fondée en 1635, et celle des Inscriptions et belleslettres, toutes deux consacrées à la littérature.

Avec la renaissance de la philosophie les progrès de la physique ne tardèrent pas à se faire sentir; les tentatives et les expériences se multiplièrent de tous côtés. La médecine et la science de l'homme profitèrent de tous les faits nouveaux. La chimie, débarrassée en partie des rêveries des alchimistes, s'occupa de mieux étudier les corps de la nature et d'en faire une analyse exacte. Les chimistes s'attachèrent à reconnaître les faits et à découvrir les éléments de la composition et de la décomposition des corps. Un homme d'un véritable génie fut l'auteur d'une révolution complète dans cette partie des sciences. Stahl, médecin

allemand (1660-1734), créa une nouvelle théorie pour expliquer l'organisation de l'homme. Leibnitz avait supposé que le corps et l'âme s'accordent ensemble au moyen d'une sorte d'action simultanée qu'il appelle harmonie préétablie. Malebranche admettait une intervention continue de la Divinité dans les opérations de l'âme et du corps. Stahl supposa que l'âme était elle-même une force active, cause et origine de tous les mouvements que fait le corps sans même que celui-ci en ait conscience. Dans ce système, la matière ne possède aucune force active, l'âme est au contraire la source de toute activité volontaire et involontaire; elle agit sur la formation et le développement du corps, même avant sa naissance, elle opère la nutrition, la distribution des sucs nourriciers, les sécrétions, et envoie à chaque point de l'organisme les particules nécessaires à l'entretien et au renouvellement des forces vitales. L'âme est immédiatement présente dans toutes les parties du corps; elle est douée d'étendue et son activité peut s'exercer sur chaque point matériel d'une manière particulière. Cette théorie reçut le nom d'animisme, en raison de l'idée qu'elle renferme, et elle eut beaucoup de vogue au dix-septième siècle. Stahl l'appliquait à la médecine. Voici comment il expliquait les maladies, qu'il considérait comme un trouble occasionné accidentellement dans le corps humain. La maladie était, suivant lui, une influence étrangère à notre corps et qui en dérange l'harmonie. L'âme fait des efforts pour réparer le trouble causé par les circonstances extérieures; seulement, quand on lui demandait comment elle exécutait ces mouvements, il répondait que c'était par une sorte d'automatisme, et sans avoir conscience d'elle-même, et il se fondait sur ce que nous exécutons un grand nombre de mouvements sans nous en rendre compte, et par une espèce de jeu machinal. Mais on lui répliquait alors que ces mouvements, que nous exécutons sans nous en

rendre compte nous-mêmes, n'en sont pas moins appris successivement, après un grand nombre de tâtonnements divers. C'est ainsi que l'enfant n'apprend à marcher qu'après un long espace de temps et de nombreuses tentatives. L'intermédiaire qui sert de communication entre l'âme et les organes du corps est, suivant Stahl, la tonicité ou la force de tension qui réunit les diverses parties de notre organisation. Cette tonicité avait beaucoup d'analogie avec l'irritabilité de Glisson (1579-1672), développée aussi par Hoffmann (16601742), et plus tard par Albert de Haller. Il appliquait d'ailleurs ses idées aux végétaux aussi bien qu'aux animaux. Stahl dut encore plus de célébrité à son système de chimie qu'à sa théorie de l'âme. Dans un traité qu'il composa sur le soufre (1718) et dans un autre traité intitulé: Experimentationes, observationes, animadversiones 300, physicæ et chimicæ, il admit un principe général qu'il appela le phlogistique et qu'il considéra comme le premier élément du calorique, élément au moyen duquel s'opère toute combustion. Suivant cette hypothèse, la combustion n'était autre chose que le dégagement de cet élément particulier qui, lorsque la chaleur se développe, abandonne les corps avec lesquels il était intimement combině. Cette théorie eut de nombreux partisans et régna exclusivement jusqu'à celle de Lavoisier. Mais on formait déjà, du temps de Stahl lui-même, une puissante objection contre ses vues sur le calorique qui eût dû en faire tomber tout l'édifice, car il n'avait pas échappé à plusieurs chimistes, entre autres à Jean Rey, à Mayow et à Boyle, que la calcination des métaux par la chaleur augmente leur poids au lieu de le diminuer. Dès lors comment existerait-il un élément appelé phlogistique, qui abandonnerait les corps en combustion, si précisément ces corps pèsent davantage? Cependant, et malgré ce fait décisif, la théorie de Stahl subşista pendant un demi-siècle, tant les hypothèses et les

systèmes possèdent l'art de charmer les hommes, tant nous éprouvons le besoin à tout prix de nous expliquer les choses! La chimie de Stahl tomba avec Lavoisier pour ne plus se relever; mais malgré ses erreurs, Stahl influa profondément sur la marche des sciences et fit faire des progrès à la physiologie, à l'anatomie, à la chimie et à la métallurgie. Sa doctrine du phlogistique fit travailler les esprits et conduisit sur la voie des grandes découvertes.

Un homme d'autant de génie et d'invention devait avoir nécessairement une école et des continuateurs, aussi eut-il des disciples.

En Allemagne, Gohl publia, en 1739, d'après les idées de Stahl, un ouvrage intitulé: Pensées sur l'esprit débarrassé des préjugés et particulièrement sur la nature des esprits animaux. Junckler, chimiste habile, né en 1699, accepta aussi les principes de Stahl et leur donna un ensemble raisonné. Il publia, dans son Conspectus physiologia, un exposé de la doctrine stahlienne, dans lequel le rôle de l'âme est indiqué d'après les idées de son maître.

Albert de Nuremberg (1682-1757) publia un Traité de l'âme de l'homme et des plantes, dans lequel la doctrine de Sthal est poussée jusqu'aux dernières limites du mysticisme et touche même à l'absurdité.

En Angleterre, ce même philosophe eut pour partisans Nichols et Whyte. En France, ses idées jouèrent aussi un rôle et il eut des disciples. Ce fut d'abord Sauvage, auteur d'un Traité de physiologie élémentaire qui parut à Avignon, en 1755, dans lequel il adopta à peu près les idées de Stahl. Il avait publié, à l'âge de vingt ans, pour son début dans les sciences, une thèse intitulée: De sensu generice considerato, dans laquelle, s'appuyant sur l'hypothèse de Stahl, il la modifia à sa manière, car, au lieu d'admettre, comme le philosophe allemand, une âme qui forme le

a.

centre commun de toute sensibilité, il croit que chaque organe est un être tout particulier doué d'une sensibilité spéciale.

Lacaze et Lecat professèrent aussi le stahlianisme chacun à sa manière. Le premier fut médecin de Louis XV et laissa un traité de l'homine physique et moral (1755), et des mélanges de physique et de morale. Le second, chirurgien en chef de l'Hôtel-Dieu de Rouen et fondateur de l'Académie des sciences de cette ville, écrivit un ouvrage sur les Mouvements musculaires et un autre sur les Sensations et les Passions, dans lequel il appliqua aussi, avec des modifications, la doctrine du médecin allemand. Un des derniers disciples de Stahl fut Barthez, qui développa encore ce système avec ses idées particulières, et fit paraître, en 1773, un ouvrage spécial sur le principe vital dans lequel on rencontre les hypothèses stahliennes.

L'influence de cette école reparut pendant longtemps encore, et elle réagira jusque sur Albert de Haller, l'illustre physiologiste du dix-huitième siècle. Glisson (1597-1677), professeur de médecine à Cambridge pendant quarante ans, considéra la matière comme douée de qualités propres parmi lesquelles il place l'irritabilité que nous retrouvons dans la physiologie de Haller et chez les anatomistes du dix-huitième siècle. Suivant Glisson, les fibres possèdent un sentiment et une volonté qui leur appartiennent en propre.

Frédéric Hoffmann, né à Halle, en 1660, soutint une doctrine opposée à la doctrine stahlienne, qu'on appelle celle du mécanisme, par opposition à l'animisme; on en trouve les développements au tome ler de sa médecine rationnelle. Contemporain de Stahl, Hoffmann avait été d'abord son admirateur et son ami, mais s'en était ensuite séparé, quoiqu'il rendit justice à ses rares talents. Glisson et lui avaient traité comme Stahl du principe vital, mais ils

« VorigeDoorgaan »